Trempe

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La trempe ou trempage est un traitement thermique des métaux. Cette opération consiste à plonger un matériau chaud dans un fluide plus froid afin de le doter de propriétés nouvelles. Elle est réalisée immédiatement après l'opération dite de mise en solution.

On parle aussi de trempe pour qualifier le processus de solidification brutale d'un magma en une roche, par exemple par exhumation rapide dans l'eau de mer ou éruption volcanique. Les roches obtenues par trempe sont des roches volcaniques partiellement cristallisées, avec des textures typiques.

Sommaire

[modifier] Principe de la trempe des métaux

La trempe est un refroidissement brutal de la pièce qui a pour objectif de figer la structure obtenue lors de la mise en solution. Dans certains cas, comme l'acier, ce refroidissement s'accompagne d'une transformation allotropique.

La séquence de traitement est la suivante :

  • la mise en solution :
  • chauffage de la pièce jusqu'à une température suffisante (pour les aciers > 800 °C),
  • maintien en température pour homogénéisation et mise en solution solide des éléments d'alliage,
  • la trempe : refroidissement rapide dans le fluide de refroidissement.

Fréquemment par extension de langage, la séquence « mise en solution + trempe » est appelée « trempe ».

Les fluides utilisés par ordre de vitesse de refroidissement (de la plus élevée à la plus faible) sont :

  • l'eau,
  • l'eau additivée (polymère par exemple),
  • l'huile,
  • le brouillard d'eau,
  • les gaz (air, argon, azote, etc.).

La vitesse de refroidissement est conditionnée par trois facteurs :

  • le transfert de chaleur dans le fluide de trempe ;
  • le transfert de chaleur à l'interface métal-fluide de trempe ;
  • le transfert de chaleur dans le métal.

La trempe peut être suivie d'un revenu, qui est un réchauffement de la pièce. Elle permet d'obtenir les caractéristiques mécaniques définitives de la pièces soit en les augmentant (cas des alliages sans transformation allotropique), soit en les diminuant et obtenir un alliage moins fragile (cas des alliages avec transformation allotropique).

[modifier] Trempe avec transformation allotropique

Le cas le plus caractéristique est le cas de l'acier.

Le mécanisme de la trempe est lié aux changements de formes cristallines d'un métal en fonction de la température (les variétés allotropiques). Un métal est une forme cristalline au sein de laquelle des atomes peuvent venir se loger (composé intersticiel). La solubilité de ces atomes dans la maille dépend de la structure de celle-ci et de sa taille. Une variation brusque de température d'un cristal dans lequel est dissout une grande quantité d'un composant passant d'une maille munie de sites importants vers une maille plus serrée emprisonne ces atomes dans le nouveau cristal et crée une contrainte dans celle-ci.

Dans le cas de l'acier, le composant obtenu après trempe s'appelle la martensite. Sa dureté correspond à l'allongement de la zone d'élasticité (courbe d'allongement en fonction de l'effort) en lieu et place la zone de déformation plastique. La résistance élastique s'approche de la résistance à la rupture.

La déformation plastique d'un métal résulte du déplacement des défauts du cristal le composant (les dislocations). Les dislocations se propagent (dans les directions principales résultant du croisement des plans de compacité maximale) plus difficilement dans un cristal dont la maille est contrainte. D'autres effets permettent de durcir un métal : la présence de beaucoup de dislocations (elles se gènent mutuellement dans leurs déplacements) ou écrouissage, le durcissement structural ou la substitution d'atomes d'un cristal par d'autres (autres manières que la trempe d'introduire des composants dans un cristal).

Les paramètres principaux d'une trempe sont le taux de composants étrangers dissous dans le cristal, la vitesse de traversée de la zone de changement de variété allotropique ainsi que les proportions de certains additifs. Cette vitesse va déterminer quelle proportion de composant intrus va avoir le temps de migrer à l'extérieur du cristal sous l'effet des contraintes.

Pour les aciers, la zone de températures de 600 à 800 °C doit être franchie sans arrêt sinon une forme spécifique du métal pourrait se former. Si le passage de la zone de recristallisation est trop lent, celle-ci suit à l'intérieur de chaque grain des lignes de potentiels énergétiques correspondant à des plans dont la géométrie est liée aux plans de compacité maximale du cristal, créant des particularités non anisotropes et rendant la pièce fragile (structure de Widmanstätten).

[modifier] Trempe sans transformation allotropique, l'exemple des alliages d'aluminium

[modifier] Objectif et principes

Cycle de traitement thermique des alliages d'aluminium en vue d'obtenir une augmentation des caractéristiques mécaniques par durcissement structural.
Cycle de traitement thermique des alliages d'aluminium en vue d'obtenir une augmentation des caractéristiques mécaniques par durcissement structural.

Le but de la trempe dans le cas des alliages d'aluminium est de maintenir à la température ambiante une solution solide sursaturée en éléments d'addition. Cette solution solide est obtenue en effectuant une mise en solution des éléments constituant les précipités présents à la température ambiante. Après la trempe on obtient une solution solide sursaturée en éléments d'additions. À la température ambiante, cette solution est métastable. La trempe fige cet état de dissolution et également capture les lacunes créées par l'effet de la température. Les éléments d'additions ainsi que les lacunes sont positionnés de manière aléatoire en substitution des atomes d'aluminium aux nœuds du réseau cristallin de la matrice aluminium (cubique à faces centrées). Il n'y a pas de transformation allotropique. Une pièce en alliage d'aluminium brut de trempe (immédiatement après la trempe) à de très faibles caractéristiques mécaniques.

La trempe des alliages d'aluminium est effectuée sur les alliages dit à durcissement structural (Alliages d'aluminium à durcissement structural : familles des 2000, 4000, 6000 et 7000 ; Alliages de fonderie : familles des 20000 et 40000 principalement). La trempe est un élément de la séquence de traitement :

  • mise en solution,
  • trempe,
  • maturation (à température ambiante) ou revenu.

Dans la nomenclature des états métallurgiques des produits corroyés en alliage d'aluminium (norme EN 515), l'état mise en solution, brut de trempe est appelé W : mise en solution trempé.

Extrait du diagramme de phase aluminium-cuivre : Pour un alliage à 3,5 % de cuivre, la température de mise en solution doit être supérieure à Tm afin de dissoudre totalement le cuivre dans la phase α. Pour éviter la brûlure, cette température doit être inférieure à Tb. Cette représentation est théorique, un alliage n'étant jamais purement binaire, il faut également tenir compte des autres éléments d'alliage. C'est seulement quand on a la dissolution complète des éléments d'addition que l'on effectue la trempe.
Extrait du diagramme de phase aluminium-cuivre : Pour un alliage à 3,5 % de cuivre, la température de mise en solution doit être supérieure à Tm afin de dissoudre totalement le cuivre dans la phase α. Pour éviter la brûlure, cette température doit être inférieure à Tb. Cette représentation est théorique, un alliage n'étant jamais purement binaire, il faut également tenir compte des autres éléments d'alliage. C'est seulement quand on a la dissolution complète des éléments d'addition que l'on effectue la trempe.

Si l'on prend l'exemple de l'alliage 2017 le but du traitement de mise en solution sera de dissoudre les 3,5% de cuivre contenu dans l'alliage.
Il faut donc amener le métal à une température supérieure à la température du solvus correspondant au diagramme de phase aluminium-cuivre (Tm sur le graphique).
Le température typiques de trempe est située entre 440 et 500°C.
Il faut veiller à ne pas utiliser une température trop élevée pour ne pas « brûler » le métal (fusion partielle).
En cas de brûlure, la pièce devient impropre à l'utilisation par perte de caractéristiques mécaniques et ne peut pas être retouchée.

Le temps de maintien à cette température doit être suffisant pour obtenir cet état de solution.
La durée est dépendante des dimensions de la pièce mais également de l'alliage :
1 minute pour une tôle en 6061, 30 minute pour une tôle en 2024 (épaisseur : 1 mm).
Des durées de mise en solution plus importantes sont nécessaires pour les pièces de fonderie (5 heures mini pour des pièces en 21000, 8 à 12 heures pour des pièces en 42200).

Quelques procédés de transformations (filage, laminage) permettent sous certaines conditions de réaliser la trempe immédiatement après la transformation.
C'est la trempe sur presse : La température obtenue par le préchauffage du métal et lors de la transformation est suffisante pour effectuer la mise en solution de la pièce.
La pièce est trempée immédiatement à la sortie de la presse ou du laminoir sans phase de chauffage. Un cas analogue se présente en fonderie, principalement avec les alliages de la série 71000, c'est la "trempe au démoulage".

[modifier] Vitesse critique de trempe

Le résultat est obtenu uniquement si la vitesse de trempe (vitesse de refroidissement du métal) est supérieure à la vitesse critique de trempe. Dans le cas contraire, si la vitesse est insuffisante, on obtient la formation de précipités grossiers de taille et de forme ne permettant pas d'obtenir les caractéristiques mécaniques recherchées.

Cette vitesse critique de trempe est fonction de l'alliage (exemple : 18°C/s pour le 2017 et 100°C/s pour le 7075). Pour obtenir le bon résultat, il faut que la vitesse de trempe soit supérieure à la vitesse critique en tous points du volume de la pièce trempée. Pour des pièces massives, la vitesse variera fortement entre le cœur de la pièce et sa périphérie. Ainsi dans certains cas, les caractéristiques mécaniques seront plus faibles dans la partie centrale de la pièce à l'issue du traitement thermique.

D'un point de vue pratique, il faut veiller à ce que le temps de transfert entre le four et le bac de trempe soit suffisamment court pour que la pièce n'atteigne pas une température trop faible avant d'être refroidie par le fluide de trempe. La vitesse de refroidissement à l'air étant faible et dans la majorité des cas supérieure à la vitesse critique. Ce point est particulièrement vrai dans le cas de pièces minces.

[modifier] Fluide de trempe

La trempe s'effectue par immersion dans l'eau, par pulvérisation d'eau ou par soufflage d'air.

Le fluide le plus utilisé est l'eau froide (T<40°C). Dans certain cas, l'eau froide génère un refroidissement trop rapide (exemple : pièces de formes compliquées) et génère des contraintes internes préjudiciables à l'utilisation de la pièce (déformations, risque de corrosion sous contrainte ou même rupture de la pièce si les contraintes sont trop élevées). Dans ce cas, on peut utiliser de l'eau chaude (T>50°C) ou de l'huile. Dans certains cas assez rares, il est possible d'utiliser d'autres fluides comme des liquides à base de glycol pour minimiser la formation des contraintes internes. Il est possible également de relaxer les contraintes en effectuant un travail à froid immédiatement après la trempe (sur trempe fraiche). On peut ainsi étirer la pièce ou la comprimer.

Pour éviter la formation d'un film de vapeur d'eau autour de la pièce (phénomène de caléfaction) on peut revêtir la pièce d'un revêtement. Cette opération s'appelle le potéyage.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • Guy Murri, Aide mémoire métallurgie, métaux, alliage, propriétés, Dunod, Paris 2004, 330 pages (ISBN 2-10-007599-3)
  • Norme EN 515 : «Aluminium et alliages d'aluminium – Produits corroyés – Désignation des états métallurgiques», publié par le Comité européen de normalisation (CEN), août 1993 (version française éditée par l'AFNOR).
  • Roger Develay, « Traitements thermiques des alliages d'aluminium », traités Matériaux métalliques M1290, éditée par les Techniques de l'ingénieur, janvier 1986.
  • Bruno Dubost, Pierre Sainfort, « Durcissement par précipitation des alliages d'aluminium », traités Matériaux métalliques M240, éditée par les Techniques de l'ingénieur, octobre 1991.
  • Jean Philibert, Alain Vignes, Yves Bréchet, Pierre Combrade, Métallurgie, du minerai au matériau, Édition Dunod, 2e édition, 2002 (ISBN 2-10-006313-8).