Cortèges du Carnaval de Paris

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 Char du cortège de la .  Carnaval de Paris .

Char du cortège de la Mi-Carême.

Carnaval de Paris 1905.

On conserve la description de nombreux cortèges du Carnaval de Paris. Dans cet article, ils figurent chronologiquement, avec, à la fin, une liste alphabétique des chars qui ont défilé à Paris.

Sommaire

[modifier] 1732. Cortège de l'ambassadeur de Venise[1]

— Cette année le carnaval a été très-remuant à Paris, même dans le peuple. Il y a eu beaucoup d'assemblées particulières ; les bals de l'Opéra ont été assez remplis, et la Porte-Saint-Antoine a été extrêmement fêtée les trois jours gras. Il faisait beau et doux. L'ambassadeur de Venise a fait la dépense d'une fort belle mascarade ; c'était un char en forme de gondole, et qui se terminait en haut par une grande coquille. Le ventre de la gondole était de carton bleu et doré ; on ne voyait point les roues. La coquille touchait aux lanternes. Le char était rempli de vingt personnes, en habit de caractère, qui étaient en amphithéâtre et qui jouaient de toutes sortes d'instruments. Il était tiré par six beaux chevaux, cocher et postillon masqués, et précédé par dix hommes à cheval, fort bien montés, représentant, par l'habit, des nations différentes. Sur ces dix, il y avait deux cors de chasse, un timbalier et deux trompettes qui répondaient à la symphonie du char. Depuis dix ans la Porte-Saint-Antoine était négligée,[2] mais on n'y a jamais vu un concours de carosses comme le mardi-gras. Les filles[3] étaient obligées d'aller dans les allées de Vincennes.

[modifier] 1739. Cortège du Bœuf Gras[4]

À Paris & dans la plûpart des grandes villes du Royaume, les Garçons Bouchers de chaque quartier se rassemblent ordinairement tous les ans le Jeudi gras, & promenent par la Ville, au son des Instrumens, un Boeuf qu'il choisissent de belle encolure, & qu'ils parent de guirlandes de fleurs & autres ornemens; On l'apelle à Paris, Le Boeuf gras, & dans plusieurs Villes de Province, Le Boeuf villé, parce qu'on le promene par la ville.

Cet usage, qui est fort ancien, paroît être un reste de certaines Fêtes du Pagannisme, & singulierement des Sacrifices que l'on faisoit aux faux Dieux. En effet, les Garçons Bouchers s'habillent pour cette cérémonie, à peu près de même que l'étoient les Esclaves des Sacrificateurs; Le Boeuf gras est paré dans le même goût, que ceux que l'on immoloit pour victimes, & les Bouchers ont des Instrumens, comme on en avoit aux Sacrifices.

Tout ce qu'il y a de plus ici, c'est que l'on met sur le Boeuf un Enfant, qui tient en main un Sceptre, et que les Bouchers apellent leur Roy, ce qui a sans doute été introduit dans les temps, où la plûpart des Communautés donnoient à leur Chef le titre de Roy, comme les Rois de l'Arbaleste & de l'Arquebuse, le Roy des Violons, & plusieurs autres semblables.

Les Garçons Bouchers de la Boucherie de l'Aport de Paris, n'ont pas attendu cette année le jour ordinaire pour faire leur Fête du Boeuf gras; dès le Mercredi matin, 4. du mois de Fevrier, veille du Jeudi gras, il se rassemblerent, & promenerent par la Ville un Boeuf, qui avoit sur la tête, au lieu d'aigrette, une grosse branche de Laurier-cerise, & il étoit couvert d'un tapis qui lui servoit de housse.

Le jeune Roy de la Fête, qui étoit monté sur le Boeuf gras, avoit un grand Ruban bleu, passé en Echarpe, et tenoit d'une main un Sceptre doré & de l'autre son épée nuë.

Les Garçons Bouchers qui l'accompagnaient, environ au nombre de quinze, étoient tous vétus de corsets rouges, avec des trousses blanches, ayant sur la tête une espece de turban ou de toque rouge, bordé de blanc.

