Albert Thomas (homme politique)

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Pour les articles homonymes, voir Albert Thomas et Thomas.
Albert Thomas
Parlementaire français
Naissance 16 juin 1878
Décès 8 mai 1932
Mandat Député 1910-1921
Début du mandat {{{début du mandat}}}
Fin du mandat {{{fin du mandat}}}
Circonscription Seine
puis Tarn
Groupe parlementaire SFIO
IIIème République

Albert Thomas, né à Champigny-sur-Marne le 16 juin 1878 et mort le 8 mai 1932, est un homme politique français qui se distingua lors de la Première Guerre mondiale comme un économiste talentueux.

Sommaire

[modifier] Biographie

Fils du boulanger de la commune, c'est un élève brillant. Il est lauréat du Concours général au lycée Michelet, avant d'être reçu premier au concours à l'École normale supérieure pour ensuite décrocher une première place à l'agrégation d'histoire.

Militant syndicaliste et coopérateur, membre de la Fédération nationale des Coopératives de Consommation, proche du monde ouvrier, il débute en politique en mai 1904 comme conseiller municipal socialiste à Champigny (dont il deviendra maire), avant d'être élu député socialiste de la Seine en 1910. Proche de Jaurès, il apparaît comme intelligent, précis et brillant, mais c'est après la déclaration de guerre qu'il s'impose comme gestionnaire remarquable. Réélu député de la Seine en 1914, il est député du Tarn de 1919 à 1921.

Les socialistes, après avoir refusé de voter le budget militaire, entrent au gouvernement, lequel en septembre 1914 charge Albert Thomas, alors âgé de 36 ans, de coordonner les chemins de fer, l'État-Major et le ministère des Travaux publics. Le train doit apporter au plus vite armes, munitions et troupes fraîches sur front qui s'étend rapidement, alors que l'armée allemande envahit déjà le nord de la France, qui abrite l'essentiel du charbon et de la richesse industrielle française.

Les qualités d'organisateur d'Albert Thomas sont remarquées par le ministre de la Guerre, Alexandre Millerand, qui lui confie en octobre 1914 l'organisation de la production du matériel de guerre. Confronté à l'urgence et aux enjeux les plus stratégiques, il doit mobiliser le réseau industriels, des mines et des transports et faire passer la production de 13 500 obus par jour à au moins 100 000. Il fait rapatrier du front les ouvriers spécialisés, appeler en renfort les femmes qui ne sont pas déjà mobilisées par la guerre et fait venir des ouvriers des colonies.

Du 18 mai 1915 au 12 décembre 1916, Albert Thomas est sous-secrétaire d'Etat de l'Artillerie et des Munitions à l'équipement militaire. Travailleur acharné, il contribue aux Conseils des ministres et aux réunions interalliées. Il s'appuie sur les services du ministère et sur deux collaborateurs et amis, François Simiand, adjudant de territoriale affecté au sous-secrétariat et Mario Roques, rappelé du front pour le Cabinet du ministre, ainsi que sur quelques collaborateurs, dont Hugoniot, ingénieur au Service industriel du Cabinet. Avec eux, il mobilise non seulement les grandes entreprises, mais aussi les petits industriels pour répondre aux besoins qu'il devine énormes de la guerre. Mi-1915, le G.Q.G. fait face à une guerre qui s'installe et à un ennemi qui bénéficie déjà des canons de gros calibres et de munitions. La France dispose d'une production maximale de 700 obus par jour de gros calibre, le G.Q.G en demande urgemment 50 000 par jour, soit 70 fois plus. En quelque semaines, le nouveau ministre persuade les industriels d'agrandir leurs usines et d'accepter les commandes, qui seront honorées alors que la production du charbon, qui s'était effondrée après les grandes grèves du début du siècle, est en pleine croissance, de même que la métallurgie.

En 1916, le jeune député socialiste de la 2e circonscription de la Seine, sous-secrétaire d'État de l'Artillerie et des Munitions, basé à l'hôtel Claridge, avenue des Champs-Élysées, est envoyé par le gouvernement français en Russie, avec René Viviani, pour inciter le tsar et l'armée russe à lancer une offensive pour desserrer l'étau allemand sur le front Ouest. Le 12 décembre 1916, nommé ministre de l'Armement au sein du second cabinet de guerre d'Aristide Briand, il conserve son équipe qui continue à travailler jour et nuit, dimanches et jours fériés compris. Albert Thomas, qui réside normalement dans sa circonscription à Champigny-sur-Marne, dort le plus souvent au ministère où il a une chambre.

En avril 1917, il retourne en Russie, où il arrive en pleine révolution alors que le pays est bouleversé par la prise du pouvoir par Kerensky, qui y a établi un Gouvernement révolutionnaire provisoire.

Le trio de collaborateurs pousse la production industrielle à ses limites, mais reste soucieux des questions sociales. Un Comité du travail féminin, créé le 21 avril 1916, veillera jusque mi-1917 à l'organisation du travail des femmes : recrutement par campagne d'affiches, formation, amélioration de leur situation matérielle et morale. Trois mois plus tard, par une circulaire du 3 juillet 1916, il interdit le travail de nuit pour les femmes de moins de 18 ans dans les usines de guerre et il limite le temps de travail à 10 heures maximum pour les femmes de 18 à 21 ans. Les jeunes filles de 16 à 18 ans ne travailleront plus dans les poudreries. Un an après, le 1er juillet 1917, une circulaire précises les modalités de protection des femmes au travail et l'organisation générale de l'hygiène, de la sécurité‚ et des services médicaux dans les établissements publics, anticipant sur la 1re loi sur la médecine du travail qui ne sera votée que 30 ans plus tard, le 11 octobre 1946. Il conçoit alors ce qu'il appelle « l'économie collective » ou « l'économie organisée » : il répartit les commandes de l'Etat entre les industriels. À ce sujet, il déclare : « Entre les industriels, hier, c'était la concurrence, parfois la guerre. Aujourd'hui, l'Etat coordonne l'initiative sans en étouffer aucune. »

