Maurice Papon

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Maurice Papon
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Naissance 3 septembre 1910
à Gretz-Armainvilliers, France
Décès 17 février 2007 (à 96 ans)
à Pontault-Combault, France
Nationalité Française
Profession Haut-fonctionnaire français

Maurice Papon (Gretz-Armainvilliers, 3 septembre 1910Pontault-Combault, 17 février 2007) était homme politique et haut-fonctionnaire français, condamné en 1998 pour complicité de crimes contre l'humanité pour des actes commis alors qu'il était fonctionnaire du régime de Vichy.

Préfet de police de Paris entre 1958 et 1967, il est également connu pour son rôle dans la répression sanglante des manifestations du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962 et pour avoir dirigé la Société française des verreries champenoises, en 1977, quand Pierre Maître, syndicaliste, fut assassiné par un commando de la Confédération des syndicats libres.

Sommaire

[modifier] Jeunesse et premières affectations

Fils de notable, il passe une partie de sa jeunesse à Gretz-Armainvilliers dans la maison familiale où il est né. Son père, Arthur Papon, premier clerc à l'étude de Me Aulagnier, fonde la Société française des verreries champenoises[1] et sa mère se consacre à son éducation. Maurice Papon a 9 ans lorsque son père, de centre-gauche, devient maire de Gretz, poste qu'il conserve jusqu'en 1937 et qu'il complète par celui de conseiller général du canton de Tournan-en-Brie et de président de ce même conseil en 1937.

Après des études secondaires à Paris, au lycée Montaigne et au lycée Louis-le-Grand, Maurice Papon fait des études de droit et de lettres, milite à la Ligue d'action universitaire républicaine et socialiste aux côtés de Pierre Mendès-France[2] et entre dans l'administration publique à l'âge de 21 ans, au ministère de l'air. Il passe ensuite d'autres diplômes de droit et d'économie politique. Il est nommé en 1935 rédacteur au ministère de l'intérieur. Il va ensuite suivre François de Tessan, son mentor, dans 3 ministères [réf. nécessaire]. En 1939, il est affecté comme sous-lieutenant au 2e régiment d'infanterie coloniale et envoyé à Tripoli en Grande Syrie (aujourd'hui, au Liban). Il est rapatrié en France pour raisons de santé. Après l'Armistice, il rejoint le nouveau régime de Vichy en tant que sous-préfet de première classe.

[modifier] À la préfecture de Gironde

Alors qu'il avait adhéré à la Ligue d'action universitaire républicaine et socialiste, organisation soutenant le Front populaire, Maurice Papon adopte en 1940 les idées de la Révolution nationale du Maréchal Pétain et de son gouvernement.

Il est nommé en 1942 secrétaire général de la préfecture de la Gironde, à Bordeaux, en zone occupée. Bras droit du préfet de la Région Aquitaine Maurice Sabatier, il dirige le Service des questions juives. Jusqu'en mai 1944, ses services recenseront les Juifs dans les hôpitaux, les sanatoriums et les maisons de retraite et organiseront l'arrestation et la déportation des Juifs de la région bordelaise vers le camp de Drancy créé en 1941.

À la Libération, Maurice Papon fournit un certificat de résistance, daté du 25 octobre 1944 et signé du « colonel Ollivier », qui indique qu'il aurait appartenu au réseau Jade-Amicol à compter du 1er janvier 1943. Son authenticité a été fortement remise en question ces dernières années, elle avait déjà été rejetée en 1952 par la commission des anciens combattants du département de la Seine.

Maurice Papon , assis au 1er rang à gauche, aux côtés de Gaston Cusin (au centre), Commissaire de la République régional à la préfecture de Bordeaux en avril 1945
Maurice Papon , assis au 1er rang à gauche, aux côtés de Gaston Cusin (au centre), Commissaire de la République régional à la préfecture de Bordeaux en avril 1945

Maurice Papon eut aussi la chance que la Résistance de Gironde soit sortie exsangue et divisée de la ténébreuse « affaire Grandclément » (du nom d'un chef résistant ayant accepté une entente avec la Gestapo de Bordeaux au nom de l'anticommunisme). Au contraire de la plupart des autres départements français, la Résistance de Gironde sortait trop affaiblie de la guerre pour pouvoir fournir les remplaçants aux cadres de Vichy. C'est pourquoi, en dépit de l'avis négatif du Comité Départemental de Libération (qui avait classé Maurice Papon parmi les personnalités à écarter ou à arrêter), le commissaire de la République Gaston Cusin choisit de maintenir ce dernier en fonctions.

[modifier] L’après-guerre

Maurice Papon a été confirmé après-guerre dans ses fonctions par le général de Gaulle et n'a pas été inquiété par la Commission d'épuration. D'abord nommé préfet des Landes, il réintègre le ministère de l'intérieur en octobre 1945. Selon Olivier Guichard, le général de Gaulle « connaissait parfaitement le passé » de ce fonctionnaire qui l'a reçu personnellement après la libération de Bordeaux[3]. Éric Roussel écrit qu'« aux yeux du général, l'autorité de l'État est si sacrée, le péril constitué par les communistes si intolérable, qu'il est disposé à accepter sans trop de problèmes de conscience des hommes qui ont pu, un moment assez long, travailler pour le compte de Vichy[4]

Il poursuit alors une carrière de haut fonctionnaire. Il est nommé préfet de Corse en 1947, puis préfet de Constantine (Algérie) en 1949. Il est fait chevalier de la Légion d'honneur en 1948. En 1951 il devient secrétaire général de la préfecture de police de Paris. En 1954 il part pour le Maroc comme secrétaire général du protectorat, où il aide à réprimer les nationalistes marocains. Il est nommé officier de la Légion d'honneur. En 1956 il retourne à Constantine pendant la guerre d'Algérie.

[modifier] Préfet de police de Paris

En avril 1958, Maurice Papon est nommé préfet de police de Paris par la IVe République finissante. Il obtient à cette époque la carte de « combattant volontaire de la Résistance » qui reconnaît sa participation à la Résistance.

À ce poste stratégique, Maurice Papon joua un rôle important dans la crise qui suivit le Soulèvement d'Alger le 13 mai 1958. Il participa aux réunions gaullistes confidentielles qui assurèrent l'exploitation de la crise et préparèrent à Paris le retour au pouvoir du général de Gaulle [5]. Cette action occulte lui valut son maintien en fonction par la Ve République. En juillet 1961 il reçoit des mains de Charles de Gaulle la croix de commandeur de la Légion d'honneur.

Plaque commémorative à Aubervilliers, sur une passerelle du Canal Saint-Denis
Plaque commémorative à Aubervilliers, sur une passerelle du Canal Saint-Denis

Dans le Massacre du 17 octobre 1961, à Paris, les forces de police placées sous l'autorité de Papon répriment très brutalement une « marche de paix » organisée par le FLN algérien : un grand nombre de civils algériens trouvent la mort. Cette marche intervenait après le meurtre d'un policier vraisemblablement par des militants du FLN. Lors des obsèques, Maurice Papon avait déclaré : « Pour un coup donné, nous en porterons dix. » Il reçoit alors carte blanche du gouvernement pour ramener le calme dans les rues de Paris [6]. L'historien Jean-Luc Einaudi a écrit que les massacres et tabassages de manifestants algériens avaient été commis « sous les ordres » du préfet de police Maurice Papon. Pierre Messmer a confirmé au procès de Maurice Papon que ces exactions ne relevaient pas seulement de la responsabilité des policiers et du préfet Papon : « J'assume avec le gouvernement [dirigé par Michel Debré] et le général de Gaulle, président de la République, la totalité de la responsabilité des événements. On ne peut pas imputer [cette] responsabilité à un préfet [...], subordonné du ministre de l'Intérieur », en l'occurrence Roger Frey[7].

Le nombre de victimes des massacres d'octobre 1961 est difficile à établir avec certitude. L'ampleur de la répression a fait l'objet de vives controverses dans les années 1990. Certains auteurs, notamment Jean-Luc Einaudi, avancent le chiffre de deux cents, voire trois cents morts. De son côté, Jean-Paul Brunet estime qu'il y eut une quarantaine de victimes. Linda Amiri, qui a dépouillé les archives de la préfecture de police de Paris, compte cent morts certains, et trente et un disparus. Alain-Gérard Slama, dans son livre de vulgarisation sur la guerre d'Algérie, et Le Monde, en 1985, parlent également d'une centaine de morts. Trois cent cinquante-sept Algériens ont été soignés par les hôpitaux de Paris pour les coups reçus.

