Cyrille Bissette

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Cyrille Bissette
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Naissance 9 juillet 1795
à Fort-Royal, Martinique, Colonie française
Décès 22 janvier 1858 (à 62 ans)
à Paris, France
Nationalité Française
Profession Homme politique martiniquais

Cyrille Charles Auguste Bissette était un homme politique Martiniquais, né à Fort-Royal (actuellement Fort-de-France) le 9 juillet 1795 et mort le 22 janvier 1858 à Paris des suites d'une longue maladie. Il fut un des grands partisans de l'abolition de l'esclavage en France. Il avait été élu député de la Martinique en 1848 et de 1849 à 1851.

Sommaire

[modifier] Biographie

Son père, Charles Borromée Bissette, un mulâtre originaire du Marin épouse en 1794 une métisse libre Elizabeth Bellaine, fille du béké Joseph Tasher de la Pagerie, le père de Joséphine de Beauharnais. De cette union naîtra six enfants dont Cyrille, l'aîné, deviendra le plus célèbre.

En 1816, Cyrille Bissette épouse Augustine Séverin, ils auront ensemble quatre enfants. Bissette devient à partir de 1818 négociant à Fort de France. Il participe à la répression de la révolte d'esclaves du Carbet en 1822. A ce moment là, il n'est pas encore engagé dans la lutte contre l'esclavage.

[modifier] « L'affaire Bissette »

Au début du mois de décembre 1823, circule à la Martinique un opuscule intitulé « De la situation des gens de couleur libres aux Antilles Françaises » écrit par Cyrille Bissette. L'objet de cette brochure est de dénoncer le système esclavagiste en exposant en détail les injustices dont sont victimes les esclaves. Outre l'obtention des droits civiques pour les Noirs libres des colonies antillaises, elle propose notamment le rachat progressif des esclaves, des écoles gratuites en faveur des nouveaux affranchis et la suppression des châtiments corporels à l'égard des esclaves[1].

Un certain Morando va dénoncer Bissette auprès du Procureur du Roi. La maison de Bissette est alors perquisitionnée et l'on découvre plusieurs pétitions à son domicile. Il est immédiatement arrêté et écroué à Fort-Royal, en compagnie de supposés complices parmi lesquels figurent Louis Fabien et Jean-Baptiste Volny. Lors du procès en première instance Bissette est condamné au bannissement à perpétuité du territoire français[2], il fait appel et la Cour Royale de Martinique, dont le procureur par intérim, Richard de Lucy, est un fervent partisan des thèses racistes, le condamne à la marque des lettres GAL et aux galères perpétuelles[3]. Le jugement est appliqué et il est marqué au fer rouge et exposé[4]. Bissette est alors transporté avec quarante-six autres condamnés pour le fort de Brest où il se pourvoit immédiatement en cassation. La Cour de Cassation casse l'assignation au territoire métropolitain de la Cour Royale de la Martinique et renvoie Bissette et ses complices devant la Cour Royale de la Guadeloupe. Cette même Cour le condamne à dix ans de bannissement des colonies françaises.

[modifier] Sa lutte contre l'esclavage

À Paris, la position de Bissette sur la question de l'abolition se radicalise. En 1832, il propose avec Louis Fabien et Mondésir Richard dans le Journal des débats une solution négociée qui éviterait toute effusion de sang[5]. Il fonde peu après une « Société des hommes de couleur » et, en 1834, la Revue des colonies dont il devient le directeur. Elle paraîtra jusqu'en 1843[6]. Le but de la nouvelle revue est de combattre l'esclavage par une abolition immédiate dans les colonies françaises.

En 1844, il s'oppose au projet de loi Mackau sur l'esclavage, car il tend à violer la loi du 24 avril 1833 sur le régime législatif des colonies.

[modifier] Carrière politique

Quelques mois après l'application du décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848, Bissette se présente aux élections législatives d'août. Il est élu député avec 19 850 voix[7]. Mais l'Assemblée Nationale Constituante invalide son élection pour cause d'incapacité personnelle, parce qu'il avait été condamné pour faillite. Pourtant, le 11 avril 1849, le Tribunal de Commerce de la Seine déclare nul et non avenu le jugement qui l'avait condamné en faillite, ce qui lui permet de briguer un nouveau mandat de député lors des législatives suivantes.

À partir de 1849, Bissette cesse de pourfendre la ploutocratie béké. Il se prononce pour la fusion des différentes composantes ethniques des Antilles, dont il est lui-même issu, et pour l'oubli du passé. Au mois de mars 1849, revenant de l'exil et de la guerre, il est accueilli à Saint-Pierre par une foule en liesse. Dans son discours il déclare : « Consentons donc à un mutuel oubli du passé et jetons loin de nous nos funestes divisions, nos préjugés d'un temps qui n'est plus, les vieilles récriminations qui ne font jamais l'affaire des partis et bien moins encore le bonheur du pays qui doit dominer et faire taire toutes les passions ».

Une alliance est conclue entre Bissette et le béké Auguste Pécoul en vue des élections législatives de juin. Les résultats consacrent l'écrasante victoire du tandem Bissette-Pécoul qui obtiennent respectivement 16 327 voix et 13 482 voix. Victor Schoelcher est battu et ne recueille que 3 617 voix.

L'association de Bissette et de Pécoul provoque la colère et l'indignation des gens de couleur libres qui accusent Bissette d'avoir trahi sa race et de s'être vendu aux blancs. Bissette fera l'objet d'une campagne de haine et de dénigrement de la part de la bourgeoisie mulâtre et plus particulièrement des partisans de Victor Schoelcher. Par contre, si l'on en croit sa popularité, le peuple continuait à lui faire confiance. Elu le 3 juin 1849, il occupe son siège jusqu'au 2 décembre 1851.

[modifier] Rivalité entre Bissette et Victor Schoelcher

La rivalité entre Bissette et Schoelcher commence véritablement après la parution du livre de Schoelcher[8] intitulé Des Colonies Françaises que Bissette avait sévèrement critiqué.

Jusqu'au coup d'État de décembre 1851, la lutte entre les partisans de Bissette et de Schoelcher est une constante du débat politique martiniquais. Après l'élection à la députation de Bissette les deux hommes s'affrontèrent encore plus violemment, soutenus chacun par des organes de presse. Bissette se sert du Courrier de la Martinique et Schoelcher et ses alliés du journal La Liberté dans lesquelles ils échangent réciproquement insultes et injures.

À partir de 1852, Bissette entame sa retraite sur le plan politique et l'antagonisme entre le Bissetisme et le Schoelchérisme s'estompe. De cette rivalité entre les deux abolitionnistes, c'est Victor Schoelcher en fin de compte qui sortira gagnant, car c'est à lui qu'on attribua l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises des Antilles.

[modifier] L'oublié de l'histoire

Cyrille Bissette est le Martiniquais qui a le plus combattu l'esclavage et ses effets néfastes au XIXe siècle[réf. nécessaire]. Au lieu de la vengeance, il prôna la réconciliation entre les races.

Victime de l'édification du schoelchérisme de la part d'une bourgeoisie intellectuelle assimilationniste, Cyrille Bissette a été banni de l'histoire en raison de son alliance avec le béké Auguste Pécoul, que les mulâtres à l'époque qualifiaient de trahison.

En 2007 encore aucune rue, aucune place en Martinique ne rend hommage à Cyrille Bissette. Son histoire est traitée dans très peu d'ouvrage et beaucoup de Martiniquais ignorent son existence.

[modifier] Biographie

  • Stella Pame, Cyrille Bissette, un martyre de la liberté, Editions Désormeaux, 1999, 279 p.[1]

[modifier] Références

  1. Nelly Schmidt, Abolitionnistes de l'esclavage et réformateurs des colonies. 1820-1851, Karthala, 2000, p. 250.
  2. Françoise Thésée, Le Général Donzelot à la Martinique vers la fin de l'Ancien Régime colonial, Karthala, Paris, 1997, p. 175.
  3. Ibid, p. 177.
  4. Bissette raconte les circonstances de sa marque dans la Revue des colonies au mois de février 1835.
  5. Nelly Schmidt, L'abolition de l'esclavage, Fayard, Paris, 2005, p. 207.
  6. Nelly Schmidt, Ibid.
  7. Cyrille Bisette député
  8. sur l'adversité de Victor Schoelcher