Tête réduite

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Les têtes réduites ou tsantzas sont des objets rituels jadis réalisés à partir de têtes humaines par des tribus d'Amérique du Sud tels que les Shuars, mais on trouve également la trace de cette pratique en Europe lors de la Seconde Guerre mondiale dans le camp de Buchenwald.

[modifier] Origine

La réalisation d'une tsantza est une quête spirituelle réalisée dans la célébration d'un rituel immuable. C'est un acte guidé par une certaine notion de justice, mais surtout de vengeance. Ainsi, pour se venger d'un homme, on va se battre avec lui, puis, une fois l'adversaire tué, on va le décapiter et faire réduire sa tête tout en prenant soin de bien emprisonner son esprit vengeur (« Muisak ») à l'intérieur. Parfois, afin d'éviter de futurs problèmes, la famille de l'adversaire est également assassinée et leur têtes sont réduites. Ces pratiques tribales violentes ont effrayé les conquistadors lors de leur découverte des Jivaros[1]. De violents affrontements ont eu lieu entre les Shuars et les espagnols. Les dizaines de milliers de têtes espagnoles qui furent réduites en un demi-siècle de combats contribuèrent à alimenter la légende des « sanguinaires» Shuars réducteurs de têtes.

Les Shuars croient à trois esprits fondamentaux :

  • Arutam - littéralement « vision » ou « pouvoir », il protège les hommes d'une mort violente mais également d'assurer leur survie.
  • Muisak - l'esprit vengeur, il fait surface lorsque une personne protégée par Arutam est assassinée.
  • Wakani - inné à chaque humain, c'est lui qui survit après la mort sous forme de « vapeur ».

[modifier] Fabrication

Tête réduite des Shuars du Perou (Musée d'Amérique, Madrid).
Tête réduite des Shuars du Perou (Musée d'Amérique, Madrid).

La fabrication d'une tsantza est une tâche qui prend près d'une semaine.

Immédiatement après l'assassinat, la victime est soigneusement décapitée selon une technique particulière. Le tueur découpe la peau autour du buste de la victime avant de détacher la tête et de s'enfuir avec son trophée. Une fois en sécurité, l'assassin entaille la nuque et le cou de la tête afin de pouvoir facilement en ôter le crâne. Ce dernier est ensuite jeté à la rivière en tant que présent à la divinité pani, le dieu anaconda.

Les yeux sont ensuite soigneusement cousus et la bouche est sertie à l'aide de pitons en bois, les choutas. Le « masque » est mis à tremper dans une décoction de baies durant 1h30 à 2h au maximum, une prolongation de ce traitement pouvant entraîner la chute des cheveux. À l'issue de cette étape, la peau est sombre et caoutchouteuse, et la taille de la tête a été réduite au tiers de sa taille originelle.

Le « masque » est retourné afin de pouvoir racler au couteau la chair encore éventuellement accrochée à la peau, puis il est remis à l'endroit et les incisions du cou sont cousues.

L'opération finale consiste à remplir la tsantza avec des pierres chauffées. Les pierres sont insérées une à une par le nez et continuellement tournées afin d'éviter les brûlures. Lorsque l'on ne peut plus insérer la moindre pierre, du sable est introduit afin de combler les espaces (cette étape devra être reconduite régulièrement). Des pierres chauffées sont également appliquées sur l'extérieur du visage afin de lui conférer une certaine étanchéité et de pouvoir modeler la peau. Les cheveux superflus sont brûlés et la tsantza est accrochée au dessus d'un feu afin qu'elle soit solidifiée et noircie. Une machette chauffée est appliquée sur les lèvres pour les sécher, après quoi les trois choutas sont retirés et remplacés par des ficelles.

Lors du dernier jour de la semaine de fabrication, la tête est emportée en forêt pour subir sa première célébration : un trou est effectué sur le haut du crâne, un double kamai est inséré et fixé à un chouta à l'intérieur de la tête, ainsi, la tsantza pourra être portée autour du cou du guerrier, lui apportant son pouvoir personnel, son arutam.

Une attention particulière est portée à garder l'apparence originelle du visage de la victime. Les coutures ont pour but d'emprisonner le « Muisak » à l'intérieur de la tsantza.

[modifier] Commerce

Lorsque les affrontements avec les Espagnols cessèrent, de nombreux occidentaux comprirent qu'ils pourraient tirer profit de ces objets tribaux. Une quantité extraordinaire de fausses tsantzas furent mises sur le marché. Ces têtes réduites étaient réalisées principalement à partir de singes, mais également à partir de têtes humaines. De nombreux meurtres ont en effet été commis afin de réaliser des tsantzas.

[modifier] Notes

  1. Le terme de jivaros a été introduit par les explorateurs espagnols et signifie « sauvage » ou « barbare ».

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

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[modifier] Bibliographie

  • Jean-Patrick Costa, Indiens Jivaros – Histoire d'une mort programmée, Éditions du rocher, 1997.