Rétine

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Rétinographie
Rétinographie
L'épaisseur d'une rétine en cas de forte myopie
L'épaisseur d'une rétine en cas de forte myopie

La rétine est une mince surface d'environ 0,5 mm d'épaisseur située au fond de chaque œil, couvrant environ 75 % du globe oculaire. Elle constitue la partie sensitive de la vision en transformant l'image lumineuse focalisée par l'œil en un signal de potentiels d'action.

La rétine est une partie très particulière du système nerveux central (SNC) : cette partie du cerveau, dont la surface peut être visible simplement par rétinoscopie, s'isole du reste de la masse cérébrale tôt dans le développement de l'embryon. Sa morphologie et son fonctionnement complexes sont donc plus facilement observables que le cortex. La rétine est donc un morceau de choix pour initier l'étude du système visuel.

Sommaire

[modifier] Quelques zones particulières de la rétine

[modifier] Physiologie de la rétine

[modifier] Morphologie de la rétine : de la lumière à l'impulsion

Comme le reste du SNC, la rétine est constituée de neurones accompagnés par des cellules de soutien et est largement vascularisée par des vaisseaux sanguins. Suivant les observations de Santiago Ramón y Cajal, dont les coupes étaient souvent préparées verticalement à la surface, on sait que la rétine est constituée de 6 couches successives de neurones différenciés, depuis la couche des neurones sensibles à la lumière, les photorécepteurs (PhR) jusqu'à sa couche la plus antérieure, celle des cellules ganglionnaires (CG), dont le rassemblement des axones forment le nerf optique.

[modifier] Cheminement de l'information visuelle dans la rétine

Organisation axiale simplifiée de la rétine (modifié depuis un dessin de Santiago Ramón y Cajal).
Image:Retine_annotee_fr.PNG

La lumière focalisée par l'œil traverse (ici de gauche à droite) les couches rétiniennes pour activer les photorécepteurs (qui se présentent sous forme de cônes ou de bâtonnets, couche à l'extrémité droite). Ceux-ci activent en avant (axialement, ici vers la gauche) les cellules bipolaires et latéralement les cellules horizontales (dans la couche représentée ci-dessus en orange), de façon à ce que le signal soit sensible aux contrastes spatiaux. Le signal se propage en avant vers les cellules ganglionnaires (dont les corps cellulaires forment la première couche, ici à gauche), dont on voit apparaître deux tailles correspondant aux voies Magno et Parvo. Ce signal est filtré latéralement par les cellules amacrines (elles touchent les cellules ganglionnaires et sont dans le sens opposé sur le dessin), qui elles sont principalement sensibles aux contrastes temporels.

[modifier] Nature des signaux rétiniens

L'image lumineuse qui arrive au niveau de la rétine est inversée par rapport à l'image extérieure car le cristallin de l'œil est une lentille biconvexe. Cette image, inversée et distordue du fait de la rotondité de la rétine, est transformée analogiquement dans la rétine en une image complexe correspondant à l'activité des neurones des différentes couches. En effet, depuis le signal synaptique émis par les photorécepteurs (PhRs), l'information est codée par un signal analogique se propageant par des contacts synaptiques et par diffusion chimique. Les cellules bipolaires sont sensibles à des contrastes spatiaux alors que les cellules amacrines sont plus particulièrement sensibles à des variations temporelles. Elles vont ainsi transformer temporellement l'image des contrastes lumineux qui vont être propagés en avant vers la couche des cellules ganglionnaires (CGs). Toutefois, ces comportements sont plus complexes et variés et correspondent à toute une famille de transformées spatio-temporelles qui ne sont pas encore aujourd'hui toutes connues (pour une revue, on pourra consulter Meister 99). Finalement, c'est seulement à la couche des cellules ganglionnaires (donc la plus externe) que les contrastes lumineux peuvent produire des impulsions neuronales ou potentiels d'actions (PA) qui constitueront alors le signal emprunté par le nerf optique, signal totalement impulsionnel. La rétine achève à ce niveau la transformation de l'information lumineuse en un train d'impulsions.

[modifier] Organisation spatiale des neurones de la rétine : de l'image lumineuse à l'image rétinienne

Cette approche radiale de la rétine a été affinée par des techniques instrumentales modernes qui ont montré l'importance de l'organisation spatiale sur la surface de la rétine. Comme Cajal l'avait déjà observé, la concentration et la nature des différents neurones varient suivant la position sur la rétine. En effet, on observe tout d'abord que la concentration en cônes augmente fortement quand on s'approche de l'axe de vision de l'œil, la fovéa pour presque s'annuler en dehors de la macula qui correspond à un disque d'un degré depuis la fovéa). En complément, la concentration en bâtonnets est quasiment nulle dans la macula mais atteint un maximum vers 3°. Cette observation explique que nous n'avons pas de sensibilité à la couleur hors de la fovéa, et de façon symétrique que pour voir une étoile faible, il est conseillé de fixer son regard légèrement à côté pour que la lumière de l'étoile frappe les bâtonnets plutôt que les cônes.

On définit alors pour les cellules ganglionnaires leur champ récepteur (Imbert, 1983) comme l'ensemble des PhR qui participent à son excitation. On observe alors que ceux-ci ont des contours sensiblement circulaires dont le rayon grandit en moyenne proportionnellement à leur excentricité. Depuis le fovéa - où il équivaut à un PhR (cône) par CG - les champs récepteurs peuvent atteindre 10deg de champ visuel à la périphérie de la rétine. On peut donc définir une carte rétinotopique qui va correspondre à la transformation spatiale de l'image par cet arrangement spatial de la grille des neurones. Elle est souvent approchée par une transformée log-polaire de l'image sphérique centrée sur l'œil. Cette carte est incomplète dû au recouvrement de régions par les axones des CGs (le scotome) et notamment à la convergence des axones vers le nerf optique, qui constituent une zone insensible, le point aveugle.

Finalement, les CGs sont sensibles à des contrastes de lumières à plusieurs tailles, et qualitativement certaines CG répondant maximalement lorsque le signal correspond à un spot de lumière entouré d'un pourtour de la taille de son champ récepteur (cellule centre-ON) ou son inverse (centre sombre sur fond clair, les cellules centre-OFF). Aussi, même si les réponses des cellules sont très variées et malgré la complexité du réseau rétinien, Rodieck (1965) a montré que la réponse jusqu'au soma des CGs pouvaient être modélisée de façon linéaire par rapport aux réponses des photorécepteurs. Cette simplification peut théoriquement permettre de déterminer de façon exacte la transformée d'une CG (qui est alors un filtre spatio-temporel linéaire) grâce à sa réponse impulsionnelle à un spot de lumière. Toutefois, de nombreux phénomènes non-linéaires, comme la perception de la couleur ou l'adaptation à l'intensité globale, sont introduits dans les réponses rétiniennes.

De nombreux scientifiques du champ des neurosciences computationnelles ont tenté de modéliser la rétine afin de créer des prothèses mais aussi pour mieux comprendre son fonctionnement. Parmi eux, on peut citer les travaux de David Marr sur la perception de la luminance dans la rétine des primates (Marr, 1974).

[modifier] Transformation multicanaux : l'image impulsionnelle

On a vu que ce sont seulement les CGs qui émettent les PAs qui seront transmis au reste du SNC, ce qui montre que depuis les 108 photorécepteurs (PhR) via environ 109 cellules intermédiaires et jusqu'au nerf optique constituée par les axones du million de cellules ganglionnaires (soit une compression de l'ordre de 100 en nombre de cellules), la transformée rétinienne est une transformation d'une intensité lumineuse variant dans le temps à un signal spatiotemporel impulsionnel de PA. On remarque aussi que le nombre relativement peu élevé de fibres en sortie montre que la taille du signal doit être comprimée pour qu'il soit transmis efficacement au reste du SNC. Une méthode utilisée par la rétine est alors de transformer l'information visuelle en un signal multicanaux qui tend à séparer les sources qui ont produit la sensation lumineuse, réduisant ainsi la dimension du signal à transmettre.

En particulier, Atick a montré que la réponse des cellules ganglionnaires à différentes fréquences spatiales coïncidait avec une réduction des corrélations spatiales entre des locations voisines, montrant ainsi que des principes écologiques peuvent guider la compréhension des fonctions rétiniennes. Un aspect du codage rétinien est donc de souligner des parties non redondantes et qui sont donc relativement saillantes. Dans notre cadre, cette sensibilité va permettre de propager plus rapidement les parties de l'image les plus saillantes, conduisant de plus à une transformation temporelle de l'information spatiale. De façon analogue, on observe que les cellules ganglionnaires transforment l'information lumineuse en signaux relativement indépendants. Ainsi l'information de couleur, la chrominance est séparée de l'information d'intensité lumineuse, conduisant à un multiplexage de l'information lumineuse. On observe ainsi que des CGs morphologiquement et fonctionnellement différentes (cellules a, b et g) vont porter des canaux différents. Ce découplage sera aussi temporel puisque l'information d'intensité lumineuse est plus rapidement activée que la couleur, créant ainsi des voies à plusieurs latences pour l'information rétinienne.

Finalement, si on présente assez rapidement une image à un sujet pour éviter toute saccade oculaire, celle-ci va se projeter au fond de l'œil en une image distordue et inversée, activer les photo-récepteurs puis tout le réseau rétinien pour enfin être transformée en de multiples canaux par les cellules ganglionnaires. De manière synthétique, chacune de ces cellules peut alors être caractérisée par une sensibilité maximale à un canal particulier et par une réponse temporelle, mais les sensibilités peuvent se recouvrir avec celles d'autres CGs et sont interdépendantes (Salinas01). L'image que nous percevons est alors entièrement codée en un train d'impulsions en environ 20-40ms. Alors que la vague d'activité rejoint maintenant le nerf optique, le décodage de cette transformation dans le reste du système visuel semble alors tenir du miracle.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

  • S. R. Y. CAJAL, Histologie Du Système Nerveux de l'Homme et Des Vertébrés, Maloine, Paris, 1911.
  • M. MEISTER ET M. J. B. II, « The neural code of the retina », in Neuron, vol. 22 p. 435-50, 1999.
  • M. IMBERT, « La neurobiologie de l'image », in La recherche, vol. 14 p. 600-13, 1983.
  • R. W. RODIECK, « Quantitative analysis of cat retinal ganglion cell response to visual stimuli », in Vision Research, vol. 5 p. 583-601, 1965.
  • J. J. ATICK ET A. N. REDLICH, « What does the retina know about natural scenes? », in Neural Computation, p. 196-210, 1992.
  • Marr, D. (1974), « The computation of lightness by the primate retina. », Vision Research, 14:1377-1388.

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

  • Les pathologies de la rétine sont traitées dans l'encyclopédie médicale Vulgaris [1]


Système sensoriel - Système visuel - Œil

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