Accouchement à domicile

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Une femme et son nouveau-né
Une femme et son nouveau-né
Accouchement à domicile en piscine à Tahiti
Accouchement à domicile en piscine à Tahiti

L'accouchement à domicile (AAD) est un accouchement ayant lieu au domicile de la mère. Il se démarque des accouchements en maison de naissance et en maternité par le fait que la mère accouche dans un environnement matériel et humain qui lui est familier, ce qui joue pour certaines femmes le rôle rassurant que la médicalisation peut jouer pour d'autres. Un accouchement à domicile est le plus souvent assisté par une sage-femme, parfois par un médecin. Il existe aussi des accouchements à domicile planifiés sans aucune assistance médicale, les accouchements non-assistés (ANA), et il arrive que des femmes qui n'y sont pas préparées fassent un accouchement non-assisté inopiné lorsqu'elles n'ont pu contacter à temps un praticien médical.

L'AAD concerne 90% des bébés dans le monde. Dans les pays développés, l'accouchement à domicile a reculé au cours du XXe siècle, et en particulier après la Seconde Guerre mondiale, car l'accouchement à l'hôpital s'est généralisé avec la création de la Sécurité sociale et de l'assurance maternité. Dans les pays latins du Sud de l'Europe, et en particulier en France, l'accouchement à domicile est souvent l'objet de préjugés et considéré comme une pratique archaïque. On constate pourtant un regain d'intérêt pour une moindre médicalisation de l'accouchement, celui-ci étant envisagé comme un événement familial et intime qu'il convient de préserver, plutôt que comme l'objet d'une intervention médicale à haut risque.

Sommaire

[modifier] Présentation

Les accouchements à domicile modernes n'ont rien à voir avec ceux pratiqués avant l'apparition de la pénicilline, des ocytociques et des techniques obstétricales modernes. Ces derniers étaient bien plus risqués : les conditions d'hygiène étaient sommaires, les grossesses étaient nombreuses, peu surveillées, mal respectées, et les femmes peu ou mal informées sur la grossesse et l'accouchement. Le médecin ou la sage-femme (quand ils étaient présents) ne disposaient pas de moyens efficaces de surveillance avant et pendant le travail. L'absence de recours à l'échographie rendait plus aléatoires les diagnostics de grossesse gémellaire, de présentation dystocique, de procidence du cordon ou de placenta praevia. Par ailleurs, l'hôpital a longtemps été un lieu à haut risque en raison des infections qui pouvaient toucher les parturientes et les nouveau-nés.

A partir des années 1960, l'immense majorité des femmes des pays développés sont encouragées à accoucher à l'hôpital. Confort des professionnels travaillant à domicile, mauvaises conditions de déplacement en cas de transfert urgent à l'hôpital, courant de modernisation des tâches ménagères et courant féministe, favorisent davantage ce mouvement que des raisons médicales. Les Pays-Bas, néanmoins, perpétuent la pratique de l'AAD avec un taux qui avoisine 33 % des naissances. Puis la Grande-Bretagne (suite, notamment, au rapport Changing Childbirth de la Commission parlementaire permanente sur la maternité, en 1993) inscrit au centre de son système de soins la liberté de choix d'un AAD et l'obligation légale pour les hôpitaux de pourvoir à leur accompagnement par des sages-femmes de leurs services[1]. Dans les pays germaniques, l'accent est mis sur le caractère naturel de l'accouchement, l'anesthésie péridurale reste très minoritaire lors des accouchements en maternité, et l'accouchement en maison de naissance est une alternative très développée, qui séduit de nombreux parents tentés par un accouchement peu médicalisé.

L'accouchement à domicile reste minoritaire dans les pays du Sud de l'Europe, dont la France, où les freins mis au développement des maisons de naissance font souvent de l'AAD la seule alternative à l'accouchement en maternité. Toutefois, malgré les difficultés rencontrées par les sages-femmes françaises[2], le nombre de celles/ceux qui accompagnent des AAD continue de croître. De plus, des sages-femmes suisses, belges ou allemandes pratiquent en toute légalité sur le sol français dans les régions frontalières.

Les motivations des couples qui choississent l'AAD moderne sont multiples. Parmi elles, on peut citer :

  • la volonté de se réapproprier la naissance de leur enfant, d'être respectés en tant que parents responsables.
  • le désir d'impliquer le père, matériellement et émotionnellement, dans l'accouchement et dans la préparation de celui-ci.
  • le besoin pour les femmes de se sentir en confiance et dans l'intimité pour "travailler" en paix, de pouvoir se déplacer, s'alimenter et choisir les positions d'accouchement qui leur conviennent, éventuellement dans l'eau.
  • l'absence quasi-systématique d'interventions de type touchers vaginaux répétés, perçage de la poche des eaux, épisiotomie, perfusion d'ocytociques, monitoring en continu ou intermittent mais trop long et fréquent, ou expression abdominale. Chaque geste étant discuté avant l'accouchement (avantages, risques - on ne parle pas des inconvénients). Pendant l'accouchement, les gestes proposés sont justifiés selon les circonstances et approuvés par la femme.
  • une naissance non-violente pour l'enfant, selon les critères établis par les parents : la lumière est tamisée, le cordon est coupé lorsqu'il ne bat plus, l'enfant est maintenu contre sa mère en peau à peau, il n'est pas immédiatement lavé ni aspiré, il est mis au sein à volonté.
  • un suivi post-partum à domicile en famille favorisant le repos, le bien-être des autres enfants, la participation du père, et une plus faible occurrence de la dépression post-natale, le lien mère-enfant ayant été préservé et encouragé au maximum.

