Polarisation (optique)

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La polarisation est une propriété des ondes vectorielles telles que la lumière. Le fait que ces ondes soient caractérisées par des vecteurs les différencie des autres types d'ondes comme les ondes sonores, et implique ce phénomène de polarisation.

Sommaire

[modifier] Théorie

[modifier] Explication du phénomène

La manifestation la plus simple de polarisation est celle d'une onde plane, qui est une bonne approximation de la plupart des ondes lumineuses. Comme toute onde électromagnétique qui se propage, elle est constituée d'un champ électrique et d'un champ magnétique tous deux perpendiculaires à la direction de propagation :

Onde lumineuse avec champ magnétique  et champ électrique  à angle droit l'un de l'autre (dans le cas d'une polarisation rectiligne).
Onde lumineuse avec champ magnétique \vec B et champ électrique \vec E à angle droit l'un de l'autre (dans le cas d'une polarisation rectiligne).

On décide, par convention, d'ignorer le champ magnétique par la suite, car il peut être déterminé à partir du champ électrique. On considère donc uniquement le champ électrique \vec E perpendiculaire à la direction de propagation.

La figure décrite par le champ électrique est alors une ellipse, qui peut devenir un cercle, ou s'aplatir en une ligne. Ces différentes formes définissent l'état de polarisation de l'onde : on dit que l'onde est polarisée elliptiquement, circulairement ou rectilignement. Les trois figures ci-dessous illustrent l'évolution du champ électrique dans ces trois cas.


Rectiligne Elliptique Circulaire

De plus, cette onde se propage, donc l'ellipse décrite par le champ \vec E est en réalité une hélice, comme le montrent les figures ci-dessous (en trois dimensions).


Image:Polarisation (Linear).svg Image:Elliptical polarization schematic.png Image:Polarisation (Circular).svg
Rectiligne Elliptique Circulaire

Ce phénomène s'explique grâce à l'équation de propagation de l'onde lumineuse. En décomposant le champ électrique en ses deux composantes orthogonales (en vert et rouge sur les schémas précédents), on s'aperçoit qu'elles ont toutes deux une évolution sinusoïdale. Lorsque les deux composantes oscillent en même temps, on obtient une polarisation rectiligne. Si elles présentent un déphasage (c'est-à-dire que l'une est en retard par rapport à l'autre), alors on obtient une polarisation elliptique.

Dans le cas particulier où ce déphasage vaut 90° et que les deux composantes ont même amplitude, la polarisation est circulaire. On distingue alors les cas de polarisation circulaire gauche et circulaire droite selon le sens de parcours.

Remarque : Cette décomposition en deux composantes orthogonales est arbitraire. Il est aussi possible, par exemple, de décomposer en deux polarisations circulaires tournant en sens contraires.

[modifier] La lumière incohérente

L'explication ci-dessus n'est valable strictement que pour une onde monochromatique, et plus particulièrement une lumière cohérente. Dans les autres cas, les effets sont un peu différents.

Par exemple, dans la lumière d'une ampoule à filament, on observe que la lumière est non polarisée : elle ne correspond à aucun des trois cas précédents. Cela s'explique par le fait que cette lumière est composée de trains d'ondes, courtes impulsions lumineuses ayant chacune une amplitude, une fréquence, et une polarisation aléatoires. Ainsi, ce que nous observons est une moyenne de tous ces trains d'ondes qui nous apparaît non polarisée.

Toutefois, la lumière incohérente peut aussi présenter, en partie, une polarisation elliptique, circulaire, ou rectiligne. Pour déterminer alors quelle est la polarisation d'une lumière, on utilise des polariseurs et des lames à retard.

[modifier] Effets physiques sur la polarisation

[modifier] Polarisation après réflexion

La réflexion de la lumière sur certains matériaux transforme sa polarisation. Un exemple important est celui de la réflexion vitreuse qui fait que l'on voit des reflets sur les fenêtres. Cette réflexion n'est pas identique selon la polarisation de la lumière incidente sur le verre. Pour le comprendre, on décompose la polarisation de la lumière en deux polarisations rectilignes orthogonales entre elles, notées s et p. La polarisation s est perpendiculaire au plan d'incidence, et la polarisation p est contenue dans ce plan.

