Théorie neutraliste de l’évolution

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La théorie neutraliste de l’évolution est une théorie scientifique de l'évolution biologique au niveau moléculaire ( voir évolution moléculaire ) émise par Motoo Kimura, à partir de la fin des années 1960. Elle est aussi appelée théorie de la mutation et de la dérive aléatoire.

Sommaire

[modifier] Enoncé

Basée sur des modèles de diffusion mathématiques, Kimura a postulé que certaines mutations génétiques entraînent des changements au niveau moléculaire ( protéines ) qui sont neutres au regard de la sélection naturelle. Cela dépend en fait de la place de la mutation dans la séquence en nucléotides de l'ADN. 72% des mutations synonymes (silencieuses) concernent un nucléotide en troisième position. Autrement dit ces mutations sont sélectivement neutres car les différentes versions des protéines codées ne changent pas l'adaptabilité de l'organisme à son milieu de vie. De même, chez les eucaryotes, 99% du génome est non-codant, de ce fait les mutations apparues dans ces régions sont également sans effet ou neutres.

Sur un plan méthodologique, montrer qu'une mutation a une valeur adaptative différente des autres mutations revient à tester l'hypothèse de neutralité selon les modèles de diffusion et à rejeter cette l'hypothèse. En d'autres termes on calcule la diffusion de la mutation au sein de la population grâce aux équations fournies par la théorie et on compare le résultat obtenu avec les observations par le biais de tests statistiques. Si les résultats théorique diffèrent des observations, la mutation a une incidence sur l'adaptabilité de la population considérée.

L'une des implications de cette théorie est que l'évolution ne conduit pas forcément vers une complexification des organismes. Si chez les organismes les plus simples comme les procaryotes l'évolution conduit vers des organismes plus complexes du fait du mur gauche de la complexité. Mais à partir d'un certain stade de complexité, cette théorie prédit des "involutions" possibles. Il apparait, à titre d'exemple, que certaines espèces d'araignées ont perdu le comportement social lors de l'évolution (Référence) ce qui correspond à une simplification, du point de vue des interactions de ces organismes avec leurs congénères.

[modifier] Neutralistes contre sélectionnistes

Bien que certains ont perçu cette théorie comme anti-Darwinienne, Kimura et la plupart des biologistes évolutionnistes actuels s’accordent à dire que les deux théories sont compatibles. « La théorie (neutraliste) ne renie pas le rôle de la sélection naturelle qui détermine le cours de l’évolution adaptative ».

En effet, dans cette théorie, la sélection naturelle perd son caractère de facteur évolutif prépondérant et devient un facteur parmi d’autres au nombre desquels on compte les facteurs stochastiques tels que la dérive génétique ou l’effet fondateur. Le rôle de ce facteur reste néanmoins très important pour l'évolution.


[modifier] Points forts points faibles

L'un des points forts de la théorie neutraliste est qu'elle englobe la théorie synthétique de l'évolution et qu'elle permette d'expliquer un certain nombre de phénomènes observés.

Mais les calculs ayant permis de développer les modèles mathématiques sur lesquels reposent cette théorie présentent un point faible majeur: ils reposent sur des hypothèses fortes dont certaines ne sont que partiellement valides telle que :

  • le taux de mutation est constant dans le temps ;
  • la taille des populations est constante dans le temps ;
  • l'état d'équilibre mutation-dérive : le nombre d'allèle perdus par dérive génétique est égal au nombre d'allèles nouveau produit par mutation.

On sait maintenant que le taux de mutations n'est pas constant dans le temps et que sous certaines conditions de stress, ce taux s'accroit, vraisemblablement sous l'influence des HSP (Référence).

On sait aussi que la taille des populations est rarement constante, particulièrement lors de bouleversements écologiques, c'est-à-dire lors des moments où l'on observe des extinctions massives et une explosion des spéciations.

On sait enfin que l'état d'équilibre mutation-dérive est rarement respecté.


[modifier] Bibliographie