Nombre de Reynolds

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Le nombre de Reynolds est un nombre sans dimension utilisé en dynamique des fluides. Il a été mis en évidence en 1883 par Osborne Reynolds. Il caractérise un écoulement, en particulier la nature de son régime (laminaire, transitoire, turbulent etc. …).

Sommaire

[modifier] Définition

Le nombre de Reynolds représente le rapport entre les forces d'inertie et les forces visqueuses. Il s'énonce généralement de la façon suivante :

 Re = {V L\over \nu}

avec les unités S.I. suivantes :

  • V - vitesse du fluide [m/s],
  • L - dimension caractéristique [m] du phénomène :
. diamètre pour une conduite (de section circulaire le plus souvent), diamètre hydraulique.
. dimension jugée la plus pertinente pour une conduite ou un obstacle de forme quelconque,
. abscisse depuis le bord d'attaque pour une plaque plane ou un profil d'aile.

Le nombre de Reynolds représente également le rapport (qualitatif) du transfert par convection par le transfert par diffusion de la quantité de mouvement.

En magnétohydrodynamique il est aussi possible de définir un nombre de Reynolds: le nombre de Reynolds magnétique.

[modifier] Interprétation du nombre de Reynolds

Le nombre de Reynolds peut s'écrire de la manière suivante :

 Re = {{\rho V^2\over L}\over {\eta V\over L^2}} , Il s'interprète alors comme le rapport entre forces d'inertie et forces visqueuses.

On distingue trois principaux régimes.

  • Aux faibles valeurs du Reynolds (inférieures à 2000), les forces de viscosité sont prépondérantes, l'accélération convective étant négligée. On parle d'écoulement de Stokes. L'écoulement est laminaire (des éléments de fluide voisins demeurent voisins). De plus, comme l'inertie est négligeable, l'écoulement du fluide est réversible. Cela donne lieu à des comportements surprenants : si les forces extérieures sont soudainement stoppées, le fluide s'arrête immédiatement. Qui plus est, si les forces extérieures sont inversées, le fluide repart en sens inverse: dans une célèbre expérience de G.I.Taylor, une goutte d'encre, intialement mélangée dans un fluide visqueux, se reconstitue lorsqu'on a inversé le mouvement.
  • Aux valeurs intermédiaires du Reynolds (entre 2000 et 3000 environ), les forces d'inertie sont prépondérantes, mais l'écoulement reste laminaire. Cependant, il n'est plus réversible: si l'on stoppe les forces extérieures, le fluide continue partiellement sur sa lancée.
  • Aux fortes valeurs du Reynolds (au-delà d'environ 3000, voire plus haut), les forces d'inertie sont si importantes que l'écoulement devient turbulent. Entre les régimes laminaire et turbulent, on parle de régime transitoire.

[modifier] Exemples

  • Dans une conduite, l'écoulement est laminaire lorsque le nombre de Reynolds est inférieur à une valeur critique pour laquelle se produit une transition assez brutale vers le turbulent. 2300 est la valeur généralement retenue pour cette transition mais, dans des conditions soignées (paroi particulièrement lisse, stabilité de la vitesse), la transition peut se produire pour une valeur plus élevée. On considère souvent que la transition peut se produire entre 2000 et 3000.
  • Sur un cylindre à section circulaire placé dans un écoulement, on obtient un écoulement proprement laminaire qui s'ajuste parfaitement à l'obstacle jusqu'à un nombre de Reynolds de l'ordre de 1 ; un sillage turbulent apparaît à l'aval aux environs de 105. Entre les deux, la transition se fait à travers diverses formes de sillages tourbillonnaires.
  • Avec une plaque plane située dans le lit de l'écoulement, la dimension caractéristique n'est plus l'épaisseur de celle-ci mais la distance d'un point au bord d'attaque. En effet une couche limite, dans laquelle interviennent la viscosité ou la turbulence, se développe à partir du bord d'attaque. Si celui-ci présente une arête émoussée, la couche limite est turbulente dès le début. Dans le cas d'un bord effilé, la couche limite est laminaire sur une certaine longueur, puis devient turbulente ensuite. Cette laminarité se maintient jusqu'à une distance qui correspond au Reynolds critique de l'ordre de 5.105 marquant la transition du type d'écoulement, la zone située au delà développant une couche limite turbulente.
  • Pour un profil d'aile, la distribution d'épaisseur le long de la corde (et le gradient de pression négative associé) de certains profils dits "laminaires" stabilise la laminarité et permet de reculer le point de transition bien au delà de 5.105 : des valeurs de 7.106 sont possibles dans des conditions aérologiques non turbulentes (difficiles à obtenir en soufflerie) sur une surface parfaitement lisse (ailes de planeurs).
  • Un corps profilé comme un fuselage (Piaggio P180 Avanti) peut avoir une transition reculée jusqu'à 50.106, dans des conditions idéales également.

[modifier] En médecine

Les modifications de régime d'écoulement entraînées par la compression d'une artère, en règle générale l'artère humérale, lors de la prise de la pression artérielle sont responsables d'un bruit (« bruits de Korotkoff ») et permettent, par l'auscultation de l'artère en aval de la compression, de connaître la pression systolique -apparition du bruit-, et la pression diastolique -disparition du bruit.

[modifier] En Hydromécanique

Dans un circuit ou système hydraulique ou oléohydraulique l'écoulement doit toujours être, si possible, laminaire avec, comme seule dissipation d'une partie de l'énergie mécanique, sa transformation en chaleur. Au delà il est en phase dite critique, puis en régime turbulent qui utilise une partie de l'énergie mécanique pour créer des mouvements de plus en plus désordonnés, le rendement chutant alors considérablement

Sur un schéma hydraulique pour calculer les pertes en charges et le rendement d'un système hydraulique, il faut soit ajouter chaque élément pour obtenir le nombre de Reynolds complet, soit utiliser un abaque comme ici pour définir les Ø des tuyauteries, raccords et flexibles hydraulique

[modifier] La similitude des fluides

Deux écoulements à géométrie équivalente pour lesquels les nombres de Reynolds sont égaux sont dits semblables. Pour qu'une expérience de modèle réduit d'un écoulement donne bien un écoulement semblable (c'est-à-dire identique à changements d'échelles de temps, de distance et de masse près) à l'écoulement en grandeur nature, il faut que :

 Re^{\star} = Re \; et  \quad\quad  {p^{\star}\over \rho^{\star} {v^{\star}}^{2}} = {p\over \rho v^{2}} \; .

Les valeurs marquées d'une astérisque « * » font référence à l'écoulement dans le modèle réduit et les autres valeurs à l'écoulement en grandeur nature. Ceci est utile pour les expériences sur les modèles réduits en veine liquide ou en tunnel aérodynamique où on récupère les données pour les écoulements en grandeur réelle. Pour les fluides compressibles, les nombres de Mach doivent aussi être égaux pour les deux fluides afin qu'ils puissent être considérés comme équivalents. De manière générale, il faut que les nombres sans dimension caractéristiques de l'écoulement soient identiques dans les deux écoulements.

[modifier] Références

  • (en) Peter Smith Stevens (trad. J. Matricon, D. Morello), Les Formes dans la Nature (Patterns in Nature), Seuil, coll. « Science ouverte », 1976 (réimpr. 1978), 22×27 cm, 240 p. (ISBN 2-02-004813-2), chap. 3 (« Écoulements »), p. 59-68
    offre une présentation simple et détaillée du nombre de Reynolds et du phénomène de tourbillon.

[modifier] Voir aussi