Migrations germaniques

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L'expression migrations germaniques désigne l'ensemble des mouvements que des peuples germaniques accomplirent à partir du Ier millénaire avant l'ère chrétienne et jusque vers le VIIe siècle.

Ces migrations, qui se déroulèrent pour une large part en retrait des civilisations historiques grecque, romaine et du haut Moyen Âge, eurent de nombreuses répercussion sur le monde antique. Elles touchèrent, selon la période, l'ensemble des régions situées à l'est de la mer Noire, au sud de l'Écosse et au nord du Maghreb.

Le fait de désigner ainsi, par une même expression, des mouvements de peuples divers, sans relation entre eux autre que sur le plan ethnolinguistique et se déroulant sur près d'un millénaire n'est pas neutre. Il suppose, sur le plan historique, que ces mouvements s'expliquent par des causes communes et ont eu des effets communs.

Sommaire

[modifier] Des causes hypothétiques

Les causes communes demeurent largement hypothétiques, compte-tenu de la faiblesse des témoignages dont nous disposons. Parmi elles figurent :

  • l'idée d'une pression de peuples plus orientaux qui aurait poussé les Germains à migrer vers l'ouest : ceci est attesté en ce qui concerne l'arrivée des Huns au nord de la mer Noire. Elle mit fin au royaume gothique situé dans cette région et entraîna la migration historique des Goths vers l'Empire romain.
  • l'idée d'un bouleversement climatique qui aurait entraîné la disparition de terres cultivables en Europe du nord-est et sur les rives de la Baltique : cette hypothèse est retenue pour expliquer la migration des Cimbres et des Teutons au IIe siècle av. J.-C. Cette migration est par ailleurs la plus ancienne que l'histoire — c'est-à-dire les sources écrites — ait enregistrée[réf. nécessaire].
  • l'idée d'une pression démographique importante : celle-ci peut se corréler à l'hypothèse d'un refroidissement climatique pour expliquer que des populations entières se mirent en route vers le sud.
  • l'idée de migrations à caractère religieux : encore une fois, cette hypothèse peut être mise en relation avec les précédentes.

De fait, les données anthropologiques recueillies sur les anciens Germains des côtes de la Baltique, notamment dans les tourbières danoises, semblent bien confirmer l'existence de famines récurrentes dans ces régions peu avant la migration des Cimbres et des Teutons, depuis le Jutland.

Grandes invasions de l'empire romain, 100 - 500 AD.
Grandes invasions de l'empire romain, 100 - 500 AD.

[modifier] Les migrations barbares dans l'historiographie

Il faut noter qu'il existe au moins un précédent protohistorique aux migrations germaniques : il s'agit de l'expansion des Celtes, aux IVeIIIe siècle av. J.-C. Néanmoins, par leur ampleur et par les conséquences qu'on leur a prêtées, les migrations germaniques restent inégalées aux yeux des Historiens.

Ce phénomène est notamment dû à l'Historiographie des « grandes invasions », qui a longtemps fait des « barbares » quasiment les seuls responsables de la chute de l'Empire romain d'Occident en 476. Au contraire, quelles qu'aient été les causes exactes des « migrations germaniques », l'emploi de cette dernière expression tend aujourd'hui à réinscrire leurs mouvements dans un phénomène historique de longue durée que les seules violences militaires de la fin de l'Antiquité et du haut Moyen Âge ne peuvent expliquer.

[modifier] Principales phases

Les principaux épisodes des migrations germaniques sont les suivants (il est possible de rattacher aussi ces mouvements aux découpes plus larges des Grandes invasions)  :

[modifier] La migration des Cimbres et des Teutons (-110 à -101)

Partis d'Europe du Nord (Jutland, Danemark actuel, Scandinavie et rives de la Baltique), régions peu fertiles, environ cent mille Germains auraient entamé une longue migration vers le sud, repoussant les Celtes vers l'ouest. Cette épisode est connu sous le nom de Guerre des Cimbres.


Les Cimbres et les Teutons — qui cherchaient sans doute uniquement de nouvelles terres sur lesquelles ils auraient pu s'installer — traversèrent la Gaule et l'Italie du nord, avant d'être arrêtés en deux batailles, à Aix-en-Provence et Verceil, par Marius en 101 avant J.-C..

La peur des envahisseurs germains n'a pas concerné que les Romains: c'est probablement une des raisons qui ont poussé César à intervenir en Gaule, et les Gaulois ont accepté la domination de Rome parce qu'ils y voyaient une défense contre la menace germanique.

[modifier] Le long face-à-face sur le limes

De César à Auguste, la frontière nord de l'Empire romain se fixe sur le Rhin et le Danube. Les Germains, divisés et "primitifs" à bien des points de vue, mais impossibles à soumettre, apparaissent comme la menace principale pour la survie de l'Empire. C'est en face d'eux que Rome fixe ses principales forces armées.

Grands et terrifiants aux yeux des Romains, ces anciens Germains acquirent la réputation de guerriers terribles. Tacite, en opposant leur caractère à celui des Latins auxquels il reprochait la perte des vertus républicaines, contribua à faire d'eux les « Barbares » de l'imagerie populaire moderne.

[modifier] La migration des Goths (150420)

Partis des rives de la Baltique, les Goths s'installèrent au nord de la mer Noire au IIIe siècle (voir royaumes goths), avant que les Huns ne les en chassent. Là, au contact des peuples de la steppe, ils développèrent une cavalerie lourde qui allait faire des ravages contre l'Empire romain d'Orient, la suprématie de leur cavaliers devenant patente lors de la bataille d'Andrinople.

Ils se scindèrent alors en deux :

[modifier] La grande invasion de 406407

Cet épisode, décrit par saint Jérôme dans des termes empruntés à l'Apocalypse, constitue un des épisodes les plus spectaculaires de ce que les historiens ont longtemps appelé « grandes invasions » : le 31 décembre 406, sans doute poussés par les Huns, Vandales, Alains, Suèves et Burgondes franchissent le Rhin gelé et déferlent sur la Gaule. Les forces romaines étaient alors mobilisées, en partie pour barrer la route de l'Italie à d'autres barbares, en partie à combattre l'usurpateur Constantin venu de Bretagne. Certains Germains de la frontière rhénane, comme les Francs, luttèrent aux côtés des Romains contre les nouveaux venus. Ces frontaliers, Francs et Burgondes, ne tarderont pas à occuper le vide politique laissé par les Romains.

[modifier] L'invasion de l'île de Bretagne par les Angles, les Jutes et les Saxons (vers 450)

D'autres Germains occidentaux, demeurés en Europe du nord, pratiquaient depuis longtemps des incursions maritimes sur les côtes de Gaule et de Bretagne. Au Ve siècle, ils passent la mer en groupes importants et prennent possession de la majeure partie de l'île de Bretagne : ce sont les Angles, les Jutes et les Saxons qui fondent de nombreux royaumes. Les Bretons, Celtes romanisés et christianisés, sont repoussés dans l'ouest de l'île et dans la Bretagne armoricaine.

A la différence des Germains orientaux, déjà christianisés, les Anglo-Saxons étaient païens et n'ont fait aucun effort pour s'assimiler à la culture romaine.

[modifier] L'invasion de l'Italie par les Lombards

Les Lombards, derniers venus en Europe occidentale, étaient des Germains orientaux. Sous la pression d'un autre peuple des steppes, les Avars, ils passent les Alpes et ils fondent un royaume arien sur la majeure partie de la péninsule italienne au VIIe siècle : le royaume lombard.

[modifier] L'héritage

le dernier terme est abusif mais ne trouve pas mieux d'un point de vue terminologique.

À travers leurs migrations, les Germains ont contribué à la fin du monde antique et à la création des royaumes du Haut Moyen Âge. Enfin, sous leur influence, les langues vernaculaires parlées dans les régions qui faisaient partie de l'Empire romain ont changé, évoluant vers les langues parlées dans l'Europe occidentale moderne.

La contribution des Germains aux origines de l'Europe politique moderne est donc importante. Néanmoins, ces migrants ou ces envahisseurs germaniques n'ont que rarement – si ce n'est jamais – remis directement en question l'héritage antique. Au contraire, là où ils n'ont pas comblé un vide politique et démographique, les Germains de la fin de l'Antiquité ont généralement contribué à la survivance de la culture antique, comme ce fut le cas lors du Royaume wisigoth du Ve au VIIe siècle.

La fusion des éléments germaniques avec les éléments romains, hispaniques ou gaulois a peut-être accéléré la disparition de la civilisation latine, mais cette disparition est plus due à l'affaiblissement de l'autorité centrale, à la christianisation des nouveaux cadres du pouvoir et au repli économique qu'aux dites invasions « barbares ».

[modifier] Voir aussi

[modifier] Bibliographie

À compléter

  • La formation de l'Europe et les invasions barbares, Émilienne DEMOUGEOT, 1969
  • L'Empire romain et les Barbares d'Occident (IVe-VIIe siècle): scripta varia., Émilienne DEMOUGEOT, 2e éd., Publications de la Sorbonne, 1988 (compilation d'articles publiés de 1956 à 1988)
  • Guy Halsall: Barbarian Migrations and the Roman West. Cambridge, 2007.
  • Walter Pohl: Die Völkerwanderung. Eroberung und Integration. Stuttgart, 2002.

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes


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