Nome (Égypte antique)

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Localisation

Les nomes[1], au nombre de quarante-deux à l’époque ptolémaïque, sont les circonscriptions administratives de l’Ancienne Égypte. Même si leur nombre, en Basse-Égypte, a varié entre seize, dix-sept et vingt, probablement en raison de la topographie fluctuante du delta, il est resté remarquablement stable en Haute-Égypte, de la Ve dynastie[2] aux Lagides[3].

Sommaire

[modifier] L'organisation des nomes, de l'Ancien au Nouvel Empire

Chaque nome a sa métropole, centre administratif et judiciaire, un ou plusieurs sanctuaires, et son emblème totémique : faucon, crocodile, cobra, gazelle, sycomore, couteau, etc. Cette division de l'Égypte semble remonter à la période prédynastique, où les nomes étaient des territoires tribaux ou claniques autonomes, avant de devenir, sous les premières dynasties, des divisions territoriales administrées par un fonctionnaire.

En effet, les nomarques sont en principe des agents du roi. Ils perçoivent en son nom les impôts destinés au « Double Grenier » ; ils répriment au besoin les troubles dans leur ressort et, en tant que ˁḏ-mr[4], ils veillent à l’entretien des canaux d’irrigation et des digues. À la fin de l’Ancien Empire toutefois, ces grands seigneurs arrivent à s’émanciper, d’abord dans les nomes méridionaux, les plus éloignés de la Résidence[5], et finissent par former d’authentiques dynasties locales agissant en pleine indépendance. Ainsi, Ânkhtyfy, nomarque de Nekhen et d’Edfou au temps d’un Néferkarê de la IXe dynastie hérakléopolitaine, se dit « grand chef » (ḥry-tp ˁ3 [6]) de son fief. Il conclut alliance avec le nomarque d’Éléphantine et guerroie contre ses voisins de Thèbes et de Coptos : bref, en tant que « héros qui n’a pas son pareil »[7], il n’a apparemment de comptes à rendre à personne.

Au Moyen Empire, en revanche, l’autorité royale s’affirme prépondérante, grâce à la réorganisation administrative du pays en trois districts (wˁrt[8]) : celui du Nord, la Basse Égypte, celui du Sud, la Moyenne Égypte, et celui de « la Tête du Sud », la région en amont d’Akhmîm. Chaque wˁrt est gouverné par un « rapporteur » ou wḥmw[9], désignation qui exprime clairement sa subordination au pouvoir central. En même temps, le titre de « grand chef » tombe en désuétude tandis que, dans les villes, des fonctionnaires appointés, les « maires » ou ḥ3ty-ˁ [10], prennent progressivement le relais des princes locaux. Par ailleurs, « la Tête du Sud » est placée sous l’autorité directe du vizir, lequel est représenté sur place par un délégué résidant à Thèbes. Par ces moyens, semble-t-il, la royauté réussit à faire pièce aux velléités d’indépendance des grandes familles seigneuriales.

L’administration provinciale du Nouvel Empire se caractérise par la même centralisation rigoureuse, avec comme corollaire la constitution de plusieurs échelons administratifs : le « directeur des champs »[11] du nome, qui supervise l’entretien du système d’irrigation et l’exploitation des ressources agricoles ; les « préposés de circonscription »[12], placés à la tête des districts ruraux ; et enfin, les héqa hout[13], chargés de l’administration des districts urbains. Ces fonctionnaires d’autorité ont à leur service un vaste personnel subalterne : scribes, conseillers, contrôleurs, appariteurs, contremaîtres, arpenteurs etc. Tout cet appareil administratif, strictement hiérarchisé, est subordonné au gouverneur de la province[14], lequel à son tour doit rendre compte de sa gestion aux « rapporteurs » du vizir, les wḥmw.

[modifier] La survie des nomes à l'époque gréco-romaine

Les Lagides confient l’administration du nome à un stratège, recruté parmi les descendants d’immigrants grecs. Sorte de gouverneur militaire sous les premiers Ptolémées, le stratège assume à partir du -IIe siècle des tâches purement civiles, la gestion fiscale du nome devenant sa principale attribution. Il est assisté d’un scribe royal ou basilicogrammateus, chargé surtout de la tenue du cadastre. Dans une Égypte bureaucratique jusqu’à l’excès, ces fonctionnaires ont à leur service tout un personnel hiérarchisé de percepteurs, de comptables et de secrétaires.

