Rafiq Hariri

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Rafiq Hariri en 2001
Rafiq Hariri en 2001

Rafiq (Baha ad-Din) al Hariri (رفيق (بهاء الدين) الحريري), est né le 1er novembre 1944 à Saida et mort assassiné le 14 février 2005 à Beyrouth. Il a été homme d'affaires et homme politique libanais musulman sunnite. Il fait fortune en Arabie saoudite avant de diriger cinq gouvernements au Liban entre 1992 et 2004 et notamment de 1992 à 1998 puis de 2000 à 2004.

Sommaire

[modifier] Biographie

Fils d'un ouvrier agricole, il effectue ses études à Saida, puis il obtient un diplôme de hautes études commerciales de l'Université arabe de Beyrouth en 1964. Il milite quelque temps au sein du Mouvement nationaliste arabe de Georges Habache. Il se marie à deux reprises et est père de cinq enfants

Il quitte le Liban à 18 ans pour l'Arabie saoudite, où il est successivement professeur de mathématiques, puis promoteur dans la construction pétrolière. En 1977, le roi Khaled le charge de construire le palais de Taëf, qu'il bâtit en moins de six mois, ce qui lui vaut la confiance du prince héritier d'alors, le futur roi Fahd. Il devient alors très prospère.

En 1979, il rachète la société française d'ingénierie Oger qui devient Oger international basé à Paris, filiale de Saudi Oger, qui reconstruira une grande partie de Beyrouth à la fin de la guerre civile libanaise dans les années 1990. À la tête d'une immense fortune, estimée entre 4 et 10 milliards de dollars, le « maître de Koraytem » est présent dans des domaines aussi variés que la banque, l'immobilier, l'industrie, les médias. Il avait au Liban sa propre chaîne de télévision, Future TV, et son quotidien, Al-Mustaqbal. Il possède aussi Radio Orient, installée à Paris.

Rafiq Hariri est nommé à la tête de cinq gouvernements entre 1992 et 2004 : il est premier ministre du 31 octobre 1992 au 2 décembre 1998, puis du 23 octobre 2000 au 21 octobre 2004. À ce poste, il met son carnet d'adresses au service de son pays tout en continuant à s'enrichir, parfois dans un contexte politico-financier trouble. Il entretient alors des relations étroites avec le président français Jacques Chirac et participe au financement de sa campagne pour l'élection présidentielle française de 2002.

Opposant à l'influence du gouvernement syrien sur son pays, après des années d'alliance objective avec la Syrie, il démissionne de son poste de Premier ministre, en octobre 2004, à cause de tensions avec le président Émile Lahoud. Il signifie son intention d'unifier les parlementaires d'opposition, dont il est l'un des ténors, en vue des élections législatives devant se tenir l'année suivante.

[modifier] L'attentat

Rue Minet al-Hosn où Hariri a été tué
Rue Minet al-Hosn où Hariri a été tué

Le 14 février 2005, malgré le blindage de son véhicule, un attentat-suicide commis par camionnette contenant une seule charge explosive de 1 800 kg, composée d'un mélange de RDX, PETN et TNT le tue en même temps qu'une douzaine de personnes et blesse une centaine de passants sur la route du bord de mer de Beyrouth. Les services de renseignements syriens sont immédiatement montrés du doigt par l'opposition et une partie de la population. Selon certains témoignages (du chef druze Walid Joumblatt et de la journaliste irlandaise Lara Marlow avec qui Hariri s'est entretenu), il aurait reçu des menaces de la part de la Syrie. En décembre 2005, l'ancien vice-président syrien Abdel Halim Khaddam confirme ces accusations :

«  Selon ces témoignages, Hariri rappela à M. Assad son engagement de ne pas prolonger le mandat de M. Lahoud, et M. Assad répondit qu'il y avait eu un changement de politique et que la décision avait déjà été prise. Il a ajouté que M. Lahoud devrait être vu comme son représentant personnel au Liban et que "s'opposer à lui est équivalent à s'opposer à Assad lui-même". Il ajouta alors qu'il (M. Assad) "préférerait casser le Liban sur les têtes de Rafic Hariri et (du leader druze) Walid Joumblatt que de voir sa parole au Liban rompue". Selon ces témoignages, M. Assad a alors menacé M. Hariri et M. Joumblatt de rétorsions physiques. La rencontre aurait duré une dizaine de minutes et c'était la dernière fois que M. Hariri devait voir M. Assad. Après cette réunion, M. Hariri a dit à ses partisans qu'il n'avait guère d'autre choix que de soutenir la prorogation du mandat Lahoud. Cette commission a aussi reçu d'autres témoignages de menaces faites à M. Hariri par des membres de services de sécurité dans le cas où il ne voterait pas en faveur de la prolongation ou "s'il pensait simplement à quitter le pays". Rapport de la commission Fitzgerald, 24 mars 2005. »

Hariri était personnellement proche de la famille royale saoudienne. Il bénéficiait à ce titre de la double nationalité libano-saoudienne. Il avait fait profiter de ses largesses de nombreuses associations et fondations qui aidaient les Libanais. C'est à partir de ses dons qu'il avait su se bâtir un électorat fidèle qui, à sa mort, proteste vigoureusement contre ses adversaires politiques. L'assassinat de Hariri est aussi ressenti au-delà des traditionnelles barrières communautaires et religieuses. Cette réprobation fait descendre une grande partie de la population libanaise dans les rues de Beyrouth à l'occasion de la manifestation du 14 mars. Cet assassinat marque le début de ce que certains appellent la Révolution du cèdre, qui conduit au départ de la totalité des troupes syriennes fin avril 2005.

Sa dépouille est inhumée dans un mausolée situé sur la place des Martyrs, au pied de la mosquée dont il a financé la construction.

En avril 2005, son deuxième fils Saad décide de se lancer dans la carrière politique et y rejoint sa tante Bahia Hariri.

[modifier] Enquête sur l'attentat

Commémoratif de Hariri
Commémoratif de Hariri

Le 1er septembre 2005, sur la proposition du procureur allemand Detlev Mehlis, agissant dans le cadre d'une enquête internationale mandatée par l'Organisation des Nations unies (ONU) à la demande de la France, le procureur général de la république libanaise Saïd Mirza procède à l'incarcération de cinq suspects repérés grâce à leur téléphone mobile : Moustapha Hamdane (chef de la garde présidentielle), Jamil Sayyed (ancien chef de la sûreté générale), Ali al-Haj (ex-directeur des forces de sécurité intérieures) et Raymond Azar (chef des services de renseignement de l'armée).

Le 20 octobre, Mehlis remet son premier rapport au secrétaire général des Nations unies Kofi Annan. Ce rapport, basé sur des témoignages anonymes, établit un lien entre plusieurs hauts responsables syriens et libanais visant à l'assassinat de Rafiq Hariri. Ce rapport est critiqué par le gouvernement syrien comme étant orienté politiquement contre lui et dénué de preuves tangibles. La rétraction du principal témoin de la commission d'enquête internationale, Hussam Taher Hussam, déclarant avoir été payé par Saad Hariri pour figurer comme principal témoin à charge contre les autorités syriennes affaiblit le rapport Mehlis. Le rapport Mehlis se défend en déclarant que Hussam a été manipulé par la Syrie.[1],[2]

Autre élément ayant jeté un discrédit sur l'enquête menée par Mehlis est l'affaire du témoignage Mohamed Zouheir Siddiq (présenté pendant un temps de l'enquête comme témoin principal par l'équipe de Mehlis). Ce dernier qui avait prétendu être un membre important des services secrets syriens au Liban, n'avait été en fait qu'un simple chauffeur d’un général syrien et recherché pour détournement de fonds[réf. nécessaire]. Ce dernier a été arrêté en France en octobre 2005 à la demande du procureur libanais Saed Mirza en coordination avec la commission d'enquéte. [3]Il se trouve en ce moment incarcéré en France qui refuse son extradition au Liban[réf. nécessaire]. Le 13 mars 2008 cependant, la France prétend via son ministre des affaires étrangères Bernard Kouchner avoir "perdu" Zouheir Siddiq. Certains y voient le signe d'un embarras face à l'effondrement de la thèse syrienne.

