Royaume de Patani

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Pour les articles homonymes, voir Pattani.

Le sultanat de Patani (en malais, le nom s'écrit avec un seul "t") était un royaume malais vassal des royaumes de Sukhothai puis d'Ayutthaya.

L'expansion thaïe vers le sud devait immanquablement se heurter à la résistance des sultanats du nord de la péninsule malaise, dont celui de Patani.

En 1572, le sultan Manzur Shah meurt. Suivent 12 années de guerres de succession entre ses fils et leurs cousins. Lorsqu'il ne reste plus un seul héritier mâle, c'est une des filles de Manzur, la princesse Ijau, qui monte sur le trône en 1584, devenant ainsi la première "reine" de Patani.

La sultane Ijau règnera 31 ans. Elle renforcera les liens de Patani avec Johor et Pahang, deux autres royaumes malais de la péninsule. Cette politique de relative indépendance vis-à-vis d'Ayutthaya est rendue possible par le fait que de 1564 jusque dans les années 1590, le royaume siamois doit faire face aux menaces des Birmans et des Khmers. Toutefois, à la fin du XVIe siècle, Ayutthaya retrouve sa puissance sous le règne du roi Naresuan.

Ijau meurt en 1615. Sa sœur Biru lui succède et règnera jusqu'en 1622. Elle marie sa sœur Ungu au sultan Abdul Ghafur Mohaidin Syah de Pahang. Ce mariage donnera une fille, Kuning. A la mort de Ghafur, Ungu rentrera à Patani avec sa fille. Lorsque Kuning a 12 ans, sa tante Biru la marie à un prince siamois, Okya Decho, fils du prince de Nakhon Si Thammarat (que les Européens appellent "Ligor"), vassal d'Ayutthaya.

A la mort de sa sœur en 1622, Ungu monte à son tour sur le trône. Elle s'arrange pour remarier sa fille au sultan de Johor. Okya Decho, furieux, obtient du roi d'Ayutthaya la permission de mener des troupes siamoises pour attaquer Patani. Ungu obtient le soutien de Pahang et Johor. L'attaque siamoise échoue.

Ungu mènera une politique anti-siamoise et refuse par exemple de se faire appeler par son titre siamois de phra chao ("princesse"). Lorsque le prince Prasat Thong prend le pouvoir à Ayutthaya et se fait couronner roi en 1630, Ungu refuse de lui payer tribut. Patani saisit même deux bateaux d'Ayutthaya qui se rendaient à Batavia, siège de la VOC (Verenigde Oost-Indische Campagnie ou "compagnie néerlandaise des Indes orientales"). Par ailleurs, Patani envoie des troupes pour attaquer les principautés de Phatthalung et Nakhon Si Thammarat.

Jaramias van Vliet, un représentant de la VOC détaché à Ayutthaya en 1633, mentionne bien cette "rébellion" de Patani sous le règne du roi Prasat Thong. Il écrit que Patani payait jusque là tribut à Ayutthaya.

En 1633, Ayutthaya recrute des troupes pour soumettre Patani. Le roi de Kedah, un autre royaume malais, intervient comme médiateur. Ayutthaya décide finalement d'envoyer plutôt une ambassade à Patani.

La sultane Ungu meurt en 1635. Sa fille Kuning lui succède. Son mari rentre à Johor. Sous le règne de Kuning, Patani retrouve les heures glorieuses du commerce international. La reine fait draguer l'embouchure de la rivière Patani pour qu'elle puisse accueillir plus de bateaux.

Contrairement à sa mère, hostile à Ayutthaya, la sultane Kuning les liens avec le roi Prasat Thong. En 1636, un ambassadeur est envoyé à Ayutthaya. Un tribut sous forme de fleurs d'or est envoyé au roi siamois. Kuning se rend elle-même à la capitale siamoise en 1641.

De 1646 à 1649, Patani s'allie au sultanat malais de Kedah et à la principauté de Songkhla pour résister à Ayutthaya. Les alliés attaquent et occupent Nakhon Si Thammarat en 1649. Ayutthaya envoie des troupes. En 1650, deux bateaux de Songkhla approtent un message de paix et des fleurs d'or pour rendre hommage à Prasat Thong.

En 1651, un prince de Kelantan, Raja Sakti, provoque un coup d'Etat. La sultane s'enfuit à Johor mais meurt en chemin près du rivage de Kelantan. Son corps est enterré dans le village de Kampung Pancor. Son règne aura été un des plus longs et prospères de la région

Le Jésuite français Nicolas Gervaise écrira dans les années 1680 que la sultane Ijau n'avait pas accès à tous les secrets du sultanat. Pourtant, c'est sous Ijau, ses sœurs et sa nièce Kuning, que Patani atteint le sommet de sa prosperité par son commerce avec l'Asie du Sud-Est, le Japon et l'Europe. C'est également sous les sultanes que sont entrepris des travaux d'irrigation.

Patani était un des meilleurs ports naturels sur la longue côte orientale de la péninsule malaise. Le royaume commerçait avec le Siam, les Etats de la péninsule eet de l'ouest de l'archipel indonésien, mais aussi avec la Chine et l'Inde. Il servait d'entrepôt au poivre produit dans la région, contre lequel les marchands chinois venaient échanger des étoffes précieuses et de la porcelaine. Les marchands indiens apportaient aussi des étoffes, qu'ils échangeaient contre de l'or, des épices et des produits agricoles.

Après la chute d'Ayutthaya en 1767, Patani redevient indépendant.

Puis sous le roi siamois Rama Ier, Patani tombe de nouveau sous la suzeraineté du Siam.

Le sultanat est annexé par le Siam dans le cadre du traité anglo-siamois de 1909. Patani, que les Siamois écrivent "Pattani", devient une province du Siam. Les régions de Narathiwat et Yala sont par la suite détachées de Patani pour être élevées au rang de provinces.

[modifier] Bibliographie

  • Hikayat Patani, "la chronique de Patani"
  • Davisakd Puaksom, "Ayutthaya in Pattani's Grasp: Historical Writings and Local History", The First Inter-Dialogue Conference on Southern Thailand, Pattani, juin 2002.
  • Perret, Daniel, Etudes sur l'histoire du sultanat de Patani, Ecole Française d'Extrême-Orient, 2005