Humour juif

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L'humour juif est l'humour des Juifs sur le monde et sur eux-mêmes.

Il est fréquemment empreint des stéréotypes des Juifs sur eux-mêmes ou des autres sur eux. Aussi certaines histoires drôles juives ressemblent-elles superficiellement à nombre d'« histoires juives », racontées par des non-Juifs, qui sont souvent en fait simplement antisémites.

L'humour est une tradition qui remonte très loin dans l'histoire juive, jusqu'à la Torah et le Midrash, mais l'expression fait généralement référence au plus récent humour à base d'histoires drôles et d'autodérision venu d'Europe de l'Est.

Sommaire

[modifier] Quelques thèmes anciens ou récents

  • La religion est une source classique : interprétation des règles du chabbat, opinions de rabbin, incidents à la synagogue, relations avec les autres religions, les sujets abondent.
  • La mère juive, décrite comme abusive et persuadée que son fils est le meilleur, est un grand classique, qui a d'ailleurs donné lieu à une pièce intitulée Comment devenir une mère juive en 10 leçons, de Paul Fuks, d'après Dan Greenburg.
  • L'argent et le commerce - thèmes éculés des plaisanteries antisémites - se retrouvent aussi dans l'humour juif (parmi celles citées par Joseph Klatzmann dans L'humour juif, cette simple phrase d'une ironie amère : « Dieu aime les pauvres et aide les riches »).
  • L'antisémitisme lui-même est une source de plaisanteries.
    • Ainsi cette histoire : après l'assassinat du tsar Nicolas II en Russie, un représentant du gouvernement en Ukraine menace un rabbin : « Je suppose que tu sais qui est derrière ça. » « Ach, répond le rabbin, je n'en sais rien, mais de toute façon le gouvernement va conclure comme d'habitude : ce sera la faute des Juifs et des ramoneurs. » Étonné, l'homme du gouvernement demande : « Pourquoi les ramoneurs ? » Le rabbin lui répond : « Pourquoi les Juifs ? »
    • Autre exemple, en Allemagne au début du nazisme : un Juif rencontre dans un café un autre Juif, un ami qui lit le journal antisémite Der Stürmer. « Mais comment, tu lis cette horreur ? » « Bien sûr ! Quand je lis de la presse juive, il n'y a que des mauvaises nouvelles, des persécutions, de l'antisémitisme partout... Alors que dans ce journal, il est écrit que nous sommes les maîtres du monde et contrôlons tout, c'est quand même plus réconfortant ! »
    • Une des plus connues sans doute: pourquoi le violon est-il l'instrument favori des musiciens juifs? Parce que c'est plus facile à emporter qu'un piano en cas de pogrom.

[modifier] Aux États-Unis

Aux États-Unis, son plus célèbre représentant pour les Français est Woody Allen, ce dernier étant devenu pour eux l'image même de l'humour juif new-yorkais. Plus tôt dans l'histoire du cinéma, les Marx Brothers sont brillamment passés des scènes de Broadway au grand écran.

Plusieurs grands écrivains, comme Saul Bellow ou Isaac Bashevis Singer, ont illustré l'humour juif dans la littérature américaine.

[modifier] En France

La littérature française est riche d'écrivains juifs connus pour leur humour, et pourtant ceux-ci, d'André Maurois à René Goscinny en passant par Georges Perec ou Jacques Lanzmann, pratiquent un humour non communautaire, dont les thèmes ne se réfèrent pas à leurs origines. Quand Marcel Proust s'abandonne à un humour dévastateur (le portrait du clan Verdurin, le personnage de Périgot Joseph ou la parodie du Journal des frères Goncourt dans À la recherche du temps perdu, ou encore son recueil Pastiches et mélanges), il n'aborde jamais des sujets spécifiquement juifs. Le seul auteur qui échappe à cette règle, peut-être, est Tristan Bernard.

Sur scène, l'humour juif est représenté par des comédiens comme Popeck, et dans certains de leurs sketches par Michel Boujenah, Élie Semoun, Gad Elmaleh[1] et d'autres. L'incarnation même de la mère juive dans plusieurs films et pièces est la comédienne Marthe Villalonga.

Au cinéma, des exemples d'humour juif sont, en France, Les Aventures de Rabbi Jacob (1973), Lévy et Goliath (1987), tous deux de Gérard Oury, et, autour du quartier parisien du Sentier et des Sépharades, La Vérité si je mens ! (1997) et sa suite (2001). Le Tango des Rashevski (2003) présente avec humour les questions relatives à la conversion au judaïsme.

Les albums de la bande dessinée Le Chat du rabbin de Joann Sfar, situés dans l'Algérie des années 1930, marquent un renouveau de l'humour juif.

[modifier] En Grande-Bretagne

Le Roi des Schnorrers, roman d'Israel Zangwill paru en 1894, est un classique de l'humour juif qui met en scène l'affrontement burlesque d'un philanthrope ashkénaze et d'un mendiant (un "Schnorrer") sépharade aussi misérable que beau parleur, héros qui a inspiré aussi bien des personnages de Singer que le Mangeclous d'Albert Cohen.

[modifier] En Israël

Le duo composé par Shimen Dzigan et Ysrael Szumacher a donné de nombreux spectacles en Yiddish à travers le monde, tourné dans un film (Nos enfants, 1951), et enregistré plusieurs disques de sketches après la guerre. Originaires de Pologne ou ils étaient déjà célèbres, ils ont émigré en Israël et perpétué l'esprit des conteurs ashkénazes en renouvelant leur inspiration au contact de la vie moderne.

[modifier] Freud et l'humour juif

Dans son livre Le mot d'esprit et sa relation à l'inconscient, Freud étudie l'humour en général, mais y analyse une vingtaine d'histoires juives (voir leurs citations dans le Que sais-je ? de Joseph Klatzmann).

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • L'Humour juif, Joseph Klatzmann, Que sais-je ?, 1998, réédition 2004
  • Les Joies du yiddish, Leo Rosten, 1968, édition française 1994 (traduction française par Victor Kuperminc), éditions Calmann-Lévy, ISBN 2-7021-2262-0 ; éd. en Livre de Poche, 1995
  • La Bible de l'humour juif, Marc-Alain Ouaknin et Dory Rotnemer, Ramsay, 1995 ; éd. J'ai Lu, 2002
  • La Nouvelle Bible de l'humour juif, Dory Rotnemer-Ouaknin, éditions du Rocher, 1999
  • Petite Anthologie de l'humour juif, tomes 1 (2005) et 2 (2006), Richard Zeboulon, éditions le Bord de l'eau

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes et références

  1. Dans son spectacle La Vie normale (2001), Gad Elmaleh met par exemple en scène un nouveau riche racontant une Bar Mitsva délirante, pour laquelle il a fait venir en jet privé un rabbin pour son fils. Élie Semoun, dans un sketch se déroulant pendant une incinération, fait dire à son personnage à propos des fours employés qu'ils sont de bonne qualité car allemands: « Ils ont fait leurs preuves » - type même d'une plaisanterie qui dite par un non-juif serait antisémite ou considérée comme telle.
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