Pression de vapeur saturante

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La pression de vapeur saturante ou tension de vapeur est la pression à laquelle la phase gazeuse de cette substance est en équilibre avec sa phase liquide ou solide. Elle dépend exclusivement de la température. Certains utilisent le terme « pression de vapeur », mais celui-ci est ambigu car il évoque la pression partielle de la vapeur.

La pression de vapeur saturante est la pression partielle de la vapeur d'un corps pur à partir de laquelle une partie du corps pur passe sous forme liquide ou solide. On dit aussi que c'est la pression maximale de sa vapeur « sèche » (c'est-à-dire sans phase liquide).

Quand la pression partielle de la vapeur est égale à la pression de vapeur saturante d'une substance, les phases gazeuse,liquide ou solide sont en équilibre.

Si la pression partielle de la vapeur dépasse la pression de vapeur saturante, il y a donc liquéfaction ou condensation. À partir d'une situation d'équilibre, cela peut se faire en augmentant la pression partielle de vapeur (par exemple en diminuant le volume), ou bien en diminuant la pression de vapeur saturante, c'est-à-dire en diminuant la température.

Sommaire

[modifier] Historique

Au XIXe siècle, John Dalton étudia le volume de vapeur d'eau qui était nécessaire pour saturer l'air. Il remarqua que ce volume dépendait beaucoup de la température.

[modifier] Cas d'un corps pur

Soit un corps pur unique dans un réservoir étanche. On augmente artificiellement le volume de ce réservoir et maintient la température à un niveau constant. Selon le niveau de cette température, on peut se trouver en présence de différentes phases en même temps. Considérons le cas où le niveau de température soit tel qu'on se trouve en présence des phases liquides et solides. L'équilibre est réputé atteint à partir du moment où la fraction massique de chaque phase n'évolue plus avec le temps.

La pression régnant dans ce réservoir une fois cet équilibre atteint est appelée pression de vapeur saturante. Si par un moyen extérieur, il est possible de modifier la pression dans l'enceinte, sans changer la composition du gaz tout en gardant la température constante, alors se présentent 2 possibilités:

Soit une augmentaton de la pression ambiante du gaz.

pamb > psat

avec pamb, la pression dans le réservoir juste après action. et psat, la pression de vapeur saturante du corps pur à cette température.

En conséquence, il y aura condensation de la fraction gazeuse, soit jusqu'à ce que la pression dans l'enceinte ait diminué de sorte qu'elle atteigne la pression de vapeur saturante correspondant à cette température, soit jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de vapeur à condenser. Dans ce dernier cas, la pression ambiante en fin de transformation est supérieure à la pression de vapeur saturante correspondant à cette température. De facto, il n'y a plus équilibre entre phases puisqu'il n'y a plus que la phase liquide.

Soit une diminution de la pression ambiante du gaz.

psat > pamb

En conséquence, il y aura ébullition du liquide soit jusqu'à ce que la pression dans l'enceinte ait augmenté de sorte que soit atteint le niveau de pression de vapeur saturante correspondant à cette température, soit jusqu'à ce que toute la phase liquide ait été convertie en phase gazeuse. Dans ce dernier cas, la pression ambiante en fin de transformation est inférieure à la pression de vapeur saturante correspondant à cette température. De même, il n'y a plus équilibre entre phases puisqu'il n'y a plus que la phase gazeuse.

[modifier] Cas d'un corps pur liquide en équilibre de phase avec un autre corps pur gazeux

Soit un corps pur 1, enfermé à l'état liquide dans un réservoir étanche. On introduit un autre corps pur 2 dans ce réservoir, à l'état gazeux.

Par ppartielle, on désignera dans la suite la pression partielle de la phase gazeuse du corps pur 1. On ne parlera pas de la pression partielle de la phase gazeuse du corps pur 2.

Par psat, on désignera la pression de vapeur saturante du corps pur 1.

Par pamb, on désignera la pression totale régnant dans le réservoir en début d'expérience.

A l'équilibre, on constatera que ppartielle = psat.

On se propose de changer la pression dans le réservoir et d'observer la réaction du système.

Il y a 3 cas possibles, pour une température donnée, unique.

1. La pression régnant dans le réservoir est inférieure à la pression de vapeur saturante du corps pur 1.

psat > pamb > ppartielle.

Dans ce cas, on obtient une ébullition (phénomène rapide), jusqu'à ce que ppartielle=psat.

Ainsi, pour un corps pur donné, il existe un couple unique (pression_1, température_1), appelé point d'ébullition et défini de la facon suivante:

Si la température est maintenue constante, mais que la pression est amenée en-dessous de pression_1, alors le corps pur est amené à ébullition. On constate par cette définition que la pression_1 est simplement la pression de vapeur saturante, dont on sait qu'elle ne dépend que de la température.

Par ailleurs, si la pression est maintenue constante mais que la température est amenée au-dessus de température_1, alors le corps pur est également amené à ébulition.

2. La pression de vapeur saturante du corps 1 est supérieure à la pression partielle de la vapeur du corps 1 mais inférieure à la pression totale.

pamb > psat > ppartielle.

Dans ce cas, on obtient une évaporation du corps 1 jusqu'à ce que ppartielle=psat.

3. La pression de vapeur saturante du corps 1 est inférieure à la pression partielle de la vapeur du corps 1.

pamb > ppartielle > psat.

Dans ce cas, on obtiendra une condensation de la phase vapeur du corps pur 1 jusqu'à ce que ppartielle=psat.


Pour modifier l'ordre des termes dans les 3 inégalités ci-dessus, il est possible d'agir:

A/ sur le niveau de la pression saturante par le biais de la température.

Plus la température est élevée, plus le niveau de la pression de vapeur saturante augmente.

À partir d'une situation d'équilibre où psat = ppartielle  :

  • si on se donne une température inférieure, alors psat diminue sous le niveau de ppartielle et la vapeur se liquéfie;
  • si on se donne une température légèrement supérieure, alors psat augmente et passe au-dessus du niveau de ppartielle: il y a évaporation du liquide;
  • si on se donne une température très supérieure, alors psat augmente et passe au-dessus du niveau de ptotale. Le point d'ébullition est dépassé et le changement d'état se fait beaucoup plus rapidement: on parle d'ébullition.

B/ sur le niveau des pressions partielle et totale en changeant le volume du réservoir.

À partir d'une situation d'équilibre:

  • si on se donne une pression partielle supérieure à psat, il y a liquéfaction ;
  • si on se donne une pression totale supérieure à psat, mais une pression partielle inférieure à psat, il y a évaporation du liquide
  • si on se donne une pression totale inférieure à psat, il y a alors ébullition.

[modifier] Exemples d'application

Premier cas (phénomène "violent"): ébullition d'eau.

On porte de l'eau à ébullition dans une casserole à une pression d'une atmosphère. Dans ces conditions de température et de pression, on a: psat_eau >> ptotale_atmosphere > ppartielle_eau.

Dans ce cas, l'apport d'énergie à la casserole a causé une augmentation de température de l'eau liquide et la pression saturante de l'eau a ainsi également augmenté. Cet état de fait amène à la formation de bulles de vapeur qui viendront augmenter la pression partielle de l'eau gazeuse dans l'atmosphère, idéalement jusqu'à ce que cette dernière pression atteigne le niveau de la pression saturante de l'eau.


Variante du premier cas. Ebullition de propane et/ou butane ou d'un mélange comme le GPL.

Dans une bouteille stockée à température ambiante (20°C) est enfermé un corps pur unique sous forme gazeuse. Dans le cas où, à cette température, la pression de vapeur saturante de ce gaz est supérieure à la pression atmosphérique extérieure, il est possible de soutirer du gaz de la bouteille sans aide additionnelle (pompe). En supposant que soit soutirée une certaine quantité de ce gaz, lors de la refermeture de la bouteille, on aura:

psat_gaz >> ppartielle_gaz = ptotale_gaz.

En effet, il n'y a pas d'autres gaz dans cette bouteille que celui qui est sous forme liquide donc sa pression "partielle" est aussi la pression totale. Dès lors, pour rétablir l'équilibre, l'ébullition va spontanément s'établir, jusqu'à ce que la pression dans la bouteille atteigne la pression de vapeur saturante de ce gaz à 20°C.


Second cas: évaporation d'une flaque d'eau au Soleil:

Dans ces conditions de température et de pression, la pression de vapeur saturante de l'eau est supérieure à la pression partielle de la vapeur d'eau dans l'atmosphère mais est inférieure à la pression atmosphérique totale.

ptotale_atmosphere > psat_eau > ppartielle_eau.

Il y a évaporation.

Troisième cas: Pluie.

Dans ces conditions de température et de pression, la pression de vapeur saturante de l'eau est inférieure à la pression partielle de la vapeur d'eau dans l'atmosphère et est dès lors forcément inférieure à la pression atmosphérique totale.

ptotale_atmosphere > ppartielle_eau > psat_eau.

Il y a changement d'état et condensation.

[modifier] Mélange de corps purs

La loi de Raoult régit approximativement la pression de vapeur saturante de mélanges de liquides.

Dans une enceinte de taille raisonnable de type bouteille ou réservoir de gaz, un mélange de gaz peut être considéré comme homogène : l'énergie d'agitation thermique est supérieure à la différence d'énergie potentielle de gravité, la stratification est négligeable. Ainsi, la composition du mélange est quasiment constante du début à la fin du tirage. Il peut par contre se produire une condensation sélective qui fait varier la composition du mélange (un des gaz se condense alors que l'autre reste sous forme gazeuse, ou lorsque les deux gaz sont liquéfiés la composition du liquide diffère de celle du gaz). Ainsi, les bouteilles de mélange ont une consigne de température de stockage pour assurer que la composition du gaz est bien la composition nominale.

[modifier] Décompression explosive

Dans le cas d'un corps contenu dans une enceinte étanche, il peut se produire une ébullition-explosion (ou bleve) par rupture de l'enceinte lorsque :

  • dans les conditions de température et de pression extérieure, le corps est sous forme gazeuse,
  • la pression est plus élevée dans l'enceinte, ce qui maintient une partie du corps sous forme liquide.

[modifier] Cas d'un corps pur solide

La pression de vapeur saturante de la plupart des solides est en général très faible pour des températures « raisonnables ». Par exemple, la pression de vapeur saturante du fer à 20 °C est tellement faible qu'il est improbable d'avoir un seul atome de fer dans une pièce bien que l'acier présent soit à l'équilibre avec sa vapeur (on entre là dans des considérations quantiques de probabilité de présence).

Par ailleurs, la cohésion des atomes d'un solide fait qu'il est impensable d'avoir un phénomène d'ébullition. Toutefois, il peut se former des pores dans le matériau, et à l'intérieur de cette porosité, une partie solide passe sous forme gazeuse (avec la même précaution que ci-dessus). Cependant, ceci n'est pas lié à la pression atmosphérique comme pour les liquides (sauf pour des pressions extrêmes), mais plutôt aux propriétés du matériau, comme la présence de défauts ponctuels dans un cristal (lacunes) et la tension superficielle.

À partir d'une situation d'équilibre psat(T) = pvap

  • modification de la température ambiante :
    • en dessous de cette température, la vapeur se condense en solide ;
    • au-dessus de cette température, le solide se sublime, c'est-à-dire qu'il se transforme directement de solide en vapeur sans passer par une phase liquide ;
  • modification de la pression ambiante :
    • au-dessus de cette pression, la vapeur se condense en solide ;
    • en dessous de cette pression, le solide se sublime.

Ainsi, pour une pression donnée, le point de sublimation d'une substance est la température à laquelle la pression de vapeur de cette substance est égale à la pression ambiante.

On n'a donc que trois cas :

[modifier] Pression de vapeur saturante et autres changements de phase

La pression de vapeur saturante d'une substance en phase liquide peut être — et est généralement — différente de la pression de vapeur de cette même substance en phase solide. Si la température est telle que la pression de vapeur du liquide est supérieure à celle du solide, le liquide se vaporisera mais la vapeur se condensera en un solide, c'est-à-dire que le liquide gèlera. Si la température est telle que la pression de vapeur du liquide est inférieure à celle du solide, le solide se vaporisera mais la vapeur se condensera en un liquide, c'est-à-dire que le solide fondra.

À la température à laquelle les deux pressions de vapeur sont égales, il existe un équilibre entre les phases solides et liquides. Cette température est mentionnée comme le point de fusion.

[modifier] Calcul de la pression de vapeur saturante

Le calcul approximatif de la pression de vapeur saturante peut se faire à l'aide d'une formule issue de l'équation de Clapeyron, en prenant comme hypothèses — entre autres — que la vapeur se comporte comme un gaz parfait et que l'enthalpie de vaporisation ne varie pas avec la température dans la plage considérée.

\ln \frac{p_{sat}}{p_0} = \frac{M.L_v}{R}(\frac{1}{T_0}-\frac{1}{T})

avec :

  • T0 : température d'ébullition de la substance à une pression p0 donnée, en K
  • psat : pression de vapeur saturante, dans la même unité que p0
  • M  : masse molaire de la substance, en kg/mol
  • Lv : chaleur latente de vaporisation de la substance, en J/kg
  • R  : constante des gaz parfaits, égale à 8,31447 J/K/mol
  • T  : température de la vapeur, en K

Pour l'eau, par exemple :

  • M = 0,018 kg/mol
  • Lv = 2,26×106 J/kg
  • p0 = 1013 mbar
  • T0 = 373 K

[modifier] Pression de vapeur saturante de l'eau dans l'air

Dans le cas de l'eau dans l'air, les manifestations de ce phénomène sont nombreuses : apparition de « vapeur » (en réalité des petites gouttelettes d'eau) au-dessus d'une casserole d'eau chaude, formation de buée, de rosée, de givre, de brouillard, de bruine ou de nuages.

La pression de vapeur saturante de l'air humide représente la quantité maximale de vapeur d'eau que l'air peut contenir. Elle augmente avec la température. On parle souvent du taux d'humidité relative (ou hygrométrie) de l'air : il s'agit du rapport entre la pression partielle de vapeur et la pression de vapeur saturante. Ce taux est exprimé en pourcentage.

{\rm humidit\acute{e} \ relative} = \frac{p_{vap}}{p_{sat}(T)} \times 100 \%
Température
(°C)
Pression
(mbar)
-60 0,001
-40 0,13
-20 1,03
-10 2,6
0 6,10
5 8,72
10 12,3
15 17,0
20 23,4
25 31,7
30 42,4
40 73,8
50 123
60 199
100 1013

La formule de Rankine reprend la précédente avec des coefficients légèrement différents (écart de 0,39 à 4,1 % sur la plage de 5 à 140 °C par rapport aux tables thermodynamiques) :

\ln p_{sat} = 13,7-\frac{5120}{T}

avec :

  • psat : pression de vapeur saturante de l'eau, en atmosphère
  • T  : température absolue, en K

Pour des températures plus élevées, on pourra utiliser la formule de Duperray (écart de 0,12 à 7,7% sur la plage de 90 à 300 °C) :

p_{sat} = (\frac{t}{100})^4

avec :

  • psat : pression de vapeur saturante de l'eau, en atmosphère
  • t  : température, en °C

Il existe d'autres modèles comme formule de Dupré.

[modifier] Voir aussi