Le 8 février 1962, une manifestation contre l'OAS, interdite par le ministère de l'Intérieur, est brutalement réprimée. Huit manifestants sont tués suite aux coups reçus ou périssent étouffés en fuyant l'extrême brutalité de la police, dans la bouche de métro Charonne : c'est l'affaire de la station de métro Charonne. Un neuvième meurt peu après des suites de ses blessures. Jean-Paul Brunet et Alain Dewerpe estiment qu'une responsabilité collective, des forces de police au chef de l’État, le général de Gaulle, en passant par le préfet Papon, s'établit. Elle relèverait de l'« autoritarisme » du régime gaulliste, qu'ils analysent (surtout Alain Dewerpe) à cette occasion.

En janvier 1967, Maurice Papon quitte la préfecture de police de Paris. Il est nommé président de Sud-Aviation, ancêtre de l'Aérospatiale.

[modifier] Maire, député, puis ministre de la République

En 1968 il est élu député UDR du Cher. À l'automne de la même année, il devient trésorier de l'UDR, appuyé par le chef de l'État, le général de Gaulle. Jacques Foccart rapporte ce dialogue du 11 octobre 1968 dans son Journal de l'Élysée (éd. Fayard/Jeune Afrique, tome 2, p. 383) :

« Jacques Foccart : [Le trésorier de l'UDR Robert] Poujade a l’intention de proposer Papon pour le remplacer, mais il veut connaître votre avis avant.
Charles de Gaulle : Oui, Papon, c’est tout à fait convenable, c’est sérieux. En effet, c’est une bonne idée. »

Il occupe ce poste pendant près de trois ans.

Il est élu maire de Saint-Amand-Montrond (Cher) en mars 1971. Il le restera jusqu'en 1983. Il posera, en outre, la première pierre du lycée Jean Moulin.

En 1972 il devient président de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Il est réélu député en 1973 et 1978. Cette année-là, il obtient 51,47 % des suffrages exprimés au second tour, face au communiste Laurent Bilbeau.

De 1978 à 1981, il est ministre du Budget dans les deuxième et troisième gouvernements de Raymond Barre. Dans un entretien accordé à France Culture en février 2007, M. Barre a déclaré que la nomination de Maurice Papon s'était faite sur son initiative.

[modifier] L'affaire Papon

Papon, alors ministre du Budget, décide de déclencher un contrôle fiscal contre l'hebdomadaire satirique, Le Canard enchaîné.

Le 6 mai 1981, le journal « riposte », sur le mode de l'arroseur arrosé [8], en publiant un article de Nicolas Brimo révélant le rôle de Maurice Papon dans la déportation des Juifs bordelais. On y trouve deux documents datés l'un de février 1943, l'autre de mars 1944, et signés de la main de Maurice Papon, alors secrétaire général de la préfecture de Gironde. Ces pièces, communiquées par Michel Slitinsky, montraient la participation du secrétaire de préfecture à la déportation des juifs vers l'Allemagne. Une autre note datée de novembre 1942, signée par Maurice Papon et produite pendant le procès, prouvera que celui-ci avait demandé au Commandant de la Direction de la Police de Sécurite allemande à Bordeaux la libération de Alice Slitinsky arrêtée le 19 octobre 1942 et relâchée le 5 décembre 1942. L'affaire, déclenchée quatre jours avant le scrutin présidentiel, fut dénoncée comme une opération politique. Elle touchait un ancien préfet, député RPR du Cher, ministre du Budget du gouvernement de Raymond Barre. Mais l'indépendance reconnue du Canard enchaîné, tout comme la réticence manifestée par le président François Mitterrand à la tenue du procès Papon, devaient faire litière de cette accusation.

Le 15 décembre 1981, un jury d'honneur composé d'anciens résistants « donne acte à M. Papon de ce qu'il fut bien affilié aux Forces françaises combattantes à compter du 1er janvier 1943 et attributaire de la carte du combattant volontaire de la Résistance ». Il ajoute cependant qu'en restant en fonctions à la préfecture de Gironde, Maurice Papon fut mêlé de ce fait « à des actes contraires à l'honneur », et estime que ce dernier aurait dû démissionner en 1942. Jean Pierre-Bloch, le dernier survivant du jury, s'est rétracté en 1998 en indiquant que : « Jamais je n'ai trouvé le nom de Papon sur ces papiers. Nous avions une liste des préfets et secrétaires généraux qui avaient rendu des services à la résistance et pouvaient nous aider à la Libération. Il y avait le nom de Gabriel Delaunay mais je n'ai jamais vu celui de Papon. Ça m'aurait frappé, car je connaissais Papon avant guerre, il était membre du groupe des étudiants socialistes. Pour moi, Papon n'a pas été résistant, pour moi, Papon n'a jamais été résistant. S'il l'a été, c'est de manière bien clandestine. » Il a alors indiqué que la décision du jury avait été principalement motivée par la caution morale de deux de ses membres : Jacques Soustelle et Maurice Bourgès-Maunoury : « La discussion a été très vive. Les débats avaient duré très longtemps. Les décisions, officiellement prises à l'unanimité, ont été prises en fait à trois contre deux, Marie-Madeleine Fourcade, le Père Riquet et Charles Verny qui a changé d'avis, d'un côté ; Daniel Mayer et moi, de l'autre »[9].

[modifier] Plainte pour crime contre l'humanité

  • 8 décembre 1981 : Maurice-David Matisson, Jean-Marie Matisson, Jacqueline Matisson et Esther Fogiel déposent plainte pour "crimes contre l'humanité"[10].

[modifier] Complice de crimes contre l'humanité

Il est inculpé en 1983 de crimes contre l'humanité mais ce n'est qu'en 1997 que débute son procès, après dix-sept années de batailles juridiques. Il est renvoyé, le 18 septembre 1996, devant la cour d'assises de la Gironde par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux[11]. Il est condamné en 1998 à une peine de dix ans de réclusion criminelle, d'interdiction des droits civiques, civils et de famille pour complicité de crimes contre l'humanité par la cour d'assises. Papon était accusé d'avoir fait déporter, entre juillet 1942 et mai 1944, près de 1600 juifs de Bordeaux vers Drancy. Maurice Papon n'était, cependant, renvoyé devant les assises que pour soixante-douze victimes entre 1942 et 1944. La cour d'assises a estimé que Maurice Papon n'avait pas connaissance de l'extermination des juifs. Seules ont été retenues, pour quatre convois sur huit, des complicités d'arrestation et de séquestration.

Son procès est porteur de significations différentes pour les Français ; pour certains, il représentait une dernière chance de confrontation du peuple français avec son passé collaborationniste, pour d'autres il symbolisait le ravivement inutile de blessures anciennes et de facteurs de divisions. Maurice Papon a été défendu par l'avocat Jean-Marc Varaut.

Une des questions principales du procès était de déterminer dans quelle mesure un individu doit être tenu responsable lorsqu'il est un maillon dans une chaîne de responsabilités. D'autre part, les accusateurs publics et privés n’ont cessé de présenter une Préfecture libre de ses actions, en faisant fi de la pression des nazis. Le procureur général requiert une peine de vingt ans de réclusion criminelle, alors que la réclusion criminelle à perpétuité était encourue. La peine finalement prononcée a été dénoncée par les avocats du condamné comme une peine de « compromis ».

Laissé en liberté provisoire au début de son procès par une décision de la cour d'assises de la Gironde présidée par Jean-Louis Castagnède, Maurice Papon s'enfuit en Suisse en octobre 1999 à la veille de l'examen de son pourvoi en cassation ; ne s'étant pas mis en état (c'est-à-dire constitué prisonnier avant l'examen de son pourvoi), il est déchu de son pourvoi[12]. Arrêté au bout de quarante-huit heures dans un hôtel helvétique, et aussitôt extradé, Maurice Papon est finalement emprisonné à la prison de Fresnes, dont il sort le 18 septembre 2002, après trois années de détention, sur la base d'un avis médical concluant à « l'incompatibilité de son état de santé avec la détention en raison de son état de santé » et de la « loi Kouchner », nouvellement votée. Il est alors assigné à résidence dans sa maison familiale de Gretz-Armainvilliers en Seine-et-Marne.

Cette remise en liberté a été très critiquée. Le rapport médical décrivant Papon comme « impotent et grabataire » parut démenti spectaculairement quand l'ancien prisonnier quitta à pied la prison de la Santé. La libération de Papon a été rendue possible par la loi « Kouchner » du 4 mars 2002[13] qui prévoit que les prisonniers peuvent être libérés s'ils souffrent d'une maladie incurable ou si leur incarcération met en danger leur santé. Papon est le deuxième Français à bénéficier de cette loi, alors que vingt-sept octogénaires français sont entrés en prison en 2001. La libération de Maurice Papon a été approuvée par l'ancien garde des Sceaux et ancien président du Conseil constitutionnel Robert Badinter. Elle avait été aussi demandée par des personnalités aussi peu suspectes de complaisance que l'ancienne résistante Germaine Tillion, cofondatrice du réseau du musée de l'Homme.

Dans un arrêt du 12 avril 2002, le Conseil d'État, considérant que les faits pour lesquels Maurice Papon a été condamné résultent à la fois d'une faute personnelle et d'une faute de service, c'est-à-dire de l'administration, a condamné l'État à payer la moitié des dommages que la Cour d'assises de la Gironde avait attribués aux parties civiles[14],[15]. Mais, de son côté, Papon a organisé son « insolvabilité ».

Le 25 juillet 2002, sur requête de M. Papon, la Cour européenne des droits de l'homme[16],[17], suivant sa jurisprudence antérieure[18],[19], a jugé contraire aux principes du procès équitable l'obligation de se constituer prisonnier avant l'examen d'un pourvoi en cassation, qui faisait alors partie du code de procédure pénale. À la suite de cet arrêt, la commission de réexamen des condamnations pénales a ordonné le réexamen du pourvoi en cassation de Papon[20], pourvoi qui a été rejeté le 11 juin 2004 par l'assemblée plénière de la Cour de cassation[21].

Par un arrêt du 4 juillet 2003, le Conseil d'État a annulé la suspension du versement de la pension de retraite de Papon: la suspension avait été décidée en application d'une disposition concernant la condamnation à une peine afflictive ou infamante, alors que cette catégorie de peines ne figure plus dans le nouveau code pénal[22]. Par un arrêt du même jour, il s'est déclaré incompétent pour examiner la requête visant à obtenir le versement de sa pension d'ancien député, dont le versement avait été suspendu pour la même raison que sa pension d'ancien préfet[23].

Maurice Papon a eu de nouveau affaire à la justice en 2004-2005, pour avoir arboré illégalement la Légion d'honneur en public, alors que ses décorations lui avaient été retirées suite à sa condamnation[24].

[modifier] La fin

Après sa libération pour raison de santé en septembre 2002, Maurice Papon vend la maison familiale qu'il possède à Gretz-Armainvilliers et s'installe dans un petit pavillon moderne au 44 de la rue Arthur Papon (du nom de son père), où il est assigné à résidence.

Hospitalisé le 8 février 2007 à La Francilienne, clinique de Pontault-Combault en Seine-et-Marne, à la suite de problèmes cardiaques et pour une intervention sur son pacemaker, il y meurt le 17 février 2007 à l'âge de quatre-vingt-seize ans. Sa mort a suscité peu de réactions spontanées des milieux politiques et associatifs.

L'avocat de Maurice Papon, Francis Vuillemin, a déclaré que son client serait enterré avec la légion d'honneur, affirmant dans un communiqué : « Je veillerai personnellement à ce que l'accompagne dans son tombeau la croix de Commandeur de la Légion d'honneur que Charles de Gaulle lui a remise de ses propres mains, pour l'éternité. » « Le délit de port illégal de décoration ne se conçoit que dans un lieu public. Le cercueil est le lieu le plus privé qui puisse être et un cadavre n'est plus un sujet de droit, il n'y a donc pas d'infraction », a déclaré l'avocat à Reuters [25].

Michèle Alliot-Marie a déclaré quant à elle : « La République a fait ce qu'elle devait faire, il y a eu procès, il y a eu décision de justice, à la suite de la décision de justice la République a décidé de retirer la croix de commandeur de la légion d'honneur à Maurice Papon, il n'est plus commandeur de la légion d'honneur, c'est tout. Ensuite ouvrir les cercueils, c'est quelque chose qui me déplaît ».[26],[27]

Maurice Papon a été inhumé le 21 février 2007 dans le cimetière de Gretz-Armainvilliers aux côtés de ses parents et de sa femme, Paulette, décédée en mars 1998, deux jours avant la fin du procès.

Son enterrement a été célébré dans le rite catholique par le père Michel Lelong, un prêtre connu pour son dialogue avec l'islam et son hostilité au sionisme et à l'État d'Israël. Une quarantaine de personnes, autant de journalistes et de policiers, ont assisté à l'oraison funèbre. Maurice Papon « a trouvé lumière et réconfort dans l'exemple du Christ condamné injustement », a notamment déclaré le père Lelong.

Il a été inhumé avec la légion d'honneur qui lui avait pourtant été retirée après sa condamnation[28], ce qui a provoqué l'indignation de la classe politique et des familles de ses victimes.

[modifier] Références

  1. Société que dirigera Maurice Papon dans les années 1970, et sous la direction de qui Pierre Maître fut assassiné par un commando de la Confédération des syndicats libres.
  2. André Coutin, Huit siècles de violence au Quartier latin, Stock, 1969, p. 331.
  3. Éric Roussel, Charles de Gaulle, éd. Gallimard, 2002, p. 460
  4. Éric Roussel, Charles de Gaulle, éd. Gallimard, 2002
  5. Eric Roussel, Charles de Gaulle, op. cit., pp. 598-599
  6. L'Express
  7. « Les heures noires de la France ressurgissent à Bordeaux », Le Monde, 18 octobre 1997
  8. Papon, alors ministre délégué au budget du gouvernement de Raymond Barre venait d’introduire un contrôle fiscal contre « Le Canard enchaîné »
  9. « Jean Pierre-Bloch : “Papon n’a jamais été résistant” », L'Humanité, 5 mars 1998
  10. plainte des Matisson pour crime contre l'humanité
  11. Pourvoi contre l'arrêt rejeté le 23 janvier 1997 par la Cour de cassation (pourvoi n°96-84822)
  12. Crim. 21 octobre 1999, pourvoi n° 98-82323
  13. LOI n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, NOR: MESX0100092L, J.O n° 54 du 5 mars 2002 page 4118
  14. CE 12 avril 2002, Papon, N° 238689
  15. Mattias Guyomar, Pierre Collin, « Les décisions prises par un fonctionnaire du régime de Vichy engagent la responsabilité de l'Etat », AJDA 2002 p. 423
  16. Arrêt Papon c. France du 25 juillet 2002, requête no 54210/00. Le professeur Rolin note que cet arrêt semble être le seul dans toute la jurisprudence de la CEDH, avec l'arrêt Martinie c. France du 12 avril 2006, à être accompagné non pas d'une opinion condordante ou dissidente mais d'une « opinion » du juge français Costa (Blog de Frédéric Rolin, « Note sous CEDH 12 avril 2006, Martinie c/ France », 18 avril 2006).
  17. La cour a déclaré irrecevables ses requêtes relatives à la suspension de sa retraite d'ancien député (décision sur la recevabilité du 11 octobre 2005, requête no 344/04) et à sa détention (Décision sur la recevabilité du 7 juin 2001, requête n° 64666/01).
  18. CEDH, Khalfaoui c. France, 14 décembre 1999, requête n°34791/97
  19. Guy Benhamou, « Contre l'"arrêt Papon" », L'Express, 27 janvier 2000
  20. Commission de réexamen des condamnations pénales, décision du 26 février 2004, 03RDH005
  21. Cour de cassation, Assemblée plénière, 11 juin 2004, pourvoi n° 98-82323
  22. CE 4 juillet 2003, N°244349
  23. CE 4 juillet 2003, N° 254850: «le régime de pensions des anciens députés fait partie du statut du parlementaire, dont les règles particulières résultent de la nature de ses fonctions ; qu'ainsi, ce statut se rattache à l'exercice de la souveraineté nationale par les membres du Parlement ; que, eu égard à la nature de cette activité, il n'appartient pas au juge administratif de connaître des litiges relatifs au régime de pensions des parlementaires ». L'arrêt a été rendu contrairement aux conclusions du commissaire du gouvernement Laurent Vallée (RFDA 2003 p. 917), qui s'appuyaient notamment sur l'arrêt du CE du 5 mars 1999, Président de l'Assemblée nationale, dans lequel le Conseil avait reconnu la compétence du juge administratif en matière de contrats administratifs conclus par l'Assemblée nationale.
  24. 2 mars 2005 : la cour d’appel de Paris confirme la condamnation de Maurice Papon à 2 500 euros d’amende pour port illégal de la Légion d’honneur
  25. Communiqué Le Monde - Reuters du 19 février 2007 La médaille d'honneur.
  26. Le Grand Rendez-vous Europe1 du 18 février 2007
  27. LEXPRESS.fr avec Reuters
  28. Papon enterré