L'AAD est accompagné majoritairement par des sages-femmes, parfois par des médecins. Le praticien apporte un kit de réanimation pour la mère et pour l'enfant, des produits de perfusion permettant de faire face à la majorité des complications. Il dispose d'un monitoring portatif permettant des enregistrements de l'activité cardiaque du fœtus.

[modifier] Quelques statistiques

En 2002, 29.4% des 200 586 naissances aux Pays-Bas ont eu lieu à domicile, dont 23.1% sous la responsabilité de sages-femmes et 6.3% sous la responsabilité de médecins généralistes.[3]

[modifier] Sécurité

Pour des raisons médico-légales, la plupart des professionnels de santé sollicités pour un accouchement à domicile ne le pratiquent que dans dans le cadre d'une grossesse physiologique[4] : pas de naissance gémellaire, pas de présentation en siège[5], pas de placenta praevia, pas de contre-indications de type hypertension. Une inscription dans une maternité proche est souvent effectuée en cas de transfert éventuel.

En Belgique, la sage-femme, autorisée à exercer en Belgique la profession d’accoucheuse ou à y accomplir des prestations en qualité d’accoucheuse, est habilitée à assumer sous sa responsabilité la surveillance de femmes enceintes pour lesquelles une grossesse à haut risque a été exclue, à pratiquer les accouchements dont l’évolution sera très probablement eutocique, et à soigner et accompagner la mère et l’enfant au cours du post-partum normal. La grossesse normale et l’accouchement eutocique sont l’ensemble des phénomènes physiologiques, mécaniques et psychologiques qui aboutissent à l’expulsion spontanée, à terme, d’abord du fœtus en présentation du sommet et ensuite du placenta.[6]

Les études épidémiologiques[7] ont montré que les résultats périnataux (surtout pour ce qui concerne les taux de mortalité) étaient comparables, sous réserve de bonnes conditions sanitaires, quel que soit le lieu choisi pour l'accouchement, dans le cas de grossesse à faible risque suivie par un personnel médicalement qualifié[8]. Au-delà de ces observations générales, aucune étude prospective randomisée (le meilleur niveau de preuve scientifique) ne peut être envisagée pour comparer les résultats périnataux entre les divers modes de prise en charge des accouchements. En effet, pour des raisons d'éthique, les parents doivent bénéficier d'une entière liberté de choix en dehors de toute situation d'urgence obstétricale, ce qui interdit tout protocole expérimental basé sur un tirage au sort.

La répartition des décès maternels était en France, pour la période 1996/2001, de 94% pour les établissements hospitaliers (maternités et cliniques) et de 6% à domicile, que celui-ci ait été le lieu d'accouchement ou non[9]. Ces statistiques n'apportent aucune indication sur la mortalité maternelle dans le cas d'accouchemets à domicile planifiés et accompagnés par un(e) professionnel(le) de santé. En effet, les services d'urgence font état d'un accroissement significatif du nombre d'accouchements « spontanés » qui ont eu lieu à domicile (pour diverses raisons médicales ou sociales) en l'absence de tout suivi obstétrical.

En l'absence de preuves scientifiques, les collèges de gynécologues-obstétriciens de plusieurs pays industrialisés continuent à condamner avec fermeté toute pratique de l'accouchement hors du cadre hospitalier (ce qui exclut aussi bien les Maisons de Naissance)[10].

On peut citer trois publications basées sur des études rétrospectives représentatives de la pratique de l'AAD en France et dans les pays limitrophes :

[modifier] Pour en savoir plus

[modifier] Recommandations de l'OMS

[modifier] Charte de l'accouchement à domicile

[modifier] Répertoire des praticiens à domicile en France

[modifier] Notes et références

  1. Deux articles datant de 2007 (de BBC News et du Daily Mail) donnent plus de précisions sur la situation au Royaume-Uni. Consulter aussi le rapport annuel de l'AIMS à l'ENCA (juin 2007) pour un exposé des dysfonctionnements de ce système, principalement liées aux restrictions budgétaires.
  2. L'impossibilité actuelle de satisfaire à l'obligation d'assurance Responsabilité Civile professionnelle (refus répétés des sociétés d'assurance) et le manque de coopérativité, parfois l'hostilité, des établissements hospitaliers en cas de transfert en urgence. Le Conseil national de l'ordre des médecins a été jusqu'à poursuivre en justice des sages-femmes libérales qui n'avaient pas pu souscrire d'assurance.
  3. Source : http://wiki.naissance.asso.fr/index.php?pagename=StatistiquesPaysBas
  4. Appellation sujette à caution, comme en témoignent les résultats controversés d'un groupe de travail de la Haute Autorité de santé.
  5. En soi, la présentation en siège n'est pas une dystocie, sauf si elle est associée à d'autres signes avant-coureurs de pathologie comme par exemple un accouchement précoce ou une rupture prématurée de la poche des eaux. Toutefois, elle est considérée comme un critère d'exclusion de l'accouchement à domicile par la plupart des professionnels qui redoutent des conséquences médico-légales en cas de complication.
  6. Carrefour Naissance : loi belge relatif a la profession de sage-femme
  7. Voir la base de données de l'AFAR.
  8. Les conclusions de ces études sont l'objet de controverses (notamment autour du taux de mortalité néonatale) nourries par des préjugés en faveur de tel ou tel mode de prise en charge de l'accouchement. Un aperçu significatif de cette discussion se trouve dans les commentaires de la page "Home birth" de Wikipedia anglais : http://en.wikipedia.org/wiki/Talk:Home_birth
  9. Rapport du Comité national d'experts sur la mortalité maternelle (CNEMM) [1] page 51
  10. Voir par exemple la déclaration de l'American College of Obstetricians and Gynecologists, en mai 2007, et les commentaires des associations d'usagers.

[modifier] Liens internes

[modifier] Autres liens

[modifier] Bibliographie et articles