Paŭlo Paal (Verdaj Donkiĥotoj)

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Paŭlo Paal (Verdaj Donkiĥoj) (Paul Paal (Les Don Quichottes verts)) est un roman originalement écrit en espéranto par Julio Baghy sorti en 1933.

Sommaire

[modifier] Résumé

Un jeune paysan très pauvre prénommé « Paul », est envoyé dans un sanatorium aux frais de l'État : Les travaux de la terre, le tabac et un maigre régime alimentaire l'ont épuisé... Il a peu d'instruction et les autres malades se moquent de sa naïveté... Lors d'une promenade, il fait la connaissance d'une jeune aveugle, Liza, qui se met en tête de le tirer de sa condition. Elle l'incite à lire, apprendre et se développer... Paul met alors son séjour à profit pour cette nouvelle tâche : il s'exerce à écrire, apprend le braille, et lit... Remis sur pieds, il retourne à la campagne, où les villageois le regardent avec méfiance : il se sent d'ailleurs lui-même devenu étranger ; seules ses bottes le retiennent encore à la glèbe... Mais il fait la connaissance du tailleur Mihok, qui lui tient des discours au sujet de l'espéranto ; Paul, qui se rappele alors que Liza connaissait cette langue, se laisse convaincre...

Ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.

Un jour, Anika Toth, fille d'un riche paysan manigance un prétexte pour entrer chez Paul, et lui fait une scène en voyant la photo de Liza... Paul n'est pas dupe et se demande ce qu'elle peut bien lui trouver... Lors d'une rencontre d'espéranto organisée chez Liza, Paul et sa bienfaitrice qui se retrouvent seuls face-à-face ne peuvent s'avouer leur amour... Paul rentrant en train chez lui, est accueilli par Anika qui l'enjoint de fuir, les gendarmes étant à sa recherche. Les services secrets pensent aussi qu'un paysan chez qui l'on trouve des livres est plus que suspect... Heureusement Liza, qui a un ministre dans sa famille, intervient en la faveur de Paul... La sortie de prison de Paul lui vaut un regain de sympathie auprès des villageois... Paul demande la main d'Anika, mais le père de cette dernière refuse violemment... Anika décide de vivre tout de même avec Paul, qui met toute son énergie dans son travail et dans ses activités d'espérantophone... Ce dernier obtient finalement un poste subalterne dans une école... Mais le fossé se creuse avec Anika qui ne peut le suivre dans ses activités intellectuelles... Un jour, le père se sentant mourir, veut se réconcilier avec sa fille : Si Paul renonce à ses livres et reprend ses bottes de paysan, elle pourra l'épouser. Ce dernier accepte, non sans regrets... Mais Anika et Paul peuvent enfin vivre ensemble.

[modifier] Commentaires

  • Baghy nous confesse que le modèle de Paul lui dit un jour : « Quelle chance tu as, la paix règne entre ta bibliothèque et ton épouse ! »
  • Selon Marjorie Boulton, ce roman est un peu un vol d'essai ; mais celui d'un balbuzard, pas celui d'un passerau.

[modifier] Des vertus émancipatrices de l'espéranto

Écrite dans un style simple et classique (proche de celui de Ludwik Lejzer Zamenhof), cette histoire relativement brève (une centaine de pages tout au plus) illustre les vertus émancipatrices de l'espéranto.

La critique peut être bon-enfant. Le personnage de Mihok est très attachant, justement parce qu'il représente tous les excès de certains espérantophones trop zélés (Respect du quasi-divin Maître Zamenhof, tendance à appeler tout le monde homfrato (frère humain), clichés abstentionnistes (pas d'alcool, pas de cigarette, pas de viande) et abus de rhétorique sur l'idée interne). Mais l'excessif Mihok est bien forcé de constater que tous les espérantophones ne pensent pas comme lui.

La critique peut aussi être plus directe : Tout les espérantophones des années 1930 n'ont pas été imperméables au racisme ambiant, et dans la Hongrie de cette époque il était possible pour certains de défendre l'espéranto tout en raillant les Juifs ; il était même possible de fonder un club patriotique d'espéranto. Baghy nous laisse un témoignage amer sur la situation, à mettre en parallèle avec les analyses faites par Ulrich Lins dans son ouvrage La Danĝera Lingvo (La Langue dangereuse).

[modifier] De l'émancipation des classes laborieuses

Dans le même temps Baghy se laisse aller à toutes sortes de considérations progressistes - il fait plusieurs fois traiter Paul de sale socialiste - sur la politique, l'imbécillité des lois (en particulier sur le mariage), le peu de secours qu'offre la religion. Le thème général du paysan qui veut s'élever au dessus de la condition de sa classe sociale, et sur la route duquel se dressent toutes sortes de barrières - le devoir de travailler pour se nourrir, la méfiance des gardiens de l'ordre public, le conservatisme de la belle famille, la jalousie de la femme contre les livres - participe totalement à ce courant idéologique.

Il faut reconnaître cependant que l'on n'a pas non plus affaire à un livre de pure propagande communiste, puisque le salut, pour Paul, vient chaque fois de cette fille de bonne famille, Liza, qui ne cesse de l'aiguilloner et de l'aider, même après lui avoir ôté ses derniers espoirs romantiques.