Olivier Basselin

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Olivier Basselin[1], né à Val-de-Vire vers 1400 et mort vers 1450, a été un poète populaire français, regardé comme le fondateur du vaudeville.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Origine

Ce poète normand du début du XVe siècle était foulon de son métier. Ce genre d'industrie occupait encore beaucoup de bras au XIXe siècle dans la ville où naquit Basselin et la tradition précise toujours l’emplacement du moulin-à-foulon qu’il y possédait et dont il vivait. Cette usine, dont les restes subsistent encore, a conservé le nom de Moulin Basselin ; elle se trouve sous le coteau des Cordeliers près du pont de Vaux.

[modifier] Chanson à boire

Basselin qu'on appelait familièrement Bonhomme, comme Jean de La Fontaine, était un Normand bon teint qui aimait le vin, le cidre et les plaisirs de la table. Ce poète, ouvrier comme le fut depuis Adam Billaut, est le premier qui ait composé des chansons de table dans un siècle où on ne connaissait encore que les fabliaux et autres pièces dont l'amour ou la dévotion étaient l'objet.

Ses chansons à boire, genre typiquement français qui connaîtra un développement considérable, sont devenues célèbres sous le nom de « Vaux-de-Vire »[2] dont la corruption a donné naissance au terme moderne de « vaudeville ». Le véritable nom de l'inventeur des Vaux-de-Vire et la preuve de son existence se retrouvent dans les écrits du commencement du XVIe siècle, ainsi que le vrai titre de ses chants joyeux.

[modifier] Existence

Il employait ses loisirs à rimer des chansons naïves. Contrairement à ce qu'ont prétendu certains biographes, il n'était pas illettré, ayant voyagé et sachant le latin. Il eut à souffrir de la guerre de 1450 entre Charles VII et les Anglais, sa fabrique fut ruinée lors du siège de Vire. Plus tard, sa famille, le voyant trop adonné aux divertissements bachiques, le fit mettre en tutelle. Il s'ensuivit un procès que Basselin évoque dans ses chansons :

Bon cidre ôte le souci
D'un procès qui me tempête

Le pauvre foulon se lamente souvent sur le sort réservé aux buveurs :

Hélas que fait un pauvre ivrogne
Il se couche et n'occit personne
Ou bien il dit propos joyeux
Il ne songe point en usure
Et ne fait à personne injure
Buveur d'eau peut-il faire mieux ?

N’attachant que peu de prix à ses chansons, il n’en fit jamais de recueil. Outre des airs à boire et des chansons d’amour, il a créé des chants de guerre contre les Anglais.

On ignore l'époque de sa mort, survenue sans doute vers 1500. Diverses traditions suggèrent que Basselin a été tué les armes à la main par les Anglais vers la fin de l’occupation par ceux-ci de l’occupation de la Normandie, quelque temps avant la bataille de Formigny.

[modifier] Vaux-de-Vire

Bourgueville de Bras, né en 1504 et qui habitait Caen, dit dans ses Antiquités de Neustrie : « C'est de Vire d'où sont procédées les chansons qu'on appelle vaux-de-Vire. » Belleforest, dans sa Cosmographie universelle, André Duchesne, dans ses Antiquités des villes de France et plusieurs autres anciens auteurs, parlent d'Olivier Basselin et de ses vaux-de-Vire. Gilles Ménage dit qu'on doit appeler ces chansons (vaudevires, parce qu'elles furent premièrement chantées au Vau de Vire, nom d'un lieu proche de la ville de Vire. » Dans ses Mélanges tirés d'une grande bibliothèque, le savant et judicieux Paulmy cite une ancienne chanson normande, comme étant le premier de tous les vaudevilles, qu'il faudrait, ajoute-t-il, prononcer vaudevires. Duchesne dit aussi en propres termes : « De Vire ont pris leur origine ces anciennes chansons qu'on appelle communément vaudeville pour vau-de-Vire, desquelles fut auteur un Olivier Basselin, ainsi que l’a remarqué Belleforest. » À ces témoignages bien supérieurs à ceux d'un Chardavoine et de quelques autres auteurs qui ont pensé que vaudeville provenait de voix de ville, ajoutons celui de Vauquelin de la Fresnaye, né dans le voisinage de Vire en 1556 ; voici quelques vers du second chant de son Art poétique :

Anfrie auroit son nom en mémoire laissé,
Et les beaux vaux-de-Vire et mille chansons belles.
Mais les guerres, hélas ! les ont mises à fin,
Si les bons chevaliers d'Olivier Basselin
N'en font à l'avenir ouir quelques nouvelles.
...
Chantant en nos festins, ainsi les vaux-de-Vire,
Qui sentent le bon temps, nous font encore rire.

L'orthographe et la prononciation des vaux-de-Vire se perdirent, ainsi que tant d'autres, pendant les époques demi-barbares du XVIe siècle, grâce à la profession obscure de Basselin, à son éloignement de la capitale et à la destruction des premiers exemplaires imprimés de ses compositions poétiques.

[modifier] Le retour au XVIe siècle

Après avoir longtemps passé de bouche en bouche, les vaux-de-Vire furent recueillis par un compatriote de Basselin, Jean Le Houx, avocat et poète normand, qui classa ces chansons par ordre alphabétique et qui les fit imprimer vers 1576. Il a édité un recueil de chansons qu’il affirmait être l’œuvre d'Olivier Basselin. Il est très vraisemblable que Le Houx était lui-même l’auteur des chansons attribuées à Basselin, comme de celles qu’il a reconnues comme les siennes propres. Le clergé fit totalement détruire la première édition de 1576. Cette première édition a disparu.

La collection de le Houx reparut longtemps après sa mort ; voici le titre de la nouvelle édition : le Livre des chants nouveaux de Vau-de-Vire, par ordre alphabétique, corrigé et augmenté outre la précédente impression, Vire, Jean de Cesne, imprimeur. Cette réimpression est sans date, mais il est certain qu'elle parut vers 1670. On n'en connaît plus que deux exemplaire ; il sont in-12.

Il y a lieu de croire que de Cesne, qui imprimait alors des cantiques et des livrets ascétiques pour les missionnaires du bourg de Flers, voisin de Vire, jaloux d'obtenir leurs bonnes grâces, leur fit le sacrifice de son édition des Vaux-de-Vire, dont il n'échappa à la proscription qu'un très petit nombre d'exemplaires, qui s'est réduit de plus en plus. Il n'est pas étonnant que la première édition de Basselin ait disparu tout entière : on était très voisin de la sanglante année 1572 et l'éditeur le Houx, poursuivi par le fanatisme, fut obligé d'entreprendre le voyage de Rome pour obtenir l'absolution qu'on lui refusait dans son pays ; il la rapporta ainsi que le surnom de Romain, qu'il conserva jusqu'à sa mort. Outre les vaux-de-Vire, il y a lieu de croire que le poète virois avait été très expert à la mer et très habile pilote avant de rentrer dans sa patrie et de s'y livrer à la versification.

C'est lui que la Croix du Maine et du Verdier désignent sous les noms d'Olivier Bisselin et d'Olivier Bosselin et auquel ils attribuent les Tables de la déclinaison, ou esloignement que fait le soleil de la ligne équinocliale, chacun jour des quatre ans, pour prendre la hauteur à l'astrolabe etc., Poitiers, Jehan de Marnef, 1559, in-4°, 7 feuilles d'impression, qui furent mises sous presse longtemps après la mort de l'auteur et réunies à la fin des Voyages de Jean Alphonse. Il n'est pas étonnant que les deux bibliographes que nous venons de citer aient altéré le nom de Basselin, qui l'avait été dans son propre pays et presque de son vivant. Plusieurs de ses vaux-de-Vire confirment cette opinion qu'il avait été homme de mer avant de devenir foulon et poëte : ce sont les 3e, 26e, 55e et 54e.

[modifier] L'oubli

Longtemps oublié, excepté dans sa ville natale, Basselin fut réimprimé en 1811, grâce aux soins actifs et éclairés d'Augustin Asselin, savant distingué et homme de beaucoup de goût, qui était alors sous-préfet à Vire. L'ouvrage, enrichi de notes, mais malheureusement gâté par une orthographe plus surannée que le style, ne fut tiré qu'à 148 exemplaires, dont 24 in-4°. Il ne fut point mis en vente. Cette publication fut un acte patriotique de M. Asselin et de quelques Virois. (cf le Mercure de France du 7 septembre 1811).

Par la suite, une nouvelle édition des Vaux-de-Vire, mieux classée, plus complète que les précédentes et, en outre, enrichie de soixante anciennes chansons normandes, la plupart inédites et d'un choix des Vaux-de-Vire de le Houx parut sous ce titre : les Vaux-de-Vire, Caen, Poisson et Paris, Raynal, 1821, 1 vol. in-8° de 271 p. Comme le texte actuel des Vaux-de-Vire est celui qui avait dû subir quelques corrections lorsque le Houx le fit imprimer vers 1576, pour cette édition, c'est l'orthographe de la fin du XVIe siècle qui est utilisée, telle que la donne le Trésor de la langue française de Nicot. Cette édition est accompagnée de dissertations, de notes et de variantes : elle est la quatrième connue des Vaux-de-Vire d'Olivier Basselin.

Il a été suggéré que le nom de Basselin peut être sans risque associé à quelques chansons préservées à Paris à la Bibliothèque nationale de France et qui ont été éditées en 1866 à Caen par M. Armand Gasté. V. Patard a évoqué cette question dans La Vérité dans la question Olivier Basselin et Jean le Houx à propos du Vau-de-Vire (1897).

[modifier] Notes

  1. Ce nom a été déformé de plusieurs manières : un recueil manuscrit de chansons, à peu près contemporaines de Basselin, l'appelle Vasselin ; il est appelé Olivier Bachelin par Crétin, Bisselin dans la Bibliothèque française de la Croix du Maine et même Bosselin dans celle de Antoine du Verdier.
  2. Genre de chanson créé, comme dit Boileau, par le Français né malin, ce poète, plus remarquable qu'il ne fut longtemps remarqué

[modifier] Publications

  • Augustin Asselin, Les Vaudevires. Poésies du XVe siècle, avec un discours sur sa vie et des notes pour l'explication de quelques anciens mots, Vire, [S.n.], 1811
  • Julien Travers, Les Vaux-de-Vire édités et inédits d’Olivier Basselin ; avec discours préliminaire, choix de notes et variantes des précédens éditeurs, notes nouvelles et glossaire, Paris, Lance, 1833
  • P. L. Jacob, Vaux-de-Vire, suivis d'un choix d'anciens vaux-de-vire et d'anciennes chansons normandes tirés des manuscrits et des imprimés, Paris, Delahays, 1858

[modifier] Sources

  • Armand Gasté, Olivier Basselin et le Vau de vire, Paris, Alphonse Lemerre, 1887
  • Armand Gasté, Étude sur Olivier Basselin et les compagnons du Vau de Vire : leur rôle pendant les guerres anglaises et leurs chansons, Caen, Le Gost-Clérisse, 1866
  • Charles Vergé, Les insurrections populaires en Basse-Normandie, au XVe siècle pendant l’occupation anglaise et la question d’Olivier Basselin, Caen, Delesques, 1889
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