Il incite le patronat a dialoguer avec les organisations syndicales ouvrières pour veiller à éviter toutes les sources d'accident du travail et de baisse de production : épuisement, sous-alimentation. Il contribue à créer une Commission consultative du travail présidée par Arthur Fontaine, futur 1er Président du Conseil d'administration du Bureau international du travail de 1919 à 1931, qui recommande aux chefs d'entreprise le repos périodique des ouvriers. Il interdit les logements insalubres. Il promeut l'aide au logement, un Fonds coopératif du personnel des usines de guerre, les coopératives de consommation et les restaurants coopératifs, des dortoirs proches des usines. Pour responsabiliser et informer les industriels et les ouvriers, Charles Dulot et Pierre Hamp produisent le Bulletin des usines de guerre.

Albert Thomas en 1923
Albert Thomas en 1923

En septembre 1917, alors que la guerre s'enlise, une crise ministérielle secoue le gouvernement du cabinet Painlevé auquel le Parti socialiste ne veut plus participer. Albert Thomas quitte son poste de ministre pour retrouver son rôle de simple député. Il crée avec des amis et quelques bénévoles une petite Association d'études et de documentations sociales (AEDS), 74 rue de l'Université à Paris, qui persistera après la guerre et préfigure la revue hebdomadaire L'Information ouvrière et sociale qu'il va créer avec Charles Dulot.

En février 1918, il est à la Conférence socialiste et ouvrière de Londres où, avec Vandervelde et Henderson, il prépare la demande de voir figurer dans chaque délégation nationale de la future Conférence de la paix un représentant du monde du travail. Jusqu'à l'armistice, fort de son expérience, il défend ses conceptions d'une guerre pour la paix par des articles dans L'Humanité, Le Populaire de Nantes, La France de Bordeaux et La Dépêche de Toulouse.

Le 18 septembre 1918, il est à Londres à la 4e Conférence socialiste et syndicaliste interalliée, où il travaille à des clauses de législation ouvrière à insérer dans le futur traité.

Après la guerre, la partie XIII du Traité de Versailles donne naissance à l'Organisation internationale du travail, avec une première Conférence internationale du travail à Washington en novembre 1919, qui réunit pour la première fois dans l'histoire les gouvernements, les patrons et les ouvriers. Albert Thomas en est élu, d'abord provisoirement (avec 11 voix contre 9 et 1 vote blanc) au scrutin secret premier président du Bureau international du travail, qui s'installe d'abord à Londres avant de migrer à Genève en 1920. Sa nomination est confirmée à Paris le 27 janvier 1920, à l'unanimité, par le conseil d'administration.

Membre de la SFIO, il connaissait très bien l'économie allemande, ce qui lui avait permis d'inventer l'économie de guerre de la France pendant la Première Guerre mondiale.

Georges Bourgin a légué aux Archives nationales le Fonds Albert Thomas. La Bibliothèque du Service historique de l'armée de terre au Château de Vincennes conserve une partie de ses archives. Une collection du Bulletin des usines de guerre est conservée à Genève à la bibliothèque du BIT. La rue Albert-Thomas (Xe arrondissement de Paris) ainsi que le cours Albert-Thomas (IIIe arrondissement de Lyon) portent son nom, et il en va de même dans de nombreuses villes françaises plus ou moins importantes (ainsi, la place Albert Thomas à Chalon sur Saône, dans le quartier des Charreaux).

[modifier] Son action au BIT

Extrait du site de l'Unesco sur le BIT/OIT

« Le Conseil d’administration désigna le premier Directeur du Bureau international du Travail (BIT) en la personne d’Albert Thomas, homme politique français, membre du gouvernement pendant la guerre. Dès les premières années, Albert Thomas donna à l’Organisation une forte impulsion. En moins de deux ans, 16 conventions et 18 recommandations internationales du travail furent adoptées. La première session maritime de la Conférence se tint en 1920 et la même année le BIT installa son siège à Genève. L’enthousiasme qui anima l’Organisation fut très vite contré. Certains gouvernements trouvaient que les conventions étaient trop nombreuses, les publications trop critiques et le budget trop important. Tout fut donc réduit. Néanmoins, la Cour internationale de Justice, saisie par le gouvernement français, précisa que la compétence de l’OIT s’étendait également à la réglementation internationale des conditions de travail dans l’agriculture.

En 1926, innovation importante, la Conférence internationale du Travail mit en place le système de contrôle de l’application des normes qui est aujourd’hui encore en vigueur. Elle créa la commission d’experts, formée de juristes indépendants, chargée d’examiner les rapports des gouvernements et de présenter son propre rapport chaque année à la Conférence.

Le 8 mai 1932, après avoir assuré pendant treize ans une forte présence de l’OIT dans le monde, Albert Thomas disparut soudainement. »

[modifier] Prix Albert Thomas

Crée en 1990, le Prix Albert Thomas est décerné par le Ministère du travail et le CNAM. Il récompense des entreprises menant des politiques dynamiques de prévention des risques professionnels.

[modifier] Bibliographie

  • Denis Guérin, Albert Thomas au BIT, 1920-1932. De l’internationalisme à l’Europe

[modifier] Sources

[modifier] Liens externes


Autres langues