Discuter:Évaluation des psychothérapies

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  • Suicide d’un proche : un chagrin qui dépasse la thérapie cognitivo-comportementale
  • Le deuil est associé à une morbidité psychiatrique, puisque 6 à 15 % des personnes endeuillées développent un chagrin compliqué (ou sévère) à la suite du décès d'un proche. Le chagrin compliqué peut être défini par des symptômes comme les conduites d'évitement des situations rappelant le défunt, le manque de conviction, le sentiment de détachement, la sensation de manque, l'incrédulité et l'amertume vis-à-vis de la mort. Les symptômes durent au moins 2 mois, provoquant une altération de la vie socio-professionnelle et des autres aspects importants de la vie quotidienne. Le chagrin compliqué est associé à des troubles fonctionnels à long terme et à des idées suicidaires. Or, selon certaines études, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est efficace dans le traitement des chagrins compliqués, mais son effet dans la prévention de ces derniers n'est pas clairement établi.

Une équipe hollandaise a donc réalisé un essai randomisé avec un suivi de 13 mois pour évaluer l'efficacité d'une TCC pour prévenir les chagrins compliqués des familles endeuillées par le suicide d'un proche (parents de premier degré et époux). Il s'agissait d'un programme d'aide et de conseil, conduit par deux infirmières en psychiatrie expérimentées. Son objectif était d'offrir aux proches un cadre à leurs réactions de chagrin, engager un processus de défoulement émotionnel, améliorer l'interaction entre les proches et aider à la résolution des problèmes. Le programme comportait 4 sessions de discussion de 2 heures chacune entamées entre 3 et 6 mois après le suicide, les problèmes urgents étaient traités en premier. On a également fourni aux familles du groupe traitement (39 familles ; 68 participants) des manuels contenant des informations sur le suicide et la notion de perte d'un proche, parmi d'autres supports d'aide. Les familles contrôles (31 familles ; 54 participants) ont reçu les soins usuels.

Les résultats de l'étude sont assez inattendus. En effet, l'intervention n'a pas permis de réduire le chagrin compliqué (réduction moyenne = -0,61 ; IC à 95 % : -6,05 à +4,83 ; p = 0,82). Les critères d'évaluation secondaires (réactions inadaptées au chagrin, dépression, idées suicidaires et sentiment de culpabilité) n'ont pas été influencés non plus. C'est seulement après ajustement par rapport aux caractéristiques initiales des sujets que des résultats positifs se sont dessinés pour le sentiment de culpabilité dans le suicide du proche (OR = 0,18 ; IC à 95 % : 0,005 – 0,67 ; p = 0,01) et les réactions inadaptées au chagrin frôlent la significativité (OR = 0,39 ; IC à 95 % = 0,15 – 1,01 ; p = 0,06).

En conclusion, la TCC sous forme d'aide aux familles endeuillées par le suicide d'un proche ne réduit pas le risque de chagrin compliqué, les idées suicidaires ni le niveau de dépression. Elle pourrait aider à prévenir les réactions inadaptées au chagrin et les sentiments de culpabilité chez les parents de premier degré et les époux. Il est cependant difficile de tirer des conclusions définitives à partir de cette étude pour plusieurs raisons. La plus importante dans ce cas précis est le biais de sélection, qui ne peut pas être complètement écarté, même si les auteurs en limitent l'importance. Un tel biais existe si par exemple les cas les plus graves refusaient de participer à l'étude. Il pourrait à lui seul expliquer l'absence d'effet de la TCC (ou toute autre intervention d'aide), si cette dernière était davantage efficace dans les cas les plus sévères. D'ailleurs, les auteurs soulèvent cette hypothèse en disant que pour l'évaluer, des études à effectif assez large doivent être réalisées pour permettre des analyses en sous-groupes. Dr Khodor Chatila De Groot M et al. : "Cognitive behaviour therapy to prevent complicated grief among relatives and spouses bereaved by suicide: cluster randomised controlled trial."