Romanche

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Cet article concerne la langue romanche. Pour la rivière française et pour la fosse océanique, voir Romanche (rivière) et Fosse Romanche.

Le romanche (Rumantsch en romanche) est reconnu comme l'une des quatre langues nationales de la Suisse depuis le 20 février 1938, et il est considéré avec certaines restrictions comme langue officielle à l'échelle fédérale depuis la votation populaire du 10 mars 1996. Il est parlé uniquement dans le canton des Grisons où il a un statut officiel depuis le XIXe siècle. Son usage étant en régression lente (-15% depuis dix ans, moins de quarante mille locuteurs), des craintes se portent sur l'avenir de cette langue. Les nouveaux manuels scolaires édités par le canton ainsi que les documents administratifs sont désormais seulement dans la forme unifiée de la langue intitulée « Rumantsch grischun », pourtant la grande majorité des écoles et des administrations communales utilisent encore les cinq langues écrites infra-régionales.

  Romanche
(rumantsch)
 
Parlé en Suisse
Région canton des Grisons
Nombre de locuteurs 35 095[1]
Typologie SVO
Flexionnelle - Syllabique
Classification par famille

 -  Langues indo-européennes
    -  Langues italiques
       -  Langues romanes
          -  Langues gallo-romanes
             -  Langues rhéto-romanes
                -  Romanche

(Dérivée de la classification SIL)
Statut officiel et codes de langue
Officielle
en
Suisse
ISO 639-1 rm
ISO 639-2 roh
ISO/DIS
639-3
(en) roh
type : L (langue vivante)
étendue : I (langue individuelle)
SIL RHE
Échantillon

Article premier de la Déclaration des Droits de l'Homme (voir le texte en français)

Artichel ün.

Tuots umans naschan libers ed eguals in dignità e drets. Els sun dotats cun intellet e conscienza e dessan agir tanter per in uin spiert da fraternità.

Voir aussi : langue, liste de langues, code couleur

Sommaire

[modifier] Histoire[2]

En 1527, Juan Travers, homme d’Etat et de guerre, écrivait une sorte de Chanson de Geste (La chanzun da la guerra dal chasté da Müsch). Deux autres fondateurs de la langue écrite sont le réformateur Philippe Saluz et Giachem Bifrun.

Si les protestants recourent souvent pour des fins polémiques à la langue romanche, l’abbaye catholique de Disentis est le foyer au XVIIe siècle d’une littérature nouvelle.

Dans la période moderne, il faut citer des poètes nationaux comme Peider Lansel, Gion Fontana ou Maurus Carnot, ainsi que des érudits comme Planto ou Andréa Schorta, auteurs d’un Dictionnaire toponymique grison.

[modifier] Classification

C'est une langue romane, du groupe rhéto-roman, et donc proche du ladin et du frioulan.

[modifier] Répartition géographique

Répartition des langues aux Grisons
en 1860 et 2000
Répartition officielle en 1860. ██ Allemand ██ Romanche ██ ItalienSource : Office fédéral de la statistique, recensement 2000
Répartition officielle en 1860. ██ Allemand ██ Romanche ██ ItalienSource : Office fédéral de la statistique, recensement 2000
Répartition officielle en 2000. ██ Allemand ██ Romanche ██ ItalienSource : Office fédéral de la statistique, recensement 2000
Répartition officielle en 2000. ██ Allemand ██ Romanche ██ ItalienSource : Office fédéral de la statistique, recensement 2000
Répartition effective en 2000. ██ Allemand ██ Romanche ██ Italien Hachures : zone avec langue minoritaire parlées par au moins 30% de la populationSource : Office fédéral de la statistique, recensement 2000
Répartition effective en 2000. ██ Allemand ██ Romanche ██ Italien Hachures : zone avec langue minoritaire
parlées par au moins 30% de la population
Source : Office fédéral de la statistique, recensement 2000

[modifier] Statut officiel

Le romanche est « langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche.»[3] Le romanche n'est que très rarement utilisé lors des débats au Parlement fédéral. Il est parfois utilisé dans la signalisation routière du Canton des Grisons.

