Henri Deneux

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Henri-Louis Deneux est un architecte français (né le 16 octobre 1874 à Reims - décédé le 15 avril 1969 à Paris)

Il naît au-dessus de l'épicerie que tenaient ses parents, rue Saint-Guillaume, dans le quartier de l'Hôtel de Ville. Émigré de l'Aisne, son arrière-grand-père était venu s'établir à Reims au début du siècle. Bien vite, la famille déménage, avec le fonds de commerce, vers le sud de la ville pour venir habiter et travailler rue du Jard. On envoie l'enfant à l'école des religieuses près de chez lui. Il gardera toute sa vie en mémoire le souvenir d'un bon prêtre qui dessinera au tableau une maison ; un geste simple et banal, mais qui le fascinera au point, disait-il, de déterminer sa vocation. Très tôt, il se passionne pour le dessin et l'aquarelle. La pire des punitions que l'on pouvait lui infliger était de lui confisquer ses crayons de couleur. Ses parents le destinent à la carrière de dessinateur dans les bureaux du Génie.

Il entre à dix-sept ans dans l'atelier des architectes Thierot et Margotin, responsables de l'agence des travaux sur les bâtiments religieux. Édouard Thierot, l'architecte diocésain chargé de la cathédrale et professeur à l'École régionale des Arts industriels qui vient d'ouvrir en 1889, le prend sous son aile. En 1894, après un an passé dans cette école, proposé par son maître, il y est nommé professeur adjoint, charge qu'il occupera en même temps que son emploi chez Thierot et Margotin jusqu’en 1898.

Chez ses patrons, il fait la connaissance de Denis Darcy, l'architecte en chef qui a la haute main sur la cathédrale. Sous sa direction et ses conseils, il commencera à effectuer, de magnifiques relevés de la cathédrale et a étudier les travaux réalisés par les architectes en charge de la cathédrale au XIXe siècle : Eugène Viollet-le-Duc, Millet, etc. C’est un artiste de talent : les aquarelles qu’il fait de la cathédrale à cette époque, aujourd’hui conservées au Musée Le Vergeur à Reims, sont de toute beauté et témoignent de son attachement pour ce monument.

En 1898, Deneux gagne la capitale, encouragé par Darcy qui le recommande à Sainte-Anne Louzier, architecte en chef de la cathédrale de Toulouse. Il passera désormais son temps entre l'agence Louzier, l'École des Beaux-arts où il s'inscrit, et les monuments qu'il étudie et relève. En 1905, au concours d'architecte en chef des monuments historiques, il est reçu premier sur 46 candidats. On lui confie le département du Nord, la Somme, Saint-Quentin et l'abbaye Saint-Martin-des-Champs à Paris. En 1912, il édifie son propre immeuble dont il occupera les derniers niveaux dans le 18e arrondissement. La construction est en béton armé et la façade décorée de faïences bleues et vertes.

Succédant à l'architecte Max Sainsaulieu, Henri Deneux, véritable sauveur de la cathédrale, fut nommé en 1915 architecte en chef de la cathédrale de Reims. Il dirige les travaux de reconstruction car c'est ainsi qu'il faut appeler certaines restaurations tant les dégâts sur l'édifice bombardé pendant près de quatre années sont importants. Il renonce alors à ses autres dossiers pour se consacrer à ce lourd travail. L'idée de conserver la cathédrale en ruine, comme un témoin de l'hécatombe et de la barbarie, fait son chemin dans certains esprits... mais pas dans celui de Deneux. Si on lui en donne les moyens, il rendra à sa cathédrale son lustre d'autrefois.

À partir du 4 mars 1919, aidé de son ami Albert Nigron, entrepreneur attitré du monument, avec l’aide des prisonniers allemands, il en entreprend le déblaiement. Avec sa femme Yvonne (née Héuze) qu’il a épousé le 27 décembre 1921 à Vincennes, il occupe deux petites pièces dont l'une lui sert d'atelier, sous quelques tôles rouillées, dans les ruines du Palais du Tau à quelques mètres de son chantier : « J'habite en face de chez moi », disait-il.

De 1919 à 1921, on classe et inventorie les débris avant de reconstituer statues et chapiteau (architecture)x ; les murs et voûtes sont réparés, les contreforts et arcs-boutants consolidés.

En 1924-1926, l'architecte reconstitue la charpente en éléments de ciment armé assemblés et démontables (selon le principe de la « charpente à la Philibert Delorme »), procédé qu'il avait appliqué à la charpente de l'église Saint-Jacques de Reims en 1920-1921.

Il couvre de plomb la toiture et rétablit sur le faîte l'alternance de fleurs de lys et de trèfles dorés à le feuille qui avaient été supprimées à la Révolution. Le clocher à l'ange et le carillon sont fidèlement reconstitués. La galerie haute de la nef est remontée sous sa forme première.

Les vitraux qui ont pu être recomposés scrupuleusement par le maître-verrier Jacques Simon, grâce à des calques exécutés jadis par son père, regagnent leur place dans les fenêtres hautes. D'autres sont remplacés par des créations : la rose du bras sud du transept, et les trois fenêtres des tympans de la façade ouest.

Entre 1919 et 1930, des fouilles archéologiques sous le dallage du XVIIIe siècle mettent à jour des vestiges des fondations des édifices antérieurs, au milieu de constructions romaines qui invitent à conclure à la présence jadis de thermes. Henri Deneux put ainsi établir un plan de la dernière cathédrale attribuée à saint Nicaise et de la cathédrale d'Ebbon. La fouille a amené la découverte de des caveaux et tombeaux des archevêques inhumés dans le chœur de la cathédrale carolingienne.

Le dallage du chœur avait été surélevé par les débris du jubé édifié en 1417 par Collard de Givry et démoli en 1744 ; de nombreux fragments authentifiés par les dessins de Jacques Cellier de 1580 ont été retrouvés, ils sont conservés au Palais du Tau.

À Reims, en parallèle à la restauration de la cathédrale, Henri Deneux veilla à la reconstruction de la basilique Saint-Remi et de l'église Saint-Jacques. L'ensemble de ses travaux lui valurent d'être promu chevalier de la Légion d'honneur, puis officier en 1927.

Pendant 10 ans encore, les travaux se poursuivront à l'intérieur et sur les façades et c'est seulement le 10 juillet 1938, qu'au cours de cérémonies grandioses, le cardinal Suhard et Albert Lebrun, président de la République, inaugureront le grand monument ressuscité.

Sa mission terminée, Henri Deneux a 65 ans, l'âge de la retraite. Il se retire avec la plus grande discrétion. Il retrouve à Paris son appartement où il vivra pendant trente ans dans un quasi-dénuement, sans autre ressource que les maigres revenus de son petit immeuble et pratiquement dans la solitude. Yvonne est morte en 1955. Quand il quitte ce monde, le 15 avril 1969, on l'a complètement oublié. Il sera inhumé à coté de sa femme au cimetière du sud à Reims après une cérémonie à la cathédrale en présence de quarante personnes. Ainsi se termine la vie, ainsi commence la mort pour Henri-Louis Deneu, le sixième architecte de la cathédrale des Rois.

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