Pont du Gard

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43° 56′ 50″ N 4° 32′ 08″ E / 43.9473, 4.5355

Pont du Gard 1
Patrimoine mondial de l’UNESCO

Le Pont du Gard

Latitude
Longitude
43° 56′ 50″ Nord
         4° 32′ 7″ Est
/ 43.94722, 4.53528
Pays France France
Type Mixte
Critères i, iii, iv
N° identification (ID) 344
Région 2 Europe et Amérique du nord
Année d’inscription 1985 (9e session)

1 Descriptif officiel (UNESCO)
2 Classification UNESCO

Le Pont du Gard est une portion d'aqueduc romain aménagée en pont à trois niveaux situé dans le sud de la France commune de Vers-Pont-du-Gard, près de Remoulins, Nîmes et Uzès, dans le département du Gard. Il enjambe le Gardon, ou Gard, et assure la continuité de l'aqueduc romain qui conduisait l’eau d’Uzès à Nîmes.

Sommaire

[modifier] Architecture

Construit sur trois étages avec les pierres extraites sur les lieux mêmes dans les carrières romaines environnantes, le pont domine le Gard de 49 m de haut et est long de 275 m. À cet endroit, le Pont enjambe le Gard et non le Gardon. Le, ou plutôt les Gardons sont, selon les hydrologues, réunis en la rivière Gard à proximité du village de Cassagnoles. Il s'agit des Gardons d'Anduze et d'Alès. En aval de ce confluent, la rivière doit normalement porter le nom de Gard. C'est une discussion antique qui perpétue la confusion. Les habitants d'Anduze et ceux d'Alès se disputant la propriété de l'original, il s'en suit une indétermination locale évitant ainsi la frustration des riverains qui perdure encore aujourd'hui.

  • Étage inférieur : 6 arches, 142 m de longueur, 6 m d'épaisseur, 22 m de hauteur
  • Étage moyen : 11 arches, 242 m de longueur, 4 m d'épaisseur, 20 m de hauteur
  • Étage supérieur : 35 arches, 275 m de long, 3 m d'épaisseur, 7 m de hauteur

Une route emprunte le premier étage et l'aqueduc proprement dit – c'est-à-dire une conduite d'eau de 1,80 m de hauteur, 1,20 m de largeur et avec une pente de 0,4 % – est placé sur le dernier étage.

En observant avec soin la face interne des piliers en grand appareil du deuxième étage du Pont on découvre aisément le travail des bâtisseurs romains : techniques de taille des blocs (traces de coup d'escoude) et techniques de construction (blocs posés en carreau et boutisse et blocs saillants pour la mise en place des échafaudages).

En s'approchant, on ne peut qu’être émerveillé de la précision d'assemblage à sec des blocs : chaque bloc était assemblé aux autres par le ciselage des joints sur place. Certains blocs pèsent près de 6 tonnes ! La pierre de Vers utilisée à la construction du pont venait des carrières avoisinantes : il s'agit d'un calcaire coquillier d'une texture assez grossière et se prêtant très bien à la taille. De nombreuses traces et gravures parsèment la surface du pont. Ce sont soit des marques d'assemblage indiquant la place que les claveaux de voûtes devaient occuper, soit des symboles gravés par les romains comme le «phallus», symbole de la fécondité ou soit des marques laissées par les bâtisseurs pour qui le Pont du Gard constituait et constitue encore une étape obligée.

Il est le plus haut pont-aqueduc connu du monde romain.

[modifier] Histoire

L'aqueduc de la source de l'Eure, située à Uzès au château d'eau à Nîmes
L'aqueduc de la source de l'Eure, située à Uzès au château d'eau à Nîmes
Vers 1850- cliché d'Édouard Baldus.
Vers 1850- cliché d'Édouard Baldus.

Le pont du Gard est l'élément monumental d'un aqueduc de près de 50 km de longueur, qui apportait de l'eau de la source de l'Eure, située à Uzès, à proximité de Saint-Quentin-la-Poterie, jusqu'à la ville romaine de Nemausus, aujourd'hui appelée Nîmes. Les eaux de la source de l'Eure proviennent en partie de la rivière l'Alzon, qui passe par les environs d' Uzès, et des eaux récoltées du Mont Bouquet, situé plus vers Alès. L'aqueduc proprement dit est un chef d'œuvre d'ingénierie, et qui en dit long sur l'extraordinaire maîtrise des anciens constructeurs: le dénivelé n'est que de 12 mètres pour une longueur totale de 50 kilomètres, et l'aqueduc serpente à travers les petites montagnes et vallées de l'arrière pays nîmois. L'aqueduc de Nîmes a sans doute été construit au Ier siècle de notre ère, comme en attestent plusieurs preuves comme des restes de poteries et tessons. Des tunnels datant de l'époque d'Auguste ont dû être contournés, ce qui démontre que la construction de l'aqueduc est postérieure. De plus, les pièces de monnaies retrouvées dans les réservoirs de la ville de Nîmes, où étaient recueillies les eaux de l'aqueduc, ne datent pas d'avant l'époque de l'Empereur Claude (41-54). On pense donc aujourd'hui que l'aqueduc dont fait partie le Pont du Gard a été érigé entre 40 et 60[1].