[modifier] Les différents romanches

Le romanche n'est pas qu'une seule et unique langue, mais cinq langues naturelles différentes, ayant chacune sa propre forme écrite standardisée :

  • le sursilvan, ou sursylvain, pour 13 879 locuteurs natifs dans la région du Rhin Antérieur (Surselva),
  • le sutsilvan, ou subsylvain, pour 571 locuteurs natifs dans la vallée du Rhin Postérieur (Schons, Rheinwald),
  • le surmiran, ou sourmiran, pour 2 085 locuteurs natifs dans les vallées de l'Albula et de la Julia (Surses),
  • le puter pour 2 343 locuteurs natifs en Haute-Engadine,
  • le vallader pour 5 138 locuteurs natifs en Basse-Engadine.

Le puter et le vallader forment ensemble le sous-groupe engadinois ou rumantsch ladin. On ne confondra ce sous-groupe avec la langue romane parlée au Tyrol du Sud, également appelée Ladin et qui fait partie du même ensemble rhéto-roman.

[modifier] Écriture

[modifier] Ordre alphabétique et valeur des graphèmes

Ordre alphabétique: comme en français. Les lettres w, y ne sont pas employées (sauf dans des mots étrangers).


Prononciation :


Voyelles:

Contrairement au français actuel, les voyelles romanches peuvent être longues ou brèves. (Pour simplifier, il n'en est pas tenu compte dans les indications ci-dessous.)

a, i : comme en français.

é, è, ê = é, è (en syllabe finale pour éviter la prononciation "e muet" ou pour distinguer des homographes); en vallader, é ne s'emploie pas et è est un son fermé.

e = (1) é, è; (2) dans les finales -el, -em, -en, -er (monosyllabes exceptés): e muet comme en français.

ö (engadinois) = eu français.

ü (engadinois) = u français.

Nombreuses diphtongues, se prononçant en général comme elles s'écrivent.

L'accent tonique est nettement prononcé, sur l'une des deux dernières syllabes. Comparer la différence entre heureux et heure en français méridional. Exemples en vallader: sandà "santé", mais sonda "samedi"; pajan (accent final comme en français: "païen"), mais pajan (accent sur la première syllabe comme en français: "ils paient").

L'accent tonique est indiqué par un point sous la voyelle dans les dictionnaires et les grammaires.


Consonnes:

b, d, f, k, l, m, n, r, t, v : comme en français.

c: (1) devant a, o, u = k comme en français; (2) devant e, i = ts.

ch:

(1) en engadinois = tch palatal (voir ci-dessous l'explication de tg); un francophone risque de confondre ce son avec tsch, mais en romanche il s'agit d'un phonème nettement différent: engadinois tschinch "cinq";

(2) en sursilvan, sutsilvan, surmiran (devant e, i) = k.

dsch (engadinois): en théorie = dj français; souvent prononcé tsch sous l'influence de l'allemand.

g: (1) devant a, o, u: comme en français; (2) devant e, i, ö, ü: dj palatal (mouillé), un peu comme dans une prononciation populaire de "bon dieu" (bon djieu); c'est le phonème sonore correspondant à tg (ci-dessous); en vallader, en début de mot, ce son est réduit à la semi-voyelle j (ci-dessous).

gl (devant i, ü et en fin de mot), gli (devant a, e, o, u) = l mouillé (comme lli dans le français allié, mais en un seul son). Exemples: glima "lime", egl (engadinois ögl) "oeil".

Remarques: (1) ce qu'on appelle traditionnellement "l mouillé" en français, comme dans il travailla, n'est plus un l mouillé proprement dit, mais une simple semi-voyelle, comme dans Maya; (2) les lettres g et l se prononcent séparément (comme en français) devant a, e, o, u et parfois exceptionnellement même devant i, ü. Exemples: glatsch "glace"; sursilvan gliergia, putèr glüergia, variantes de gloria "gloire".

gn = n mouillé, comme en français (romanche muntogna, français montagne). Remarque: parfois, g et n se prononcent séparément, comme en français dans stagnation, agnostique: romanche magnet (de l'allemand) "aimant".

h: (1) en début de mot: en général non prononcé, sauf dans les mots d'origine germanique; (2) entre voyelles (sursilvan) ou en fin de mot (putèr): aspiré.

j: semi-voyelle, comme y français dans yacht, essayer.

qu = [kw] (comme en italien).

s:

(1) s sourd [s] (français s, ss), parfois même entre voyelles: vallader ses "six", sesanta "soixante" (sursilvan sis, sissonta, rumantsch grischun sis, sessanta.

(2) s sonore [z] (français z, s), parfois même en début de mot: rosa (engadinois rösa) "rose", sut (engadinois suot) "sous".

(3) devant consonne sourde (même à l'intérieur de mot) = ch français [ʃ]: festa (sursilvan fiasta) "fête" (prononcer feschta, fiaschta); sco (putèr scu) "comme" (prononcer schkô, schkou).

(4) devant consonne sonore = j français [ʒ]: engadinois sdun "cuillère" (sursilvan et rumantsch grischun "tschadun").

sch:

(1) sch sourd = ch français [ʃ]: schanza "chance", sche (engadinois scha) "si" (exprimant une condition); nascher (sursilvan nescher; accent sur la première syllabe) "naître" (cf. imparfait naschaiva, nascheva, "naissait").

(2) sch sonore = j français [ʒ]: Grischun (nom: canton des Grisons; habitant de ce canton), grischun (adjectif: du canton des Grisons); schanugl (engadinois "schnuogl") "genou".

Remarque: si le mot romanche a un correspondant en français, la prononciation du sch est prévisible. Comme on le voit sur les exemples ci-dessus, si le mot correspondant en français a s sourd, ss ou ch, le romanche a un sch sourd; si le mot correspondant en français a s sonore ou g, le romanche a un sch sonore.

s-ch (engadinois) = sch + tch platal (cf. règles ci-dessus pour s devant consonne sourde et pour ch en engadinois); ce groupe de sons est écrit stg dans le reste du romanche et en rumantsch grischun.

tg (sursilvan, sutsilvan, surmiran et rumantsch grischun): sorte de tch palatal (mouillé) [tç]; cf. allemand Plättchen, mais en romanche il s'agit d'un son unique; cf. français t devant i ou u dans la prononciation des jeunes: la langue est largement appliquée sur le palais comme pour la semi-voyelle [j] (français y); imaginez quelqu'un qui prononcerait "entier" et "inquiet" de la même manière en français.

Remarque: en rumantsch grischun, ce son est écrit tg en général, mais ch devant a en début de mot; c'est une conséquence de la volonté de rester aussi proche que possible de la graphie des langues romanches préexistantes: cf. vallader chüna, surmiran tgegna, sursilvan tgina "berceau": rumantsch grischun tgina; mais vallader chasa, surmiran tgesa, sursivan casa "maison": rumantsch grischun chasa.

tsch: comme dans le français "match"; à distinguer de la palatale écrite ch ou tg.

z: (1) ts, (2) dz.

[modifier] Histoire

[modifier] Usages

[modifier] Prononciation

[modifier] Grammaire

[modifier] Lexique

[modifier] Exemples

Mot en français Mot en italien Mot en latin Traduction (ladin vallader) Prononciation standard
terre terra terra terra terra
ciel cielo cælum tschêl tschiel
eau acqua aqua aua aua
feu fuoco ignis fieu
homme uomo homo hom um
femme donna femina duonna dunna
manger mangiare edere mangiar mangiar
boire berre bevere baiver baiver
grand grande magnus grond grond
petit piccolo paruus pitschen pitschen
nuit notte nox not notg
jour giorno dies di di
Français Sursilvan Sutsilvan Surmiran Puter Vallader Rumantsch Grischun
or aur or or or or,aur,ar aur
dure dir dir deir dür dür dir
œil egl îl îgl ögl ögl egl
léger lev leav lev liger leiv lev
trois trais tres treis trais trais trais
neige neiv nev neiv naiv naiv naiv
roue roda roda roda rouda rouda roda
fromage caschiel caschiel caschiel chaschöl chaschöl chaschiel
maison casa tgeasa tgesa chesa chasa chasa
chien tgaun tgàn tgang chaun chan chaun
jambe comba tgomba tgomma chamma chomma chomma
poule gaglina gagliegna gagligna gillina giallina giaglina
chat gat giat giat giat giat giat
tout tut tut tot tuot tuot tut
forme fuorma furma furma fuorma fuorma furma
je (moi) jeu jou ja eau eu jau

[modifier] Exemples de phrases comparatives

[modifier] Le corbeau et du renard

Le début, simplifié, du corbeau et du renard, en français, en italien et dans les différents romanches

[modifier] Français

Le renard était à nouveau affamé. Il vit un corbeau sur un sapin, qui tenait en son bec un morceau de fromage. Cela me semble bon, pensa le renard et il dit au corbeau : « Comme tu es beau ! Si ton chant est aussi beau que ton apparence, alors tu es le plus beau de tous les oiseaux ».

