Salaire minimum interprofessionnel de croissance

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Le salaire minimum interprofessionnel de croissance[1], plus connu sous l'acronyme SMIC, anciennement salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), est, en France, le salaire minimum horaire en dessous duquel aucun salarié ne peut être payé. Il est réévalué au minimum tous les ans au 1er juillet, et plus souvent en cas d’inflation importante ou de choix politique.

Depuis le 1er mai 2008, la valeur du SMIC brut est de 8,63 € par heure[2] en France (à ne pas confondre avec le montant minimum garanti, fixé à 3,28 €). Soit, pour un travail à temps plein de 151,67 heures par mois (semaine de 35 heures), 1 308,91 € brut mensuel[3], ce qui correspond à un peu plus de 1 000 € net[4].

Au 1er juillet 2006, il y avait 2,27 millions de smicards en France, représentant 15,1 % des salariés (hors secteur agricole et interim)[5], 9,0 % des emplois, 8,1 % de la population active.

34,5 % des personnes payés au SMIC horaire travaillent à temps partiel[6].

Sommaire

[modifier] Historique

Le SMIC a succédé, en application d'un décret du Premier ministre Jacques Chaban-Delmas du 2 janvier 1970, au Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), instauré le 11 février 1950. Le SMIG n'était indexé que sur les prix, qui augmentent moins vite que la moyenne des salaires en moyenne, notamment parce que les salaires croissent en moyenne au même rythme que la productivité (environ 5 % par an pendant les Trente glorieuses, un peu moins de 2 % par an en moyenne ensuite). Le pouvoir d'achat du SMIG n’augmentait pas, et en raison des gain de productivité il y avait de moins en moins de smigards.

Des fortes revalorisations du SMIC entre 1994 et 2005 ont conduit à ce que le SMIC augmente plus vite que le salaire moyen, et ont abouti à un « écrasement de la hiérarchie des salaires »[7]. La proportion de salariés payés au SMIC dans l’ensemble des salariés est passée d’environ 10 % sur la décennie 1987-1996 à plus de 16 % en 2005[7]. Le pouvoir d'achat des travailleurs payés au salaire minimum a cru plus vite en moyenne que celui des autres salariés ; en particulier, les bas salaires sont progressivement rattrapés par la croissance du SMIC car ils augmentent moins vite que le SMIC[7].

Au cours des années 1990 et des années 2000, les gouvernements ont également baissé les charges sur les bas revenus afin de limiter la croissance du coût du travail des bas salaires, en particulier au niveau du SMIC, pour favoriser l'emploi. Ces actions ont eu comme effet pervers d'augmenter la proportion d'employés payés au SMIC par un effet dit de « trappe à bas salaire ».

La réduction de la durée du travail de 39 à 35 heures entre 1997 et 2002 a donné lieu à la création de cinq SMIC différents. Les niveaux des SMIC ont été réunifiés de 2003 à 2005 par la loi Fillon sur la RTT, avec un mode de convergence qui a abouti à une forte revalorisation du SMIC, qui a augmenté d’unpeu plus de 5,5 % en moyenne sur chacune des trois années 2003-2005[7].

[modifier] Exceptions au SMIC

Dans certains cas, il existe une réduction :

  • Les mineurs ayant moins de six mois d'expérience dans un secteur d'activité peuvent percevoir une rémunération inférieure de 20% au smic pour les mineurs de 16 à 17 ans et de 10 % pour les mineurs de plus de 17 ans. Cet abattement est supprimé si le rendement du jeune est égal à celui des adultes de sa catégorie (principe « à travail égal, salaire égal »).
  • Les jeunes en contrat d'apprentissage perçoivent une rémunération allant de 25 % à 78 % du SMIC (ou du minimum conventionnel) en fonction de leur âge et de leur ancienneté dans le contrat d'apprentissage. Ils étaient 340 000 en 1997.
  • Les jeunes en contrat de qualification perçoivent une rémunération allant de 30 % à 75 % du smic selon les mêmes critères.
  • Les jeunes en contrat d'orientation perçoivent une rémunération de 30 % à 65 % du smic selon leur âge.
  • Les jeunes en stages ne reçoivent pas de rémunération mais peuvent recevoir une indemnité. Si la durée du stage est supérieure à trois mois consécutifs (loi sur l'égalité des chances du 1er juillet 2006), cette gratification est obligatoire. Elle est fixée par convention de branche ou accord professionnel étendu, ou, à défaut, par décret. Pour le moment aucun décret n'en a précisé le montant.
  • Les travailleurs handicapés peuvent se voir attribuer une rémunération inférieure au SMIC. L'abattement diffère selon que le travailleur exerce en milieu traditionnel ou protégé. Dans ce cas un complément de rémunération leur est accordé pour atteindre le minimum conventionnel ou le SMIC.
  • Les salaires agricoles minima dépendent d'un autre barème.