La source n'était située que 12 m au-dessus du niveau des réservoirs de la ville. Les Romains ont donc dû faire preuve d'une grande précision pour permettre à l'eau de s'écouler par gravité jusqu'à Nîmes. L'aqueduc complet a une pente de 34 cm au kilomètre, soit 1/3 000, ce qui est un exploit technologique remarquable. Il a un trajet sinueux pour pouvoir profiter au maximum des reliefs (à vol d'oiseau, Uzès n'est qu'à 20 km de Nîmes). Le pont lui-même a été construit afin que l'eau puisse traverser la petite vallée du Gard, apportant 20 000 mètres cubes d'eau par jour à Nîmes. L'eau courante mettait une journée entière pour parvenir par gravité de son point de captage situé à la Fontaine de l'Eure, proche d'Uzès, jusqu'à l'ouvrage de répartition encore visible rue de la Lampèze à Nîmes et appelé Castellum. Nemausus comprenait un certain nombre de puits, ainsi qu'une source proche : la construction de l'aqueduc ne relevait donc pas d'une nécessité vitale mais d'un ouvrage de prestige, destiné à l'alimentation des thermes, bains et autres fontaines de la ville.

[modifier] Construction

Il fut entièrement construit sans l'aide de mortier, les pierres - dont certaines pèsent six tonnes - étant maintenues grâce à des pieux en fer. Elles sont en calcaire coquillier, issu d'une carrière située à moins d'un kilomètre du monument, la carrière de l'Estel. Les blocs furent montés grâce à une roue dans laquelle les ouvriers marchaient, apportant la puissance nécessaire au treuil. Pour soutenir le pont pendant la construction, un échafaudage complexe fut érigé. La façade de l'aqueduc porte toujours les marques de sa construction sous forme d'appuis d'échafaudage et d'arêtes saillantes sur les piliers qui accueillaient les assemblages en bois semi-circulaires destinés au maintien des voûtes. On suppose que la construction dura environ une quinzaine d'années, avec 800 à 1 000 ouvriers sur le chantier. Environ 50 400 tonnes de blocs de pierres ont été utilisés.

Le maître d'œuvre, inconnu, devait être un remarquable ingénieur. Le pont du Gard présente en effet une particularité unique dans l'antiquité : chacune de ses grandes voûtes est en fait constituée de voûtes indépendantes accolées (quatre à l'étage inférieur, trois au second étage), ce qui donne à l'ensemble la capacité de s'adapter aux légers mouvements et tassements inévitables dans le temps. Avec l'excellence des fondations et de la construction, c'est probablement ce qui a permis au pont de Gard de résister aux siècles. Cette partition de la voûte en anneaux indépendants les uns des autres ne se rencontre qu'en Narbonnaise (ponts romains de Sommières, Boisseron, Ambrussum, Nages et Solorgues).

L'aqueduc à l'intérieur du pont
L'aqueduc à l'intérieur du pont

La conduite d'eau, située au troisième niveau, a un plancher fait de mortier et de cailloux et des parois en moellons. L'étanchéité est assurée par un autre mortier de couleur rougeâtre (mortier d'étanchéité au tuileau). Sa taille permettait à un homme d'en assurer aisément l'entretien.

Cette méthode de construction est comparable à celle qui fut utilisée des siècles plus tard pour les cathédrales, et on peut aujourd'hui encore voir des marques indiquant la position des pierres à placer, par exemple, « FRS II » (frons sinistra II, c'est-à-dire « face gauche 2 »)

[modifier] La dégradation progressive

Dès le IVe siècle cependant, il commença à être moins entretenu et des dépôts bouchaient les deux tiers de la conduite. Au IXe siècle, il devint inutilisable et les habitants de la région commencèrent à prendre les pierres du pont. Cependant, la plus grande partie de l'aqueduc est toujours remarquablement intacte.

Du Moyen Âge au XVIIIe siècle, le pont était utilisé comme un passage pour traverser la rivière. Les piliers du second étage furent rétrécis, afin de laisser plus de place au trafic croissant, mais déstabilisant l'ensemble de la structure. A partir de 1702, les échancrures dans les piles furent en partie colmatées et, face à chaque pile, des passages en encorbellement furent aménagés pour élargir la voie.

[modifier] Préservation, rénovation puis patrimoine de l'humanité

En 1743, on construisit un autre pont non loin, afin de réduire la circulation et de ne pas endommager l'aqueduc romain. En 1747, l'ingénieur Henri Pitot accola aux arches de l'étage inférieur un pont routier pour que le trafic puisse être assuré sans risque pour le monument. Celui-ci fut rénové au XVIIIe siècle, puis à nouveau sous le règne de Napoléon III au XIXe siècle.

