Andage

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Andage (Andagina ou Andaïna) est le nom primitif de la localité de Saint-Hubert où s'était établi, au VIIe siècle, une communauté religieuse dirigée par saint Bérégise grâce à une donation de Pépin de Herstal et de son épouse Plectrude. En 817, à l'initiative de l'évêque de Liège Walcaud, cette communauté fut remplacée par des moines bénédictins qui dirigeront l'abbaye jusqu'en 1797.

Andage changea de nom à l'occasion du transfert de la dépouille de saint Hubert de Liège à cette abbaye en 825 mais les moines continuèrent à écrire monastère d'Andage à Saint-Hubert.


L'abbaye deviendra dès lors un important centre de pèlerinages et connaîtra un rayonnement important en Europe.

[modifier] Saint Bérégise

Saint Bérégise (ou Bergis) voit le jour dans un village aujourd’hui disparu, Spange en Condroz situé actuellement entre Emptinne et Hamois (Province de Namur, Belgique)(Beregisius ex Condrusto pago Austrasiorum ex vico qui vocatur Spangius ortus fuit : Bérégise, du canton condruze d’Austrasie, est né dans un village dénommé Spange).

Sa naissance se situe vers l’an 670. Ses parents étaient, semble-t-il, riches et pieux. On ne connaît rien de son père, mais sa mère se prénommait Berilla.

Bérégise entre au monastère bénédictin de Sarchinium (Trayen ou Saint-Tron, S.Trudo, Saint-Trond dans le Limbourg Belge) pour y faire son éducation. Dans cette abbaye, son instruction se révèle plutôt être celle d’un clerc séculier et c’est à ce titre qu’il sera rattaché, avec la dignité de prêtre, à la maison de Pépin II de Herstal (ou de Heristal), maire du palais résident à Liège, arrière-grand-père de Charlemagne.

Sous l'influence de Bérégise, devenu aumônier de la cour, le caractère encore fruste et âpre de Pépin va s'assouplir peu à peu et devenir celui d'un grand homme d'État chrétien. Bérégise sera un administrateur qui deviendra vite indispensable au roi. Et pourtant, il ne se gêne pas pour admonester vigoureusement son puissant protecteur lorsque ce dernier se détourne du droit chemin. Il va même jusqu'à le tancer publiquement au sujet de ses actes quelquefois peu corrects. On raconte qu'il lui refusa un jour le baiser de paix parce qu'il ne s'était pas découvert en entrant dans l'église. On ne badinait pas, à l'époque, avec le respect dû à la maison de Dieu. Cette indépendance de caractère, on va le voir, ne semble pas avoir nui à la carrière de Bérégise.

On prétend, en effet, que Plectrude, épouse de Pépin de Herstal, voyageant dans la forêt d’Ardenne pour aller visiter son domaine d’Amberloup, fit une halte avec sa suite près d’une rivière où s’élevait autrefois une église dédiée à Saint Pierre et consacrée par Saint Materne. S’étant assise sur un tas de pierres, elle vit tomber du ciel un parchemin écrit en lettres d’or (on dit d’autre part qu’elle aurait trouvé ce pli dans le creux d’un rocher). Bouleversée par ce prodige, Plectrude fit lever ses gens et rejoignit son mari. Celui-ci, ému, demanda à son aumônier, Bérégise, de lui commenter le sens du texte. Le Saint lui expliqua que ce message devait être considéré comme un ordre du ciel et que le lieu où on l’avait trouvé devrait être habité par des hommes pieux au profit de beaucoup d’âmes. Cette histoire de parchemin tombé du ciel apparaît bien sûr comme un deus ex machina, souvent utilisé à cette époque (la biographie de Saint Bérégise - la Vita Beregisi - ne fut par ailleurs écrite que deux siècles plus tard).

[modifier] Fondation de l’abbaye

Toujours est-il que Pépin décida de fonder ce monastère. Un diplôme de donation attribué à ce haut protecteur et daté du 13 novembre 687 semblerait être un faux. Adoptons la position extrêmement réservée prise par le chanoine Baix en 1935, à propos du peu que l’on sait (avec toutes les garanties historiques voulues) de Bérégise et de l’histoire de l’établissement religieux qu’il développa. Il dut recevoir la terre sur laquelle allait s’élever le Chapitre d’Andage au cours du premier quart du VIIIe siècle. Le maire du palais céda donc le terrain nécessaire, régla les dîmes et le nombre de serfs. Il semble que les premiers religieux du lieu aient défriché très tôt pour agrandir leur domaine et y construire les premiers bâtiments de la Communauté dans cet endroit inhabité de la forêt. Ces lieux auraient pourtant été occupés dès l’époque romaine par un castrum (le castrum d’Ambra) à la tête du domaine d’Amberloup. Cette petite agglomération fortifiée et son église furent, dit-on, rasées par les Huns. Elle disparut ensuite sous végétation jusqu’à la fondation du monastère d’Andagina, éponyme du ruisseau, l’Andagina ou Andaïna.

Le monastère prospéra sous la direction de saint Bérégise. Entouré de quelques disciples, Bérégise y organisa la vie canoniale. Bien qu’il ait été courant de voir jusqu’au XIe siècle des supérieurs de Chapitres être désignés comme abbés, certains Chapitres eux-mêmes étant fréquemment appelés abbatie, aucun texte ancien ne donne à Bérégise le titre d’abbé d’Andage. C’est la tradition qui, plus tard, lui attribue ce titre ; en fait dans la Vita Beregisi il est considéré comme le pater de la Communauté, fonction qu’il occupa pendant plusieurs années. À ce propos on peut noter la controverse due à ce que tous les auteurs depuis G. Kurth jusqu’à J. Baudhuin, ont parlé de chanoines réguliers. Il semble que ce serait une méprise ; les chanoines réguliers ne se distingueront des séculiers qu’à partir du XIe siècle. Ceci s’explique par le fait que certains auteurs anciens ont cru que Bérégise avait été réellement moine bénédictin de Saint-Trond avant de fonder Andage.

Il y montra la pratique de la piété à un grand nombre de serviteurs de Dieu et il y mourut comblé de mérites, après un abbatiat qui dura un bon quart de siècle. Il ne cessa d’agrandir l’abbaye en se faisant accorder de nombreuses libéralités par plusieurs grands seigneurs. En ce qui concerne le développement du patrimoine foncier du Chapitre, on ne dispose plus que du résumé d’un acte analysé par l’auteur de la Vita Beregisi. Ainsi, on garde trace du don en 725, par un comte nommé Grimbert, de vignes dans la région de Trèves ; don précieux car l’abbaye se trouvait en dehors de toute zone viticole. Il avait su gagner la sympathie des évêques, des comtes et de toute la noblesse et intéressa tout particulièrement ses amis et ses parents. Il fit aussi des miracles, mais nous n'en connaissons pas les détails. En effet, après 937, l'auteur de la Vita Beregisi, un moine issu de son abbaye écrivit la vie du Saint fondateur en n’y faisant que des allusions générales. Il se réservait de les raconter plus au long dans un récit dont on n'a pas retrouvé la trace, aucun autre de ses écrits ne nous étant parvenu. Le culte de saint Bérégise n'a jamais connu un grand éclat, car il fut éclipsé rapidement par celui de saint Hubert. Toutefois, d’autres enrichissements du temporel du Chapitre se produisirent du temps de Bérégise ou encore jusqu’à la fin du VIIIe siècle, car la Vita Beregisi parle de donations constantes de terres et de vignes.

Ajoutons que Bérégise fut l'ami du futur saint qu'il semblait avoir conseillé aux temps où Hubert, jeune homme encore fougueux, ne pensait qu'à la chasse. Le moutier (monastère) qu’il a fondé connaîtra plus tard un grand essor. Grâce à une charte de 817 de l’évêque de Liège, Walcaud, on connaît les biens que possédait le Chapitre au début du IXe siècle, à savoir les terres de Arville, Loupville, Paliseul, Jemelle, Tellin, Lesterny, Revogne, Givet, Anseremme et Romedenne. Il faut y ajouter les églises de Maissin, Martelange et Boulaide.

On n’en connaît guère plus sur de la vie de saint Bérégise.

La date du 2 octobre, celle de sa fête (saint Bérégise est honoré dans le diocèse de Namur à la date du 10 octobre et dans celui de Liège à la date du 2 octobre), indique vraisemblablement le jour de son décès, mais on n'en connaît pas l'année exacte ; tout ce qu’on sait, c’est qu’elle est postérieure à 725, année au cours de laquelle il est cité nommément et antérieure à 746, puisque la mort de Bérégise eut lieu, semble-t-il, en présence de saint Hubert, qui aimait venir goûter le calme en la solitude d'Andage. Les orthodoxes belges, eux aussi, lui rendent un culte puisqu'une icône le représentant fut exposée à Lasne, dans une chapelle ayant abrité la paroisse de tous les saints de Russie (patriarcat de Moscou). Elle appartient aujourd'hui un habitant de cette paroisse.

Une chapelle lui fut dédiée et construite du temps de l’abbé Maillieux. Son inauguration solennelle eut lieu le 2 octobre 1927, date à laquelle on célébrait saint Bérégise à cette époque. Le culte tomba dans l’oubli et la statue du saint a disparu. Elle fut remplacée par celle de la Vierge Marie.

[modifier] Saint Hubert

Toutefois, en ce début de siècle, malgré cette apparente richesse temporelle, le chapitre d’Andage connut une crise à la fois matérielle et spirituelle : bâtiments en ruine, abandon de certains chanoines, effondrement de la discipline. Bérégise n’était sans doute plus là pour maintenir le cap. Les clercs restant se rendirent chez l’évêque de Liège en 817 pour lui expliquer leur détresse. Walcaud transforma le Chapitre de chanoines séculiers en une abbaye de moines bénédictins que ces derniers dirigèrent jusqu'en 1797.

En 825, le pape accorda à l’évêque de Liège l'autorisation de transférer à Andage le corps de saint Hubert, évêque de Liège et successeur de saint Lambert. Dès lors Andage, devenu saint Hubert, connaîtra un rayonnement extraordinaire en Europe. Ce fait s’inscrit dans le mouvement plus répandu de la renaissance du monachisme, en particulier dans le diocèse de Liège, où les moines remplacent de plus en plus les chanoines. D’un point de vue plus global, on ne peut d’ailleurs nier l’importance du rôle qu’ont joué les abbayes et monastères de Belgique (et d’autres contrées) dans le développement général du pays.