Souffle cardiaque

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Un souffle cardiaque est un bruit anormal perçu à l'auscultation cardiaque et le témoin d'un écoulement turbulent du sang au travers d'une valve cardiaque.

Le plus souvent, ces turbulences résultent de rétrécissement ou de fuite (reflux de sang) au niveau des valves cardiaques.

On oppose les souffles organiques, liés à une lésion d'une valve cardiaque, aux souffles anorganiques (ou fonctionnels) qui correspondent à une augmentation du débit cardiaque ou à un dysfonctionnement du muscle cardiaque responsable de petites turbulences.

Les souffles cardiaques peuvent être classés selon différentes caractéristiques : localisation (qui correspond au foyer d'auscultation où ils sont le mieux perçus), position par rapport aux bruits normaux du cœur, timbre, irradiations...

Les souffles cardiaques minimes sont fréquemment retrouvés chez les enfants, la plupart étant anorganiques.

Dans cet article, les souffles cardiaques ont été classés selon leur position par rapport aux bruits cardiaques normaux (souffles systoliques et souffles diastoliques).

Sommaire

[modifier] Caractéristiques des souffles cardiaques

[modifier] Localisation

La localisation d'un souffle cardiaque sur le thorax lors de l'auscultation permet de localiser l'origine du souffle. Elle correspond au foyer d'auscultation où il est le mieux entendu (partant du principe que là où la turbulence sanguine est maximum, le souffle l'est également).

C'est ainsi que les souffles ayant pour origine :

[modifier] Position temporelle

Le moment où est entendu un souffle cardiaque correspond à sa position par rapport au cycle cardiaque, c'est-à-dire, lors de l'auscultation, par rapport aux bruits normaux du cœur (premier bruit cardiaque (B1, fermeture des valves auriculo-ventriculaires) et deuxième bruit cardiaque (B2, fermeture des valves sigmoïdes aortiques et pulmonaires)).

Icône de détail Article détaillé : Auscultation cardiaque.

Un souffle est dit systolique s'il est perçu entre le premier (B1) et le deuxième (B2) bruit du cœur, c'est-à-dire s'il survient au cours de la systole cardiaque lorsque les ventricules se contractent et éjectent le sang vers l'aorte et l'artère pulmonaire. Un souffle est dit diastolique s'il est perçu entre B2 et B1, c'est-à-dire au cours de la diastole cardiaque, lorsque les ventricules se remplissent de sang venant des oreillettes.

Selon sa position par rapport à la systole ou la diastole, le souffle sera proto-systolique ou diastolique s'il est perçu au début du cycle cardiaque correspondant, méso-systolique ou diastolique s'il est perçu au milieu du cycle cardiaque correspondant, et télé-systolique diastolique s'il est perçu à la fin du cycle cardiaque correspondant. Un souffle est dit holo-systolique ou diastolique s'il est perçu sur la totalité de la partie du cycle cardiaque correspondant.

[modifier] Timbre

Le timbre (ou tonalité) d'un souffle va dépendre du gradient (de la différence) de pression qui le génère. C'est un paramètre subjectif avec une terminologie qui lui est propre. On parlera ainsi d'un souffle râpeux, humé, aspiratif, musical...
Les souffles aigus sont générés par de fortes différences de pressions alors que les souffles plus graves sont générés par des différences de pressions plus faibles.

[modifier] Irradiation

L'irradiation d'un souffle correspond au chemin que prend le souffle à partir de son point de départ. Il indique approximativement la direction du flux sanguin. Son intensité est, par définition, plus faible, qu'à son point de départ.

[modifier] Intensité

L'intensité d'un souffle cardiaque est exprimée en sixième selon la classification suivante :

1/6e Très faible, nécessite le silence dans la piece
2/6e Faible mais facilement perçu avec le stéthoscope
3/6e Moyen, bruit assez fort mais nécessitant le stethoscope
4/6e Fort avec frémissement, entendu avec uniquement le rebord du stéthoscope posé sur le thorax
5/6e Très fort, entendu avec le stéthoscope à 3mm de distance du thorax
6/6e Entendu à distance du thorax sans stethoscope

L'intensité du souffle est souvent en rapport avec l'importance d'une atteinte cardiaque, mais pas toujours.

[modifier] Eléments pouvant modifier les caractéristiques d'un souffle cardiaque

De multiples éléments peuvent entraîner une modification dans l'auscultation d'un souffle, permettant d'aider au diagnostic étiologique  :

[modifier] Bilan d'un souffle cardiaque

Dans la majorité des cas, une bonne auscultation cardiaque permet d'étiqueter l'origine du souffle et d'en déterminer le caractère organique ou fonctionnel. Cependant, des examens complémentaires peuvent être réalisés pour préciser ce diagnostic.
Un électrocardiogramme sera réalisé afin de rechercher des signes d'hypertrophie ventriculaire gauche (pouvant témoigner d'un rétrécissement aortique), ou des signes de cardiopathie hypertrophique.
Une échographie cardiaque permettra d'étudier la structure des valves cardiaques, et la structure myocardique afin d'étudier le retentissement sur le muscle cardiaque, le doppler permettra d'étudier les flux sanguins.

