Folco de Baroncelli-Javon

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Folco de Baroncelli-Javon (1er novembre 1869 à Aix-en-Provence15 décembre 1943 à Avignon) était un écrivain et un manadier camarguais.

Le marquis de Baroncelli-Javon, en tenue de gardian, observant son troupeau dans sa manade aux Saintes-Maries-de-la-Mer au début des années 1900.
Le marquis de Baroncelli-Javon, en tenue de gardian, observant son troupeau dans sa manade aux Saintes-Maries-de-la-Mer au début des années 1900.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Famille et jeunesse

Folco de Baroncelli-Javon, naît à Aix-en-Provence le 1er novembre 1869, mais sera baptisé à Avignon où demeurent ses parents. Il descend d'une vieille famille florentine installée en Provence depuis le XVe siècle dans un bâtiment au plein centre d'Avignon, le palais de Baroncelli, appelé plus récemment "Palais du Roure". Celui qui devait devenir gentilhomme-gardian appartient par son père[1] à une très vieille famille d’origine toscane et de tradition gibeline, qui possède depuis le début du XVIe siècle le marquisat de Javon, dans le diocèse de Carpentras. Sa famille, quoique aristocratique, parle le provençal, une véritable hérésie à l'époque où cette langue ne peut être que celle du peuple.

Il est le frère du célèbre cinéaste Jacques de Baroncelli et de Marguerite de Baroncelli-Javon qui fut reine du Félibrige sous le capoulié de Mistral et qui épousa le peintre post-impressionniste Georges Dufrénoy.

Il fait ses études à Avignon (Nîmes ?), alors ville taurine et capitale des félibres, où il rencontre Mistral et Roumanille. Dès 1890, il publie un premier ouvrage en provençal, Babali, et dirige avec Mistral le journal l'Aioli.

[modifier] Sa vie camarguaise

[modifier] Au mas de l'Amarée

En 1895, lou Marquès (le Marquis), comme on l'appellera désormais, se rend en Camargue et monte une manade, la Manado santenco (la Manade saintine), aux Saintes-Maries-de-la-Mer. Il épouse la fille d'un propriétaire de Châteauneuf-du-Pape; de ce mariage, il aura trois filles[2], mais sa femme supporte mal le climat camarguais et leur vie commune est épisodique. Néanmoins, le 30 juillet 1899, il s'installe définitivement aux Saintes sur la petite route du Sauvage, au mas de l'Amarée, en locataire du propriétaire d’alors, monsieur Allègre.

En 1905, il rencontre Joe Hamman puis Buffalo Bill à l'occasion d'une représentation de la troupe américaine à Nîmes. Ayant noué une relation d'amitié avec ce dernier, il propose les services de ses gardians qui participent avec les indiens et les cows-boys aux spectacles de Buffalo Bill.

En septembre 1907, les crues noient une partie de sa manade.

En mai 1908, sa rencontre avec Jeanne de Flandreysy le marque à jamais. Il tombe amoureux de cette belle mais très indépendante femme, véritable égérie provençale. Si leur relation amoureuse fut brève, leur amitié dura jusqu'à la mort du marquis.

Taureau camarguais et son éleveur
Taureau camarguais et son éleveur
La course camarguaise
La course camarguaise

Dès le début du XXe siècle, le Marquis s’attelle avec d’autres à la reconquête de la pure race Camargue, tout comme il participe activement à la codification de la course camarguaise naissante. La sélection draconienne qu'il opère est récompensée par son taureau Prouvenço, historique cocardier qui déchaîne les foules, baptisé ainsi autant pour ses qualités esthétiques que combatives. Le 16 septembre 1909, il crée la Nacioun gardiano[3] (ou "Nation gardiane"), qui a pour objectif de défendre et maintenir les traditions camarguaises.

Les carnages et sa participation à la guerre de 1914-1918 le touchent profondément et à la suite de propos anti-militaristes qui auraient pu lui valoir le peloton d’exécution, il est interné au fort de Peccais.

A la fin de la Guerre, Jeanne de Flandreysy rachète le palais du Roure, sauvant ainsi le marquis d’une première ruine ; elle l’incite à cette époque à écrire.

En 1924, il demande à Paul Hermann de concevoir et dessiner la croix camarguaise qui symbolise la Nacioun gardiano. La croix originelle est réalisée par Joseph Barbanson, forgeron aux Saintes-Maries-de-la-Mer et inaugurée le 7 juillet 1926 sur un terre-plein de l’ancienne sortie sud-est de la cité camargaise [4].

[modifier] Au mas du Simbèu

Toutefois, les problèmes financiers s’accumulent et en 1930, désargenté, il doit quitter le mas de l'Amarée où il habite. Les Saintois se cotisent alors et lui offrent un terrain sur lequel il construit le mas du Simbèu (littéralement « signe », « enseigne », « point de mire », nom donné au vieux taureau, chef du troupeau)[5]; le 1er octobre 1931 à minuit, il quitte l’Amarée pour le Simbèu.

Dans les années 30, il dénonce le projet d'assèchement du Vaccarès, se bat pour la création d'une réserve et manifeste pour le maintien des courses camarguaises. Il témoigne aussi en faveur du maire communiste des Saintes-Maries-de-la-Mer, Esprit Pioch[6], et prend parti dans la guerre d’Espagne pour les Républicains espagnols. Il soutient également les gitans et leur pèlerinage. A sa demande, l’Archevêque d’Aix, Monseigneur Roques, tolère que la statue de Sara, patronne des gitans, soit amenée jusqu’à la mer, ce qui est réalisé, pour la première fois, le 25 mai 1935. Toutefois, ce n’est qu’à partir de 1953 que des prêtres participeront à cette procession.

La fin des années 1930 n'est pas très heureuse pour le marquis. En février 1935, il tombe gravement malade et il est très affecté par le décès de son épouse survenu le 8 août 1936. En 1938, à nouveau gravement malade, il est transporté d’urgence au centre médical de Nîmes. Et à la veille de la guerre en février 1939, c’est la fin de sa manade. En 1940, il proteste auprès de Daladier après des manœuvres de tirs d'avions dans le Vaccarès.

La guerre 1939-1945, lui sera en quelque sorte fatale. Lors de leur arrivée en zone libre en 1942, les Allemands s'installent, dès le 16 novembre 1942, dans son mas du Simbèu, réquisitionné en janvier 1943. Finalement, le 17 février, le Marquis de Baroncelli est expulsé et s’installe dans le village même des Saintes. Affaibli par la maladie et terriblement attristé, il s’éteint à la fin de 1943. Il reçoit l’extrême onction et décède le 15 décembre 1943 peu avant 13 heures à Avignon.

[modifier] Son tombeau

Son mas Lou Simbèu est détruit en 1944, lorsque les troupes allemandes quittent le pays. Le 21 juillet 1951, les cendres du « Marques » sont transférées dans un tombeau à l’endroit même où se trouvait le mas du Simbèu. Lors de ce transfert, alors que le convoi funèbre longe les prés, les taureaux de son ancienne manade se regroupent et suivent lentement le cortège, comme accompagnant leur maître une dernière fois. Ainsi, selon sa volonté :

lorsque je serai mort, quand le temps sera venu, amener mon corps dans la terre du Simbèu, ma tête posée au foyer de ma vie, mon corps tourné vers l'église des Saintes, c'est ici que je veux dormir,

le Marquis repose sur les lieux de son dernier mas. Sa tombe, d'une grande sobriété, peut se visiter.

[modifier] Notes

  1. Ce seigneur de très vieille noblesse avait épousé une Nîmoise, mademoiselle de Chazelles, dont il eut neuf enfants.
  2. Nerte, Maguelone et Frédérique, dit Riquette. Nerte et Maguelone se marient respectivement le 27 juin 1916 et le 6 novembre 1928. Le 25 avril 1933, sa troisème fille, Frédérique dit Riquette, épouse Henri Aubanel.
  3. L'association est déclarée au journal officiel le 16 Septembre 1909 sous son nouveau nom. C'est donc le 16 septembre 1909 que naît officiellement la Nacioun Gardiano, fleur de son âme et de son idéal, en remplacement du "Coumitat Virginien" dissout. Le conseil des membres fondateurs reste le même. Le siège social de la Nacioun sera aux Saintes-Maries-de-la-Mer.
    D’après le site officiel de la Nacioun Gardiano, consultable ici
  4. A cette fête furent présents de nombreuses personnalités et les amis du Marquis de Baroncelli. On pouvait y voir le poète Joseph d'Arbaud, Delly, Maguy Hugo (la petite-fille du grand poète Victor Hugo), Madame de la Garanderie, Fanfonne Guillierme, la famille des éditeurs Aubanel, le peintre Paul Hermann, bien sûr, et bien d'autres personnalités locales.
  5. Il s'agit d'un taureau castré, auquel on a inculqué la peur de l'homme et qui obéit à la voix; une sonnaille pend à son cou. Il sert à manœuvrer la manade (le troupeau). Il est au gardian ce que le chien est au berger.
  6. Condamné en 1934; fin du rêve de parc naturel.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

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