Liberté chérie (loge maçonnique)

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Liberté chérie est la seule loge maçonnique connue pour avoir fonctionné à l'intérieur d'un camp de concentration nazi pendant la Seconde Guerre mondiale.

Monument dans le camp de concentration d'Esterwegen
Monument dans le camp de concentration d'Esterwegen
Détail du monument
Détail du monument

Sommaire

[modifier] La loge

Le 15 novembre 1943, sept francs-maçons belges déportés pour faits de résistance fondèrent la loge maçonnique Liberté Chérie dans le baraquement n°6 du Camp de concentration Emslandlager VII d'Esterwegen. Le nom de la loge fut choisi d'après les paroles du chant La Marseillaise.

Ces sept fondateurs étaient:

  • Paul Hanson,
  • Luc Somerhausen,
  • Jean De Schrijver,
  • Jean Sugg,
  • Henry Story,
  • Amédée Miclotte,
  • Franz Rochat,

Par la suite, ils initièrent, puis élevèrent jusqu'au troisième degré le Frère Fernand Erauw, un autre belge.

Paul Hanson fut élu Vénérable Maître. Les Frères réunissaient la loge dans le baraquement n°6 autour d'une table qui était habituellement utilisée pour le tri des cartouches. Un prêtre catholique déporté avait accepté de faire le guet afin de protéger leurs réunions.

Le baraquement n°6 était occupé par des prisonniers Nacht und Nebel ("nuit et brouillard") étrangers. Les camps d'Emslandlager étaient un ensemble de camps dont l'histoire est présentée dans l'exposition permanente du centre de documentation et d'information de Papenburg. Cet ensemble de quinze camps était établi près de la frontière avec les Pays-Bas et étaient administrés depuis Papenburg.

Luc Somerhausen décrivit l'initiation d'Erauw et les autres cérémonies comme étant des plus simples. Ces cérémonies eurent lieu à l'une des tables au moyen d'un rituel extrêmement simplifié dont toutes les composantes furent expliquées au candidat afin que, par la suite, il puisse participer au travail de la loge. Elles furent protégées des regards des autres prisonniers et des surveillants par la communauté de prêtres catholiques qui était déportée dans le même baraquement.

Il y avait plus d'une centaine de prisonniers dans le baraquement n°6, où ils étaient enfermés pratiquement 24 heures sur 24, n'ayant le droit de sortir qu'une demi-heure par jour, sous surveillance. Pendant toute la journée la moitié des prisonniers triait des cartouches et des pièces de radios. L'autre moitié était contrainte de travailler dans des conditions effroyables dans les carrières de tourbe des environs. L'alimentation était si pauvre que les prisonniers perdaient en moyenne 4 kg chaque mois.

Après la première tenue et l'admission du nouveau Frère, d'autres réunions thématiques furent organisées. L'une d'entre-elles fut dédiée au symbole du Grand Architecte de l'Univers, une autre à l'avenir de la Belgique et une autre à la place des femmes dans la franc-maçonnerie. Seuls Somerhausen et Erauw survécurent à la détention et la loge cessa ses travaux en 1944.

[modifier] Les membres de la loge

Le Vénérable Maître de la loge, Paul Hanson fut transféré et mourut dans les ruines de sa prison, détruite par un raid allié sur Essen le 26 mars 1944.

Jean Sugg et Franz Rochat appartenaient à la loge des "Amis philanthropes":

Le docteur Franz Rochat, un professeur d'université, pharmacien et directeur d'un important laboratoire pharmaceutique était né le 10 mars 1908 à Saint-Gilles. Il travaillait clandestinement pour le journal de la résistance "la voix des belges". Il fut arrêté le 28 février 1942, fut transféré à Untermansfeld en avril 1944 et y mourut le 6 avril 1945.

Jean Sugg était né le 8 septembre 1897 à Gand et était d'origine suisse-allemande. Il travaillait avec Franz Rochat dans la presse de la résistance, traduisant des textes allemands et suisses, et participa à différent journaux clandestins, dont "La Libre Belgique", "La Légion Noire", "Le Petit Belge" et "L'Anti Boche". Il mourut dans les camps le 8 février 1945.

Le Dr. Amédée Miclotte était un professeur. Il était né le 20 décembre 1902 à Lahamaide et appartenait à la loge "Union et Progrès". Il fut aperçu pour la dernière fois en détention, le 8 février 1945.

Jean De Schrijver était un colonel de l'armée belge. Il était né le 23 août 1893 à Alost. Il était membre de la loge "La Liberté" de Gand. Le 2 septembre 1943, il fut arrêté pour espionnage et possession d'armes. Il mourut en février 1945.

Henry Story était né le 27 novembre 1897 à Gand. Il était membre de la loge "Le Septentrion" à Gand. Il mourut le 5 décembre 1944.

Luc Somerhausen, un journaliste, était né le 26 août 1903, à Hoeilaart. Il fut arrêté le 28 Mai 1943 à Bruxelles. Il appartenait à la loge "Action et Solidarité n°3" et fut Grand Secrétaire-adjoint du Grand Orient de Belgique.

Fernand Erauw, {Assessor at the Audit Office??} et officier de réserve dans l'infanterie, était né le 29 janvier 1914 à Wemmel. Il fut arrêté le 4 août 1942 pour appartenance à l'Armée secrète. Il s'évada et fut repris en 1943.

Les survivants Erauw et Somerhausen se retrouvèrent en 1944 dans le camp de concentration d'Oranienburg- Sachsenhausen et restèrent à jamais inséparables par la suite. Au printemps 1945, ils participèrent à la "marche de la mort". Alors qu'Erauw mesurait 1,84m, il ne pesait plus que 32 kg, le 21 mai 1945 à l'hôpital Saint-Pierre de Bruxelles.

En août 1945, Luc Somerhausen envoya un rapport détaillé au Grand Maître du Grand Orient de Belgique dans lequel il relatait l'histoire de la loge "Liberté chérie". Il mourut en 1982, à l'âge de 79 ans. Le dernier témoin, Fernand Erauw, mourut à l'âge de 83 ans, en 1997.

[modifier] Le monument

Un monument, créé par l'architecte Jean De Salle, fut élevé par les francs-maçons belges et allemands le 13 novembre 2004. Il fait désormais partie de l'ensemble du mémorial d'Esterwegen. Wim Rütten, Grand Maître de la Fédération belge du Droit Humain déclara dans son discours:

«  Nous sommes assemblés ici aujourd'hui, dans ce cimetière d'Esterwegen, non pas pour prendre le deuil, mais pour exprimer publiquement une pensée libre: A la mémoire de nos Frères, les droits de l'Homme ne seront jamais oubliés!  »

[modifier] Annexes

[modifier] Bibliographie

  • Fernand Erauw: L'odyssée de Liberté Chérie, 1993 - Histoire de la loge
  • L. Somerhausen: Une loge belge dans un camp de concentration. In: Feuillets d’information du Grand Orient de Belgique. Nr 73, 1975
  • Pierre Verhas: Liberté chérie : Une loge maçonnique dans un camp de concentration. Bruxelles, Labor, 2005.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes

[modifier] Références et notes


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