Alphonse Massamba-Débat

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Alphonse Massamba-Débat est un homme d'état congolais, né en 1921 à Nkolo dans le district de Boko (Pool) et mort le 25 mars 1977, Président de la République du Congo de 1963 à 1968.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Origine et famille

Alphonse Massamba-Débat naît à Nkolo en 1921 dans une famille kongo. Il reçoit une formation d'instituteur à l'Ecole des Cadres moyens de l'AEF à Brazzaville. Il exerce au Tchad. De retour au Congo, il est Directeur de l'école de Mindouli avant d'être nommé Directeur d'école à Brazzaville. Il est marié à Marie Nsona dont il a plusieurs enfants. Marqué par son éducation protestante, il fait montre toute sa vie d'une grande austérité pour certains, d'une grande intégrité pour d'autres (et surtout pour ceux qui l'auront connu au plus près) ainsi que d'une dévotion confinant au mysticisme.

[modifier] Premières responsabilités politiques (1959-1963)

Massamba-Débat est membre du PPC de Félix Tchicaya avant d'adhérer en 1956 à l'Union Démocratique de Défense des Intérêts Africains (UDDIA), le parti nouvellement créé par l'abbé Fulbert Youlou.

Il est élu Président de l'Assemblée Nationale en 1959. Il occupera cette fonction jusqu'en 1961.

Il devient alors ministre du plan et de l'équipement. De par ses mœurs austères et sa simplicité, sa rigueur et sa compétence, il est épargné par le discrédit croissant des membres du gouvernement de Fulbert Youlou, auxquels la population reprochent leur faste et leur arrogance.

En mai 1963, Massamba-Débat quitte le gouvernement suite à des divergences de plus en plus prononcées avec Fulbert Youlou.

[modifier] La Présidence de la République (1963-1968)

Le 15 août 1963, les chefs militaires Mountsaka et Mouzabakani appellent Alphonse Massamba-Débat au pouvoir. Il devent Chef du Gouvernement provisoire et constitue un cabinet réduit constitué de techniciens (Germain Bicoumat, Bernard Galiba, Pascal Lissouba, Paul Kaya, David Ganao, Edouard Ebouka-Babakas et Jules Kounkound).

Le 8 décembre 1963, la nouvelle constitution est adoptée par référendum. Elle institue un Conseil National de la Révolution (CNR), présidé par le Président de la République. Elle prévoie, outre la fonction de Président de la République, celle de Premier Ministre, Chef du gouvernement.

Le 19 décembre, il est candidat unique à l'élection présidentielle. Il est élu à 100% des suffrages exprimés. Le 24 décembre 1963, il publie son gouvernement, au sein duquel, Pascal Lissouba devient Premier Ministre.

En août 1964, le Mouvement National de la Révolution (MNR) est créé et institué parti unique. Massamba-Débat en est le Secrétaire Général et Ambroise Noumazalaye le Premier secrétaire politique.

L'idéologie du régime est de gauche et le Congo se rapproche des pays socialistes, notamment Cuba et la Chine, tout en s'éloignant des pays capitalistes. Che Guevara vient rencontrer Massamba-Débat en janvier 1965. Les relations diplomatiques sont rompues avec les États-Unis. Les rapports se tendent avec le Congo démocratique voisin dont l'itinéraire politique est de plus en plus influencé par les velléités mobutistes.

Le gouvernement de Tshombe expulse les ressortissants congolais vivant au Congo-démocratique.

Sur le plan intérieur, le régime de Massamba-Débat, aux prises avec les complots alimentés par une jeune garde politique congolaise avide de plus de pouvoir, se montre en contre-partie plus répressif et brutal, notamment par le biais de sa milice politique, la Défense Civile et l'organisation de jeunesse du parti unique, la JMNR. Le point culminant de cette atmosphère de "terreur" est constitué par l'assassinat en février 1965, de trois personnalités dont les positions ne sont pas du goût du pouvoir : le Président de la Cour Suprème Joseph Pouabou, le procureur de la république Lazare Matsocota et le Directeur de l'Agence Congolaise d'Information Anselme Massoueme auxquels on ne pourra attribuer la responsabilité à Massamba-Débat dont la mémoire réhabilitée en 1991 commencera à rétablir la vérité sur l'ensemble de son oeuvre marquée autant par la rigueur, l'intégrité, que le pacifisme. Il s'agira néanmoins des premiers crimes politiques reconnus de l'histoire du Congo indépendant.

Sur le plan économique et social Massamba-Débat mène une gestion saine et rigoureuse. Sous sa présidence le Congo connait un début d'industrialisation et le niveau de vie des Congolais s'améliore. Quelques grandes unités de productions à grande main d'œuvre sont construites : l'usine textile de Kinsoundi, les palmeraies d'Etoumbi, l'usine d'allumettes de Bétou, les chantiers de constructions navales de Yoro, etc. Des centres de santé sont créés (deux à Brazzaville et un à Pointe-Noire) ainsi que des groupes scolaires (collèges et écoles primaires). Le taux de scolarisation du pays devient le plus élevé d'Afrique noire.

L'assise populaire de Massamba-Débat est incertaine dès le départ, car une partie des ressortissants de la région du Pool, dont sont originaires les deux premiers présidents du Congo, lui reproche d'avoir remplacé Youlou à la tête du pays. La brutalité des milices rend le régime impopulaire. Massamba-Débat, devient de plus en plus isolé. Les contradictions idéologiques (socialisme bantou contre socialisme scientifique) et les luttes de factions, principalement entre les pro-lissouba et les pro-noumazalaye; les tentatives de l'opposition de droite (Mouzabakani, Kolelas, Kinganga) et l'activisme des officiers progressistes, conduits par le capitaine Ngouabi, affaiblissent Massamba-Débat.

Le 26 avril 1966, il nomme un nouveau gouvernement. Noumazalaye devient Premier Ministre en remplacement de Lissouba. Une lutte sourde s'instaure entre le Président et son Premier Ministre sur les options idéologiques, la politique de nationalisation des entreprises et la diplomatie.

Le 12 janvier 1968, il démet Noumazalaye et décide d'assumer lui-même la fonction de Premier Ministre.

En juillet 1968, devant la montée de la contestation, il fait arrêter le capitaine Ngouabi, dissoût l'Assemblée Nationale et le Bureau Politique du MNR et suspend la Constitution de 1963. Il en résulte un affrontement entre ses partisans au sein de la Défense civile et une partie de l'armée. Il est alors contraint d'amnistier tous les prisonniers politiques et composer avec ses opposants.

Une autre version de ces évènements consisterait en la simple reconnaissance d'un coup d'état qui concluera logiquement les manoeuvres de ces grandes figures du Nord que sont Marien Ngouabi ou encore et déjà l'actuel président Denis Sassou Nguesso; car en tout état de cause, les problèmes internes du Congo sont depuis toujours liés à des conflits relativement ethniques dont on su malignement profiter les intérêts français et occidentaux via la soif de pouvoir des jeunes pousses politiciennes d'alors que l'on retrouvait pour l'heure dans les camps sudistes aussi bien que nordistes. On pourra noter alors la volonté manifeste de Massamba-Débat d'éviter tout bain de sang et ainsi de se contraindre à démissionner.

Le 5 août 1968, "il" forme un nouveau gouvernement, et un nouveau Conseil National de la Révolution (CNR) de 40 membres et doté de pouvoirs étendus, est mis en place. Celui-ci est présidé par Ngouabi et Massamba-Débat y est un simple membre. Outre Ngouabi, plusieurs officiers ont font partie : Norbert Ntsika, Alfred Raoul, Joseph Ngabala, Denis Sassou-Nguesso, Luc Kimbouala-Nkaya, etc, ainsi que le chef de la Défense Civile, Ange Diawara.

Le 4 septembre 1968, Massamba-Débat, dont les prérogatives de Président de la République ont été rognées par le CNR, se résoud officiellement de démissionner. La fonction de Président de la Réublique est provisoirement suspendue. Le capitaine Raoul assume l'intérim du Chef de l'État.

[modifier] Les dernières années (1968-1977)

Le 31 décembre 1968, la fonction de Président de la République est rétablie. Marien Ngouabi est le nouveau président.

Le 16 octobre 1969, il est arrêté par le nouveau régime et accusé des assassinats de février 1965. La cour martiale chargée de le juger l'acquitte, le mois suivant, le procès ayant démontré la seule implication de ses collaborateurs d'alors (Noumazalaye, Lissouba, Ndalla, Hombessa, etc) réunis au sein du groupe de M'Pila. Libéré, il se retire dans son village natal.

Le Congo entre alors dans une phase de grande instabilité (installation du « socialisme scientifique », instauration de la République populaire du Congo en 1970, multiples tentatives de coup d'État) dont le point culminant sera l'assassinat de Ngouabi en mars 1977.

