Salon littéraire

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Lecture de Molière par Jean-François de Troy, vers 1728
Lecture de Molière par Jean-François de Troy, vers 1728

Un salon littéraire est une réunion d’hommes et de femmes de lettres se rencontrant régulièrement, dans un milieu intellectuel, souvent mondain, pour discuter l’actualité de l’époque concernée, philosophie, littérature, morale, etc. L’expression est apparue au XVIIe siècle[réf. nécessaire], mais l’on peut aussi qualifier de telles réunions de club, groupe, voire de cénacle.

Avant le règne de Louis XIV, préexistaient non pas des salons mais des groupes littéraires. Le plus célèbre était celui de Malherbe dont Boileau salua l’avènement. Ce salon était réputé non pour aider mais pour détruire ses contemporains. Par exemple, Racan, voyant que Malherbe avait rayé environ une page sur deux d’un livre récemment sorti, commit l’imprudence de lui demander si le reste était bon. Celui-ci, d’abord interloqué, passa la première heure de leur réunion à biffer toutes les pages qui avaient échappé au premier massacre.

Il y eut ensuite jusqu’au début du XIXe siècle, des réunions assez nombreuses d’esprits d’élite ou de personnes tenant à la « société polie », qui constituèrent autant de centres, de foyers littéraires dont la connaissance est indispensable pour saisir dans ses détails et ses nuances l’histoire de la littérature. Comme ces salons littéraires furent presque toujours présidés par des femmes, l’histoire des premiers ne peut s’envisager indépendamment des secondes que distinguait l’esprit, le goût et le tact.

C’est dans leur salon que s’est développée l’habitude de la conversation et qu’est née l’art de la causerie caractéristique de la société française. Ces salons où l’on s’entretenait des belles choses en général, et surtout des choses de l’esprit exercèrent une influence considérable sur les mœurs et la littérature. La première réunion de ce genre fut celle de l’hôtel de Rambouillet, dont la formation remonte à 1608 et dura jusqu’à la mort de son hôtesse, Catherine de Rambouillet, dite « Arthénice », en 1659.

Charles Nodier, salonnier du XIXe siècle.
Charles Nodier, salonnier du XIXe siècle.

Le second salon littéraire à voir le jour fut celui de Conrart ne date que de 1629. Malgré cela, comme c’était un salon d’hommes, cette réunion littéraire privée devint, au bout de quelques années, sous la protection de Richelieu, et malgré certaines résistances, grâce à Boisrobert et à Chapelain, un corps officiel d’où est sorti l’Académie française.

Vers le milieu du XVIIe siècle, l’abbé d’Aubignac eut une réunion littéraire dont il voulut également faire une Académie. Il écrivit à ce sujet un Discours au roi sur l’établissement d’une seconde Académie dans la ville de Paris (1664) qui sollicitait le titre d’« Académie royale », mais ni le roi ni les ministres ne s’occupèrent de ces visées ambitieuses pourtant appuyées le dauphin, protecteur de l’abbé.

Scarron, dont le style burlesque fit date autant que ses épigrammes souvent acerbes ont traversé les siècles jusqu’à nous, ouvrit, au début du règne de Louis XIV, un salon qui acquit une grande notoriété après son mariage avec Françoise d’Aubigné, future Madame de Maintenon alors âgée de seize ans. Son amitié avec Ninon de Lenclos, qu’elle prit sous sa protection, et la légèreté de leur jeune âge attirèrent rapidement les mondains et les beaux esprits et enfin l’élite intellectuelle du temps.

Le XVIIIe siècle eut le salon du baron d’Holbach, « le premier maître d’hôtel de la philosophie » chez qui se réunissaient Diderot, d’AIembert, Helvétius, Marmontel, Raynal, Grimm, l’abbé Galiani, etc. On peut dire que l’Encyclopédie naquit dans cette réunion, que Rousseau, appela après sa rupture avec les Lumières, le « club holbachique », et dont Morellet, qui avait également son propre cercle, a écrit qu’ « On y disait des choses à faire cent fois tomber le tonnerre sur la maison, s’il tombait pour cela. »

Un célèbre salon, au XIXe siècle fut celui de Charles Nodier à la bibliothèque de l'Arsenal où se retrouvaient les hommes les plus illustres dans le monde des lettres et des arts que la France ait produits au cours du XIXe siècle. À son arrivée au poste de bibliothécaire de Monsieur, en remplacement de l’abbé Grosier, Nodier amena à l’Arsenal la brillante pléiade des écrivains et des artistes de l’école romantique, qui trouvèrent dans leur aîné de vingt à trente ans, un guide et un appui. Victor Hugo, Lamartine, Alfred de Musset, Alexandre Dumas, Balzac, Sainte-Beuve, Alfred de Vigny, Émile Deschamps, Jules Janin, Eugène Delacroix, les frères Johannot, Robert-Fleury, Liszt, Amable Tastu, et bien d’autres encore, étaient les habitués de ce salon situé au premier étage de l'Arsenal.