Pigiste

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Un pigiste est un journaliste rémunéré à la tâche (par exemple au nombre de caractères ou de pages pour un rédacteur, à la durée dans l'audiovisuel, au nombre d'images pour un photographe...). Un pigiste peut collaborer à un ou plusieurs médias.

Sommaire

[modifier] En France, le pigiste est un salarié

En général, le pigiste ou freelance n'est pas un salarié et ne bénéficie donc, à ce titre, d'aucun des droits ou avantages sociaux garantis aux salariés. Au Canada, il est un "travailleur autonome", c'est-à-dire quelqu'un qui est payé à l'acte.

En France au contraire, le journaliste pigiste est un salarié au sens de la loi. Il bénéficie en principe des droits correspondants définis par le code du travail et la convention collective des journalistes (congés payés, assurance chômage, retraite, formation professionnelle, treizième mois, droit à la clause de conscience et de cession...). Ce rattachement à un statut de salarié est unique en son genre dans le monde, comme le montre l'enquête de la Fédération internationale des journalistes[1] réalisée en 2003. Cette présomption de contrat de travail du journaliste pigiste est déterminée dans le droit français par l'alinéa adjoint à l'article L. 761-2 du code du travail par la loi n° 74-630 du 4 juillet 1974, dite loi Cressard : « Toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un journaliste professionnel au sens du premier alinéa du présent article est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties. »

Toutefois, ces droits ne sont pas toujours respectés et la jurisprudence est parfois contradictoire.

De plus, qu'ils soient titulaires de la carte de presse ou sans carte, la situation des pigistes français peut être d'une extrême précarité, comme le montrent les nombreux témoignages de signataires de la pétition « Pigistes en colère ».

[modifier] Le désavantage de ne pas être salarié

Au Québec et dans le reste du Canada, le problème est plus criant encore, du fait que le pigiste, parce qu'il n'est pas salarié au sens du Code du travail, ne bénéficie d'aucune des protections acquises au salarié: pas de congés fériés payés, pas d'assurances-accident ou assurances-maladie fournies par certains employeurs, et surtout, pas d'accès à l'assurance-chômage lorsqu'un contrat prend fin. Ceux qui réussissent à obtenir des contrats de quelques semaines ou quelques mois (principalement en recherche télé) obtiennent du coup un salaire fixe pendant une durée déterminée, mais ceux qui ne vivent que de contrats à la pièce (la norme, en presse écrite) n'ont aucune protection légale.

Par ailleurs, en France, au Québec, dans le reste du Canada (ces deux derniers marchés sont très différents), aux États-Unis[1] et dans plusieurs autres pays, le problème est amplifié par le fait que les tarifs de base à la pige n'ont pas augmenté depuis un quart de siècle, parfois plus longtemps encore. Il en résulte une baisse du niveau de vie, qui conduit au départ de plusieurs journalistes pigistes vers des secteurs d'emploi mieux rémunérés (les relations publiques, par exemple).

[modifier] Un problème pour la qualité de l'information?

La progression de la pige dans le secteur des médias soulève, de plus, des questions sur la qualité de l'information: un journaliste qui est payé à la pièce peut plus difficilement suivre des dossiers à long terme; il risque de faire des sujets superficiels, parce que payants, de préférence à des enquêtes approfondies; et il est davantage soumis à l'arbitraire des patrons, ce qui devient encore plus épineux à mesure que la concentration de la presse progresse.

« Dans les pays où de nombreux journalistes sont employés dans le cadre de contrats à durée déterminée renouvelables indéfiniment, les réponses ne dissimulent pas que les journalistes sont soumis à des pressions pour que leurs articles soient moins acerbes, plus commerciaux et laissent entendre que les chances de renouvellement de leur contrat pourraient être en danger », lit-on dans une étude de la Fédération internationale des journalistes publiée en 2006.[2]

Ceux qui voient dans le journaliste pigiste un simple entrepreneur semblable aux autres le réduisent à un acteur économique qui n'a qu'à négocier pour améliorer ses conditions de travail. Cette vision est particulièrement populaire chez ceux qui sortent des universités. Mais cette vision fait fi de la réalité socio-économique (concentration de la presse, tarifs gelés, absence de protections sociales, etc.).[3] Elle a par ailleurs pour effet pervers de contribuer au recul de la qualité de l'information,[4] puisque si quelques individus, en négociant serré, parviennent temporairement à améliorer leurs conditions de travail, ces améliorations ne sont pas projetées sur le reste de la profession. [5]

[modifier] Références

  1. National Writers Union, "Reports on Pay Rates for Freelance Journalists", juillet 2001
  2. Fédération internationale des journalistes, "Etude sur le travail précaire dans le secteur des médias", 2006
  3. Jean-Sébastien Marsan, "Devenir son propre patron. Mythes et réalités du nouveau travail autonome", Montréal, Éditions Écosociété, 2001, 147 p.
  4. Alain Accardo et al., Journalistes précaires. Paris, Le Mascaret, 1998, 411 p. Réédité et complété d'une seconde enquête parue trois ans plus tôt in Alain Accardo et al., Journalistes précaires, journalistes au quotidien, Agone, Marseille, 2007. ISBN 978-2-7489-0064-4
  5. Pascal Lapointe et Christiane Dupont, Les nouveaux journalistes: le guide. Entre précarité et indépendance. Québec, PUL, 2006.

[modifier] Liens externes

wikt:

Voir « pigiste » sur le Wiktionnaire.