Résidentialisation

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La résidentialisation est un type d'opération de rénovation urbaine qui est apparu en France au début des années 1990.

Sommaire

[modifier] Définition

On peut considérer différentes définitions concernant ce qu'est la résidentialisation, ce qui fait qu'elle reste une notion assez floue. La résidentialisation est généralement définie en fonction de son site d'intervention, de sa portée, de ses objectifs, qui peuvent arriver à varier grandement d'une opération de résidentialisation à une autre. Il est donc difficile de donner une définition de la résidentialisation.

On peut remarquer que les définitions que l'on peut recueillir au fil des lectures qui lui sont relatives varient grandement. On peut ainsi noter ces quelques exemples :

  • La résidentialisation, qui consiste à donner un caractère privé aux immeubles, par exemple en posant des grilles à l’entrée ou en aménageant un jardin au pied de l’immeuble, permet une appropriation de l’immeuble par ses habitants.[1]
  • Conçue comme la panacée contre les phénomènes de déqualification sociale, la résidentialisation s’inscrit à la suite du constat de relative inefficacité des opérations classiques de réhabilitation sur les conditions de vie réelles des habitants. […] Cette perspective qui ambitionne de réduire des problèmes mal définis (les incivilités, la déqualification sociale) à des problèmes de forme urbaine, propose curieusement un programme d’intégration urbaine par la création d’entités spatiales repliées sur elles-mêmes.[2]

Ces définitions donnent quelques aperçus sur ce que peut être une opération de résidentialisation, et la résidentialisation en général. Il s'agit donc, au sens le plus large du terme, d'une opération d'urbanisme, visant à réguler, par la mise en œuvre de dispositifs allant de la petite échelle à la grande échelle, les problèmes rencontrés dans certains quartiers d'habitation.

Ses missions sont multiples : Il s’agit d’une part d’intervenir sur la définition des espaces extérieurs, leurs statuts (dimension spatiale), mais également de faire changer les comportements des habitants, de les "responsabiliser" face à leur habitat (dimension sociale) au travers de l'amélioration de leur cadre de vie, d’améliorer la qualité des logements et de ce fait leur taux d’occupation (dimension économique), souci principal du bailleur social (s'il s'agit d'une intervention sur un quartier d'habitat social), d’améliorer l’entretien des espaces extérieurs en définissant clairement les responsabilité de chacun (dimension de gestion)… On peut encore trouver d'autres applications à la résidentialisation, notamment la mise en place d'un système de gestion urbaine de proximité (GUP) ; l'intervention sur des quartiers d'habitat dégradé, pas seulement social (cadre des opérations de l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH))…

Néanmoins, depuis la création de l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), on peut dire qu'en règle générale, une opération de résidentialisation porte sur des quartiers d'habitat social, notamment dans les ZUS, au travers d'opérations tels les grands projets de ville (GPV) ou les opération de rénovation urbaine (ORU). La résidentialisation se veut une des approches permettant de répondre aux problèmes des grands ensembles. La résidentialisation se fait généralement selon trois axes, plus ou moins avoués :

  • Un aspect spatial
  • Un aspect sécuritaire
  • Une amélioration de la gestion des espaces

[modifier] Trois aspects de la résidentialisation

[modifier] Aspect spatial

L'aspect spatial de l'opération tend à donner un statut défini aux espaces entourant les immeubles d'habitation. Lors de la conception des grands ensembles, la plupart du temps selon les principes de la Charte d'Athènes, les espaces verts devaient devenir des espaces de rencontre, à tout le monde. Dans la réalité, ces terrains ont connu l'abandon, les défauts de gestion et les "appropriations négatives", comme les incivilités ou simplement la surappropriation par une tranche spécifique de la population.

La résidentialisation peut permettre de matérialiser en dur (végétation, murs, murets, grilles et grillages) ou de façon symbolique (changement de matériau, de coloration) un territoire donné pour un bâtiment ou un ensemble de bâtiments[3]. Ces nouvelles subdivisions de l'espace ont pour but de donner une échelle plus réduite aux ensembles d'habitation. De telles opérations s'accompagnent souvent de créations de voiries (visant à morceler les territoires). Notons toutefois que celles-ci amènent d'autres types de nuisances (pollutions, insécurité routière) auparavant méconnues dans le cas d'un cœur d'îlot initialement dédié aux piétons[4].

Toutefois, si cette tentative, relevant des domaines propres aux sciences sociales en milieu urbain, de faire s'approprier l'habitat par les "résidents" peut se concevoir pour des immeubles de taille modeste, elle est beaucoup moins évidente lorsqu'il s'agit de bâtiments de plus de 4 ou 5 étages. De plus, cette appropriation peut être vécue comme un facteur d'insécurité dans les quartiers résidentialisés. La revendication d'un "territoire" s'accompagne parfois de volontés de domination, pouvant entraîner des rivalités ou la surappropriation déjà évoquée. Mais ce point est justement pris en compte par les aspects sécuritaires de la résidentialisation.

[modifier] Aspect sécuritaire

L'aspect sécuritaire correspond à la volonté de résorber les désordres présents sur ces espaces au statut indéfini. La volonté de mettre fin aux occupations de halls d'immeubles, aux dégradations... se traduit par la mise en pratique d'outils de prévention situationnelle comme la vidéosurveillance, les dispositifs de dissuasion, les contrôles d'accès

[modifier] Gestion

Si la délimitation administrative des surfaces aux abords et entre le bâtiments est connue des différents services (par le cadastre), leur gestion (entretien, nettoyage) en est cependant souvent complexe, une même allée pouvant très facilement être de la responsabilité du bailleur sur une partie de son tracé, et de celle de la mairie sur le reste.

Cette complexification de la gestion est souvent génératrice de tension entre les locataires et les bailleurs si ces derniers ne fonctionnent pas en parfaite coordination avec les services municipaux concernés.

Cependant, des conventions existent entre bailleurs et mairies afin de répartir le coût budgétaire de services (nettoyage, espaces verts) délégués à des sociétés externes ou à charge de services internes (services des voiries et/ou des espaces verts) dont la charge est alors imputée pour moitié (en général) aux deux parties. La résidentialisation peut alors impliquer un transfert de compétence vers le bailleur, avec des retombées pour les locataires qui voient leurs charges augmenter, la dotation municipale étant supprimée. Autre solution envisagée, les allées et autres espaces de circulation extérieurs sont rétrocédés par le bailleur - s'il est propriétaire de tout le foncier - à la commune / à l'EPCI, qui prennent alors totalement à leur charge leur entretien, comme pour n'importe quelle autre portion du domaine public.

De même, les espaces de stationnement peuvent, lors d'une opération de résidentialisation, faire l'objet d'un transfert de compétence, et donc de charges d'entretien (cela pouvant comprendre s'il y a lieu l'entretien des espaces verts, y compris la taille annuelle des arbres) et/ou de frais de location.

[modifier] Intrication des notions

Ces troisaspects s'entremêlent dans les discours des différents acteurs ayant affaire à la résidentialisation. Que ce soient les concepteurs (architectes, urbanistes, paysagistes) ou les maîtres d'ouvrage de ces opérations (mairies, offices HLM, Etat), les objectifs qui sont associés à la résidentialisation varient. L'accent est mis dans la présentation du projet sur un aspect ou sur l'autre. De plus, les échelles d'intervention varient beaucoup, allant du quartier entier à l'immeuble seul, voire à quelques appartements. Il est donc difficile de donner une définition unique de la résidentialisation.

[modifier] Quelques opérations de résidentialisation

« Parfois considérée comme la panacée face aux divers désordres rencontrés dans les grands ensembles, la résidentialisation n'a pas pour autant sa place systématiquement dans les opérations de refonte des espaces extérieurs de ceux-ci. Ainsi, lors de la réhabilitation des Courtillières, grand ensemble construit par Émile Aillaud à la fin des années 1950, la résidentialisation prévue, devant aboutir à un morcellement du parc central de l'ensemble, fut avantageusement abandonnée au profit d'un retraitement plus limité de ceux-ci, les laissant majoritairement ouvert.[5] Toutefois, pour ce qui est du traitement des abords immédiats des immeubles, notamment le Serpentin, les outils "classiques" de résidentialisation (adressage précis, entrées indépendantes...) ont été prévues[6]. »

[modifier] Liens externes

[modifier] Références

  1. Rapport Grosdidier à l’Assemblée Nationale n°997, p. 20.
  2. Golovtchenko, N. (2002). Article « résidentialisation » in Segaud, M., Brun, J., et Briant, J.-C. (Dir.). (2002). Dictionnaire de l’habitat et du logement. Paris : Armand Collin.
  3. Selon le principe de l'"unité résidentielle", pour reprendre la notion de Philippe Panerai
  4. Cela est par exemple valable pour la résidentialisation du quartier de la Thibaude à Vaulx-en-Velin, où les habitants ont longtemps milité contre la création d'une voie passant au milieu des tours. Ils redoutaient en effet les dangers que pouvaient représenter des voitures passant à vive allure. Des contrôles de vitesse furent effectués, ce qui déboucha sur l'installation de dos-d'ânes sur la voie nouvelle.
  5. Réhabilitation réalisée par l'AUC (architectes urbanistes) pour la partie concernant le parc. Cf. Lapierre, É. (Dir.). (2003). Architecture du réel. Architecture contemporaine en France. Paris : Éditions du Moniteur. pp.76-89.
  6. Partie de l'opération selon la conception de l'agence RVA. Cf. http://www.lemoniteur-expert.com/btp/moniteur_hebdo_amenagement/aux_courtillieres_residentialisation_est_necessite.htm