Mégléno-roumain

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  Mégléno-roumain
(Limba vlăşească)
 
Parlé en Grèce, République de Macédoine, Roumanie
Région Balkans
Nombre de locuteurs 5000-12.000
Classification par famille

 -  Langues indo-européennes
    -  Langues italiques
       -  Langues romanes
          -  Langues romanes orientales
             -  Mégléno-roumain

(Dérivée de la classification SIL)
Statut officiel et codes de langue
Officielle
en
ISO 639-1
ISO 639-2 roa
ISO/DIS
639-3
ruq
SIL RUQ
Voir aussi : langue, liste de langues, code couleur

Le mégléno-roumain est considéré par certains linguistes comme une langue à part, faisant partie de la branche orientale des langues romanes, avec le roumain, l’aroumain et l’istro-roumain. Pour d’autres linguistes, c’est un dialecte du roumain, à côté des dialectes daco-roumain (connu généralement comme le roumain), aroumain et istro-roumain. Le mégléno-roumain n’est plus parlé que par une population estimée entre 5000 et 12.000 locuteurs qui se donnent le nom de « Vlaşi »[1] (prononcé « Vlach »), principalement en Macédoine de Grèce, dans quelques villages de la République de Macédoine et dans quelques villages de Roumanie.

Sommaire

[modifier] Histoire

Le mégléno-roumain est la langue romane orientale dont l’histoire est la moins connue, puisqu’elle n’a pas d’attestations anciennes. Alors que l’aroumain se sépara des autres langues romanes orientales dès le IXe siècle, on suppose que le mégléno-roumain rompit son union avec le roumain à une époque plus récente. L’une des hypothèses est que cela se produisit aux XIe-XIIe siècles. Une autre théorie affirme que les Mégléno-roumains[2] ne furent établis dans la région où ils vivent actuellement qu’au XIVe siècle, par les Byzantins.

Le mégléno-roumain n’est guère une langue écrite. Les premiers textes dans cette langue furent notés par des linguistes[3]. Il y a aussi quelques recueils de littérature folklorique[4] parus entre 1900 et 1930 et un seul ouvrage non folklorique, une brochure de vulgarisation sur la sériciculture[5], avec la graphie du roumain et des termes empruntés à cette langue.

Entre 1862 et 1912 il y eut quelques tentatives d’enseignement en roumain standard et d’introduction de celui-ci dans la liturgie orthodoxe destinée aux Mégléno-roumains.

[modifier] Distribution géographique

Le mégléno-roumain est parlé surtout en Macédoine de Grèce, dans la région de Mogléna, (préfectures de Kilkis et de Serrès), et dans plusieurs villages de la République de Macédoine proches de la frontière avec la Grèce. Dans l’un de ces villages, Huma, il est parlé par la plupart des habitants. Après la première guerre mondiale, un certain nombre de Mégléno-roumains émigrèrent en Roumanie, dans le village Cerna du département de Tulcea. En 1940, 30 familles environ s’établirent dans la région roumaine de Banat, dans les villages Variaş et Biled.

[modifier] Quelques particularités par rapport au roumain

Le mégléno-roumain est plus proche du roumain que l’aroumain, ce qui s’explique par sa séparation plus tardive du premier. Certains linguistes le considèrent comme une langue de transition entre les deux premières.

[modifier] Phonétiques

Sons spécifiques (avec la notation de Theodor Capidan):

Son Description Exemple
entre [a] et [ə], plus près de [a] – seulement atone, initial de mot mpirat (empereur)
i [i] un peu plus "aigu” (terme de Capidan) qu'en roumain izvor (source)
ǫ [ɔ] – entre [o] et [a], plus près de [a] cǫnt (je chante)
dz [d͡z] dzăc (je dis)
l’ [ʎ] il’ă (fille)
ł l "guttural” (terme de Capidan) – surtout en fin de mot cał (cheval)
ń [ɲ] ńel (agneau)

Sons existant en roumain aussi, avec la notation de Capidan:

Graphème Prononciation Lettre correspondante en roumain Exemple
[j] "i” undi (où)
[w] "u” ou "o” ală (pot)
[ʤ] "g” (devant "e” et "i”) am (vitre)
ts ou ţ [t͡s] "ţ” tserţer (ciel)
[t͡ʃ] „c” (devant "e” et "i”) ărapă (bas (vêtement))

Les lettres "a”, "ă”, "b”, "c”, "d”, "e”, "f”, "g”, "h”, "j”, "l”, "m”, "n”, "o”, "p”, "r”, "s”, "ş”, "t”, "v”, "z”, ainsi que les digraphes "ch” et "gh” rendent les mêmes sons qu'en roumain, à moins qu'ils ne fassent pas partie de graphèmes notant des sons du tableau ci-dessus.

