Patrick Berhault

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Patrick Berhault (né le 19 juillet 1957 à Thiers - mort le 28 Avril 2004 sur l'arête du Täschhorn au Dom) était un grimpeur et alpiniste français.

Patrick Berhault était guide de haute montagne et professeur à l'École nationale de ski et d'alpinisme (ENSA). Il était un grimpeur au grand cœur épris de nature et de liberté, aux fortes convictions écologistes et partisan d'une éthique stricte de la montagne (peu de pitons, pas d'utilisation de moyens mécaniques).

Surnomme Berobocop ou E.T. par ses compagnons de cordée en raison de sa formidable forme physique, de son endurance et de sa grande maîtrise technique et mentale.

Sommaire

[modifier] Sa jeunesse

Patrick Berhault, né en Auvergne, déménage rapidement dans le Sud de la France. Il passe sa jeunesse au bord de la mer, entre Nice et Monaco, où il rêve d'abord de devenir plongeur sous-marin. Il découvre la randonnée et s'émerveille pour la montagne à l'age de 13 ans, grâce à un curé prof d'anglais.

Il s'inscrit au club alpin monégasque et commence à grimper avec des copains à la Turbie. Puis il s'encorde avec un de ses mentors du Club Alpin Français, section de Nice, Michel Dufranc qui lui fait découvrir les joies de l'escalade dans le Sud de la France (Baou de saint Jeannet, Aiglun, Verdon). Ils parcourent également ensemble quelques voies classiques.

Patrick abandonne l'école après la seconde, pour se consacrer entièrement à sa passion pour la montagne. Il ouvre de nombreuses voies dans le massif du Mercantour (Alpes Maritimes).

[modifier] La naissance "du libre"

A la fin des années 1970, en compagnie de Patrick Edlinger, il participe à l'introduction de l'escalade libre en France, un art de vivre venu de Californie, et invente le 8ème degré. Il se tourne vers le solo intégral et surprend aussi bien par son audace que par sa rapidité. En montagne, il développe un style d'action fondé sur la rapidité, la légèreté et une forme physique et mentale surprenante. Il partagera trois années d'escalade et d'alpinisme au jour le jour avec son ami Patrick Edlinger. Pendant ces années ils mettent au point un entraînement sportif intensif à base de footing, de tractions, d'abdominaux et d'exercices de souplesse.

[modifier] Le style Berhault

En 1978, Patrick Berhault connaît un premier accident en montagne. Avec son ami Pierre Brizzi, à la suite de la rupture d'une corniche ils dévalent un couloir de 800 mètres aux trois Dents du Pelvoux et s'en tirent miraculeusement avec seulement quelques contusions. C'est en 1979 qu'il se fait remarquer pour la première fois pour son aisance et sa rapidité dans le massif des Ecrins.

Au début des années 1980, il réalise en des temps records, et le plus souvent en solo, les voies les plus dures des Alpes. En 1980, avec Jean-Marc Boivin, ils font le pari incroyable de relier les sommets des Drus et du Fou dans la journée en parapente après en avoir gravi la face Sud pour le "Fou" et la directe Américaine pour les "Drus" !

Le style "Berhault" est né, qui remet en cause bien des usages fondés jusqu'alors sur la lenteur, la lourdeur et une technologie imposante. Toute une dynamique se crée autour de ce mouvement. En même temps qu'il s'aventure en montagne, Patrick Berhault s'investit dans l'univers du "libre" en falaise et fait partie de ceux qui repoussent le niveau des difficultés réalisées. Il effectue notamment des voies d'envergure dans le Verdon, en n'hésitant pas à désescalader certaines voies lors d'enchaînements. Il libère également des voies d'escalade artificielle ("Le toit d'Auguste", près de la Turbie, un des premiers 8A de France).

[modifier] 1985 : le retour à la terre et la danse-escalade

À partir des années 1985 alors que ses frères de grimpe poussent le jeu jusqu'à la compétition, et que son copain Edlinger se dévoile au grand public dans les films de Jean-Paul Janssen ("la vie au bout des doigts", "opera vertical"), Berhault tourne le dos à la scène pour s'orienter vers de nouveaux projets.

Il devient conseiller technique auprès du fabricant de matériel d'escalade et de montagne italien CAMP. Admirateur du célèbre danseur Noureev, il s'investit dans une toute nouvelle discipline : la "danse-escalade". Il s'entoure d'un chorégraphe, met au point des chorégraphies et donne des spectacles, notamment au festival de Chateauvallon.

C'est également l'époque ou il s'engage dans le développement de "l'escalade sociale" en participant à des stages de formation pour les jeunes de Vaulx-en-Velin. Le projet d'une vie à la campagne (son mythe du "guide-paysan") se dessine du côté de Thiers, en Auvergne dans ses collines natales du Forez. Il achète pour vivre avec sa compagne et ses deux filles une ferme dans le hameau de Chabreloche (Puy de Dome). Tantôt maçon, paysan ou charpentier, il conduit son tracteur et retape sa ferme.

[modifier] 1990 : Le retour à la Montagne

C'est au début des années 1990 que Patrick Berhault a amorcé son retour à la montagne. Il a passé son diplôme de guide, un objectif longtemps repoussé. Il se constitue une petite clientèle et est bientôt requis pour former lui-même les aspirants-guides au sein de l'Ecole nationale de ski et d'alpinisme (ENSA). Préférant désormais la cordée au solo, il a renoué, à partir de 1992, avec les ascensions express. Puis les a empilées les unes derrière les autres, de préférence à la saison froide, quand la montagne est calme et ses élèves occupés ailleurs.

Patrick Berhault partage alors sa vie entre des expéditions lointaines (Himalaya, Amérique latine), la formation de guides à l'École nationale de ski et d'alpinisme à Chamonix, et le développement d'une vie locale autour des sports de nature. Convaincu d'une possible revitalisation du monde rural par le loisir, il s'engage fortement dans ce projet et s'investit en Auvergne dans le développement local de l'escalade : création d'un centre d'escalade pour enfants, création de la maison de la montagne de Grenoble. Par ces actions, il met en pratique sa vision écologique du monde et de la société.

[modifier] 1995 : L'alpinisme comme un voyage

A partir de 1995, son projet consiste à développer dans les Alpes une pratique de l'alpinisme construite sur le voyage, l'immersion longue dans la nature profonde et le parcours de voies classiques ou modernes permettant de réaliser des enchaînements inédits en fonction de la thématique aventureuse choisie. Défendant l'idée de la grande cordée au fondement de la communauté montagnarde, Patrick Berhault devient le promoteur d'un alpinisme humaniste et écologique, capable de relier les hommes entre eux et avec la nature.(cf "Ses voyages alpins" ci-après).

Son dernier projet (mars-avril 2004) : consistait à enchaîner en compagnie de Philippe Magnin, les 82 sommets de plus de 4000 m des Alpes. Patrick Berhault fait une chute mortelle le 28 Avril 2004, après le 64e sommet, sur l'arête neigeuse entrecoupée de ressauts rocheux qui sépare le Täschhorn du Dom dans le massif des Mischabels (Valais/Suisse). Le passage ne comportait pas de difficulté technique pour ces deux guides-professeurs ; cet accident est probablement dû à une faute d'inattention : un pied qui a glissé ou une corniche de neige qui a cédé sous son poids. Pour ne pas se retarder dans ce grand voyage, les deux guides avaient coutume de ne s'encorder que dans les passages de grande difficulté technique et dans les parties crevassées.

[modifier] Ses voyages alpins

  • Du 28 février au 3 mars 1997: avec son copain Francis Bibollet, voyage d'une semaine dans quatre faces nord à travers le massif du Mont-blanc. Les règles sont posées : une prévision météo "sur mesure", préparée par l'ami routeur de Chamonix, Yann Giezendanner, mais aucun moyen de liaison mécanique - ni hélico, ni voiture, ni téléphérique, un vélo s'il faut faire un bout de route.

Patrick Berhault, qui a milité à l'association Mountain Wilderness, accorde son alpinisme à ses convictions écologistes.

  • Du 12 au 18 février 1998, c'est avec Bruno Sourzac qu'il repart pour cette fois les 4 grandes faces qui se trouvent au dessus du glacier noir (Ecrins).
  • En janvier 2000 il traverse avec Christophe Frendo le massif des Aravis en plein hiver.
  • D'août 2000 à février 2001, il entreprend "La grande traversée des Alpes", tantôt seul, tantôt entouré d'amis : Patrick Gabarrou, Patrick Edlinger, Ottavio Fassini, Gael Bouquet des Chaux, Valérie Aumage, Philippe Magnin. Au cours de ce voyage alpin qui le fait connaître du grand public, naîtra la "cordée magique" Berhault/Magnin. Durant ce voyage de 167 jours qui le mènera de la Slovénie à Menton, 22 sommets et voies majeures sont gravis :


Date Sommet Massif Altitude Avec
27 août 2000 face nord du Triglav Alpes juliennes 2 863 m Patrick Edlinger et Tomaz Humar
5 septembre 2000 Cima ovest voie Cassin-Ratti Dolomites 2 973 m Patrick Edlinger
6 septembre 2000 Cima Grande voie Brandler-Hasse Dolomites 2 999 m Patrick Edlinger
11 septembre 2000 Civetta voie Solleder Dolomites 3 218 m Patrick Edlinger
12 septembre 2000 Civetta punta Tissi voie Phillip-Flamm Dolomites 2 863 m Patrick Edlinger
13 septembre 2000 Civetta cima Su Alto voie Livanos-Gabriel Dolomites 2 958 m Patrick Edlinger
16 septembre 2000 Marmolada voie du Poisson Dolomites 3 342 m Patrick Edlinger
18 septembre 2000 Marmolada di Rocca voie Vinatzer et variante Messner Dolomites 3 265 m Patrick Edlinger
25 septembre 2000 Crozzon di Brenta pilier des Français Dolomites 3 135 m Patrick Edlinger
26 septembre 2000 Brenta Alta, voie Detassis Dolomites 2 960 m Patrick Edlinger
4 octobre 2000 Piz Cengalo voie nord-ouest Massif de la Bernina 3 370 m Ottavio Fassini
24 et 25 octobre 2000 Grandes Jorasses, face nord voie Goussault-Desmaison Massif du Mont-Blanc 4 208 m Philippe Magnin
28 octobre 2000 Mont Blanc, Hypercouloir puis arête du Brouillard Dolomites 4 807 m Philippe Magnin
29 novembre 2000 Cervin, face nord Valais 4 478 m Philippe Magnin
4 et 5 décembre 2000 Eiger, face nord Oberland 3 970 m Philippe Magnin
13 décembre 2000 Grande Casse, face nord seconde ascension de la voie Boivin-Diaféria-Maurin Vanoise 3 852 m Patrick Gabarrou
19 et 20 décembre 2000 traversée des Aiguilles d'Arves Maurienne 3 510 m, 3 509 et 3 363 m Gaël Bouquet des Chaux
22 décembre 2000 Meije, voie Pierre Allain (Face Sud) Massif des Écrins 3 893 m Philippe Magnin
27 décembre 2000 Dôme de neige des Écrins, ascension par le versant Bonnepierre Massif des Écrins 4 015 m Valérie Aumage
8 et 9 janvier 2000 Arête Nord-Nord Ouest du Viso Alpes Cottiennes 3 841 m en solitaire
17 janvier 2000 Corno Stella, face nord voie Ughetto-Ruggeri (dite voie du Grand Dièdre Rouge) Alpes-Maritimes 3 050 m en solitaire
29 janvier 2000 Marguareis, voie Gogna en face Nord de la Pointe Scarason Alpes-Maritimes 2 651 m P. Gabarrou et P. Magnin
9 janvier 2000 arrivée sur la plage de Menton Alpes-Maritimes 0 m -
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  • Du 11 février au 5 mars 2003 : avec Philippe Magnin, prenant pour camp de base le bivouac Eccles, installé sur le versant italien du Mont-Blanc, ils enchaînent seize voies extrêmes sur le granit fauve de l'envers du Mont Blanc.

