Amuïssement

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Amuïr signifie rendre muet. En phonétique, l'amuïssement consiste en l'atténuation ou, le plus souvent, la disparition complète d'un phonème ou d'une syllabe dans un mot. L'amuïssement est une des modifications phonétiques les plus courantes en phonétique historique. Il peut être classé dans la catégorie des métaplasmes quand il concerne la syllabation du mot.

Sommaire

[modifier] Raisons de l'amuïssement

De nombreux amuïssements sont dus aux effets de l'accent tonique : plus les phonèmes sont éloignés de l'accent du mot, plus ils sont susceptible de s'amuïr. On explique ainsi de nombreuses apocopes, aphérèses et syncopes.

Dans d'autres cas, l'amuïssement est dû à des simplifications de groupes, le plus souvent consonantiques. Par exemple ─ l'orthographe en porte encore la trace ─ de nombreux mots anglais portent la marque d'une consonne amuïe devant une autre consonne. C'est le cas pour les groupes /kn/ en début de mot : knife [naɪf] « couteau » ou know [nəʊ] « savoir ». Le premier remonte au vieil anglais tardif cnīf, le second au vieil anglais cnāwan. De même pour /pb/ et /pn/, /ps/ et /pt/ à l'initiale : cupboard ['kʌbəd] « placard », pneumonia [njuː'məʊnɪə] « pneumonie », psychic ['saɪkɪk] « psychique », Ptolemy ['tɒləmɪ] « Ptolémée ».

C'est une des formes les plus visibles de la paresse articulatoire, qui conduit aux évolutions phonétiques. Elle peut parfois entraîner d'autres modifications, dont les plus importantes sont l'allongement compensatoire et la métaphonie.

[modifier] Exemples en français

C'est le cas en français (sauf dans certaines régions du Midi) pour le phonème /ǝ/ (dit e « caduc » ou e « muet »), qui peut s'amuïr, sauf quand il est suivi d'un groupe de consonnes auquel il peut servir de support : revenir peut être prononcé /rǝvǝnir/ ou, plus couramment, /rǝvnir/, /rvǝnir/ voire /rvnir/.

L'orthographe du français, très conservatrice, garde souvent la trace d'anciens phonèmes amuïs, qui étaient donc prononcés dans un état plus ancien de la langue. Par exemple, dans le mot petit, le graphème t n'est normalement pas prononcé (/pǝti/). Il l'était en ancien français et il réapparaît en liaison (petit homme /pǝtit_ɔm/ voire /ptit_ɔm/ avec amuïssement du e « caduc ») ainsi que dans la formation du féminin petite /pǝtit/, laquelle forme porte en finale la trace d'un e « caduc » lui aussi normalement muet.

En règle générale, la majorité des graphèmes consonantiques de fin de mots du français sont muets et dénotent la trace d'un ancien phonème amuï. Certaines réfections orthographiques, cependant, sont à prendre en considération : ainsi, l'adjectif grand au masculin ne se prononçait pas, en ancien français, avec un /d/ final mais avec un /t/ (on l'écrivait d'ailleurs le plus souvent grant; cf aussi la prononciation de "grand homme"). C'est par analogie avec le féminin récent grande que l'on a modifié le t en d.

Pour être qualifié d'amuï, un phonème doit avoir été réellement prononcé : le d du mot poids n'est donc pas la trace d'un ancien phonème amuï /d/ car ce n'est qu'une lettre ajoutée par erreur au mot, par confusion avec un étymon pondus. Poids provient en effet de l'adjectif latin pensum.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes