Paul Nothomb

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Paul Nothomb est né en 1913 à Bruxelles en Belgique mort le 27 février 2006.

Homme de gauche, ami d'André Malraux, il aurait inspiré le personnage d'Attignies dans l'Espoir. Il était le grand-oncle de la romancière Amélie Nothomb.

Jeune rebelle et alors qu'il avait un avenir socioprofessionnel bien tracé par sa famille de la haute bourgeoisie belge, il s'engage sans hésitation et participe à la guerre d'Espagne. Productions Rose Night a recueilli en 1999 son témoignage et celui de sa compagne sur l'escadrille Malraux, et un livre a vu le jour trois ans plus tard sur son engagement dans le conflit. Résistant durant la Seconde Guerre mondiale, il tombe aux mains de la Gestapo qui le torture, il craque, laisse croire à l'ennemi qu'il se rallie à sa cause pour protéger son épouse enceinte directement menacée et se retrouve, à la Libération, condamné. Il sera réhabilité par la suite.

Romancier et philosophe, il propose, entre autres passions telles que l'amour de la Liberté et son pourquoi, une relecture des textes de la Bible, hors des canons. Se référant au texte brut, il dénonce des erreurs de traduction, et offre un nouvel éclairage de la Genèse en particulier.

Sommaire

[modifier] Le paradoxe logico-mathématique du "Mal"

À partir d'une exégèse rigoureuse de la Genèse, fin connaisseur de l'hébreu qu'il apprend et enseigne, Paul Nothomb introduit à la compréhension de la notion du "Mal" et de la Chute à travers le comportement d'Adam vis-à-vis d'Êve. En nommant Êve face à lui comme étant objet de sa connaissance à lui, "celle-là", il la rabroue en quelque sorte à un statut logique inférieur au sien, lui qui est pourtant devenu depuis l'apparition de Êve, son égal à part entière. Nothomb sous-entend pratiquement que la parole d'Adam pour désigner Êve a valeur de Verbe et détermine la suite des événements.

Étant nommée par Adam, Êve est déterminée par cette façon d'être nommée par Adam. Autrement dit, de la manière dont Adam l'a (dé)considérée, de la manière dont elle (dé)considèrera les choses, et a fortiori Dieu lui-même, car c'est une question de perception avant tout.

Ainsi, Paul Nothomb établit l'argument que la Chute procède de la façon dont Adam a perçu Êve au tout début de leur rapport, selon la logique que "l'origine détermine la fin". Cette argumentation est non seulement très plausible, mais vraiment judicieuse. Elle mérite une plus ample explication.

Partons d'une allégorie pour illustrer ce propos. Si un chat qualifie un autre chat dans un statut logique de non-égal, "celui-là, ce chat-là", il lui confère dans sa perception un statut inférieur au sien, comme objet d'une connaissance et non comme sujet de connaissance égal à lui. Ce chat se prend dès lors pour l'ensemble des chats qu'il surmonte à partir de sa perception propre. Il rompt sa place logique dans l'ensemble auquel il appartient. Au lieu d'être un élément d'un ensemble, il en sort par sa profération d'un autre élément qu'il rabaisse à un statut d'objet et non d'égal.

Autre exemple, un mari dit à sa femme comment le ménage doit fonctionner. D'élément dans un système (la famille), il se prend pour la famille et dicte les règles, rabaissant sa femme à la condition obéissante d'objet de cet ensemble. Dès lors, lui qui est au départ un élément de cet ensemble, de même valeur logique que sa femme, devient en quelque sorte le système lui-même. C'est cela le parodoxe logico-mathématique, lorsqu'un élément d'un système se prend pour le système.

Quand Êve réfléchit aux paroles du Serpent, elle en conclut que la recommandation de Dieu, Dieu lui-même, est un élément parmi d'autres de sa réflexion, un objet du système que l'on peut remplacer par un autre aspect plus attrayant. En somme, c'est elle qui décide de quelles valeurs relève le système auquel elle appartient. Dieu n'est plus, aux yeux d'Êve, le représentant du système, la règle à suivre pour vivre dans ce système. Dès lors, face à Êve, Dieu n'est plus le système, donc le système n'est plus. Ils sont "chassés" du Paradis. Leur vision les chasse d'une qualité logique qui faisait leur origine, la création DE Dieu, et sa Manifestation, la présence d'Adam et d'Êve au Paradis.

La lecture de la Genèse de Paul Nothomb précise que la perception d'Êve vis-à-vis de Dieu incombe [??] à celle d'Adam vis-à-vis d'elle, le Serpent n'étant qu'un catalyseur qui, en quelque sorte, accélère la réaction psychique.

Cette lecture est considérable dans sa portée. Par exemple, toute la psychanalyse est d'accord pour comprendre la perversion comme étant un élément d'un système qui se dégage de ce système par une sorte de démesure (fixation, exagération du désir, etc.). Ainsi, la pulsion partielle s'émancipe du primat génital. Par exemple, le plaisir des yeux du voyeuriste est plus important que la finalité génitale de l'excitation sexuelle. Le primat génital étant la logique fécondante qui veut que tout ce qui jalonne la rencontre vers les sexes n'a de sens qu'en vue de cette relation sexuelle dite génitale. Au lieu de passer par la peau, les yeux, les postures, les odeurs, etc., comme en autant d'étapes vers l'introduction du sexe mâle dans le sexe femelle, la libido stagne dans une étape particulière et se dégage de la priorité vitale de la reproduction. L'élément déborde son système et se déracine de la logique de son origine pour devenir sa propre fin. C'est la définition de l'absolu, être à soi-même sa propre destination, faire système par soi-même au détriment du reste, c'est-à-dire l'aspect le plus commun attribué au "Mal".

[modifier] L'hypostase du "Mal"

Hypostasier consiste à considérer à tort comme une réalité en soi, absolue. La rigueur de l'exégèse de Paul Nothomb dénonce cette logique d'hypostase du "Mal". Selon sa traduction, le "Mal" n'existe pas dans la Genèse biblique. Tout est bon (tob) et il est possible que ce soit moins bon. Il n'y a pas de négation, d'entité antagoniste autonome en son essence. L'attitude est décrite comme conforme à l'origine, et c'est bon, même très bon ; sinon ce n'est pas conforme à l'origine, et c'est "moins bon", mais ce n'est pas "Mal" au sens strict. En effet, l'autonomisation du "moins bon" en un concept du "Mal" est en lui-même une signature de la volonté de retrait de l'élément hors de son système d'origine, une manière verbale de vouloir accorder un statut définitif à cette séparation - absolu serait plus juste. En fait, une manière de parler, non conforme à l'origine. Ces aspects sont étudiés dans son livre « La mémoire de l'Éden » dans lequel nous pouvons lire cette phrase terrible à la page 121 : « La perte de sa familiarité avec Dieu le condamne à la religion ».

[modifier] Bibliographie

Les tuniques d'aveugles, éd. de la Différence / La Longue Vue, coll. Vers la seconde Alliance, 1990
Les récits bibliques de la Création, éd. de la Différence, coll. Vers la seconde Alliance, 1991
L'imagination captive. Essai sur l'homme immortel, éd. de la Différence, coll. Vers la seconde Alliance, 1994
Le Second récit. L'autre Lecture de la Genèse, éd. Phébus, Paris, 2000
Ça ou l'histoire de la pomme, éd. Phébus, Paris, 2003
Ève dans le jardin, éd. Phébus, Paris, 2004
La Mémoire de l'Éden, éd. de la Longue Vue, Bruxelles, 1987
Malraux en Espagne éd. Phébus, Paris, 1999

[modifier] Liens externes