[modifier] Les souffles systoliques

Un souffle systolique débute après le premier bruit du cœur (B1) et fini avant le deuxième bruit (B2).
Les causes les plus fréquentes sont le rétrécissement aortique, l'insuffisance mitrale, la communication inter-ventriculaire.

On distingue généralement les souffles mésosystoliques (intensité maximale au milieu de la systole, séparé clairement de B1 et de B2 par un espace libre), dit éjectionnels, secondaire à un obstacle sur l'éjection du sang, et les souffles holosystoliques (constant sur toute la systole, sans espace libre avec les bruits), dit de régurgitation, dont la cause première est l'insuffisance mitrale.

[modifier] Obstacle à l'éjection du flux sanguin au travers les valves sigmoïdes aortiques

Une sténose valvulaire aortique peut produire un souffle typiquement mésosystolique rude et râpeux, perçu sur le rebord du deuxième espace intercostal gauche et irradiant vers les vaisseaux du cou (artères carotides). Les causes les plus fréquentes sont l'apparition de calcifications des valves aortiques liées au vieillissement et, plus rarement, la bicuspidie (anomalie congénitale où la valve aortique est composée de deux feuillets au lieu de trois). Dans la bicuspidie, l'irradiation est faible ou inexistante. L'intensité du souffle du rétrécissement aortique diminue en position debout. Le B2 peut être conservé ou aboli suivant le mécanisme ou la sévérité de la maladie.

Icône de détail Article détaillé : Rétrécissement aortique.

Dans la cardiomyopathie hypertrophique avec obstruction, l'obstacle à l'éjection est situé sous l'orifice valvulaire qui est normal. Le souffle est mieux perçu sur le bord gauche du sternum. Ce souffle augmente en intensité en position debout et au cours de la manœuvre de Valsalva. Typiquement le B2 est conservé.

Icône de détail Article détaillé : Cardiomyopathie hypertrophique.

[modifier] Obstacle à l'éjection du flux sanguin au travers les valves sigmoïdes pulmonaires

On parle alors de rétrécissement ou de sténose pulmonaire. Le souffle est mésosystolique, entendu au niveau du deuxième espace intercostal gauche, et irradie dans l'espace inter-scapulo-vertébral accompagné d'un B2 diminué et d'un frémissement (thrill).

[modifier] Insuffisance mitrale

En cas d'inefficacité de la valve mitrale, la pression dans le ventricule gauche devient plus importante que dans l'oreillette gauche au début de la contraction isovolumétrique, qui correspond à la fermeture de la valve mitrale (B1). La différence de pression augmente d'un bout à l'autre de la systole et peut même perdurer après la fermeture des valves aortiques, expliquant pourquoi ce souffle peut parfois "noyer" le son du B2.

Le souffle est le plus souvent holosystolique, mais dans les formes minimes, il peut n'être que télésystolique. Il est le mieux perçu à la pointe du cœur, il irradie dans l'aisselle, il est doux en jet de vapeur. Il est parfois précédé d'un clic. A noter qu'il peut également être holosystolique (être entendu pendant toute la systole).

L'insuffisance mitrale peut être fonctionnelle, c'est-à-dire qu'il n'existe pas de lésion au niveau de la valve mitrale. Le plus fréquent est le souffle d'insuffisance mitrale fonctionnel observé dans la dilatation du ventricule gauche.

Dans le |prolapsus de la valve mitrale, la valve mitrale est épaissie, et les cordages sont allongées. Lors de la fermeture de la valve, l'une des valvules recule trop et passe en arrière de sa voisine. Si le prolapsus devient suffisamment important, une régurgitation mitrale peut survenir.

Toute manœuvre visant à diminuer le volume ventriculaire gauche (station debout, assise, manœuvre de Valsalva) peut augmenter la durée du souffle et diminuer son intensité. Au contraire, toute manœuvre visant à augmenter le volume ventriculaire gauche (s'accroupir, surrélévation des jambes, serrer les mains) diminue sa durée et augmente son intensité.

[modifier] Insuffisance tricuspide

Ce souffle est télé- ou holosystolique, généralement mieux perçu au niveau du rebord gauche du sternum et maximum au niveau de l'appendice xiphoïde. Son intensité est typiquement majorée lors de l'inspiration (signe de Rivero Carvallo) par augmentation du retour veineux.

Les causes des insuffisances tricuspides sont multiples. Une forme primitive est moins fréquente et peut être due à une endocardite bactérienne, un infarctus du ventricule droit, lors de l'anomalie d'Ebstein (cardiopathie congénitale).
Un prolapsus de la valve tricuspide peut également survenir et être responsable d'un souffle télésystolique. Ce prolapsus est inhabituel sans prolapsus mitral concomittent.