Polarisation s
Polarisation s
Polarisation p
Polarisation p
Sur ces deux images, la plaque épaisse est le matériau réfléchissant, et la plaque fine est le plan d'incidence (fictif).

La lumière est plus ou moins réfléchie selon qu'elle est polarisée s ou p, et selon l'angle d'incidence. Cela permet, par exemple, au photographe, d'éliminer une grande partie des reflets sur une vitrine lorsqu'il veut photographier ce qu'il y a derrière. Pour cela, il suffit de placer un polariseur devant l'appareil photo, et de se placer au bon angle de vue, appelé angle de Brewster.

La réflexion sur les métaux a également un effet sur la polarisation.

[modifier] Autres effets

Les ondes présentant une polarisation peuvent subir différents effets :

  • Un polariseur par absorption permet de transformer une lumière quelconque en une lumière polarisée rectilignement.
  • La biréfringence est une propriété de certains matériaux qui séparent un rayon lumineux en deux rayons de polarisations différentes. Un exemple important en optique est la lame à retard.
  • Les matériaux présentant un pouvoir rotatoire peuvent faire tourner la polarisation. Cela permet, en chimie, de différencier les molécules chirales entre elles.

[modifier] La polarisation dans la nature, la science et la technologie

[modifier] Dans la vie de tous les jours

La même image prise avec filtre polariseur (à gauche), et sans (à droite).
La même image prise avec filtre polariseur (à gauche), et sans (à droite).
La même image prise avec filtre polariseur (à gauche), et sans (à droite).
La même image prise avec filtre polariseur (à gauche), et sans (à droite).

Les matériaux transparents et brillants réfléchissent en partie la lumière. Selon l'angle d'observation, cette lumière réfléchie est plus ou moins polarisée. En la regardant derrière un polariseur, ou des lunettes de soleil polarisantes, on peut voir des variations de l'intensité lumineuse.

La lumière du ciel est également polarisée en partie. C'est pour cela que les photographes utilisent des polariseurs afin d'assombrir le ciel sur les photographies, et augmenter le contraste. Cet effet est bien visible au coucher du soleil : à 90° du soleil, la lumière est particulièrement polarisée. D'autre part, la réflexion sur une surface horizontale (mer, glace) polarise la lumière horizontalement. C'est pour éliminer ces reflets que les pêcheurs et les alpinistes utilisent des lunettes de soleil polarisantes (constituées d'un filtre polarisant vertical).

[modifier] En biologie

De nombreux animaux sont capables de percevoir la polarisation de la lumière, qu'ils utilisent souvent pour la navigation, car la polarisation de la lumière du ciel est perpendiculaire à la direction du soleil. Cette capacité est courante chez les insectes, comme les abeilles qui l'utilisent pour se diriger lors de leur danse communicative. On a aussi observé cette capacité chez certaines espèces de pieuvres, calmars, seiches, et crevette-mantes. La peau des seiches pouvant changer rapidement, et vivement colorées, est partiellement polarisée. La crevette-mante a aussi la particularité de ne pas réfléchir toutes les polarisations de la même façon.

Certains vertébrés, comme les pigeons, peuvent aussi percevoir la polarisation.

[modifier] Géologie

La lumière polarisée est utilisée en géologie dans l'observation de lames minces de roches. C'est un outil indispensable à l'identification des minéraux constituant celles-ci. C'est le phénomène de biréfringence de certains cristaux qui la permet.

[modifier] Observation en relief

La lumière polarisée est utilisée pour observer des images projetées en relief, au moyen de deux projecteurs dont l'un est muni d'un polariseur orienté haut-gauche et l'autre haut-droite. Les spectateurs portent chacun une paire de lunettes polarisantes dont les deux "filtres" sont orientés dans les directions correspondantes. De nombreux films en relief ont été ainsi montrés au public, notamment dans des parcs d'attractions (Cité des Sciences, Futuroscope, etc.) et dans plusieurs salles de cinéma ainsi équipées. Voir par exemple stéréoscopie.

[modifier] Chimie

Les composés chiraux font tourner la polarisation de la lumière les traversant. Ce pouvoir rotatoire permet de séparer les énantiomères selon le sens dans lequel ils font tourner la polarisation.

[modifier] Communications hertziennes

La polarisation des ondes la plus courante dans les applications grand public, comme la télévision terrestre (analogique ou numérique) ou par satellite, est la polarisation linéaire, horizontale ou verticale. On retrouve ces deux polarités dans le domaine du Wifi, du radioamateurisme et dans les transmissions professionnelles.

Les différentes composantes de la polarisation sont nécessaire pour protéger la réception de signaux à fréquences identiques ou rapprochées, car cela évite des interférences mutuelles, particulièrement lorsque les signaux parviennent dans une même direction.

Le réseau de télévision terrestre utilise principalement la polarisation horizontale (H) et donc les antennes sont horizontales. Dans certaines régions à spectre surchargé, comme les zones frontalières, par ex. l'Alsace en France, les nouveaux canaux émis sont souvent polarisés verticalement (ex. Arte, M6 et la TNT). Il faut donc là 2 râteaux pour un même émetteur. Il n'existe pas d'antenne TV à bipolarisation en UHF captant, et protégeant, à la fois les polarisations V et H. Pour recevoir 2 polarisations différentes émises par un même émetteur on utilise en complément un coupleur d'antennes UHF. Les antennes (donc leur plan) étant placées l'une verticalement et l'autre horizontalement.

En télévision par satellite c'est la tête universelle, commandée par le terminal DVB-S, ou le démodulateur, qui sélectionne le plan des polarités émises par les antennes du satellite, principalement les rectilignes H ou V. Une mauvaise sélectivité (rotation de la tête dans la bride) conduit à des dysfonctionnements.

La polarisation circulaire (intuitif : tire-bouchon) est moins utilisée, on la retrouve toutefois chez les radio-amateurs et dans la majorité des appareils de transmission de salon (transmetteur AV sans fil) fonctionnant dans la Bande 2,4 GHz (bande S).

[modifier] Radars et télédétection

Icône de détail Articles détaillés : radar et radar météorologique.
Illumination de la cible avec la double polarisation. Notez la forme de la goutte
Illumination de la cible avec la double polarisation. Notez la forme de la goutte

Les radars utilisent la polarisation pour extraire des informations supplémentaires à la position (obtenue grâce à la réflectivité) et au déplacement (obtenu grâce à l'effet Doppler) des cibles sondées. En effet, les intensités et déphasages entre deux faisceaux polarisés orthogonalement revenant d'une même cible peuvent révéler sa forme ou son type.

  • Si les cibles ont une forme aplatie comme dans l'image ci-contre, en sondant avec deux ondes dont l'une est de polarisation verticale (V) et l'autre horizontale (H), on obtient des intensités plus fortes revenant de celle ayant l'axe horizontal. Par contre si les retours orthogonaux sont égaux cela indique une cible ronde. Cela s'appelle la différence de réflectivité (Zdr).
  • Le faisceau radar sonde un volume plus ou moins grand selon les caractéristiques de l'antenne émettrice. Ce qui revient est l'addition des ondes réfléchies par les cibles individuelles dans le volume. Comme les cibles peuvent changer de position dans le temps les unes par rapport aux autres, l'intensité des ondes V et H ne demeure constante que si les cibles ont toute la même forme. Le rapport d'intensité entre les canaux H et V revenant de sondages successifs s'appelle le coefficient de corrélation (ρhv) et donne donc une idée de l'homogénéité ou non des cibles dans le volume sondé.
  • La phase de l'onde change lorsqu'elle traverse un milieu de densité différente. En comparant le taux de changement de phase de l'onde de retour avec la distance, la phase différentielle spécifique ou Kdp, on peut évaluer la quantité de matière traversée.
  • On peut également comparer le déphasage entre les retours H et V (différentiel de phase ou φdp).

Un exemple d'utilisation est celui par les radars météorologiques. Les volumes sondés contiennent une multitude de cibles telles gouttelettes, flocons ou grêlons. Elles peuvent être toutes du même type ou être un mélange de formes et de types. En utilisant les différentes informations des ondes polarisées, on obtient donc des informations supplémentaires qui peuvent nous donner directement le type d'hydrométéores quand on les analyse en conjonction avec la réflectivité. Ceci aide même à éliminer les artéfacts indésirables comme les oiseaux ou les échos revenant des obstacles comme les montagnes.

D'autres types de radar utilisent la polarisation à différentes fins. Par exemple, le radar à synthèse d'ouverture est utilisé pour cartographier des régions par avion ou satellite et utilise la polarisation pour distinguer les types de sol, de végétation, etc.

[modifier] Observations astronomiques

L’expérience PILOT a pour but la mesure de la polarisation de l’émission des poussières galactiques dans l’IR lointain. Au cours de la prochaine décennie, la mesure très précise de la polarisation du fond cosmologique (CMB) sera l’un des enjeux majeurs pour la cosmologie et la physique fondamentale. L’objectif principal en sera la mesure des modes «B» du CMB, qui nous renseigneront à la fois sur le bain d’ondes gravitationnelles primordiales généré pendant la période d’inflation de l’univers qui a eu lieu dans les tout premiers instants de l’expansion et sur la structuration de la matière après le big-bang (effet de microlentille sur le fond). Le Département Univers Froid du Centre d'Études Spatiales des Rayonnements s’engage résolument dans cette voie, et participe activement à plusieurs projets de préparation, en particulier l’expérience ballon PILOT.

Site officiel du projet PILOT

[modifier] Écran à cristaux liquides

Icône de détail Article détaillé : Écran à cristaux liquides.
Afficheur 3 chiffres 1 & 5 : filtres polarisants ; 2 : électrodes avant ; 4 : électrode arrière ; 3 : cristaux liquides ; 6 : miroir
Afficheur 3 chiffres
1 & 5 : filtres polarisants ;
2 : électrodes avant ;
4 : électrode arrière ;
3 : cristaux liquides ;
6 : miroir

Les écrans à cristaux liquides sont devenus courants depuis les années 1980. D'abord utilisés pour l'affichage monochrome sur les cadrans et montres, ils se retrouvent maintenant dans les télévisions, les caméras numériques et tout autre affichage grâce à leur faible encombrement, et, depuis quelques années, leur polychromie. L'écran utilise la polarisation de la lumière grâce à des filtres polarisants et à la biréfringence de certains cristaux liquides en phase nématique dont on peut faire varier l'orientation en fonction du champ électrique.

L'écran LCD (Liquid Crystal Display) est constitué de deux polariseurs dont les directions de polarisation forment un angle de 90°, de chaque côté d'un sandwich formé de deux plaques de verre enserrant des cristaux liquides. Les deux faces internes des plaques de verre comportent une matrice d'électrodes transparentes, une (noir et blanc) ou trois (couleur) par pixel. L'épaisseur du dispositif et la nature des cristaux liquides sont choisis de manière à obtenir la rotation désirée du plan de polarisation en l'absence de tension électrique.

L'application d'une différence de potentiel plus ou moins élevée entre les deux électrodes d'un pixel entraîne un changement d'orientation des molécules, une variation du plan de polarisation et donc une variation de la transparence de l'ensemble du dispositif. Cette variation de transparence est exploitée par un rétro-éclairage, par réflexion de la lumière incidente ou par projection.

Affichage par segments et par pixels
Affichage par segments et par pixels

Les petits afficheurs LCD monochromes utilisent souvent des électrodes avant en forme de segments de caractère de façon à simplifier l'électronique (commande directe en tout ou rien) tout en obtenant une très bonne lisibilité (pas de balayage). Les affichages plus complexes, comme pour les télévisions, utilisent des électrodes par pixels accessibles par ligne ou colonne entières. Leur commande d'allumage ou d'extinction doit se faire par un balayage régulier des lignes/colonnes de points.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes