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MAI 2006 - Une équipe de 6 personnes, François Bonnet, agriculteur, Daniel Julien, agronome et sociologue, François de Ravignan et Pierre Styblinski, agro-économistes, Christian Bellavia et Alain Keler, photographes, s’est rendue en Pologne du 16 au 28 mai avec la participation des associations Solidarité, La Ligne d’Horizon, Les Yeux de la Terre et Rocade, dans le but de donner au public français une information sur la situation de l’agriculture et des paysans polonais.

La Pologne dispose en majeure partie de sols riches et d’un climat favorable. Le cinquième de la population totale vit sur de petites exploitations de moins de dix hectares, ces dernières représentant 80% du total ; elles sont principalement situées dans les régions du Sud et de l’Est visitées par l’équipe. La région de Poznan, à l’Ouest, en revanche, est marquée par la présence d’exploitations plus grandes, parfois très vastes, ayant acquis les terres des anciennes fermes d’Etat. Selon nos sources, la plus grande occuperait 80 000 ha, le cinquième d’un département français.

L’ouverture du marché agricole de la Pologne provoque une transformation très rapide et profonde. La baisse des prix à la production et donc des revenus n’est compensée ni par les aides directes de la PAC, ni par les augmentations de productivité. Pour les petits paysans, cela contribue à perpétuer une émigration (surtout temporaire, qui touche parfois la quasi-totalité des exploitations d’un village), mais aussi des abandons de terre. C’est ainsi que les dispositifs de la PAC (y compris la mise aux normes) et leurs modes d’application nationaux ont un effet d’éviction sur les petites exploitations. Dans les faits, si la plupart de nos interlocuteurs s’en déclarent préoccupés, ainsi que du sous-emploi qui en résulte, personne ne propose de solution. Les agriculteurs les plus dynamiques se lancent dans un agrandissement rapide, un équipement massif, parfois sur-dimensionné.

Or le contexte polonais n’est pas celui de la France des années 1960, avec son plein emploi et sa croissance industrielle : ici le taux de chômage est de 17% ; et il relève de la gageure de prétendre envoyer de nombreux agriculteurs travailler dans d’autres secteurs. La croissance des secteurs secondaires et tertiaires est en effet souvent le fait de firmes étrangères et de processus techniques peu exigeants en main-d’œuvre. L’évolution qui s’amorce risque de se révéler  dramatique, en favorisant ceux qui ont des capacités financières et en excluant la petite agriculture familiale.

Une action collective et structurée des agriculteurs qui, seule, pourrait leur permettre de former un contre-pouvoir aux dérives libérales en cours, paraît pouvoir difficilement se mettre en place aujourd’hui. L’expérience communiste amène les agriculteurs polonais à s’en méfier. Ceci fait de l’agriculture polonaise une proie facile pour les grands groupes agro-alimentaires et financiers.

En conséquence, une nouvelle réforme de la PAC s’imposerait, comportant une aide forfaitaire à l’unité de main-d’œuvre et un plafonnement des aides pour protéger les petites exploitations au nom de leur fonction sociale, ainsi que le respect d’une « préférence communautaire » qui devient de plus en plus timide (par exemple, la production de fruits rouges polonais est mise en question par l’importation de fraises chinoises congelées !)

Mais pourra-t-on éviter à la Pologne, et à d’autres PECO, d’aggraver le chômage et de voir disparaître leurs cultures paysannes ?

François Bonnet, Daniel Julien, François de Ravignan, Pierre Styblinski