[modifier] Communication inter-ventriculaire

La Communication inter-ventriculaire correspond à un défect dans la paroi ventriculaire, entraînant un passage direct de sang entre le ventricule droit et le ventricule gauche (shunt). Le souffle est holosystolique, irradiant en "rayon de roue". Il est mieux perçu au niveau des troisième et quatrième espaces intercostaux gauches.

Typiquement, un souffle intense est en faveur d'une communication peu importante alors qu'un shunt massif peut donner des anomalies très discrètes à l'ausculation.

Icône de détail Article détaillé : Communication inter-ventriculaire.

[modifier] Autres

  • Dilatation de la racine de l'aorte ou de l'artère pulmonaire : peut produire une bruit mésosystolique à l'éjection du sang, ainsi qu'un dédoublement du B2. Il n'y a pas d'anomalies hémodynamiques.
  • Augmentation du flux sanguin au travers les valves sigmoïdes qui peut survenir dans diverses situations telle l'anémie, la grossesse, la thyrotoxicose.

[modifier] Les souffles diastoliques

Les souffles diastoliques débutent après le deuxième bruit cardiaque (avec la fermeture des valvules sigmoïdes) et se terminent avant le premier bruit. Ils sont donc perçus pendant la diastole cardiaque.
Les principaux sont l'insuffisance aortique, l'insuffisance pulmonaire, la sténose mitrale.

Ils sont souvent moins intenses que les souffles systoliques et plus difficiles à détecter.

[modifier] Insuffisance aortique

Le souffle est décrit comme doux, lointain, humé, aspiratif. Il est de faible intensité. Il est mieux perçu au foyer aortique et au niveau du rebord gauche du sternum, mieux entendu en position assise et penchée en avant, en expiration forcée. Il irradie vers la pointe du cœur.
Il existe de plus un clic d'éjection protosystolique et un bruit mésosystolique sec, lié à la distension rapide et brutale de l'aorte. Il existe également un rétrécissement mitral fonctionnel par refoulement des valves sous l'effet du flux de régurgitation (appelé roulement de Flint) et perçu à l'apex.
A noter que dans les insuffisances aortiques importantes, le souffle peut être holodiastolique.

[modifier] Insuffisance pulmonaire

Elle est le plus souvent liée à une hypertension pulmonaire (souffle de Graham Steel) et perçu au deuxième espace intercostal gauche. Son intensité peut augmenter au cours de l'inspiration.

[modifier] Sténose de l'artère interventriculaire antérieure

Ce souffle, également appelé souffle de Dock, est similaire au souffle de l'insuffisance aortique et est le mieux perçu au niveau des deuxième et troisième espaces intercostaux gauche. Sa présence est cependant très rare.

[modifier] Sténose mitrale

A noter qu'une terminologie rigoureuse ne parle pas de souffle diastolique lors d'un rétrécissement mitral mais d'un roulement diastolique. Cette anomalie auscultatoire est difficile à détecter, car très souvent de faible intensité. Idéalement, il est entendu lorsque le sujet est allongé sur le côté gauche (décubitus latéral gauche).

En cas de sténose (ou rétrécissement) mitrale, il est perçu un éclat de B1 à l'apex cardiaque. Le long du rebord gauche du sternum, est perçu un claquement (claquement d'ouverture mitrale, entendu après B2 et marquant la fin de la relaxation isométrique). Il inaugure le roulement diastolique qui est entendu à la pointe, dans l'aisselle et en décubitus latéral gauche, dont le timbre est grave et grondant. Il se renforce en télédiastole, dû à la contraction auriculaire.
Ce souffle peut être accompagné d'un éclat de B2 au foyer pulmonaire en cas d'hypertension pulmonaire et d'une insuffisance tricuspidienne fonctionnelle en cas de dilatation du ventricule droit.

[modifier] Sténose tricuspide

Le souffle est le mieux entendu le long du rebord gauche du sternum. Il augmente en intensité au cours de l'inspiration. La sténose tricuspide est souvent associée à une sténose mitrale et rarement isolée. Il s'agit d'une atteinte rare.

[modifier] Myxome auriculaire

Tumeurs bénignes cardiaques, les myxomes gauches sont bien plus fréquents que les myxomes développés au dépens du cœur droit. Ils peuvent entraîner une obstruction au niveau de la valve mitrale induisant un souffle similaire à celui de la sténose mitrale.

[modifier] Autres

Une augmentation du flux sanguin traversant les valves auriculo-ventriculaires (mitrale pour le cœur gauche et tricuspide pour le cœur droit) peut également produire un souffle mésodiastolique.

[modifier] Souffles continus

Ces souffles sont secondaires aux turbulences du flux sanguin d'une cavité cardiaque à haute pression vers un système de pression inférieure. Par exemple, en cas de persistance du canal artériel (connexion anormale entre l'aorte et l'artère pulmonaire qui se ferme normalement au cours de l'enfance), où la pression aortique est plus élevée que la pression pulmonaire.

[modifier] Notes et références

  • (en) Cet article est issu d'une traduction de l'article anglais : "Heart murmur".

[modifier] Voir aussi