Un "voyage glaciaire" sur 8 voies, suivi d'un "voyage rocheux" sur 8 autres voies mythiques par -25°C, ce qui leur vaut le « Cristal 2003 » décerné par la Fédération française de la montagne et d'escalade (FFME). Les 16 voies de ce voyage :

    • "brouillard givrant"
    • "cascade notre dame"
    • "hypercouloir du brouillard"
    • "hyper-goulotte"
    • "Abominette"
    • "Fantomastic"
    • "Freynesie Pascale"
    • "Grand couloir du Freney"
    • "cascade Grassi",
    • "Pilier derobe du Freney"
    • "Pilier central du Freney"
    • "Pilier sud du Freney"
    • "Pilier central du Brouillard"
    • "Pilier droit du Brouillard"
    • "Pilier rouge du Brouillard"
    • "Pilier gauche du Brouillard".

[modifier] Ses voyages lointains

  • 1980 Nanga-Parbat 8125 m (Pakistan) - Tentative sur le versant Rupal
  • 1981 Hoggar (Algérie) - Ouverture de nouveaux itinéraires
  • 1982 Jannu 7710 m (Népal) - Tentative sur la face Nord
  • 1985 Alpamayo 6000 m (Pérou) - Face sud-ouest
  • 1988 Shishapangma 8046 m (Tibet) - Voie normale
  • 1992 Kilimandjaro 5895 m (Tanzanie) -Ascension réalisée en tant que guide avec 5 non-voyants
  • 1993 Aconcagua 6960 m (Argentine) -Face est du glacier des Polonais - première traversée intégrale des arêtes d'ouest en est
  • 1995 Kilimandjaro 5895 m (Tanzanie) - par le Heim-Glacier
  • 2003 Everest lors de l'expédition anniversaire « EVEREST 50 ».

[modifier] Films documentaires

  • Voie Express 1979 par Laurent Chevalier
  • Nangat Parbat 1980 par Laurent Chevalier
  • Overdon 1980 par Jean–Paul Jansen
  • OverIce 1981 par Jean–Paul Jansen
  • Oversand 1981 par Jean–Paul Jansen
  • Devers 1981 par Laurent Chevalier
  • Paroi en coulisse 1983 par Laurent Chevalier
  • Histoire de l’alpinisme 1985 par Bernard Choquet
  • Pirates par Roman Polanski (doublage)
  • La chance de grimper 1987 par Bernard Giani
  • Métamorphoses 1987 par Bruno Soldini
  • Météores 1987 par Guy Meausoone
  • Grimpeur Etoile 1989 par Laurent Chevalier
  • Fortune Express 1990 par Olivier Schatzsky (doublage)
  • Les voies de l’équilibre 1992 par Pierre Ostian
  • Premier de Cordée 1998 par Edouard Niermans
  • La Grande Crevasse 1999 par Edouard Niermans
  • Sur le fil des 4 000 de Gilles Chappaz, retrace l'enchaînement de 64 des 82 sommets de plus de 4000 des Alpes. Monté à titre posthume par Gilles Chappaz avec notamment des images Mini-DV réalisées par Patrick Berhault et Philippe Magnin au cours de cette aventure.
  • La cordée de rêve retrace le grand voyage alpin réalisé en 2000-2001.

[modifier] Livres

  • Encordé mais libre, la traversée des Alpes, Editions Glénat Livres, Grenoble, octobre 2001, 258 p. (ISBN 2723435822)
  • Le grand voyage alpin, la traversée des Alpes, Editions Glénat Livres, Grenoble, novembre 2001, 144 p. (ISBN 272343589X)
  • Patrick Berhault de Michel Bricola et Dominique Potard ; Editions Guerin, mai 2008 (ISBN 2352210216)

[modifier] Liens externes

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