Les travailleurs à temps partiel ne perçoivent pas une rémunération inférieure aux SMIC horaire.

Les notes de frais, heures supplémentaires et primes sont exclues du calcul.

[modifier] Revalorisation

Son augmentation correspond au minimum à l'inflation constatée l'année précédente, plus 50 % de l'augmentation du salaire moyen[réf. nécessaire]. Le gouvernement a en outre la possibilité d'accorder des « coups de pouce ».

De plus si l'inflation constatée entre le 1er juillet et le dernier mois connu (N-1) dépasse 2 %, il est automatiquement réévalué au mois N+1 du pourcentage de cette inflation.

L'augmentation du salaire minimum est autant un enjeu syndical que politique comme l'attestent les déclarations de la CGT réclamant un SMIC à 1 500 euros brut par mois, au lieu des 1 308,91 euros actuels.

Pendant la campagne électorale de 2007, le Parti socialiste promettait l'augmentation du SMIC à 1 500 euros (parfois nets, parfois bruts) par des coups de pouce réguliers, pour atteindre ce montant au plus tard en 2012 (c'est-à-dire au terme de la législature 2007-2012), ce qui correspondait à la prévision de la hausse du salaire moyen prévue. Cependant, la candidate Ségolène Royal est revenue sur cet engagement après sa défaite électorale en le qualifiant de « non crédible »[8].

L'OCDE recommande, afin de réduire le chômage, de limiter la croissance du SMIC au strict maintien du pouvoir d'achat[9]. De même, le FMI note que « La hausse tendancielle du SMIC, en renchérissant le coût du travail, a évincé les jeunes et les non-qualifiés du marché du travail. Elle a par ailleurs comprimé l'échelle des bas salaires et découragé le travail. »[10]

L’INSEE a estimé en 2000 qu’« une augmentation de 10 % du Smic détruirait environ 290 000 emplois [..] à long terme »[11].

[modifier] Évolution récente du SMIC horaire brut en euros

Date
parution au JO
Montant
horaire
Évolution Inflation Différence Gouvernement et parti
30 juin 1995 5,64 € + 3,99 % + 1,7 % + 2,29 pts Juppé, RPR
28 avril 1996
28 juin 1996
5,75 €
5,78 €
+ 0,56 %
+ 2,00 %
+ 2,0 % + 0,57 pt * Juppé, RPR
27 juin 1997 6,01 € + 4,00 % + 1,2 % + 2,8 pts Jospin, PS
26 juin 1998 6,13 € + 2,00 % + 0,7 % + 1,3 pt Jospin, PS
2 juillet 1999 6,21 € + 1,30 % + 0,5 % + 0,8 pt Jospin, PS
30 juin 2000 6,41 € + 3,22 % + 1,7 % + 1,52 pt Jospin, PS
29 juin 2001 6,67 € + 4,06 % + 1,70 % + 2,36 pts Jospin, PS
28 juin 2002 6,83 € + 2,40 % + 1,90 % + 0,5 pt Raffarin, UMP
28 juin 2003 7,19 € + 5,27 % + 2,10 % + 3,17 pts Raffarin, UMP
2 juillet 2004 7,61 € + 5,80 % + 2,10 % + 3,70 pts Raffarin, UMP
30 juin 2005 8,03 € + 5,50 % + 1,80 % + 3,70 pts Villepin, UMP
1er juillet 2006 8,27 € + 3,05 % + 1,60 % + 1,45 pt Villepin, UMP
1er juillet 2007 8,44 € + 2,10 % + 2.00 % + 0.10 pt Fillon, UMP
1er mai 2008 8,63 € + 2.25 % + ???? % + ???? pt Fillon, UMP
NB : le taux d'inflation annuel est celui du mois de juillet.

* Pour l'année 1996, il a été tenu compte des deux évolutions cumulées dans le calcul de la différence.

Source :réf. à confirmer :  Insee

[modifier] Évolution historique du SMIC horaire brut en euros

Salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) en €/h[12]
2008 2007 2006 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1996 1995 1994
8,63 8,44 8,27 8,03 7,61 7,19 6,83 6,67 6,41 6,21 6,13 6,01 5,78 5,75 5,54 5,42
1993 1992 1992 1991 1990 1990 1990 1989 1989 1988 1988 1987 1987 1986 1986 1985
5,31 5,19 5,08 4,98 4,87 4,77 4,65 4,56 4,48 4,38 4,34 4,24 4,20 4,10 4,05 3,97
1985 1985 1984 1984 1984 1984 1983 1983 1983 1983 1982 1982 1982 1982 1982 1981
3,89 3,80 3,71 3,63 3,59 3,47 3,40 3,34 3,30 3,20 3,09 2,99 2,90 2,84 2,77 2,71
1981 1981 1981 1980 1980 1980 1980 1980
2,64 2,55 2,32 2,25 2,18 2,13 2,08 2,04

[modifier] Le niveau du SMIC par rapport aux autres pays

Icône de détail Voir la section détaillée dans l'article : Salaire minimum.

En pourcentage du salaire moyen, le SMIC en France est beaucoup plus élevé que dans les autres pays de l'OCDE[13],

Les augmentations du SMIC, plus rapides que celles du salaire moyen, ont conduit à augmentation du pourcentage de salariés payés au salaire minimum. La part est passée de 8,1 % en 1993 à 16,3 % en 2005, et 15,1 % en 2006[14]. La comparaison avec les États-Unis montre qu’en France la part des salariés entre 25 et 55 ans payés au salaire minimum est très élevée, alors qu’aux États-Unis le salaire minimum ne concerne essentiellement que les jeunes de moins de 25 ans, qui font des « petits boulots »[15].

[modifier] Le SMIC remis en cause

Icône de détail Pour l'analyse théorique d'un salaire minimum, voir : salaire minimum.

Selon la vision libérale, le SMIC, du fait de son niveau élevé, a une influence particulièrement néfaste en France car il empêche l'ajustement entre l'offre (d'emplois par les entreprises) et la demande d'emplois (des chômeurs) sur certains marchés de l'emploi. Selon la théorie de l'offre et de la demande, les prix sur le marché (ici le prix du travail est le salaire) permettent un ajustement entre l'offre et la demande, et le retour à un état d'équilibre économique, le « plein emploi. » Les marchés de l'emploi concernés par ce problème sont ceux des emplois peu qualifiés (dont la productivité est inférieure au coût du SMIC pour l'employeur), où justement le chômage en France est particulièrement élevé.

Par ailleurs, l'échelle des salaires est aplatie par l'existence du SMIC, et certains employés seraient « bloqués » au niveau SMIC, sans espoir de promotion salariale. Ce phénomène est accentué en France par les allègements de charge qui ont été mis en place sur les bas salaires, incitant les entreprises à ne pas augmenter ces employés. L'Ifrap compare ainsi le pourcentage de salariés au Smic en France (16,8 %) au pourcentage américain (1,5 %)[16].

Le SMIC en France est beaucoup plus élevé que dans les autres pays de l'OCDE, en pourcentage du salaire moyen[17], ce qui peut avoir un effet négatif sur le chômage et la production en empêchant des rmistes de trouver un emploi.

Selon un rapport du Conseil d'analyse économique de Philippe Aghion, Gilbert Cette, Élie Cohen et Jean Pisani-Ferry, le niveau élevé du SMIC pénalise l’emploi des jeunes ; « on ne peut cependant ignorer que le niveau du coût du travail représente pour [les jeunes sans qualification] une barrière significative, accentuée par l’augmentation rapide du niveau relatif du SMIC au cours des dernières années. Il serait donc souhaitable de réexaminer ce que pourrait apporter une modulation selon l’expérience ou l’âge du salaire minimum des jeunes de moins de 25 ans dont le niveau de formation est inférieur au baccalauréat. »[18]

Le SMIC serait selon cette vision une mesure « anti-pauvres »[19],[20]. Ainsi, la redistribution des revenus se fait au profit non pas de ceux qui en ont le plus besoin, mais de ceux qui ont sur le gouvernement le pouvoir de pression le plus important, bénéficiant ici du soutien des syndicats de salariés français[21]. Les libéraux avancent enfin qu'il existe d'autres moyens de redistribution des revenus moins néfastes pour l'emploi (par exemple, la prime pour l'emploi, l’Impôt négatif, l’Allocation universelle, …) et moins distorsifs pour le marché du travail.

La vision keynésienne est :

  • Qu'un salaire minimum est un plus pour la consommation, une garantie contre une exploitation excessive des salariés les moins qualifiés.
  • Que le SMIC en France joue un rôle de redistribution, au même titre que la politique fiscale, que c'est un instrument de justice sociale patent.
  • Que le SMIC, en maintenant et en augmentant le pouvoir d'achat des travailleurs peu qualifiés, maintient la consommation, ce qui selon la théorie contestée de l'effet multiplicateur keynésien augmente l'emploi (les entreprises embauchant seulement en perspective de débouchés croissants).

Cependant, l'effet multiplicateur keynésien, s’il a peut-être fonctionné dans le passé , est de moins en moins efficace à mesure que l’économie devient ouverte (ce qui est le cas de la France où en 2005 54 % de la consommation de biens manufacturés est importée[22]), et la hausse de consommation générée par une hausse du SMIC ne relance que peu l’économie, et essentiellement à court terme, mais contribue à creuser les déficits publics.

[modifier] Notes et références

  1. description Ministère du Travail
  2. Arrêté du 25 avril 2008 relatif au relèvement du salaire minimum de croissance, legifrance.gouv.fr
  3. chiffres, site de l'INSEE
  4. chiffre en septembre 2007, site du Ministère du Travail
  5. Synthèses premières informations, DARES, mars 2007
  6. données INSEE
  7. abcd Philippe Aghion, Gilbert Cette, Élie Cohen et Jean Pisani-Ferry, Les leviers de la croissance française, Rapport du Conseil d'analyse économique, 2007, page 20 [lire en ligne]
  8. article Nouvel Obs, juin 2007.
  9. étude économique de la France, OCDE, 2005
  10. Conclusions de la mission 2007, France, point 6
  11. « Une décomposition du non-emploi en France », Économie et Statistique, n°331, 2000, INSEE
  12. Montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance, INSEE. Consulté le 15 juin 2008
  13. Le salaire minimum dans un pays proche, le Royaume-Uni, est proche du SMIC, mais le salaire moyen y est beaucoup plus élevé.
  14. Voir graphique dans le document de la DARES, mars 2007, p. 2
  15. « Characteristics of Minimum Wage Workers: 2005 », Département du travail américain : table 7 : en 2005, 6,1% des travailleurs âgés de moins de 25 ans sont payés sous ou au niveau du salaire minimum, contre 1,5% des travailleurs de plus de 25 ans ; par ailleurs (table 9), ce sont des emplois de courte durée. Les non blancs ne sont pas sur-représentés (table 1)
  16. Le Smic en France et aux États-Unis par l'Ifrap, chiffres de la Dares de 2006
  17. Le salaire minimum dans un pays proche, le Royaume-Uni, est proche du SMIC, mais le salaire moyen y est beaucoup plus élevé.
  18. Philippe Aghion, Gilbert Cette, Élie Cohen et Jean Pisani-Ferry, Les leviers de la croissance française, Rapport du Conseil d'analyse économique, 2007, page 55 [lire en ligne]
  19. Pour la suppression du SMIC (salaire minimum légal français)
  20. Le SMIC : machine à exclure, Pascal Salin, paru dans Libération le 20 mai 1995
  21. Le Smic Facteur De Chomage
  22. INSEE première, août 2006.

[modifier] Annexes

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

wikt:

Voir « SMIC » sur le Wiktionnaire.

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