Présidence française de l'Union européenne

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La République française assure la présidence tournante du Conseil européen au second semestre 2008, du premier juillet au 31 décembre 2008. D'après les dispositions du Traité de Lisbonne c'est la dernière fois dans l'histoire que la France assure cette fonction. Dès 2009 un président stable sera nommé pour deux ans et demi par les états membres pour représenter l'Union européenne et présider les Conseils européens. La Slovénie assure la présidence du Conseil européen de janvier à juin 2008; c'est la République tchèque qui prendra la relève de la France en janvier 2009.

L'Union européenne doit être dotée en 2009 d'un président du Conseil européen stable
L'Union européenne doit être dotée en 2009 d'un président du Conseil européen stable
La France assure la présidence de juillet à décembre 2008
La France assure la présidence de juillet à décembre 2008

Sommaire

[modifier] Une politique européenne offensive mais brouillée

Malgré son dynamisme et ses ambitions affichées, le président Nicolas Sarkozy n'est pas parvenu à imposer une vision européenne forte à ses partenaires avant la présidence française.
Malgré son dynamisme et ses ambitions affichées, le président Nicolas Sarkozy n'est pas parvenu à imposer une vision européenne forte à ses partenaires avant la présidence française.

[modifier] Le traité de Lisbonne : la question institutionnelle résolue

Des gestes forts en direction de l'Europe sont faits par le tout juste élu Nicolas Sarkozy : le jour de son investiture il se rend à Berlin pour s'entretenir avec la chancelière allemande Angela Merkel et le 14 juillet 2007, aux côtés de l'émir du Quatar, c'est José Sócrates, le Premier ministre du Portugal, président du Conseil européen, et son compatriote M Barroso de la Commission qui sont à l'honneur[1]. Il rompt avec les relations peu amènes qu'entretenaient Jacques Chirac et la Commission européenne. Le nouveau président français montre de réels talents de négociateur pour faire accepter son idée de traité simplifié qui devient le traité de Lisbonne pour remplacer la défunte Constitution européenne, en particulier avec la Pologne dont les dirigeants se montrent particulièrement intransigeants. La résolution de l'Affaire des infirmières bulgares grâce à l'action déterminée du Président français, après des années d'enlisement, est déjà un premier signal fort à destination d'une Europe de l'Est, qui s'est sentie humiliée par les propos de Jacques Chirac en 2003. Ce dernier réagit à leur promptitude à soutenir les États-Unis pour la guerre en Irak sans aucune concertation européenne, en déclarant qu'ils « avaient manqué une bonne occasion de se taire ».

[modifier] Le rapprochement avec les pays d'Europe de l'Est après la brouille chiraquienne

Les origines hongroises de Nicolas Sarkozy et sa volonté de coopérer plus étroitement avec les États-Unis lui assure une côte d'amour en Europe de l'est dès son élection. Il clame sa volonté de travailler avec tout le monde, et en réponse à la formule de Jacques Chirac déclare aux pays est-européens « que personne ne leur demande de se taire ». Il joue un rôle de médiateur lors du conflit entretenue par les nationalistes polonais contre l'Allemagne et la personne d'Angela Merkel en 2007. Il veut donner aux Ukrainiens le soutien de la France dans leur processus de rapprochement avec l'Union européenne[2]. Pour l'Espagne, il s'inscrit dans la lignée de Jacques Chirac qui avait accompagné Zapatero pour ses premiers pas sur la scène internationale, en travaillant à son tour étroitement avec ce pays longtemps tenu à l'égard du directoire franco-allemand de l'Europe : coopération dans la lutte contre ETA mais aussi dans le domaine communautaire et pour l'Union méditerranéenne / Union pour la Méditerranée .

[modifier] Les inquiétudes des capitales européennes sur la vision européenne de Nicolas Sarkozy

Malgré toutes les priorités affichées et toutes les initiatives du nouveau président français, ses partenaires européens ne lui trouvent pas de véritable vision européenne. L'affaire de l'Union méditerranéenne / Union pour la Méditerranée a généré des crispations intenses outre-rhin et assombrit la coopération franco-allemande. Malgré la présence active de Jean-Pierre Jouyet secrétaire d'état aux affaires européennes, dans les couloirs des institutions européennes, la figure de Henri Guaino, souverainiste à l'origine du projet d'UM / UPM a concentré toutes les critiques, en Europe et en France. On lui attribue la paternité des discours jugés démagogiques du président Sarkozy qui remettent en cause l'indépendance de la Banque centrale européenne. Le magazine eurocitoyen Le Taurillon voit la patte de Henri Guaino derrière les propos de Nicolas Sarkozy sur l'euro fort, les déficits publics et l'Union méditerranéenne[3]; et Le Taurillon de réclamer de la droite française qu'elle "fixe une ligne cohérente en matière de politique européenne !". Le Monde parle aussi pour la politique européenne de Nicolas Sarkozy d'"ambitions européennes parasitées par des initiatives intempestives"[4].

La proximité de Nicolas Sarkozy avec Tony Blair, ancien premier ministre de l'Angleterre, qui a mené continuellement une politique anti-européenne, est aussi vue d'un mauvais oeil dans les capitales européennes. Tony Blair, fort d'un hypothétique soutien de Nicolas Sarkozy, a tenté de s'imposer comme candidat pour le poste de premier président du Conseil européen[5], vaine tentative, écourtée par une levée de bouclier de la part des autres capitales européennes [6].

[modifier] L'influence française dans les institutions européennes

 Jean-Claude Trichet président de la BCE est fréquemment attaqué par la France pour la politique d'indépendance de la Banque centrale européenne
Jean-Claude Trichet président de la BCE est fréquemment attaqué par la France pour la politique d'indépendance de la Banque centrale européenne

L'influence française sur les institutions européennes est bien évidemment traditionnellement très forte[7] : le fonctionnement même de l'administration européenne est calqué sur le modèle administratif français. Le couple que la France forme avec l'Allemagne a permis à l'Europe communautaire de se construire et de se stabliser. Mais les élargissements successifs de la communauté européenne, et notamment celui de 2004 ont entrainé un effet de dilution de l'influence française en Europe[8] avec un rééquilibrage du poids des états au sein des institutions (un seul commissaire, voix au sein du Conseil européen, nombre de députés européens, nombre de fonctionnaires européens). Le récent rejet de la Constitution européenne par les Français a également écornée l'image de la France. Les attaques répétées de Jacques Chirac contre la Commission européenne ont bien évidemment été très mal vues au sein de l'administration communautaire.

Néanmoins, comme le note le journal Le Monde[9], les eurocrates français sont présents et très influents : six directeurs généraux et le secrétaire général adjoint de la Commission, le président de la Banque centrale européenne souvent en conflit avec son pays d'origine, le président du Comité militaire de l'Union européenne, le secrétaire général adjoint du Conseil européen, le président du Comité des régions, le président de la Cour européenne des droits de l'homme et le président de l'UNICE.

[modifier] Les priorités de la France pour la Présidence : "une présidence citoyenne et européenne"(Jean-Pierre Jouyet)

« La France ne travaillera pas pour elle, elle travaillera pour l'Europe. Parce que le devoir d'une présidence européenne c'est de travailler pour l'Europe pas de travailler pour le pays qui vous permet d'exercer la présidence de l'Europe[10]. »

(Nicolas Sarkozy lors de la remise du prix Charlemagne 2008 à la Chancelière fédérale d'Allemagne Angela Merkel à Aix-la-Chapelle )

[modifier] L'Europe de la défense

La politique européenne de la France en matière de défense a toujours été de favoriser l'émergence d'une force de coopération militaire européenne indépendante des États-Unis. La tactique a néanmoins changée avec l'arrivée de Nicolas Sarkozy : il s'agit de donner satisfaction aux États-Unis (envoie de troupes françaises en Afghanistan, retour dans les structures intégrées de l'OTAN, rapprochement politique avec l'Angleterre) pour que ceux-ci usent de leur influence en matière militaire sur les autres pays européens, traditionnellement portés à se reposer sur l'allié d'outre-atlantique. Cette politique est taxée d'atlantiste en France; néanmoins cette méthode se révèle plus constructive que l'opposition frontale aux États-Unis pour certains[11].

Les Coulisses de Bruxelles [12] évoquent des négociations en cours entre Londres et Paris et un projet français de force aéronavale commune.

[modifier] La politique d'immigration (« La gestion globale et concertée des migrations »)

La question de l'immigration est une question importante pour le président Sarkozy sur le plan de la politique intérieure. Cette question est aussi importante pour des pays comme l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne qui connaissent une forte immigration clandestine. Une politique européenne concertée sur les flux migratoire doit prendre en compte, selon la France, les pays de la rive sud de la Méditerranée. Brice Hortefeux, ministre français en charge de l'immigration veut discuter avec les partenaires européens d'un Pacte de l'immigration incluant le refus des régularisations massives et l'harmonisation des régimes d'asile[13].

[modifier] La politique de l'énergie et du développement durable

Devant les difficultés des ministres européens de l'Énergie à s'entendre, la France doit trouver un accord sur la libéralisation du secteur de l'énergie[14].

[modifier] L'Union méditerranéenne / Union pour la Méditerranée

Ce projet français, lancé sans aucune concertation avec les partenaires européens non-méditerranéens de la France, a parasité la préparation de la Présidence française.

[modifier] La politique agricole commune et son avenir

La politique agricole commune (PAC) a toujours été une priorité politique française en matière de construction européenne pour des raisons de politique intérieure et d'organisation du marché commun. Elle représente le seul versant véritablement abouti de l'Europe organisée face à la dynamique libérale et aussi les limites d'une politique européenne véritablement volontariste : les justifications de la PAC sont peut-être plus politiques qu'économique pour ses détracteurs[15].

[modifier] Rendre l'Europe plus visible et accessible aux citoyens

Cet objectif est déjà celui de la Commission Barroso, et a eu des succès inégaux jusqu'à aujourd'hui. La Présidence française prévoit un nombre important de colloques, de séminaires et de conférences qui vont se dérouler un peu partout en France en 2008 pour sensibiliser l'opinion aux enjeux européens.

[modifier] La nomination des nouveaux dirigeants de l'UE pour 2009

Après l'intermède Tony Blair (voir plus haut 1.3), ce sont l'actuel premier ministre du Luxembourg et président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, et l'actuel président de la Commission européenne, Jose Manuel Barroso, qui sont favoris pour occuper en 2009 respectivement le poste de premier président du Conseil européen et de nouveau président de la Commission[16]. Ce sont deux ténors de la droite européenne : la nouvelle répartition des postes dirigeants en 2009 devrait donc être à la faveur de l'actuel Haut représentant pour la politique étrangère Javier Solana qui est un socialiste européen et qui a donc des chances de devenir le ministre des affaires étrangères de l'Union. Nicolas Sarkozy veut que cette question des postes dirigeants soit réglée à la fin de la présidence française.

[modifier] Notes et références

  1. Sarkozy ose l'Europe Les Coulisses de Bruxelles, 14 juillet 2007
  2. "La France regarde vers l'Est et plaide pour l'Ukraine en Europe", Le Monde, Paris, 30 avril 2008
  3. Henri Guaino, le conseiller de l'ombre de Sarkozy qui exaspère l'EuropeLe Taurillon, magazine eurocitoyen, 2 mars 2008
  4. Des ambitions européennes parasitées par des initiatives intempestivesLe Monde, 5 mai 2008
  5. Tir de barrage français contre Tony Blair Les Coulisses de Bruxelles, 16 janvier 2008
  6. L'arrière-garde européenne privée de poste ? Les Coulisses de Bruxelles, 9 avril 2008
  7. Rapport au Parlement français sur la présence et l'influence de la France dans les institutions européennesDélégation de l'Assemblée nationale pour l'UE, 12 mai 2004
  8. Rapport au Parlement français sur la présence et l'influence de la France dans les institutions européennesDélégation de l'Assemblée nationale pour l'UE, 12 mai 2004
  9. "Le sarkozysme a-t-il conquis Bruxelles?" Le Monde, Paris, 18 octobre 2007
  10. Discours de Nicolas Sarkozy lors de la remise du prix Charlemagne 2008 à Angela Merkel Présidence de la république française
  11. L'anti-atlantisme français : le point de vue d'Ezra Suleiman Le Figaro, 30 octobre 2007
  12. L'Elysée vote Juncker et Barroso pour diriger l'Union-"La défense" Les Coulisses de Bruxelles, Bruxelles, 5 mai 2008
  13. Les priorités de la Présidence français Toute l'Europe.fr
  14. "Ce que l'UE attend de la Présidence française" par Graham Watson, président du groupe des eurodéputés libéraux Le Figaro, Paris, 23 avril 2008
  15. "Les réalisations économiques et sociales : Europe libérale et Europe organisée" dans Penser et Construire l'Europe au XXème siècle GUIEU, LE DREAU
  16. Juncker favori pour présider le Conseil européen Le Figaro, Paris, le 5 mai 2008

[modifier] Annexes

[modifier] Liens externes

[modifier] Liens internes

[modifier] Bibliographie

  • "Les défis de la présidence française de l'UE" dans La Revue internationale et stratégique, n° 69, printemps 2008
  • La France dans l'Union européenne, Jacques Guillaume, Belin, 2007
  • "L'influence française au sein du Parlement européen à mi-mandat : quelle stratégie à l'horizon 2009 ?", Thierry Chopin, dans Horizons stratégiques, n° 4, avril 2007