Evolution spécifiques de certains sons

Roumain Mégléno-roumain Traduction
voyelles toniques de durée moyenne voyelles toniques longues : ā, ē, ī, ō, ū
"a" initial atone : afară absence de "a" initial atone : fară dehors
"ă" : rău "ǫ" : rǫ méchant
"â" : cânt "ǫ": cǫnt je chante
"e" atone : capete "i" : capiti têtes
"o" atone : dormim "u" : durmim nous dormons
"f" initial devant [i] és [j] : fier absence de "f" initial : i̯er fer
"ce", "ci" : ceva "tse", "tsi": tsiva quelque chose
"ge", "gi" : ginere "ze", "zi" : ziniri
ou "dze", "dzi" : dziniri gendre
"h" initial ou final de mot : hrănesc absence de "h" : rănes je nourris
"vi" : viu "ghi" : ghiu vivant

[modifier] Morphologiques

Roumain Mégléno-roumain Traduction
masculin pluriel en -i semivocalique : lupi indistinct du singulier : lup loups
génitif (al) unui împărat lu un ạmpirat d’un empereur
datif unui împărat la un ạmpirat à un empereur
indicatif présent, 2e personne, singulier, IVe conjugaison à suffixe serveşti sans -ti : sirbeş tu sers
infinitif infinitif court à valeur verbale : putem face ceva infinitif long à valeur verbale : putem fatsiri tsiva nous pouvons faire quelque chose
gérondif plângând la terminaison -ăra ajoutée au gérondif proprement-dit : plăngǫndăra en pleurant
la catégorie d’aspect verbal inconnue en roumain : încep să învârt nvărtes (aspect perfectif) je commence à tourner

[modifier] Dans l’ordre des mots

Il est à noter la préférence du mégléno-roumain à placer les adjectifs démonstratifs et possessifs, ainsi que l’épithète et aussi le complément du nom au génitif devant le nom déterminé.

Roumain Mégléno-roumain Traduction
dracul acesta ou acest drac tsista drac(u) ce diable
stăpânul meu meu stăpǫn mon maître
fata împăratului lu ạmpiratu il’ă la fille de l’empereur

[modifier] Lexicales

À côté des vocables d’origine latine, le lexique mégléno-roumain contient beaucoup d’emprunts aux langues environnantes : la plupart au macédonien, mais aussi au grec et au turc. Les emprunts à ce dernier sont plus nombreux que dans les autres langues romanes orientales.

[modifier] Notes

  1. Appellation qui peut prêter à confusion, puisqu'elle est utilisée également pour désigner les Aroumains.
  2. Appellation qui n'est pas utilisée par la population en cause, mais par les linguistes, dans la perspective du statut de dialecte du roumain qu'on attribue à l'idiome de cette population.
  3. Le premier: WEIGAND, Gustav, Vlacho-Meglen, eine ethnographisch-philologische Untersuchung, Leipzig, 1892.
  4. CANDREA, I.-Aurel, Texte meglenite. Grai şi suflet, 2 fascicules, 1923, 1924 ; PAPAHAGI, Pericle, Românii din Meglenia. Texte şi glosar, Bucarest, 1900 ; PAPAHAGI, Pericle, Meglenoromânii. Studiu etnografico-filologic, 2 vol., Bucarest, 1902
  5. Cum si cată bubili (Comment élever les vers à soie), Thessalonique, 1907

[modifier] Bibliographie

  • ATANASOV, Petar, Le mégléno-roumain de nos jours. Une approche linguistique, 1990, in Balkan-Archiv, nouvelle série, supplément, tome 7, Hambourg, 1990
  • ATANASOV, Petar, Meglenoromâna astăzi, Bucarest, Editura Academiei Române, 2002 (en roumain)
  • CAPIDAN, Theodor, Meglenoromânii, tome 1, Istoria şi graiul lor, Bucarest, Cultura Naţională, 1925 (en roumain, reproduction en mode image)
  • SALA, Marius et al., Enciclopedia limbilor romanice, Bucarest, Editura Ştiinţifică şi Enciclopedică, 1989 (en roumain)

[modifier] Liens externes