Roger Vailland

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Roger Vailland (né à Acy-en-Multien le 16 octobre 1907, décédé à Meillonnas le 12 mai 1965) est un écrivain, essayiste et grand reporter français. Son œuvre comprend des romans, des essais et du théâtre, des journaux de voyages et intimes. Il a participé à plusieurs films sur ses textes et sur ceux d'autres auteurs.

Sommaire

[modifier] Biographie

Son père tient un cabinet de géomètre et la famille s'installe en 1910, 18 rue Flatters à Paris.

En 1919, après le retour de guerre de son père, ils deviennent rémois, toujours pour raisons professionnelles. Reims est en pleine reconstruction. Le père de Roger lui transmet l’amour de la campagne et de Plutarque, de Shakespeare et des Mille et Une Nuits. Dans le club des Phrères simplistes qu’il anime avec ses camarades (cf.René Daumal), il découvre le goût du dérèglement des sens, des drogues et des amours féminines et masculines. Il goûte par ennui à la boxe et à la poésie. Il est anticonformiste.

En 1925, la famille emménage à Montmorency. Roger entre à Louis-le-Grand en classe d’hypokhâgne. Deux ans plus tard, sa grand-mère le loge dans son appartement rue Pétrarque, pour lui permettre de préparer une licence de Lettres à la Sorbonne.

Grâce aux conseils et à l’appui de Robert Desnos, il est embauché en 1928 par Pierre Lazareff comme journaliste à Paris-Midi (une édition de Paris-Soir) et emménage dans un hôtel de la rue Bréa, où il peut en toute tranquillité consommer ses drogues.

Cette même année, il est cofondateur de la revue Le Grand Jeu, auquel participent René Daumal, Roger Gilbert-Lecomte et le peintre Joseph Sima, aventure littéraire qui se définit comme la « première révélation de la métaphysique expérimentale ». Ce mouvement tente d’accéder au monde surréel, là où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire se rejoignent. Trois numéros de la revue Le Grand Jeu paraîtront, le quatrième ne sera jamais publié. Le groupe se délite en 1932 au bout de quatre ans, du fait du départ progressif de ses membres.

Roger côtoie le Paris culturel de l’époque : Robert Desnos, Joyce, Cocteau, Gide,... Il fréquente le club du Bar du Château, rue du Château, où vivent Prévert, Marcel Duhamel, Benjamin Péret, etc. et où sont accueillis en hôtes de passage Aragon, Queneau, Robert Desnos, Michel Leiris. En mars 1929, il est exclu de ce club très fermé par l’intransigeance politique de Breton et d’Aragon.

Reporter à Paris-Soir, il parcourt divers pays, voyages dont il fera des récits détaillés. Il publie des romans-feuilletons.

En décembre 1934, il habite le 38 rue de l’Université, qu’il occupe avec Andrée Blavette (surnommée Boule), sa future femme, en alternance avec l’hôtel particulier des Blavette, villa Léandre à Montmartre, lieu qui sera un de ses ports d’attache jusque pendant la guerre. Il se séparera d'Andrée au début de 1947.

Fin 1940, la guerre et son métier de journaliste le mènent cours Gambetta à Lyon. Il glisse rapidement d’idées collaborationnistes à un engagement dans la Résistance aux côtés des communistes. La guerre est le catalyseur qui va libérer Vailland de l’angoisse de l’écriture.

Engagé dans la Résistance dès 1942 et en mission au domicile de Daniel Cordier, un agent de la Résistance, il découvre un exemplaire de Lucien Leuwen, se plonge dans sa lecture... et se lance aussitôt dans l’écriture de Drôle de jeu. Désireux de se retirer au calme pour écrire son roman, il s’installe en juin 1942, sur le conseil d’un ami, au château Marion, un peu à l’écart de Chavannes-sur-Reyssouze près de Bourg-en-Bresse. Drôle de jeu paraît à la Libération et recevra le prix Interallié en 1945. Vailland y a mis le quotidien de la vie d’un résistant communiste, partagé entre ses convictions politiques et son âme de séducteur.