[modifier] Italien

La volpe era nuovamente affamata. Vide un corvo posato su un pino con un pezzo di formaggio nel becco. Come lo gu pensò la volpe e disse al corvo : « Come sei bello ! Se il tuo canto è così bello come il tuo aspetto, allora sei il più bello fra gli uccelli ».

[modifier] Sursilvan

L'uolp era puspei inagada fomentada. Cheu ha ella viu sin in pegn in tgaper che teneva in toc caschiel en siu bec. Quei gustass a mi, ha ella tertgau, ed ha clamau al tgaper : « Tgei bi che ti eis ! Sche tiu cant ei aschi bials sco tia cumparsa, lu eis ti il pli bi utschi da tuts ».

[modifier] Sutsilvan

La vualp eara puspe egn'eada fumantada. Qua â ella vieu sen egn pegn egn corv ca taneva egn toc caschiel ainten sieus pecel. Quegl gustass a mei, â ella tartgieu, ed â clamo agli corv : « Tge beal ca tei es ! Scha tieus tgànt e aschi beal sco tia pareta, alura es tei igl ple beal utschi da tuts ».

[modifier] Surmiran

La golp era puspe eneda famantada. Cò ò ella via sen en pegn en corv tgi tigniva en toc caschiel an sies pecal. Chegl am gustess, ò ella panso, ed ò clamo agl corv : « Tge bel tgi te ist ! Schi ties cant è schi bel scu tia parentscha, alloura ist te igl pli bel utschel da tots ».

[modifier] Putér

La vuolp d'eira darcho üna vouta famanteda. Cò ho'la vis sün ün pin ün corv chi tgnaiva ün töch chaschöl in sieu pical. Que am gustess, ho'la penso, ed ho clamo al corv : « Che bel cha tü est ! Scha tieu chaunt es uschè bel scu tia apparentscha, alura est tü il pü bel utschè da tuots ».

[modifier] Vallader

La vuolp d'eira darcheu üna jada fomantada. Qua ha'la vis sün ün pin ün corv chi tgnaiva ün toc chaschöl in seis pical. Quai am gustess, ha'la pensà, ed ha clomà al corv : « Che bel cha tü est ! Scha teis chant es uschè bel sco tia apparentscha, lura est tü il plü bel utschè da tuots ».

[modifier] Rumantsch Grischun

La vulp era puspè ina giada fomentada. Qua ha ella vis sin in pign in corv che tegneva in toc chaschiel en ses pichel. Quai ma gustass, ha ella pensà, ed ha clamà al corv : « Tge bel che ti es ! Sche tes chant è uschè bel sco tia parita, lura es ti il pli bel utschè da tuts ».

[modifier] Psalm svizzer : le Cantique suisse en romanche

En l'aurora la damaun ta salida il carstgaun, spiert etern dominatur, Tutpussent! Cur ch'ils munts straglischan sura, ura liber Svizzer, ura. Mia olma senta ferm, Mia olma senta ferm Dieu en tschiel, il bab etern, Dieu en tschiel, il bab etern.

Er la saira en splendur da las stailas en l'azur tai chattain nus, creatur, Tutpussent! Cur ch'il firmament sclerescha en noss cors fidanza crescha. Mia olma senta ferm, Mia olma senta ferm Dieu en tschiel, il bab etern, Dieu en tschiel, il bab etern.

Ti a nus es er preschent en il stgir dal firmament, ti inperscrutabel spiert, Tutpussent! Tschiel e terra t'obedeschan vents e nivels secundeschan. Mia olma senta ferm, Mia olma senta ferm Dieu en tschiel, il bab etern, Dieu en tschiel, il bab etern.

Cur la furia da l'orcan fa tremblar il cor uman alur das ti a nus vigur, Tutpussent! Ed en temporal sgarschaivel stas ti franc a nus fidaivel. Mia olma senta ferm, Mia olma senta ferm Dieu en tschiel, Il bab etern, Dieu en tschiel, il bab etern.

[modifier] Notes et références

  1. Recensement fédéral de la population 2000
  2. Encyclopédie du monde actuel (EDMA), Lausanne 1969
  3. Constitution suisse, Article 70

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes