Opération Noroît

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L'opération Noroît est une opération militaire d'évacuation des ressortissants occidentaux exécutée à Kigali par l’armée française à partir du 4 octobre 1990.

Sommaire

[modifier] Contexte

Le 1 octobre 1990, le FPR entre au Rwanda ; dans la nuit du 3 au 4 octobre, une fusillade éclate dans la ville de Kigali.

En 1998, la mission d'information parlementaire sur le Rwanda établit dans son rapport que le Président Juvénal Habyarimana n’avait pas hésité à mettre en scène une simulation d'attaque de la capitale par le FPR dans la nuit du 4 au 5 octobre en exagérant la menace résultant de coups de feu et d’échange de tirs qui eurent lieu cette nuit-là dans Kigali[1]. Sans être dupes, les autorités françaises justifièrent l'intervention française par le risque couru par leurs ressortissants. La mission parlementaire estima que « l’attaque simulée sur Kigali servit non seulement de leurre pour déclencher l’intervention française, mais aussi de levier pour restaurer le régime dans sa plénitude »[2].Selon des analystes qui défendent la politique française, le FPR commence une série d'incursions, qui seraient systématiquement accompagnées de massacres[3].

L'offensive du FPR laissant craindre pour la sécurité des ressortissants français au Rwanda, les dirigeants français de l'époque décident de monter une opération avec le triple objectif de protéger l’ambassade de France, d'assurer la protection des ressortissants français, et, le cas échéant, de participer à leur évacuation. Une série d'ordres d'opération supplémentaires sera prise pour coordonner l'action des armées française et belge.

le 4 août 1993 les accords d'Arusha sont signés. Ils prévoient que l'armée française doit quitter le Rwanda et laisser place à une force des nations unies. La MINUAR s'installera au Rwanda à partir d'octobre 1993 et l'armée française quittera le Rwanda en décembre 1993. Quelques dizaines d'assistant militaires resteront au Rwanda pour des opérations de maintenance technique selon les députés français.

[modifier] Formation de militaires

Selon les accords de coopération militaires passés entre la France et le Rwanda en 1975, la France ne pouvait être là que pour former la gendarmerie rwandaise.[4]

Les forces armées rwandaises sont passée de 1990 à 1994 de 5 000 à 50 000 hommes. Cette opération a permis d'organiser, d'entraîner et d'encadrer les militaires rwandais pour leur apprendre à faire face au danger des mines et des pièges à utiliser des armes lourdes.

Les députés français, dans leur rapport, ont souligné que le soutien français aux forces armées rwandaises a été « à la limite de l'engagement direct » et qu'à plusieurs reprises, le soutien français a en effet été déterminant pour contenir les forces du FPR. Notamment des officiers français encadraient l'état-major rwandais pour la conduite stratégique des combats.

Selon des témoignages rwandais et français, les militaires français ont aussi formé directement de futurs miliciens Interahamwe.[5]. L'armée française a toujours démenti ces accusations de formation des milices.

Des témoignages affirment aussi que l'armée française aurait procédé à des contrôles d'identité ethniques, parfois accompagnés de miliciens en plus de leurs homologues rwandais et des interrogatoires en prisons dès 1991.[6]

[modifier] Étendue de l'opération

« La présence française » fut jugée « à la limite de l'engagement direct » selon le titre d'un chapitre du rapport de la mission parlementaire française[7]. La France a conseillé l'armée rwandaise y compris pendant les combats avec le FPR. La date de la décision et la motivation de cette « opération de formation » corroborent les inquiétudes du parlement. Certains avancent qu'elle a parfois directement encadré l'armée rwandaise. Bernard Lugan, expert auprès du TPIR, conteste cette qualification [8] sur la base de l'absence de pertes humaines, selon lui inévitables en cas d'engagement direct.

D'après le général Maurice Schmitt, ancien Chef d’état-major des armées : « un Conseil de défense restreint, très bref, s’est tenu sur l’heure à Riyad, sous la présidence du Président de la République, à la suite duquel l’ordre a été donné d’envoyer au plus vite deux compagnies à Kigali, avec la mission de protéger les Européens, les installations françaises et de contrôler l’aérodrome afin d’assurer l’évacuation des Français et étrangers qui le demandaient. Ces troupes ne devaient en aucun cas se mêler des questions de maintien de l’ordre qui étaient du ressort du Gouvernement rwandais ».

Le 31 juillet 1992, La France et le Rwanda ont « régularisé » [9] la rédaction de l'accord d'assistance militaire de 1975 pour qu'il englobe la formation des Forces armées rwandaises en changeant simplement dans sa rédaction les mots « Gendarmerie rwandaise » par « Force armées rwandaises » aux articles 1 et 6 de l'accord de 1975, et toujours sous « uniforme rwandais » selon l'avenant de 1983.

Parallèlement la France, en accord avec la communauté internationale, a soutenu le processus de paix des négociations des accords d'Arusha entre le pouvoir rwandais, son opposition et les exilés du FPR.

[modifier] Perception de l'opération Noroît dans la population rwandaise

D'après la mission d'information sur le Rwanda (mission parlementaire française), « le général Jean-Claude Thomann constate (...) l’accueil enthousiaste des populations et des forces armées rwandaises réservé aux soldats français ».

Le général Thomann note : «le rôle stabilisateur que joue la présence, même non active, d’un contingent d’intervention étranger, pour conforter un pouvoir menacé par une agression extérieure et confronté à un risque non négligeable de troubles intérieurs, d’origine ethnique ou politique».

Les rescapés du génocide sont unanimes pour dénoncer le soutien de l'armée française au régime Habyarimna de 1990 à 1994. Ils considèrent la France complice du Hutu Power.

[modifier] Divers

  • Le Noroît est le vent de nord-ouest ; le terme aurait été choisi à cause de la position géographique de la France par rapport au Rwanda

[modifier] Voir aussi

[modifier] Références

  1. Rapport de la mission d'information sur le Rwanda, p.128
  2. Rapport de la mission d'information sur le Rwanda, p.81
  3. selon des anciens officiers et sous-officiers de l'APR (notamment le dissident Abdul Joshua Ruzibiza, dans Rwanda, l'histoire secrète, éd. Panama, 2005), et selon les enquêtes d'André Guichaoua, professeur à Paris-I-Sorbonne, expert auprès du TPIR ([1]), ou celles de Pierre Péan (Noires fureurs, blancs menteurs, éd. Fayard, 2005)
  4. Rapport des députés français
    Commission d'enquête citoyenne Pour en finir avec les soi-disant « accords de défense »
  5. Thierry Prungnaud, gendarme du GIGN qui formait la garde présidentielle rwandaise (GISGP - Groupement d'intervention et de Sécurité de la Garde Présidentielle), sur France Culture le 22 avril 2005
  6. Accusations rapportées par les députés français qui les ont établies dans leurs rapport en ce qui concerne l'année 1993 et par Alison Des Forges, de Human Right Watch [2]
    Le chercheur belge Olivier Lanotte a contesté notamment le témoignage d'Immaculée Cattier devant la CEC.
  7. Rapport de la mission d'information sur le Rwanda, p.168
  8. François Mitterrand, l'armée française et le Rwanda, éd. du Rocher, 2005
  9. selon le terme de l'ambassadeur Georges Martres

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie