Viatcheslav Mikhaïlovitch Molotov

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Viatcheslav Molotov
Viatcheslav Molotov

Viatcheslav Mikhaïlovitch Molotov (en russe : Вячеслав Михайлович Молотов) (né le 9 mars [25 février, calendrier julien] 1890 et décédé le 8 novembre 1986) fut un homme politique et un diplomate de l'Union soviétique. Il est généralement considéré comme le bras droit de Joseph Staline.

Sommaire

[modifier] Biographie

Viatcheslav Molotov est né le 9 mars 1890 à Koukarka (de nos jours Sovetsk) en Russie. Après avoir étudié au Gymnasium (lycée) de Kazan, il s'inscrivit au Parti ouvrier social démocrate de Russie (POSDR) en 1906 sous le pseudonyme de Molotov (du russe : molot (молот) marteau), abandonnant ainsi son véritable patronyme Skriabine. Il est l'un des fondateurs de la Pravda en 1912. Il était, avec Alexandre Chliapnikov, le plus ancien bolchevik à Pétrograd à l'époque de la Révolution de février, alors que des personnages comme Lénine étaient encore en exil. Après avoir soutenu une ligne d'appui au gouvernement provisoire, il finit par se rallier à l'orientation de Lénine. Il joua un rôle mineur dans la Révolution d'octobre et dans la guerre civile, mais était très apprécié comme exécutant à qui l'on pouvait confier toutes les tâches utiles.

Son ascension au sein du parti s'explique par sa fidélité et sa subordination totale à Joseph Staline dès 1922.

De décembre 1930 au 9 mai 1941, il fut Président du Conseil des commissaires du peuple (Sovnarkom), qui était la Présidence du gouvernement de l'Union soviétique, même si en pratique ce poste était sous les ordres du secrétariat du Parti communiste. De 1928 à 1934, il est également chef suprême du Komintern, bien que la IIIe Internationale ait dans les faits été dirigée suivant les instructions de Staline.

Pendant les vacances de Staline, Molotov restait à Moscou et dirigeait de fait le Politburo et l'URSS suivant ses directives. Il fut également deuxième secrétaire du Comité central juste après Staline, jusqu'en 1935. À la fin des années 1930, il fit partie avec Kaganovitch, Iejov et Kliment Vorochilov du groupe restreint de cinq membres qui prenait de fait toutes les décisions importantes en compagnie de Staline. Bourreau de travail infatigable, ce bureaucrate fut un des chefs de la planification de la dékoulakisation, un des organisateurs des escadrons jetés sur les campagnes (1930-1933). Il n'hésita pas à se rendre dans l'Ukraine affamée de l'Holodomor pour inciter les communistes défaillants à rester fermes contre les paysans révoltés et décimés par la faim.

Pendant les Grandes Purges de 1936-1939, ainsi que le prouvent les registres d'entrée du Kremlin aujourd'hui disponibles, Molotov fut le dirigeant soviétique le plus souvent reçu dans le bureau de Staline, avant même le chef suprême de la police Nikolaï Iejov. Il ne se cacha jamais d'avoir soutenu fermement la politique de la Grande Terreur, qui aboutit à 680 000 exécutions en deux ans et à l'envoi de centaines de milliers d'innocents au Goulag. Sa signature apparaît aux côtés de celle de Staline sur de très nombreuses listes de condamnations à mort collectives. Ainsi, le 25 novembre 1938, il contresigna avec Staline la mort de 3 173 personnes, un record.

Dans ses entretiens des années 1970 avec le journaliste Félix Tchouïev [1], Molotov fut sans ambiguïté : Staline était le principal responsable de la Terreur, « et nous qui l’encouragions, qui étions actifs, j’ai toujours été actif, toujours favorable à ce que mesures soient prises ».

Il fut cependant lui-même parfois menacé par le maëlstrom répressif : nombre de ses proches collaborateurs furent arrêtés et contraints par le NKVD de mettre en cause leur patron à toutes fins utiles. Sa femme Polina, membre du Comité central et ministre, fut vivement mise en cause en 1939 pour de prétendues malversations, et exclue du Comité central en 1940, alors que ses origines juives la rendaient gênante au moment du Pacte germano-soviétique. En 1949, Polina fut arrêtée et envoyée au Goulag, d'où elle ne sortit qu'à la mort de Staline.

À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Molotov devint ministre des Affaires étrangères, tout en gardant son poste au Sovnarkom, jusqu'à ce que Staline l'inclût dans ses fonctions. Il est fréquemment avancé que son prédécesseur, Maxim Litvinov, avait été écarté à cause de sa judéité, pour ne pas déplaire aux nazis lors la signature du Pacte germano-soviétique du 23 août 1939, portant sur le partage de la Pologne et l'annexion des pays baltes par l'Union soviétique.

Lors de la défaite des Alliés lors de la bataille de France en 1940, Molotov adressa les « chaleureuses félicitations du gouvernement soviétique » à l'ambassadeur allemand à Moscou pour « le splendide succès des forces armées allemandes ».

Dans un discours prononcé en novembre 1940, Molotov annonça triomphalement qu'en un an, l'URSS s'était accrue de "500 000 km² et de 23 millions de nouveaux habitants, sur des territoires qui avaient auparavant appartenu à l'Union Soviétique"[réf. nécessaire].

Comme membre du Politburo, il continua d'approuver fréquemment les exécutions en masse des « ennemis du peuple ». Par exemple, le 5 mars 1940, il signa comme tout le politburo l'ordre d'exécuter (préparé par Lavrenti Beria) des milliers de prisonniers polonais, surtout des officiers représentant l'intelligentsia et qui est connu comme le Massacre de Katyń.

Au cours des discussions avec Hitler, lors de sa rencontre le 12 novembre 1940 avant le déclenchement de la guerre entre l'Union soviétique et l'Allemagne en 1941, où il expliquait que "s'il faisait le bilan de la situation créée après la défaite de la France, il aurait à dire que l'accord germano-russe n'a pas été sans influence sur les grandes victoires allemandes"[réf. nécessaire], Molotov ennuyait en permanence ses interlocuteurs avec son insistance à garder, ou même améliorer, les intérêts de son pays en Europe de l'Est sans être distrait par des promesses sur des terres lointaines comme l'Inde. Quand Ribbentrop discutait de partager l'Empire britannique bientôt conquis, Molotov lui demanda pourquoi, si le Royaume-Uni était moribond, leurs négociations avaient lieu dans un abri anti-aérien. Plus tard cette attitude inflexible causerait bien des frustrations aux Alliés, jusqu'au jour de 1945 où le Président Truman le rabroua sans ménagement : "On ne m'a jamais parlé sur ce ton!" dit-il au Président, qui lui répondit immédiatement : "Changez votre politique et je vous parlerai différemment!"[réf. nécessaire].

Il servit comme ministre des Affaires étrangères jusqu'en 1949 et fut alors remplacé par Andrei Vychinsky, puis de 1953 à 1956.

Après la mort de Staline en 1953, il s'opposa à la liquidation par Nikita Khrouchtchev de l'héritage de Staline et tenta avec d'autres partisans de la tendance orthodoxe, comme Lazare Kaganovitch, un coup dans le Parti communiste pour évincer Khrouchtchev. Quand cela échoua, il laissa Khrouchtchev le nommer à des postes de plus en plus insignifiants, comme par exemple ambassadeur en Mongolie de 1957 à 1960, puis délégué soviétique permanent auprès de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à Vienne de 1960 à 1961. En 1964 il fut exclu du parti, qu'il put réintégrer en 1984, mais ce n'était qu'un geste symbolique.

Il mourut le 8 novembre 1986 et fut enterré au Cimetière de Novodevitchi à Moscou.

[modifier] Lien de parenté

Viatcheslav Molotov était le cousin germain du compositeur russe Alexandre Scriabine (Скря́бин).

[modifier] Anecdote

Le célèbre cocktail Molotov, ou bombe à essence, lui doit son nom qui lui fut donné par les soldats de l'armée finlandaise en 1939, par dérision.

[modifier] Bibliographie

  • Oleg Khlevniouk, Le Cercle du Kremlin. Staline et le Bureau politique dans les années 1930 : les jeux du pouvoir, Paris, Seuil, coll. « Archives du communisme », 1998, 331 p.
  • Jean-Jacques Marie, Staline, Fayard, 2001.
  • Simon Montefiore, Staline. La Cour du Tsar Rouge, traduction française, Éditions des Syrtes, 2005.
  • Félix Tchouev, Conversations avec Molotov, tr. fr. 1995.
  • Bernard Bromage, Molotov, the Story of an Era, Londres, P. Owen, 1956, 225 p.
  • Derek Watson, Molotov: A Biography, New York, Palgrave MacMillan, 2005, 376 p.

[modifier] Référence

  1. Conversations avec Molotov, Félix Tchouev, 1995, ISBN 2226076506

[modifier] Lien externe