Cassinomagus

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Cassinomagus est le nom antique d'un complexe monumental gallo-romain établi entre le 1er et le 4e siècle ap. J.-C. sur l'actuelle commune de Chassenon en Charente. Installée sur un plateau bordé par la Vienne, l'antique Cassinomagus, indiquée sur la Table de Peutinger, était une agglomération urbaine secondaire située en territoire Lémovice, sur la voie d'Agrippa, entre Limoges et Saintes. Elle s'étendait sur près de 300 hectares. Son nom, qui devait signifier "Le Marché du Chêne" (ou "des Chênes") et sa situation au carrefour de grandes voies, en position frontalière et à proximité de trois autres cités (Saintes - Santons, Poitiers - Pictons et Périgueux - Pétrocores), confirment que l'actuel petit village de Chassenon, a dû connaître la prospérité de la fin du Ier au IIIe s. ap. J.-C.. Son principal centre d'intérêt était certainement le vaste sanctuaire qui occupait, à lui seul, environ 25 hectares. Les fouilles modernes, qui ont lieu de 1958 à 1988, et qui ont repris depuis 1995, ont permis de repérer un grand temple et deux petits temples, un théâtre-amphithéâtre, un aqueduc... La partie la mieux étudiée et la plus surprenante de ce sanctuaire, ce sont des thermes doubles monumentaux, s'étendant sur un hectare, construits sur trois niveaux toujours visibles et visitables, éléments qui font de cet établissement cultuel et curatif un monument très rare en son genre .

Sommaire

[modifier] Les thermes gallo-romains

Icône de détail Article détaillé : Thermes de Chassenon.
Chaufferie nord des thermes
Chaufferie nord des thermes

Les thermes dits de Longeas ont été construits à la fin du 1er siècle de notre ère, avec des pierres issues de l'écrasement d'une météorite. Ils ont été utilisés pendant plus de trois siècles, comme établissement de cure à l'intérieur du sanctuaire. Leur état de conservation est exceptionnel avec, par endroits, des murs qui s'élèvent encore sur sept mètres de hauteur. Le visiteur d'aujourd'hui y découvre les espaces publics, ouverts aux baigneurs de l'Antiquité, ainsi que le niveau technique, alors réservé au personnel.

[modifier] Histoire

[modifier] L'astroblème de Rochechouart-Chassenon

L'histoire de l'antique Cassinomagus gallo-romaine remonte à environ 214 millions d'années. Bien avant que l'homme n'existe, il se produit alors un événement d'une importance exceptionnelle : une météorite d'un kilomètre et demi de diamètre percute la Terre à une vitesse de 11 à 20 km par seconde, sur le lieu-dit de La Judie, dans la commune de Pressignac. Elle laisse un cratère d'environ 22 km de diamètre et ravage tout à plus de 100 km à la ronde.

Aujourd'hui, l'érosion a complètement effacé toute trace dans le relief, seul le léger détour de la Vienne vers le sud sur Chassenon, entre Saint-Junien et Exideuil, pourrait lui être attribué. Par contre, le sous-sol conserve de nombreuses roches fracturées, fondues, remuées, que l'on appelle les brèches. Ce n'est qu'en 1967 qu'un géologue démontrera l'origine de ces roches restées mystérieuses depuis leur première analyse scientifique au début du XIXe siècle, il devient en quelque sorte « l'inventeur » de l'astroblème de Rochechouart-Chassenon.

On peut donc dire que l'histoire de Chassenon commence là, puisque le bouleversement des sols va donner naissance à ces brèches qui seront utilisées pour la construction, non seulement des monuments gallo-romains, mais des habitations qui se succèderont au cours des âges.

[modifier] L'agglomération de Cassinomagus

Le temps passe. Les siècles s'ajoutent aux siècles, dont nous ne savons rien. Des hommes, un jour, s'établissent en ces lieux. C'est l'âge de la pierre taillée, de la pierre polie, dont quelques vestiges ont été retrouvés, attestant de l'occupation humaine en ce temps de la préhistoire.

Bien longtemps après, apparaissent nos ancêtres les Gaulois. Peut-être vont ils déjà construire une bourgade et y établir un lieu de culte ou de guérison. Rien ne le prouve mais on peut se demander si les Romains n'ont pas romanisé, transformé, agrandi dans des proportions gigantesques, un sanctuaire déjà existant. Car, sous l'occupation romaine, Cassinomagus, remarquablement situé à un carrefour de routes et à la limite de plusieurs provinces, fait l'objet d'une attention toute particulière. Une publicité efficace fait sans doute connaître les vertus guérisseuses des eaux du sanctuaire et incite à venir implorer la bienveillance des dieux.

C'est ainsi que grandit la renommée de Cassinomagus et que, bien vite, des foules importantes s'y pressent, à en juger par l'ampleur de ses monuments :

  • construit sur un podium de 50 mètres de diamètre, un temple octogonal à l'extérieur, circulaire à l'intérieur, de 18 mètres de diamètre et dont la hauteur devait être impressionnante ;
  • un théâtre qui, semble-t-il, au vu de récentes photos aériennes, pourrait avoir 120 mètres de façade ;
  • des thermes immenses dont les vestiges laissent deviner la splendeur qui fut la leur au temps de l'âge d'or de Cassinomagus.

[modifier] Un sanctuaire thermal

Dans l'enceinte de Cassinomagus, des hommes, femmes et enfants viennent implorer de leurs dieux la guérison de leurs maladies. Ils participant au temple à des cérémonies hautes en couleur, demandant l'intercession des dieux, et suivent ensuite dans les thermes les différentes phases de la thérapeutique thermale en parcourant les salles chaudes et froides, se baignant dans les piscines, recevant les soins empressés du personnel mis à leur service. Ils se retrouvent enfin le soir au théâtre pour des spectacles dont nous ignorons tout, mais qui avaient certainement pour but de leur faire oublier un moment les maux qui les accablaient.

[modifier] Fouilles archéologiques

Les premières fouilles sont engagées à Chassenon par l'abbé Michon en 1844, qui trace les premiers plans concernant l'agglomération de Cassinomagus. La seconde moitié du 19e siècle voit les recherches se poursuivre sous la houlette de l'abbé Arbellot, président de la Société historique et archéologique du Limousin. Alors que Napoléon III vient de créer sa Commission de topographie des Gaules (1858), Arbellot obtient quelques subsides pour mener des fouilles de 1860 à 1862: on découvre alors deux petites constructions à l'Est du site, qualifiées de fanum.

Mais Chassenon est loin de Pompéi, et tout le monde n'y est pas encore gagné à l'archéologie. En 1888, les besoins de l'exploitation agricole conduisent à araser les derniers murs de superstructure des thermes et du temple. Peu de temps après, les vestiges du théâtre antique sont attaqués par une carrière de pierre qui restera en activité jusque dans les années 1930. En 1892, la réfection du mur d'enceinte du cimetière entraîne la destruction des sarcophages du haut moyen-âge qui le composaient.

En 1889, la Société historique et archéologique du Limousin effectue sa sortie annuelle à Chassenon et, pour ainsi dire, passe la main à la jeune Société des Amis des sciences et des arts de Rochechouart qui vient de se créer. Commence alors une nouvelle période de fouilles à Chassenon. La collecte des objets reste une motivation importante, à partir des monnaies ramassées, et du vidage des puits au sud-­ouest du bourg de Chassenon.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les conditions d'exercice de l'archéologie vont commencer à changer, avec la première Loi sur l'archéologie de 1941, et la création des Circonscriptions archéologiques (1942). Dès 1936, à l'occasion de la fermeture de la carrière des arènes, l'État avait procédé au classement des vestiges du théâtre antique au titre des monuments historiques.

A partir de 1958, un travail systématique va être entrepris par Jean Henri Moreau pour dégager les vestiges des thermes, les étudier et les mettre en valeur. Afin de l'aider dans son travail, M. Moreau crée l'association des Amis de Chassenon, qui fait connaître et visiter le monument, et mobilise toute l'énergie et les ressources nécessaires aux travaux de conservation. Dès 1959, les vestiges des thermes sont classés au titre de monuments historiques et, en 1960, le Département de la Charente apporte sa première contribution au financement des travaux. Ce travail continu dure 30 ans et contribue à faire connaître Chassenon au niveau national.

En 1989, M. Moreau laisse à ses successeurs la poursuite d'un travail remarquablement mené. Avant de se retirer, il a su faire couvrir les vestiges pour qu'ils ne subissent pas les intempéries, et conduire le Conseil général de la Charente à les acquérir pour assurer la pérennité de l'entreprise. Dans les années 1990, l'archéologie poursuit sa professionnalisation. La procédure des fouilles programmées est créée. De nouvelles fouilles démarrent en 1995 et se poursuivent depuis lors tous les ans, contribuant à la formation d'une équipe de recherche importante et qualifiée.

Des projets d'acquisition foncière sont lancés dès 1996 pour tenter de créer une vaste réserve archéologique autour des monuments antiques repérés. Des prospections géophysiques et pédestres sont entreprises et révèlent avec plus de précisions les différentes composantes du site archéologique. La nouvelle chronologie de l'occupation des thermes et la révélation d'une période de réoccupation aux 5e et 6e siècles font l'objet de publications.

En 2000, un projet de valorisation culturelle et touristique du site fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique prise en 2002, et se concrétise par l'acquisition d'une réserve archéologique de 28 hectares par le Conseil général. Dès lors, les projets de fouilles peuvent s'étendre dans de nouveaux secteurs.

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