[modifier] Préservation, entretien, restauration

Vue amont
Vue amont
Le pont routier (1743-1747) accolé
Le pont routier (1743-1747) accolé

Charles IX passe devant le pont en décembre 1564 lors de son tour de France royal (1564-1566), accompagné de la Cour et des Grands du royaume : son frère le duc d’Anjou, Henri de Navarre, les cardinaux de Bourbon et de Lorraine[2]. Des nymphes peu vêtues lui donnent une représentation.

Le pont du Gard est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1985.

En 1998 et en 2002, le pont du Gard fut touché par de violentes inondations endommageant les environs, mais ne causant aucun dommage à la structure de l'édifice.

Le gouvernement français finança en 2000, dans le cadre d'une opération Grand site national, avec l'aide de collectivités locales, de l'UNESCO et de l'Union européenne, un projet d'aménagement du site, afin d'assurer la préservation de ce monument exceptionnel, très fréquenté, et menacé de ce fait par l'afflux des touristes. Il fut donc décidé de le rendre accessible uniquement aux piétons et d'améliorer les infrastructures destinées aux touristes avec, entre autres, un musée.

Le projet fut critiqué pour son coût (32 millions d'euros) et pour l'« atteinte au paysage ». Pourtant, les deux bâtiments sont imbriqués dans la roche et imitent sa couleur; ils sont invisibles l'un pour l'autre, afin justement de ne pas défigurer le site. Une attention particulière a été portée au paysage qui, dégradé par le tourisme de masse a été restauré et mis en valeur par un parcours. Enfin, il est désormais impossible de marcher dans la conduite au sommet de l'aqueduc, pour ne pas fragiliser sa structure. Il s'agit de l'un des monuments français les plus visités, avec 1,4 million de touristes en 2001. Cet aménagement a été conçu par l'architecte Jean-Paul Viguier.

La gestion du site est assurée par la Chambre de commerce et d'industrie de Nîmes-Bagnols-Uzès-Le Vigan.

[modifier] Le Pont du Gard vu par les écrivains

- « Après un déjeuner d'excellentes figues, je pris un guide et j'allai voir le Pont du Gard. C'était le premier ouvrage des Romains que j'eusse vu. Je m'attendais à voir un monument digne des mains qui l'avaient construit. Pour le coup, l'objet passa mon attente et ce fut la seule fois de ma vie. Il n'appartenait qu'aux Romains de produire cet effet. L'art de ce simple et noble ouvrage me frappa d'autant plus qu'il est au milieu d'un désert où le silence et la solitude rendent l'objet plus frappant et l'admiration plus vive, car ce prétendu pont n'était qu'un aqueduc. On se demande quelle force a transporté ces pierres énormes si loin de toute carrière et a réuni les bras de tant de milliers d'hommes en un lieu où il n'en habite aucun. Je parcourus les trois étages de ce superbe édifice que le respect m'empêchait presque d'oser fouler sous mes pieds... Le retentissement de mes pas sous ces immenses voûtes me faisait croire entendre la voix de ceux qui les avaient bâties. Je me perdais comme un insecte dans cette immensité. Je sentais, tout en me faisant petit, je ne sais quoi qui m'élevait l’âme et je me disais : "Que ne suis-je Romain !" ».

- Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, I ère partie, Livre VI, 1782.

- - « Par bonheur pour le plaisir du voyageur né pour les arts, de quelque côté que sa vue s’étende, elle ne rencontre aucune trace d’habitation, aucune apparence de culture : le thym, la lavande sauvage, le genévrier, seules productions de ce désert, exhalent leurs parfums solitaires sous un ciel d’une sérénité éblouissante. L’âme est laissée tout entière à elle-même, et l’attention est ramenée forcément à cet ouvrage du peuple-roi qu’on a sous les yeux ».

- Stendhal, Mémoires d’un touriste, 1837.

- - « Tout à coup nous aperçûmes au-dessus du feuillage sombre des chênes verts et des oliviers, se détachant sur un ciel bleu, deux ou trois arches, à teinte chaude et jaunâtre : c’était la tête du géant romain. Nous continuâmes d’avancer, et au premier coude que fit la montagne, nous l’embrassâmes dans tout son ensemble, à cent pas à peu près de nous ».

- Alexandre Dumas, Midi de la France, 1837-1841.

- - « J’accordai toute mon attention à cette grandiose construction. On s’en approche de très près avant de la voir : le ravin qu’il enjambe s’ouvre brusquement et découvre le spectacle, qui devient alors d’une extrême beauté ».

- Henry James, Voyage en France, 1877.

- - « Le site sauvage, la solitude complète du lieu, le bruit du torrent ajoutaient une poésie sublime à l’architecture imposante qui s’offrait à mes yeux ».

- Mérimée, Notes d’un voyage dans le Midi de la France, 1835.

[modifier] Voir aussi

Le verso du billet de 5 euros ressemble beaucoup au pont du gard

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

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Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur le Pont du Gard.

Vue depuis le Gard
Vue depuis le Gard


[modifier] Sources de l’article

[modifier] Notes

  1. Nîmes et son aqueduc, Le Pont du Gard et l'aqueduc romain de Nîmes - Guide pratique complet de visite.. Consulté le 09/12/2007
  2. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p. 254


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