Responsabilité

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

La responsabilité est le devoir de répondre d’un fait, c’est-à-dire en être garant. Cette notion s’applique à différents domaines :

Sommaire

[modifier] Responsabilité et conscience

[modifier] Philosophie

[modifier] Un point de vue contextualiste : l’éthique de l’intégrité

La responsabilité n’est pas seulement un fait, mais aussi une valeur. En tant que valeur sociale, suivant la perspective adoptée, elle peut prendre des significations diverses : elle renvoie inévitablement à des valeurs éthiques (ou morales, et est pour une part prisonnière des idéaux d’une époque, de leur vivacité et de leur configuration sociale, – en un mot : de la volonté de croire de cette époque, et d’être obéie. L'injonction à être « responsable », l’auteur d’une vie « bien » réglée, s’applique notamment à la question de la manière dont nous nous rapportons à nous-mêmes. Suppôts de la responsabilité, nous serions naturellement tenus à un ensemble de « devoirs » ou d'obligations. Pour autant, l’anti-conformisme ne dissocie pas forcément de la responsabilité envers nous-mêmes. Cette inflexion individualiste de la problématisation du rapport du privé et du public hante notamment la littérature américaine sur la désobéissance civile (Thoreau, Emerson).

Si poser un acte moral ne se fait pas sans évaluer les effets qu’il provoque, ses conséquences inhérentes (est-on, par exemple, pareillement responsable de sa sexualité en temps de sida ?), il lui faut encore la lumière des raisons qui le déterminent, une cohérence interne (« Comment rapporter à un besoin vital les fictions qui se dressent devant l’intelligence, et parfois contre elle, si l’on n’a pas déterminé les exigences fondamentales de la vie ? » s'interrogeait Bergson), pour dire de cet acte que c’est un choix responsable.

L’Américaine Starhawk parle ainsi d’une « éthique de l’intégrité » où les choix « ne sont pas fondés sur des absolus imposés à une nature chaotique, mais sur les principes d’ordonnancement inhérents à la nature. Ils ne sont pas fondés non plus sur des règles qui peuvent être définies hors du contexte. Ils reconnaissent qu’il n’y a pas de choses séparées de leur contexte ».

Tel positionnement radicalement immanent sur la responsabilité permet d’adopter une perspective qui, loin de botter en touche la question de savoir qui peut aujourd’hui raisonnablement prétendre être l’auteur de ses actes ou maîtriser la détermination de son destin personnel, adopte justement cette condition d’incertitude et de fragilité, de « faillabilité » (Adorno), comme fondement de la capacité d’agir et de la responsabilité morale, dès lors que le sujet y est engagé dans une enquête sur la genèse et les significations sociales des normes morales auxquelles son existence est d’emblée confrontée, fût-ce dans le pâtir (Murard). « L’immanence, toujours selon Starhawk, est un contexte, de telle sorte que le soi individuel ne peut jamais être vu comme un objet séparé et isolé. C’est un nœud de relations enchevêtrées, constamment transformé par les relations qu’il forme. L’intégrité signifie aussi l’intégration – être une part intégrale et inséparable de la communauté humaine et biologique » (Femmes, magie et politique).

[modifier] Citations

  • « La conception matérialiste de l’éternité, c’est celle qui consiste à ne renvoyer les actions qu’à la responsabilité de ceux qui les accomplissent. Chaque action est singulière, elle n’influe donc que sur elle-même, et ne renvoie à rien d’autre qu’aux relations qu’elle détermine et à la continuité des rapports qu’elle entretient avec les autres. Chaque fois que l’on fait quelque chose, on en accepte la responsabilité : cette action vit pour toujours, dans l’éternité. Il ne s’agit pas d’immortalité de l’âme mais d’éternité des actions accomplies. C’est l’éternité du présent vécu à chaque instant qui passe : une plénitude complète, sans transcendance possible, fût-elle logique ou morale. [...] Il n’y a pas de renvoi de la responsabilité : chacun de nous est responsable de sa singularité, de son présent, de l’intensité de la vie, de la jeunesse et de la vieillesse qu’il y investit. Et c’est l’unique moyen d’éviter la mort : il faut saisir le temps, le tenir, le remplir de responsabilité. » (Toni Negri, Exil, Mille et une nuits, 1998, pp.50-51)
  • « Affrontons, réprimandons la lisse médiocrité et le misérable contentement du temps, clamons plutôt, à la face des coutumes, du commerce, des affaires publiques, ce fait qui se déduit de l’histoire elle-même : il y a un grand Penseur et Acteur responsable qui agit chaque fois qu’un homme agit ; un homme vrai n’appartient ni à une époque ni à un lieu donnés, mais il est le centre des choses. Là où il est, la nature est aussi.[...] il faut avoir en soi quelque chose de divin quand on s’est défait des normes communes de l’humanité pour s’aventurer à compter sur soi-même comme maître. Le cœur doit être haut, la volonté fidèle et la vue claire, pour pouvoir sérieusement se tenir à soi-même lieu de doctrine, de société et de loi, pour qu’un simple but soit aussi pressant qu’une nécessité implacable chez les autres ! » (Ralph Waldo Emerson, « Confiance et autonomie », Essais, Michel Houdiard Éditeur, 1997, p.37,45)
  • « Et pour celui-là qui est solidaire des hommes, l'homme n'est point simple mot de son vocabulaire, l'homme est ce dont il est responsable. » (Antoine de Saint-Exupéry, Citadelle)

[modifier] Écologie politique

La responsabilité est l’une des trois valeurs centrales de l’écologie politique, avec la solidarité et l’autonomie. Elle consiste dans la prise de conscience des conséquences de nos actes présents, que ce soit pour le futur (dimension temporelle) ou pour l’ensemble des territoires affectés (dimension spatiale). Elle suppose un système économique, juridique et politique capable de mettre en relation nos décisions avec les effets qui s’ensuivent, qu’ils soient positifs ou négatifs.

Cette responsabilité s’exerce par des stratégies de développement durable, au niveau des gouvernements, des régions, ou des collectivités territoriales.

[modifier] Gestion d’entreprise

En gestion, la responsabilité du fait des produits défectueux est un risque que les entreprises doivent intégrer de plus en plus dans leur mode de gestion, sous peine de s’exposer à des risques juridiques (voir sécurité juridique) ou au versement d’intérêts compensatoires. Cet enjeu devient de plus en plus important pour les dirigeants, dans la mesure où il devient difficile, aujourd’hui, de cacher un vice dans un produit, ou un service rendu à un client. En effet, les facilités de communication offertes par l’internet, les messageries électroniques, et autres mobiles, permettent de se rendre compte assez vite des vices des produits.

Le responsabilité du fait des produits défectueux doit être intégrée dans la stratégie des entreprises, par l’analyse approfondie des relations avec ses parties prenantes. Ce type d’analyse correspond au développement durable et à la responsabilité sociétale d'entreprise.

[modifier] Bibliographie générale

  • Paul Ricœur, Éthique et responsabilité, La Baconnière, 1995.
  • Hans Jonas, Le Principe responsabilité : une éthique pour la civilisation technologique, Cerf, 1995.
  • Theodor Adorno, Probleme der Moralphilosophie, Suhrkamp Verlag, 1997.
  • Hannah Arendt, Responsabilité et jugement, Payot, 2005.
  • Zygmunt Bauman, La vie en miettes, moralité et postmodernité, Rouergue, 2004.
  • Antoine Garapon, Denis Salas (éd.), La justice et le mal, Odile Jacob, 1997.
  • William James, La volonté de croire, Les Empêcheurs de penser en rond, 2005 (1e éd. fr., 1916).
  • Numa Murard, La morale de la question sociale, La Dispute, 2003.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Aspects philosophiques

[modifier] Développement durable

[modifier] Aspects juridiques