Deux d'entre eux tenoient le Boeuf par les cornes, & le conduisoient; plusieurs avaient des Violons, Fifres et Tambours, et les autres portoient des bâtons.

Ils allerent en cet équipage en differens Quartiers de Paris, & principalement l'Hôtel du Bailliage, chés M. le Premier Président, pour lui donner une Aubade.

Comme ce Chef du Parlement étoit encore à la Grand-Chambre, les Bouchers prirent le parti de l'aller attendre sur son passage; & pour cela ils firent monter le Boeuf par l'Escalier de la Sainte Chapelle, & vinrent dans la Grand'-Salle du Palais, jusqu'à la Porte du Parquet des Huissiers de la Grand'-Chambre.

Lorsque le Premier Président sortit, il se mirent en haye sur son passage, & le saluérent au son de leurs Instrumens. Pendant cette Aubade ils avoient éloigné le Boeuf gras vers le passage des Enquêtes; & après que ce Magistrat fut passé, ils se promenerent avec le Boeuf dans plusieurs des Salles du Palais, et le firent descendre enfin par l'Escalier de la Cour neuve, du côté de la Place Dauphine; & ils continuerent leur cérémonie dans Paris.

On n'avoir point encore vû le Boeuf gras dans les Salles du Palais, lesquelles sont au moins à la hauteur d'un premier étage; & on aurait peine à le croire, si un grand nombre de Parisiens n'avoient vû ce Spectacle singulier.

Le lendemain des Bouchers d'un autre quartier promenerent aussi un Boeuf, mais ils ne vinrent point au Palais.

[modifier] 1859. Préparatifs et cortège des Bœufs Gras[5]

Nous touchons à l'époque de l'année où le marché de Poissy, nous devrions dire ses foires hebdomadaires, grands entrepôts des animaux destinés à l'alimentation de Paris, ont le privilège d'exciter l'attention universelle. Tous les journaux s'empressent d'annoncer à la France quel est l'habile éleveur qui a triomphé dans le concours destiné à donner à la grande promenade du carnaval parisien ses héros triomphateurs.

Ce marché, à qui les riches éleveurs ruraux, les nombreux et rusés maquignons, et le concours si varié des bouchers de Paris et des localités voisines donnent une physionomie si étrange, a été, cette année, malgré la disette générale des fourrages, digne de sa réputation, et de celle de nos cultivateurs normands. Son champ offrait, le jeudi 24 février dernier, un spectacle magnifique. Parmi les bestiaux soumis à l'appréciation du jury et qui ont mérité à la plupart de leurs maîtres les éloges des examinateurs, six fixèrent le choix préalable des juges et furent désignés pour le concours. Sur le nombre, trois furent définitivement primés pour la promenade des jours gras, Bastien, Lombard et Turin; tous trois appartenaient à M. Adeline, le célèbre éleveur normand, déjà connu par ses succès spéciaux. Le boucher qui en est devenu l'acquéreur est M. Meeh, dont le magasin est situé rue Saint-André-des-Arts.

Chacun de ces animaux a eu son jour de grandeur. Bastien a paru le premier : sa hauteur était de 1 mètre 67 centimètres prise au garrot, sa longueur de 2 mètres 88 centimètres, et son poids de 1, 225 kilogrammes. Il était placé, comme d'habiitude sur un char de la plus riche ornementation, décoré d'oriflammes et de guirlandes, et traîné par quatre chevaux conduits à l'allemande. Quatre sacrificateurs en tunique de pourpre se tenaient aux quatre coins du char.