Il rêvait depuis longtemps d’écrire un grand roman sans y parvenir, puis, jusqu’à la fin de sa vie, il les enchaîne les uns à la suite des autres avec une facilité impressionnante... et une méthode efficace : un diagramme accroché au mur indique en abscisse les jours d’écriture et en ordonnée le nombre de pages écrites.

En décembre 1947, ses amis De Meyenbourg installés à Sceaux ont pitié de sa situation matérielle et lui offrent l’hospitalité jusqu’en décembre 1950. Cette même année 1950, il se joint à d’autres écrivains comme Marcelle Auclair, Jacques Audiberti, Hervé Bazin, Émile Danoën et André Maurois pour le numéro de La Nef (revue de Lucie Faure) intitulé « L’Amour est à réinventer ».

Après un voyage en Extrême-Orient, il emménage au printemps 1951 avec Elisabeth Naldi (rencontrée fin 1949) à La Grange aux Loups (aussi appelée dans ses livres La Grange aux Vents), une austère petite maison des Allymes, hameau à six kilomètres d’Ambérieu-en-Bugey. Loin des intellectuels de gauche parisiens, il découvre la vie des ouvriers et des paysans. Elisabeth et Roger vivent alors les années les plus pauvres et les plus heureuses de leur vie.

En 1954, Roger et Elisabeth se marient et s’installent, à l’automne, dans une belle maison du centre de Meillonnas, à vingt kilomètres de Bourg-en-Bresse.

Inscrit au Parti communiste en 1952, duquel il se désengage après le soulèvement de Budapest en 1956, il écrit une série de romans engagés : Les mauvais coups (1948) - l’histoire d’un couple qui se défait -, Bon pied bon œil (1950) - la découverte du militantisme -, Beau masque (1954) - le thème de la fraternité syndicale et de la lutte contre l’aliénation-, 325 000 francs (1955) - pamphlet contre le capitalisme qui a recueilli moins de votes des jurés du Goncourt que Les Eaux mêlées, de Roger Ikor. La lutte des classes n’est pas son unique thème de prédilection. Il crée des personnages assez cyniques, voire libertins.

Cette évolution thématique marque un changement dans son œuvre littéraire : ainsi dans La loi (Prix Goncourt 1957), il dresse le portrait stendhalien d’un héros dominateur, dans La fête (1960), celui d’un héros donjuanesque, dans La truite (1964) celui d’une jeune femme décidée à exploiter les hommes sans rien leur concéder. Vailland consacre également deux essais à des libertins célèbres : Laclos (1953) et Éloge du Cardinal de Bernis (1956).

« Ma méthode de travail consiste à faire de chaque chapitre une scène, [...] Je ne commence à écrire ma scène que quand j’ai parfaitement imaginé tous les détails [...] je ne suis content que si le décor imaginaire de la scène est devenu tellement précis que je ne peux pas changer par l’imagination un meuble de place sans que toute la scène, y compris le comportement des personnages, en soit modifiée... » Roger Vailland, archives personnelles. (Cf. la biographie d’Yves Courrière, p. 604-605.)

Toute sa vie, Roger Vailland aura rejeté les contraintes et aura cherché avec une désinvolture élégante, à connaître le bonheur : une pratique hédoniste qui le marginalise.

Grand reporter, romancier communiste qui roulera en Jaguar à la fin de sa vie, drogué, presque collaborateur mais grand résistant, alcoolique, amateur de cyclisme et de montagne, ascète lorsqu’il écrit, ex-surréaliste, obsédé sexuel, ennemi juré d’Aragon, Roger Vailland a commencé tôt à opérer le « dérèglement de tous les sens » cher à son maître Arthur Rimbaud.

Roger Vailland meurt à cinquante-sept ans, le 12 mai 1965, d’un cancer du poumon. Il repose dans le cimetière de Meillonnas, près de Bourg-en-Bresse.

[modifier] Bibliographie

[modifier] Romans

  • Drôle de jeu, Prix Interallié, Éditions Corrêa, Paris, 1945
  • Les Mauvais coups, Éditions Sagittaire, 1948
  • Bon pied bon œil, Éditions Corrêa, Paris, 1950
  • Un Jeune homme seul, Éditions Corrêa, Paris
  • Beau masque, Éditions Gallimard, Paris, 1954
  • 325 000 francs, Éditions Corrêa, Paris, 1955
  • La Loi, Prix Goncourt 1957, Éditions Gallimard, Paris
  • La Fête, Éditions Gallimard, Paris, 1960
  • La Truite, Éditions Gallimard, Paris, 1964
  • La Visirova, Messidor, Paris, 1986
  • Cortès, le conquérant de l'Eldorado, Messidor, Paris, 1992

[modifier] Voyages

  • Boroboudour, Éditions Gallimard, Paris

[modifier] Journaux

  • Chronique d’Hiroshima à Goldfinger : 1945-1965, Éditions sociales, Paris, 1984
  • Chronique des années folles à la Libération, Éditions sociales, Paris, 1984.
  • Écrits intimes, Éditions Gallimard, Paris, 1982.

[modifier] Théâtre

  • Héloïse et Abélard, Editions Corréa, 1947
  • Le Colonel Foster plaidera coupable, pièce en cinq actes, les Éditeurs réunis, Paris, 1952.
  • Monsieur Jean, Éditions Gallimard, Paris, 1959

[modifier] Essais

  • Laclos, Éditions du Seuil, Paris, 1953
  • Éloge du Cardinal de Bernis, Éditions Grasset, Paris, 1956.
  • Expérience du drame, Éditions du Rocher, Monaco, 2002
  • Un homme du peuple sous la Révolution, Éditions Gallimard, Paris, 1979
  • Le regard froid : réflexions, esquisses, libelles, 1945-1962, Éditions Grasset, Paris, 1998
  • N’aimer que ce qui n’a pas de prix, Éditions du Rocher, Monaco, 1995
  • Les pages immortelles de Suétone, Éditions du Rocher, Monaco, 2002
  • Le Saint-Empire, Éditions de la différence, Paris, 1978
  • Le Surréalisme contre la révolution, Éditions Complexe, Bruxelles, 1988

[modifier] Filmographie

  • Le jour et l’heure [images animées] / René Clément, réalisation, adaptation ; André Barret, scénario ; Roger Vailland, adaptation, dialogues ; Claude Bolling, composition ; Simone Signoret, Stuart Whitman, Geneviève Page... [et al.], acteurs. Neuilly-sur-Seine : Film office éditions, 1998, copie 1962. 1 cassette vidéo (1 h 48 min)
  • Les liaisons dangereuses [images animées] / Roger Vadim, réalisation, adaptation ; Choderlos de Laclos, auteur adapté ; Roger Vailland, adaptation , dialogues ; Jeanne Moreau, Gérard Philipe, Annette Vadim... [et al.], acteurs. Boulogne-Billancourt : Régie cassette vidéo, 2001, copie 1959. 1 DVD vidéo monoface zone 2 (1 h 42 min)
  • La loi [multimédia multisupport] / Jules Dassin, réalisation, scénario ; d'après le roman de Roger Vailland ; Françoise Giroud, dialogues ; Roman Vlad, compositeur ; Yves Montand, Gina Lollobrigida, Marcello Mastroianni... [et al.], acteurs. Evreux : Éditions Atlas, 1998, copie 1959. 1 cassette vidéo (1 h 58 min)
  • Le vice et la vertu [images animées] / Roger Vadim, réalisation, scénario ; Roger Vailland, scénario ; Michel Magne, compositeur ; Annie Girardot, Robert Hossein, Catherine Deneuve... [et al.], acteurs. Courbevoie : René Château vidéo, 1996, copie 1963. 1 cassette vidéo (1 h 33 min)

[modifier] Exposition

Roger Vailland et l'art : une relation singulière

Exposition d'œuvres de Consagra, Coulentianos, Reinhoud D'Haese, Harfaux, Hartung, Maurice Henry, Hoffmeister, Pignon, Sima, Singier, Soulages.

De mai à novembre 2005 au Musée Chintreuil de Pont-de-Vaux (Ain)

[modifier] Sources

  • Roger Vailland, ou un libertin au regard froid, une biographie importante par Yves Courrière, Editions Plon, Paris, 1991

[modifier] Liens externes