Thorstein Veblen

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Thorstein Bunde Veblen
Naissance : 1857
Wisconsin (Etats-unis d'Amérique)
Décès : 1929
()
Nationalité : américaine
Champs : sociologie, Économie
Célèbre pour : sociologie des sciences, consommation ostentatoire, effet Veblen, institutionnalisme américain...

Thorstein Bunde Veblen est un économiste et sociologue américain, né en 1857 et mort en 1929. Il était membre de l'Alliance technique fondée en 1918-19 par Howard Scott, qui donna naissance au Mouvement technocratique.

Sommaire

[modifier] Biographie

Veblen naît aux États-Unis dans le Wisconsin dans une famille rurale d'immigrés norvégiens. La langue d'usage à la maison était le norvégien. Il garda des contacts avec la culture scandinave en y séjournant à plusieurs reprises et en traduisant en anglais des sagas islandaises. Né dans une famille luthérienne pratiquante austère, Veblen devint athée. Il changea d'université et de ville à de nombreuses reprises en partie à cause de sa vie sentimentale agitée.

[modifier] Pensées vebleniennes

[modifier] La consommation ostentatoire

Icône de détail Article détaillé : consommation ostentatoire.

Esprit extrêmement caustique, il s'intéressa à la partie cachée de l'iceberg économique : les motivations des acheteurs. Considérant la classe à l'abri des besoins matériels immédiats et de la contrainte du travail autre que souhaité (la classe de loisir, ainsi la nomme-t-il), il y trouva essentiellement la vanité et le désir de se démarquer de son voisin. Il note que par sa consommation l'élite gaspille du temps et des biens. Elle fait du gaspillage du temps, soit le loisir, et du gaspillage des biens, soit la consommation ostentatoire, ses priorités. Par exemple, une de ses pages inoubliables dans sa Théorie de la classe de loisir (1899) concerne le lustre de l'étoffe, prisée dans les chapeaux car servant à montrer qu'on les change souvent, et considéré défavorablement pour les pantalons parce qu'il montre qu'au contraire on ne l'a pas changé depuis longtemps. Alors qu'il s'agit du même lustre ! Il n'y a donc pas selon lui d'esthétique dans l'affaire, mais simplement une émission de signifiants de puissance qui est la raison d'être de la consommation ostentatoire (conspicuous consumption). Ce concept est fondateur en sociologie et on le retrouve sous une forme ou une autre dans la sociologie de Pierre Bourdieu, de Robert K. Merton et dans une autre mesure dans l'œuvre de Jean Baudrillard.

[modifier] L'effet Veblen

Icône de détail Article détaillé : Effet Veblen.

On déduira des concepts de gaspillage de temps et de biens l'effet Veblen. En économie, cet effet fait référence à un paradoxe, plus le prix d'un bien augmente plus sa consommation augmente également. Cet effet concerne avant tout les classes supérieures, mais l'exemple des vêtements de marque auprès des jeunes moins favorisés est également une bonne illustration de l'effet Veblen.

[modifier] L'institutionnalisme américain

Au-delà de son ton sarcastique et caustique, Veblen est également le fondateur du courant de pensée économique dit de l'institutionnalisme américain, dont les thèses seront prépondérantes aux États-Unis dans les années 1920 et 1930. Son article Why is Economics not an Evolutionary Science?, publié en 1899, peut être considéré comme le texte fondateur de la pensée de Veblen mais aussi de l'ensemble de la pensée institutionnaliste, en ce qu'il énonce les grands principes d'une économie évolutionnaire s'opposant aux thèses marginalistes. Plusieurs points, que Veblen développera lors de ses écrits postérieurs, ressortent clairement : le rejet de la conception hédoniste de l'individu proposée par le marginalisme, la critique des « préconceptions de normalité » suivant lesquelles l'évolution tend nécessairement vers un équilibre stable prédéfini, la nécessité de partir d'une étude du comportement humain, des facteurs le déterminant et de leur évolution etc.

[modifier] L'évolutionnisme

Veblen est surtout le premier économiste à avoir tenté d'intégrer dans les sciences sociales les apports du darwinisme, tout en se démarquant radicalement du darwinisme social. Outre le darwinisme, Veblen a également puisé l'essentiel de son épistémologie dans la philosophie pragmatiste américaine, notamment celle de Charles Sanders Peirce, et s'est également appuyé fortement sur les apports de la psychologie sociale de son époque, telle qu'elle ressort des écrits de William James (par ailleurs philosophe pragmatiste et ami de Peirce) et de William McDougall.

[modifier] Le développement social et les ingénieurs

Pour Veblen, l'économie peut expliquer le développement social. Ainsi, les institutions de l'économie sont traversées par deux instincts de base, l'instinct artisan et l'instinct prédateur. Par l'instinct artisan, l'homme s'enrichit au travers de son travail, au travers de la domestication rationnelle de la nature. Cependant, par son instinct prédateur, le genre humain veut déposséder autrui de ses biens et des résultats de son travail.

Contrairement à beaucoup d'autres économistes, Veblen ne voit pas dans la bourgeoise industrielle un moteur pour la société. Ceux-ci vivent du succès de l'industrie, mais ils n'utilisent pas ces profits de manière socialement durable. Mais Veblen pense que le changement peut malgré tout provenir de l'industrie, il est potentiellement incarné par les ingénieurs. Ces experts devraient prendre le contrôle de l'industrie qui est dans les mains d'irresponsables, les propriétaires.

[modifier] L'université

De par son analyse de l'institution académique, Veblen est également considéré comme l'un des fondateurs de la sociologie des sciences. Pour Veblen, l'université sert à la reproduction des classes sociales plutôt qu'à la connaissance. Dans son ouvrage The Higher Learning In America, Veblen dénonce l'influence indue de la religion et de la pensée conservatrice au sein d'une institution qu'il aimerait être vouée à la culture du savoir. L'université corrompt valeurs, orientations et idéaux que la société étasunienne lui avait donnée. Cette corruption de l'enseignement est introduite par la fraude et les spéculations financières opérées par les administrations des universités.

[modifier] Quelques œuvres de Veblen

(Liste non exhaustive)

  • Theory of the Leisure Class (1899)
  • Theory of Business Enterprise (1904)
  • The Instinct of Workmanship and the State of Industrial Art (1914)
  • The Higher Learning In America (1918)
  • The Engineers and the Price System (1921)

[modifier] Citations

  • « La théorie des droits naturels de propriété fait de l'effort productif d'un individu autosuffisant et isolé, la base de la propriété qu'on lui attribue. Ce faisant elle oublie qu'il n'y a ni isolement ni auto-suffisance de l'individu. Toute la production est, en fait, une production grâce à la communauté, et la richesse n'est telle qu'en société. » The American Journal of Sociology, Novembre 1898.
  • « Dans les premières décennies de l'ère des machines, celles des précurseurs, il a été vrai, en gros, comme on le voit, que la routine habituelle de l'administration de l'industrie consistait à chercher de nouvelles méthodes et à accélérer la production au maximum de ses capacités.  » The Engineers and the Price System.
  • « Les experts, techniciens, ingénieurs [...] constituent l'état-major indispensable du système industriel. Sans leur contrôle immédiat et leurs corrections éventuelles, le système industriel ne fonctionne pas. [...] Jusqu'ici ils ne sont pas encore groupés même de loin en une force de travail autonome [...] mais ils sont en position de faire le pas suivant » Ibid
  • « Le désir de disposer d'un plus grand confort et de se mettre à l'abri du besoin, voilà un mobile qui se trouve à tous les stades du processus d'accumulation dans une société industrielle moderne; toutefois, ce qu'on peut appeler à cet égard le niveau de suffisance est à son tour profondément affecté par les habitudes de rivalité pécuniaire. » Theory of the Leisure Class.

[modifier] Bibliographie

  • David Seckler : Thorstein Veblen and the Institutionalists. A study in the social Philosophy of economics. Londres, Mac Millan 1975.

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes