Pacifisme

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Il existe deux acceptions possibles du terme pacifisme : l'action des partisans de la paix ou une doctrine de la non violence. Les deux concepts relient simplement les revers d'une même médaille : Théorie et Praxis.

Dans le premier sens, le pacifisme est la doctrine et l'action des partisans de la paix ou du rétablissement de la paix. Les socialistes d'avant 1914 (Jean Jaurès), les Zimmerwaldiens durant la Première Guerre mondiale, les opposants aux guerres coloniales ou les partisans de la paix entre Israéliens et Palestiniens professent un pacifisme qui n'est pas assimilable à la non-violence. Ainsi, les refuzniks israéliens qui ne refusent pas de porter les armes, mais de servir au-delà de la ligne verte, sont des pacifistes.

Sommaire

[modifier] Pacifisme chrétien

Les positions ont varié au cours des âges.

  • Les premiers chrétiens refusaient de porter les armes, même pour défendre Rome, en invoquant le passage de la PassionJésus, que Pierre cherche à défendre par l'épée, ordonne à Pierre de ranger celle-ci en précisant que qui utilise l'épée périra par l'épée.
  • Saint Martin (316-397), soldat converti alors qu'il est engagé dans l'armée par un contrat de 25 ans, demande à ne pas participer à l'attaque de Worms. Traité de lâche par l'empereur Julien, il décide alors de marcher en tête de ses troupes, sans autre arme qu'une croix, mais il se trouve que les Barbares se rendent avant l'assaut (Martin sera libéré de son contrat à l'âge de quarante ans)
  • Saint Ambroise (340-397) fait montre d'une vision plus romaine des choses : « La force sans la justice est matière d'iniquité. Est pleine de justice la force qui, à la guerre, protège la patrie contre les barbares. » Néanmoins, le pouvoir temporel reste sous étroite surveillance : la ville de Thessalonique s'étant révoltée contre son gouverneur et l'ayant tué, l'empereur (chrétien) Théodose Ier ordonne le massacre des habitants, innocents ou coupables, et sept mille personnes périssent. Saint Ambroise écrit aussitôt à Théodose pour lui signifier la gravité de sa faute et le prévenir que, jusqu'à ce qu'il l'expie par la pénitence, il est exclu de facto de la communauté. Quand l'empereur se présente à l'église, Ambroise lui en interdit l'entrée. L'empereur rappelle la pardon accordé jadis au roi David. « Vous l'avez imité dans son péché, répond saint Ambroise, imitez-le dans sa pénitence ». Il lui impose l'obligation de promulguer une loi portant que toute sentence de confiscation ou de mort ne deviendra exécutoire qu’au bout de trente jours, après avoir été de nouveau examinée et confirmée. Après huit mois de louvoiement, Théodose se soumet
  • Saint Augustin (354-430) renchérit : « Que trouve-t-on à blâmer dans la guerre ? Est-ce le fait qu'on y tue des hommes qui doivent mourir un jour afin que les vainqueurs soient maîtres de vivre en paix ? Faire ce reproche à la guerre est le fait d'homme pusillanimes et non d'hommes religieux. Ce qu'on blâme dans la guerre c'est le désir de nuire, la cruauté de la vengeance, une âme inapaisée et implacable, la fureur des représailles, la passion de la domination et autres sentiments semblables. » Augustin estime que tuer un homme (y compris soi-même) n'est pas une faute quand Dieu l'ordonne, en citant, entre autres, l'exemple de Samson (La Cité de Dieu, livre I) :
« Dieu lui-même a fait quelques exceptions à la défense de tuer l’homme, tantôt par un commandement général, tantôt par un ordre temporaire et personnel. En pareil cas, celui qui tue ne fait que prêter son ministère à un ordre supérieur ; il est comme un glaive entre les mains de celui qui frappe, et par conséquent il ne faut pas croire que ceux-là aient violé le précepte : “Tu ne tueras point”, qui ont entrepris des guerres par l’inspiration de Dieu, ou qui, revêtus du caractère de la puissance publique et obéissant aux lois de l’État, c’est-à-dire à des lois très-justes et très-raisonnables, ont puni de mort les malfaiteurs » (§21)
  • Dans la Somme théologique, Thomas d'Aquin (1228-1274) examine les conditions de licéité d'une guerre et pose trois exigences :
    1. l'autorité du prince,
    2. la cause juste,
    3. l'intention droite.
    • Il y considère aussi qu'une société est « un donné de la nature » ; une société de païens n'est pas moins légitime qu'une société chrétienne. Une souveraineté païenne est donc possible, y compris sur des chrétiens. On ne peut donc considérer comme sainte au seul prétexte qu'on la ferait à des infidèles (ce en quoi la position affichée du catholicisme diffère donc de celle de l'islam).
    • Enfin, il admet la légitimité du régicide face au « tyran d’exercice » ou au « tyran d’usurpation ».
  • Catéchisme en 2003 : la guerre de défense est considérée comme acceptable à condition :
    • « que le dommage infligé par l'agresseur à la nation ou à la communauté des nations soit durable, grave et certain ;
    • que tous les autres moyens d'y mettre fin se soient révélés impraticables ou inefficaces ;
    • que soient réunies les conditions sérieuses du succès ;
    • que l'emploi des armes n'entraîne pas des maux et des désordres plus graves que le mal à éliminer. La puissance des moyens modernes de destruction pèse très lourdement dans l'appréciation de cette condition. »

