Loi sur le sacrilège

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La loi sur le sacrilège est une loi punissant de mort toute personne ayant commis un sacrilège, passée en France sous la Restauration (1815-1830). Elle a été votée par le gouvernement ultra-royaliste dirigé par le comte de Villèle en janvier 1825, après la mort de Louis XVIII. Les ultras, élus en 1824 par un suffrage étroitement censitaire (100 000 Français ont alors le droit de vote), profitent de l'arrivée au pouvoir de Charles X, jugé plus favorable aux thèses contre-révolutionnaires, pour représenter ce projet de loi, déjà présenté, sans succès, à la Chambre des pairs en avril 1824. Prétextant une augmentation du vol de vases sacrés, elle condamne à mort tout profanateur, établissant une distinction entre les vols de vases sans hosties et les vols de vases contenant des hosties consacrées. Dans ce dernier cas, le projet de loi prévoyait l'application de la condamnation des parricides sous l'Ancien Régime, peine abolie pendant la Révolution et rétablie en 1810 : mutilation du poing, puis décapitation. Après de vifs débats, ce châtiment est finalement remplacé par une « amende honorable » du criminel avant sa mise à mort.

Les doctrinaires, dont le baron de Barante, le comte de Lanjuinais, Royer-Collard et Benjamin Constant s'opposent à la loi, au nom de la séparation du temporel et du spirituel. Certains réactionnaires eux-mêmes, comme Lanjuinais, s'indignent, celui-ci déclarant que l'utilisation même du terme de « déicide » était un sacrilège en soi, et que la loi n'avait nullement à statuer sur les offenses commises à Dieu, dont lui seul saurait être juge. Benjamin Constant affirme qu'en tant que protestant, il ne peut même pas voter la loi, puisque celle-ci, en tant qu'elle distingue le vol d'une hostie d'un vol de vase vide, repose sur une croyance (la transsubstantiation) qu'il ne partage pas. Le rapporteur de la loi, le comte de Peyronnet, recule alors devant l'opposition de droite et de gauche, et affirme que le sacrilège n'est constitué que s'il est intentionnel et public; il établit même une analogie du sacrilège aux attentats à la pudeur, affirmant que l'un comme l'autre n'ont de sens que s'ils sont commis en public.

La loi, jamais appliquée sauf sur un point mineur, est abrogée dès les premiers mois de la monarchie de Juillet, après les Trois Glorieuses.


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