Pulsion de mort

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Type de pulsion postulé par Sigmund Freud en 1920 , la pulsion de mort (Thanatos) concurrence les pulsions de vie (pulsion d'autoconservation et pulsions sexuelles) ou Eros, poursuivant des buts contraires. Cette notion introduite dans la seconde topique a explicitement été inspirée d'un texte de Sabina Spielrein ("Die Destruktion als Werdens" In Jahrbuch der Psychoanalyse, IV, 1912).

Sommaire

[modifier] Introduction

[modifier] Pulsion

La pulsion se manifeste comme contrainte interne, elle s'oppose au besoin et enjambe les deux registres de physique et de psychique.

Elle est dotée de quatre caractéristiques : la poussée (sa tendance à s'imposer), sa source, son objet et son but. Cette poussée originaire du ça formule le principe de plaisir, mais le moi saura lier la pulsion, l'ajourner.

[modifier] Principe de plaisir et pulsion de mort

Dans Au-delà du principe de plaisir (1920), la tendance des névrosés de guerre à réactiver leur trauma dans leurs rêves révèlent à Freud la compulsion de répétition, contrainte qui remet en cause le principe de plaisir et témoigne d'une tendance plus fondamentale.

Le principe de plaisir est cette loi de l'inconscient selon laquelle les motions pulsionnelles doivent être liées (c'est-à-dire que les processus primaires sont transformés en processus secondaires) afin de ramener au plus bas le niveau des tensions ou des excitations imposées au psychisme.

Or, dans la compulsion de répétition observée chez les névrosés de guerre, l'événement traumatique, générateur de très fortes tensions, fait sans cesse retour dans le rêve. Dans le jeu de la bobine au contraire, l'enfant remet en scène une situation déstabilisante de manière à en acquérir la maîtrise, de sorte qu'au final le jeu est pour lui un moyen de diminuer le déplaisir associé à cette situation.

En conclusion de Au-delà du principe de plaisir, Freud parvient à la conclusion paradoxale que principe de plaisir et pulsion de mort ne s'opposent pas, ne sont pas contraires: dans la mesure en effet où le plus bas niveau de tension (niveau que le principe de plaisir veut atteindre) correspond en définitive à l'état de repos du non-vivant, le principe de plaisir est au service de la pulsion de mort.

[modifier] Tendance à la déliaison

Alors que les pulsions de vie (regroupant les pulsions d'autoconservation (ou pulsions du moi) et les pulsions sexuelles du premier dualisme pulsionnel) tendent à la liaison, la pulsion de mort tend à la déliaison : elle veut casser, réduire à néant, détruire, ramener le vivant à un état antérieur anorganique, et vise d'abord le sujet lui-même - tout comme le narcissisme primaire. Mais la pulsion de mort se donnerait rarement à voir en elle-même, libre et déliée comme dans la compulsion de répétition, parce qu'elle est "silencieuse" et "muette", et qu'elle est du reste souvent liée à une motion érotique.

Dans Malaise dans la culture (1929), Freud parvient à la conclusion que c'est ce "combat éternel" entre l'Éros et la pulsion de mort qui a déterminé de manière fondamentale le développement de la culture humaine et a joué un rôle primordial dans la formation du surmoi.

L'exposé de cette pulsion provoquera moult débats et encore aujourd'hui, certains psychanalystes n'en reconnaissent pas la validité. La théorie de la relation d'objet l'accepte comme plus précoce que la pulsion sexuelle.

[modifier] Psychologie analytique et pulsion de mort.

Carl Gustav Jung n'a jamais parlé de la pulsion de mort : ce concept n'avait pas encore été forgé par Freud au temps de leur collaboration. Cependant il a beaucoup travaillé cette question avec Sabina Spielrein et il a publié son second volume des "métamorphoses de la libido"[1] en même temps qu'elle son article sur "la destructivité comme cause du devenir". Sabina Speilrein y affirme le désir, dans la relation amoureuse, de se fondre dans son partenaire amoureux, d'y disparaître, et d'en renaître. Jung quant à lui fait le lien entre ce désir et le désir d'inceste « [La vie est] une lutte continuelle avec la disparition, délivrance violente et momentanée de la nuit continuellement aux aguets. Cette mort n’est point un ennemi extérieur, mais une aspiration personnelle intérieure vers le silence et le calme profond d’un non-être connu, sommeil clairvoyant dans la mer du devenir et du disparaître. » (p.591-592). La différence essentielle entre la conception de Jung et celle de Speilrein est que pour elle ce désir est lié à l'objet amoureux, alors que pour Jung il n'est pas en soi lié à un objet. Il apparaît ainsi plus proche de la position que Freud adoptera 10 ans plus tard. Mais pour Jung comme pour Speilrein ce désir de mort a une visée téléologique (renaître), ce qui n'apparaît jamais dans l'œuvre de Freud. Enfin cela met en lumière la différence entre Jung et Freud sur la question de l'inceste, désir sexuel pour le parent de sexe opposé pour Freud, désir non sexuel (car anobjectal) de retour à l'en-deça de la vie pour Jung.

[modifier] Thanatos

Thanatos renvoie à l'aspect mythologique de la pulsion de mort.

[modifier] Références

  1. C.G. Jung, Métamorphoses de l’âme et ses symboles (La première édition de 1912 portait le titre Métamorphoses et symboles de la libido - 3° édition revue et remaniée par l’auteur, 1952) Genève, Georg, 1987

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle, 1905
  • Sigmund Freud, Pulsions et destin des pulsions, 1915
  • Sigmund Freud, Au-delà du principe de plaisir, 1920
  • Nicole Jeammet : "La haine nécessaire" PUF, 1989, ISBN 2130422489
  • Ana Paula Levivier, La mort à fleur de peau, L'Harmattan, 2006. Le texte propose de comprendre la pulsion de mort de façon indépendante de l'idée de "fin biologique de la vie" contenue dans l'acception courante du mot mort.

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