Effet Jahn-Teller

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L’effet Jahn-Teller est responsable de la distortion du complexe hexaaquacuivre(II), [Cu(OH2)6]2+, qui devrait posséder une  géométrie octahédrique. Les deux liaisons Cu-O axiales mesurent ~ 238 pm, alors que les quatre liaisons Cu-O équatoriales mesurent ~ 195 pm.
L’effet Jahn-Teller est responsable de la distortion du complexe hexaaquacuivre(II), [Cu(OH2)6]2+, qui devrait posséder une géométrie octahédrique. Les deux liaisons Cu-O axiales mesurent ~ 238 pm, alors que les quatre liaisons Cu-O équatoriales mesurent ~ 195 pm.

L’Effet Jahn-Teller, connu aussi en tant que « Distorsion Jahn-Teller », décrit la distortion de la géométrie des molécules non-linéaires dans certaines situations. Historiquement, cet effet a été proposé dans un théorème publié en 1937 par Hermann Arthur Jahn et Edward Teller, dans lequel ils démontrent que toute molécule non-linéaire possédant un niveau électronique fondamental dégénéré subira une distorsion géométrique qui lèvera cette dégénérescence, ce qui aura pour effet de diminuer l’énergie totale de la molécule[1].

Cet effet est observé dans les complexes octaédriques de certains métaux de transition hexacoordonnés. En particulier, le cuivre (II), le chrome (II) et le manganèse (III). La configuration électronique dn d’un ion placé dans un champ cristallin octaédrique devrait se subdiviser en 2 niveaux, T2g et Eg, respectivement triplement et doublement dégénérés. L’ion Cu2+ étant de configuration d9, le niveau Eg contiendrait donc 3 électrons, dont l’un ne sera pas apparié. Les deux orbitales du niveau Eg étant dégénérées, l’électron célibataire devrait pouvoir se placer indifféremment dans l’une ou l’autre des orbitales, conduisant à l’existence d’un niveau fondamental dégénéré, ce qui est le cas du théorème de Jahn et Teller. Ce type de complexe va donc subir une distorsion le long d’un des axes de symétrie quaternaire (que l’on désigne comme étant l’axe « z »), ce qui a pour effet de lever la dégénérescence orbitalaire et de diminuer l’énergie totale du complexe. Cette distorsion se manifeste généralement par une élongation des distances métal-ligand le long de l’axe z, mais peut occasionnellement provoquer un raccourcissement de cette liaison (le théorème de Jahn-Teller ne prédit pas la direction de la distorsion, mais l’existence de géométries instables). Lorsque ce type de distorsion se produit, cela a pour effet de diminuer la répulsion électrostatique entre le doublet électronique du ligand, qui est une base de Lewis, et les électrons du métal central possédant une composante selon l’axe z, diminuant ainsi l’énergie du complexe.

Dans les complexes octaédriques, l’effet Jahn-Teller est principalement observable lorsqu’un nombre impair d’électrons occupe le niveau Eg. Cette condition est vérifiée lorsque le métal possède une configuration d9, ou d4 spin fort (appelé aussi « champ faible »), ou d7 spin faible (appelé aussi « champ fort ») pour lesquels l’état fondamental du complexe octahédrique théorique est dégénéré (Eg³ ou Eg1). On devrait observer un effet Jahn-Teller pour les configurations électroniques d1, d², d6 d7 spin fort et d4, d5 spin faible, états pour lesquels la couche T2g est incomplète, ce qui entraine l’existence d’un état fondamental triplement dégénéré. Mais les orbitales Eg, contrairement aux orbitales T2g, pointent vers les ligands, ce qui rend la distorsion beaucoup plus forte dans le premier cas que dans l’autre. Les effets attendus pour les complexes de coordination octaédriques sont présentés dans la table ci-dessous :

Effet Jahn-Teller
Nombre d’électrons d 1 2 3 4 5 6 7 8 9
Haut spin* - - - F 0 f f - -
f f 0 - - - - 0 F
Bas spin* - - - f f 0 F - -

avec f : faible effet Jahn-Teller attendu (dégénérescence orbitalaire impliquant les orbitales T2g), F : fort effet Jahn-Teller attendu (dégénérescence orbitalaire impliquant les orbitales Eg), 0 : pas d’effet Jahn-Teller. * bas spin et haut spin ne sont pas définis pour d1, d², d³, d8 et d9, dans les autres cas, lire la ligne du milieu.

L’effet Jahn-Teller peut être observé expérimentalement en étudiant l’absorbance dans le spectre UV/visible de composés inorganiques, dans lesquels il provoque souvent le dédoublement de certaines bandes spectrales.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. (en) H. A. Jahn, E. Teller, « Stability of polyatomic molecules in degenerate electronic states. I. Orbital degeneracy. », dans Proceedings of the Royal Society of London Series A - Mathematical and Physical Sciences, 1937, 161, p. 220-235

[modifier] Bibliographie

  • G.L. Miessler, D.A. Tarr, Inorganic Chemistry (3rd ed), Pearson Prentice Hall, 2004, p. 370-373
  • D.F. Shriver, P.W. Atkins, Inorganic Chemistry (3rd ed), Oxford University Press, 1999 (ISBN 0-19-850330-X), p. 235-236
  • Isaac Bersuker, The Jahn-Teller Effect, Cambridge University Press, 2006 (ISBN 0521822122)