[modifier] Bibliographie

  • Michel Slitinsky, "L'affaire Papon" 1983 Éditions Alain Moreau Préface de Gilles Perrault, Préface interdite qui donne lieu à un seconde édition de "L'affaire Papon" en 1984 avec comme préface le rendu de justice qui a donné lieu à l'interdiction de la préface de Perrault qui traitait Papon de "franc salaud"
  • Michel Slitinsky, "Le Pouvoir préfectoral lavaliste à Bordeaux", Éditions Wallada, 1997 (ISBN 2904201130)
  • Michel Slitinsky, "Procès Papon, le devoir de mémoire", Éditions de l'Aube, 1998 (ISBN 2876783843)
  • Collectif de lycéens, Michel Slitinsky : "l'affaire de tout un siècle", Éditions Le Bord de L'eau, 2000 (ISBN 2911803248)
  • Michel Slitinsky " Indiscrétions des archives de l'occupation", Éditions Les Chemins de la Mémoire, 2005 (ISBN 2909826872).
  • Max Lagarrigue,99 questions… La France sous l’Occupation, Montpellier, CNDP, octobre 2007 (ISBN : 978-2-86626-280-8).
  • Quotidien Le Monde, Le Procès de Maurice Papon. La chronique de Jean-Michel Dumay, éd. Fayard, 1998
  • Gérard Boulanger, Papon, un intrus dans la République, éd. du Seuil, coll. « L'épreuve des faits », 1997 ; Plaidoyer pour quelques juifs obscurs victimes de monsieur Papon, éd. Calmann-Lévy, 2005
  • Jean-Marc Varaut, Plaidoirie de Jean-Marc Varaut devant la cour d'assises de la Gironde: Au procès de Maurice Papon, fonctionnaire sous l'occupation. Ed. Omnibus, 1998 (ISBN 978-2259189330)
  • Jean-Marc Varaut, Un avocat pour l'Histoire. Ed. Flammarion 2007 (ISBN 978-2-0812-0057-9)
  • Jean-Paul Brunet, Charonne. Lumières sur une tragédie, éd. Flammarion, 2003
  • Alain Dewerpe, Charonne, 8 février 1962. Anthropologie historique d'un massacre d'État, éd. Gallimard, coll. "Folio-histoire", 2006
  • Denis Salas, Barbie, Touvier, Papon, éd. Autrement, 2002
  • Jean de Maillard, « À quoi sert le procès Papon ? », Le Débat, n° 101, septembre-octobre 1998
  • Georges Gheldman, 16 juillet 1942, témoignage, 2005, Berg International. On trouve en annexe la retranscription intégrale du témoignage de Georges Gheldman lors du procès de Maurice Papon.
  • Edith Gorren et Jean-Marie Matisson, Le Procès Papon, les Enfants de Pitchipoï, éd. Atlantica, 1998
  • Hubert de Beaufort, Affaire Papon. La contre-enquête, Ed. Guibert, 1999 (ISBN 978-2868395641)
  • Guillaume Mouralis, "Le procès Papon. Justice et temporalité", Terrain, n°38, mars 2002

[modifier] Liens externes