Ce char, précédé par un détachement à cheval de la garde de Paris ouvrant la marche, par deux coureurs blasonnés aux armes municipales, une nombreuse escouade de tambours, une troupe de musiciens à cheval en travestissements variés et trois compagnies en costumes Louis XV, portant des bannières de couleurs diverses, était suivi par un autre char allégorique où les principaux dieux de l'antiquité païenne se groupaient au milieu des trophées, des drapeaux et des fleurs. Une foule d'autres cavaliers en riches et pittoresques costumes et un grand nombre de voitures où se trouvaient les inspecteurs de la boucherie, etc., terminaient ce cortège, que fermait un nouveau détachement fourni par la cavalerie de la garde de Paris.[6]

Le cortège s'est rendu, comme de coutume aux palais et aux hôtels des premiers personnages de l'État, et a prolongé, au milieu de l'empressement habituel, sa promenade triomphale sur les boulevards et dans les principaux quartiers de Paris. Ovations funèbres qui ne devaient traverser, aux acclamations populaires, les honneurs et le Capitole que pour arriver à cette roche Tarpeïenne des bœufs triomphateurs que l'on appelle... l'abattoir. Sic transit gloria mundi[7]

[modifier] 23 mars 1911. Parcours du cortège de la Mi-Carême

Départ : Place Clichy - Boulevard de Clichy - Boulevard des Batignolles - Boulevard Rochechouart - Boulevard Magenta - Boulevard de Strasbourg - Boulevard Sébastopol - Hôtel-de-Ville (Arrêt) - Rue de Rivoli (à gauche) - Place de la Concorde - Champs-Élysées - Avenue d'Antin - Élysée (Arrêt) - Faubourg Saint-Honoré - Rue Royale - Boulevard de la Madeleine - Boulevard des Capucines - Boulevard des Italiens - Boulevard Montmartre - Boulevard Poissonnière - Boulevard Bonne-Nouvelle - Boulevard Saint-Denis - Boulevard Saint-Martin - Place de la République (dislocation)[8]

Banquet au Palais des Fêtes à 8 heures 1/2

[modifier] Liste de chars

[modifier] Mi-Carême 1911 : 11 chars.[8]

  • 1 - la Musique
  • 2 - "Énigme"
  • 3 - Le "Lachez-tout", Char dirigeable
  • 4 - la Musique (2)
  • 5 - des Fleurs
  • 6 - la Poésie, (époque romaine)
  • 7 - la Sculpture
  • 8 - la Danse
  • 9 - la Peinture
  • 10 - la Musique (3)
  • 11 - la Reine des Reines

[modifier] Notes

  1. « Journal anecdotique du règne de Louis XV », par E.J.F.Barbier, Avocat au Parlement de Paris – Edition de 1847 – En 1732, les trois jours gras (dimanche, lundi et mardi-gras) tombaient les 24, 25 et 26 février.
  2. La promenade, dans le faubourg Saint-Antoine, n'avait lieu, dans l'origine, que le premier lundi de carême. On y allait en voiture voir les mascarades des gens du peuple, qui ne terminaient le carnaval que ce jour-là, et dont le faubourg Saint-Antoine était en quelque sorte le rendez-vous. (Note de l'édition de 1847)
  3. Le mot "filles" est ici utilisé dans le sens de "prostituées" (encore au moins, dans les années 1930, dire de quelqu'un "c'est une fille", avait le même sens).
  4. Mercure de France, février 1739, pages 387 à 390. Le Parlement était jadis à Paris une Cour souveraine de Justice. C'est de ce Parlement dont il est question ici.
  5. Ce texte, intitulé « Marché des bœufs de Poissy » et signé Léo de Bernard, est extrait du journal Le Monde illustré, 12 mars 1859, page 166. Il a été copié en 1995 au Centre de documentation du musée des Arts et traditions populaires, où il figurait sous le numéro ATP 64 64 25.
  6. Ce dernier détachement permettait d'éviter que la foule qui venait augmenter le cortège, en lui emboitant le pas, ne vienne se méler à sa partie organisée.
  7. Paroles qui signifient, en latin : « Ainsi passe la gloire du monde ».
  8. ab Programme de la Mi-Carême 1911, dossiers Actualités Carnaval, Bibliothèque historique de la ville de Paris, 8 pages plus la couverture, imprimée des deux côtés.