En réalité, l'église chrétienne a souvent utilisé la violence, comme beaucoup de religions

[modifier] Pacifistes célèbres

Ainsi que tous les nommés du Prix Nobel de la paix.


  • Jean Giono, écrivain plus ou moins anarchiste mais « pacifiste intégral », fonde un mouvement pacifiste, (« les Rencontres du Contadour »), du nom d'un village de la Montagne de Lure (Basses-Alpes), mais son manque de charisme, son individualisme et son refus de prendre des décisions importantes feront capoter ces illusions.
  • Bob Marley

[modifier] Nations pacifistes

Le Global Peace Index [1] mesure sur la base d'une vingtaine de critères (notamment l'engagement dans des conflits, la vente d'armes, les dépenses militaires, la transparence du gouvernement, le taux de criminalité ...) les pays les plus pacifiques.


[modifier] Critiques

Pour certains analystes, l'opposition systématique à la guerre par certains pacifistes est critiquable; Dans la préface à l'édition de 1946 de La Trahison des Clercs, Julien Benda prend position contre un pacifisme systématique, qui exclut la guerre dans tous les cas. Parlant des « clercs » qui défendent cette théorie, il écrit[2] :

« Nous estimons que le clerc est parfaitement dans son rôle en admettant l’emploi de la force, voire en l’appelant, dès qu’elle n’agit qu’au service de la justice, à condition qu’il n’oublie pas qu’elle n’est qu’une nécessité temporaire et jamais une valeur en soi. »

Dans ses Reflections on Gandhi, George Orwell défendait également une position proche en reprochant aux pacifistes d'« éluder les questions gênantes » et d'adopter « la thèse stérile et malhonnête selon laquelle dans chaque guerre les deux camps représentent la même chose, ce pourquoi il est sans importance de savoir qui gagne. » S'adressant à Gandhi, il écrivait également : « Et les Juifs ? Acceptez-vous qu'on les extermine tous ? Et sinon, que proposez-vous pour l'éviter, si vous excluez l'option de la guerre ? »

Enfin, selon l'auteur péruvien Mario Vargas Llosa, cette attitude revient à laisser le pouvoir aux dictateurs. Il écrit ainsi dans Les enjeux de la liberté que[3] :

« Le pacifisme semble être un sentiment altruiste, inspiré par une oecumenique abjuration de la violence et le rêve d'un monde de bon sens, où tous les conflits entre les nations se résoudraient autour d'une table de négociations et où les armes auraient disparu. C'est une belle affabulation, mais celui qui croit que la meilleure façon de la rendre réalité consiste à s'opposer à toutes les guerres pareillement oeuvre en vérité pour que le monde soit une jungle dominée par des hyènes et des chacals, et où les brebis seraient exterminées »

[modifier] Bibliographie

  • « Les pacifistes » in Frédéric Rousseau éd., Guerres, paix et sociétés, 1911-1946, Neuilly, Atlande, 2004, p. 552-573.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Source : Global Peace index.
  2. Julien Benda, La Trahison des Clercs, préface à l'édition de 1946
  3. Mario Vargas Llosa, Les enjeux de la liberté, Gallimard, 1997, p. 43-48


[modifier] Photographies

Avignon : manifestation pour la paix, août 2006
Avignon : manifestation pour la paix, août 2006
Londres : manifestation pour la paix en Irak novembre 2006
Londres : manifestation pour la paix en Irak novembre 2006