À l’époque romaine, l’Égypte, qui fait partie du patrimonium de l’empereur, est placée sous l’autorité d’un préfet d’ordre équestre, le praefectus Aegypti. Pour faciliter le contrôle et l’exploitation de cette riche province, essentielle pour le ravitaillement de Rome en blé, le gouvernement impérial la divise en trois grandes circonscriptions administratives ou épistratégies, dont chacune regroupe plusieurs nomes ou stratégies, à l’exemple des wˁrt du Moyen Empire : le Bas Pays, l’Heptanomia[15], et la Thébaïde. À la tête de ces divisions territoriales se trouvent des délégués du gouvernement provincial, les épistratèges et les stratèges, choisis et nommés par le préfet, agissant en son nom et place, et responsables devant lui. Le stratège dispose de toute une bureaucratie hiérarchisée, calquée sur les échelons administratifs de la monarchie lagide. Ses attributions sont surtout d’ordre fiscal et judiciaire : il est notamment chargé de la perception des impôts, responsabilité qu’il partage avec le Conseil de la métropole à partir de Septime Sévère, et tient tribunal dans son ressort. Sous Gallien, sa compétence s’étend aussi sur l’annone militaire, dont il assure le recouvrement et la distribution à l’armée stationnée en Égypte.

Ainsi, des premiers Ptolémées au Bas-Empire, le maintien du stratège à travers les siècles atteste l’importance de la fonction, même si ses attributions ont pu être modifiées au gré des besoins administratifs : le stratège est l’homme de confiance du gouvernement à la tête du nome, dont il assure la gestion comme les nomarques de pharaon l’ont fait avant lui.

[modifier] Les nomes de Basse-Égypte

Les nomes de Basse-Égypte
Les nomes de Basse-Égypte
Liste des nomes de la Chapelle Blanche de Sésostris Ier
Liste des nomes de la Chapelle Blanche de Sésostris Ier
Nom égyptien translittéré Métropole à l'époque des Lagides Nom actuel du site
1
Nome de la Muraille blanche
jnbw-ḥḏ
Memphis, anc. mn-nfr
Bedrechein
2
Nome de la Cuisse
ḫm
Létopolis, anc. ḫm
Aousîm
3
Nome de l'Occident
jmntt
j3mw ?
Kôm el-Hisn
4
Nome inférieur de Neith
nt
Naucratis
Kôm Gi'Eif
5
Nome supérieur de Neith
nt
Saïs
Sà el-Hagar
6
Nome du Taureau de la montagne
ḫ3sww
Xoïs
Sakha
7
Nome du Harpon à cordes-côté occidental
wˁ-m-ḥww-gs-jmntj
Métélis
Macîl
8
Nome du Harpon à cordes-côté oriental
wˁ-m-ḥww-gs-j3btj
Pithôm (Hérôonpolis)
Tell el-Maskhoutah
9
Nome d’Andjety
ˁnḏtj
Busiris, anc. pr-wsjr
Abousir
10
Nome du Taureau noir
km-wr
Athribis
Tell-Athrib
11
Nome du Taureau recensé
ḥsbw
Léontopolis
Tell el-Muqdam
12
Nome du Veau divin
ṯb-nṯrt
Sébennytos, anc. ṯb-nṯrt
Semenoûd
13
Nome du Sceptre intact
ḥq3-ˁnḏ
Héliopolis, anc. iwnw
Tell-Hisn
14
Nome du Dressoir oriental
ḫntj-j3btj
Sile
Tell Heboua
15
Nome de l'Ibis
bḥˁ
Hermopolis Parva
El-Ashmunein
16
Nome du Dauphin
ḥ3t-mḥjt
Mendès
Tell el-Rub'a
17
Nome du Trône
sm3-bḥdt
Diospolis parva, anc. jw-jmn
Tell el-Balamoun
18
Nome supérieur de l'Enfant royal
jmt
Bubastis, anc. pr-b3stt
Tell-Bastah
19
Nome inférieur de l'Enfant royal
jmt-pḥ
Tanis, anc. ḏˁnt
Sân el-Hagar
20
Nome de Soped
pr-spdw
Phakusa
Fakus

[modifier] Les nomes de Haute-Égypte

Les nomes de Haute-Égypte
Les nomes de Haute-Égypte
Nom égyptien translittéré Métropole à l'époque des Lagides Nom actuel du site
1
Nome du Pays de Nubie
t3-stj
Éléphantine, anc. 3bw
Gezîret Aswân
2
Nome du Trône d'Horus
wṯst-ḥr
Apollinopolis Magna
Edfou
3
Nome la Forteresse
nḫn
Hiéraconpolis, anc. nḫn
El-Kab
4
Nome du Sceptre
w3st
Pathyris
Gebelein
5
Nome des Deux Divinités
nṯrwj
Coptos, anc. gbtjw
Qeft
6
Nome du Crocodile
iqr
Tentyris, anc. jwnt n nṯrt
Dendérah (Dendera)
7
Nome de la Bât
b3t
Diospolis parva, anc. ḥwt-sḫm
Hou
8
Nome de la Grande Terre
t3-wr
Thinis
Girga
9
Nome de Min
wn mnw
Panopolis, anc. jpw
Akhmîm
10
Nome du Cobra
w3ḏt
Aphroditopolis
Iftèh
11
Nome de Seth
ḥnn
Hypselis
Chotb
12
Nome de la Vipère de montagne
3tft
Hierakon, anc. pr-ˁntj
El-Ataula
13
Nome supérieur du Sycomore
nḏft ḥntt
Lycopolis, anc. s3wt
Assiout
14
Nome inférieur du Sycomore
nḏft pḥt
Cusae
El-Qousiyèh
15
Nome du Lièvre
wnt
Hermopolis Magna, anc. ḫmn
Achmounein
16
Nome de la Gazelle
m3-ḥḏ
mnˁt-ḫwfw
Beni Hassan el-Qadim ?
17
Nome du Chacal
jnpwt
Cynopolis
El-Kaïs
18
Nome du Faucon aux ailes déployées
nmtj
Hipponos, anc. ḥwt-nswt
Kôm el-Ahmar Sawaris
19
Nome des Deux sceptres
w3bwj
Oxyrhynque, anc. pr-mḏd
El-Behnesèh
20
Nome supérieur du Laurier rose
nˁrt ḫntt
Hérakléopolis, anc. ḥwt-nn-nswt
Ahnas
21
Nome inférieur du Laurier rose
nˁrt pḥt
Crocodilopolis-Arsinoé, anc. šdt
Medinet el-Fayum
22
Nome du Couteau
mdnjt
Aphroditopolis, anc. pr-nbt-tp-jḥw
Atfieh

[modifier] Notes

  1. du grec νομος, nomos, qui signifie district ; le terme égyptien correspondant est
    N24
    X1 Z1
    ,sp3t.
  2. La liste la plus ancienne retrouvée actuellement se trouve sur la stèle fausse porte du grand prêtre de Ptah Sabu dit Ibébi qui donne cite six nomes mais la liste la plus complète dont nous disposions pour l'Ancien Empire est celle de la « Chambre du monde » (la Weltkammer des égyptologues allemands) du temple solaire de Niouserrê aujourd'hui exposée à Berlin ; elle indique vingt-deux nomes pour la Haute-Égypte. Pour le Moyen Empire une liste des nomes du pays tout entier se trouve gravée sur le soubassement de la Chapelle Blanche de Sésostris er retrouvée et exposée à Karnak
  3. Listes du temple de Dendérah et du mammisi d’Edfou
  4. K3
    N36
    , lit. « Qui creuse le canal »
  5. Memphis
  6. D2
    D21
    D1
    Z1
    O29
    D36
    G1 A1
  7. « Je suis l’humanité arrivée à sa perfection [lit. le début et la fin de l’humanité], dit-il dans l’inscription autobiographique de sa tombe d’El-Kab, placé à la tête du pays grâce à mon esprit clairvoyant : je suis un héros qui n’a pas son pareil. » Traduit d'après J. Assmann, Ägypten, eine Sinngeschichte, Fischer, 1999, p. 111
  8. G43 D36
    D21
    D56 X1
    N23
  9. F25 G17 G43 A2 A1
  10. F4
    D36
  11. F20 G1 V28 X1
    N23
    Z3
    , jmj-r3 3ḥt
  12. F20 G43 N21
    Z1
    , jmj-r3 w
  13. S38 O6 X1
    O49
    , ḥq3-ḥwt
  14. qui porte désormais le titre de
    F4
    D36
    , ḥ3tj-c
  15. c’est-à-dire les sept nomes qui constituent la Moyenne Égypte

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Références

  • (en) Alan K. Bowman, Egypt After the Pharaohs, Oxford University Press, 1990.

[modifier] Liens externes