Massamba-Débat est arrêté à son domicile brazzavillois, le 18 mars 1977, quelques heures soit-disant après l'assassinat de Marien Ngouabi. L'un de ses enfants sera lui aussi emmené de force avec lui et ne reverra plus jamais son père, pas plus que ses autres frères et soeurs. Selon certains témoignages, ce dernier est victime de graves sévices durant sa détention. La cour martiale instituée pour la circonstance par le Comité Militaire du Parti, nouveau détenteur du pouvoir, le condamne à mort. Il est présenté comme l'instigateur du complot ayant conduit à la mort du président Ngouabi. Il est exécuté le 25 mars 1977 de nuit, dans des circonstances mystérieuses. Son corps n'a jamais été rendu à sa famille. Sa mémoire a été réhabilitée par la Conférence Nationale Souveraine de 1991, mais sa tombe n'a jamais été montrée par ceux qui l'ont exécuté.

[modifier] La postérité

L'ancien Stade de la Révolution de Brazzaville construit durant son mandat, porte aujourd'hui son nom.

Alphonse Massamba-Débat est une personnalité incontournable du paysage congolais, politique africain et international, même et surtout après sa mort. En effet, l'Afrique a connu un certain nombre de personnalités qui ont marqué l'histoire de l'indépendance, de nombre de ses pays, comme Patrice Lumumba, Kwame Nkrumah ou encore Thomas Sankara, dans les années 60, se distinguant toutes par un courage notamment, par une honnêteté et une intégrité certaine, en opposition totale avec les caractéristiques des gouvernements suivants et souvent actuels, qui auront tout fait pour détruire leurs prédécesseurs. Des gouvernements tyranniques et conspirateurs, jouisseurs, qui auront conduit l'Afrique dans l'état de désarroi actuel et qu'on lui connaît et qui n'auront toujours pas le courage de rétablir toute les vérités sur bon nombre de leurs agissements honteux comme les circonstances audieuses que que sont celles de la mort d'un personnage sacré comme Massamba-Débat par exemple, dont le seul nom porte encore et bien malgré eux, bien des espoirs. Les vérités se font attendre, mais petit à petit, le voile se lève sur toute une histoire qui touche le Congo d'abord et d'autres pays bien-sûr, comme la France, qui n'aura cessé, on le sait aujourd'hui, d'exercer ses influences depuis des siècles et bien entendu, ces dernières décennies riches en évènements.

Extrait.

   La semaine sanglante dite “semaine rouge” de mars 1977
   Sassou Nguesso et Yhombi-Opango assassinent Marien Ngouabi parce qu’il est resté trop longtemps au Pouvoir. Ils détournent les soupçons sur des innocents qu’ils éliminent physiquement. Alors une semaine sanglante s’organise au cours de laquelle sont opérées de nombreuses exécutions sommaires, les malheureux étant enterrés comme des chiens : des militaires, des civils, souvent torturés avant d’être abattus ou enterrés vivants. Ce fut le cas de l’ex-Président Massamba-Debat, dont les yeux auraient été crevés par un grand militaire aujourd’hui et plusieurs fois ministre, depuis son acte ignoble. Ajoutons que Massamba-Debat aurait été dépécé et jeté en pature aux lions du parc zoologique. En tout cas, sa tombe n’a jamais été indiquée par les assassins, en dépit des promesses de Yhombi-opango. On donnera à titre indicatif les noms d’autres victimes de ce carnage : le Cardinal Emile Biayenda, les lieutenants Kimbouala-Nkaya, Mboro, Ontsou, de nombreux jeunes soldats âgés d’à peine 21 ans, de nombreux éléments du fameux commando créé pour la circonstance et qui eurent l’étiquette d’exécutants de l’assassinat. Ce fut un ignoble crime politique. Sassou Nguesso est ministre de la Défense, et dirigea provisoirement l’Etat, du 18 mars au 3 avril 1977.

[modifier] Œuvres

  • Le meilleur héritage, Harmattan, 2003, ISBN : 2738425526.

[modifier] Sources

  • Encyclopédie Universalis, édition de 1977. Notices biographiques.
  • Les voies du politique au Congo, Rémy Bazenguissa-Ganga. Karthala, 1997.

[modifier] Parcours politique

[modifier] Chronologie des fonctions principales

Précédé par Alphonse Massamba-Débat Suivi par
-
Président de l'Assemblée Nationale
1959 - 1961
Marcel Ibalico
Fulbert Youlou
Premier Ministre
1963
Pascal Lissouba
Fulbert Youlou
Président de la République du Congo
1963 - 1968
Marien Ngouabi