Début décembre 2005, sous la pression de George W. Bush et Jacques Chirac qui menacent la Syrie de sanctions en cas de non-collaboration à l'enquête, Bachar el-Assad accepte que 5 responsables syriens soient entendus par les enquêteurs de l'ONU, tout en continuant à nier toute implication de la Syrie dans cette affaire.

Le 29 décembre, le Belge Serge Brammertz, procureur adjoint à la Cour pénale internationale succède à Detlev Mehlis, dont le mandat expire le 15 décembre et qui ne souhaite pas être reconduit dans ses fonctions. Kofi Annan officialise la nomination. C'est le précédent président de la commission qui avait proposé Brammertz pour le remplacer.

Le 30 mai 2007, le Conseil de sécurité de l'ONU décide de justesse, par 10 voix sur 15,[4] la création d'un tribunal spécial chargé de juger les assassins d'Hariri.

Le huitième rapport rendu public par la commission d'enquête de l'ONU consacrée à l'assassinat de Rafiq Hariri en juillet 2007 a fourni plusieurs informations nouvelles sur l'organisation de cette attaque.[5].

Wayne Madsen, journaliste au New Yorker chargé de suivre les développements politiques de Washington, accuse les États-Unis d'être derrière l'assassinat de Rafiq Hariri parce qu'il s'opposait à certaines politiques des États-Unis et notamment à l'implantation d'une base aérienne américaine au nord du Liban.[6],[7]

[modifier] Des liens amicaux avec Jacques Chirac

Rafiq Hariri a entretenu des liens amicaux avec Jacques Chirac qu'il tutoyait. En mai 2007, à l'issue de sa présidence de la République, Jacques et Bernadette Chirac vont s'installer dans un appartement de 180 m2 sur les quais de Seine appartenant à la famille Hariri. [8]

[modifier] Voir aussi

[modifier] Références

  1. Affaire Hariri: le principal témoin se rétracte à Damas, Radio France internationale, 30 novembre 2005.
  2. Affaire Hariri : coopération mitigée de la part de la Syrie, selon le rapport de Detlev Mehlis, ONU, 13 décembre 2005.
  3. (en) al-Safir: France arrests Zouhair Siddiq, Arabic News, 18 octobre 2005
  4. Il faut 9 voix pour qu'un projet de résolution du Conseil de sécurité soit adopté. L'Afrique du Sud, la Chine, l'Indonésie, le Qatar et la Russie se sont abstenus. Un tribunal international voit le jour, Radio Canada
  5. Le huitième rapport Brammertz
  6. (en) Chronique de Madsen du 21 juillet 2006
  7. (ar) Al-arabiya
  8. Rafik Hariri : L'ami libanais qui gêne Chirac, L'Événement du jeudi, 10 décembre 1998

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Rafik Hariri.

[modifier] Bibliographie

  • Rafic Hariri : un homme d'affaires Premier ministre par René Naba, L'Harmattan, 2000 (ISBN 2738484956) : une biographie très critique
  • Mordakte Hariri, Unterdrückte Spuren im Libanon par Jürgen Cain Külbel, Édition Zeitgeschichte Band 34, 2006 (ISBN 3-89706-860-5) : contre-enquête sur l'assassinat
  • Le grand retournement : Bagdad-Beyrouth de Richard Labévière , octobre 2006, ISBN 2020884062, p. 46-60 et 237-252


Précédé par
Rachid Solh
Premier ministre
du Liban
Suivi par
Salim El-Hoss


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Salim El-Hoss
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Omar Karamé