Maïs Bt

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Les maïs Bt sont des variétés de maïs qui ont été modifiées génétiquement pour leur conférer une résistance aux principaux insectes nuisibles du maïs, entre autres une pyrale : la pyrale du maïs Ostrinia nubilalis. Il s'agit donc de variétés de maïs OGM. En 2002, la surface de maïs transgénique Bt occupe 7,6 millions d'hectares, correspondant à 13 % de la surface d'OGM totale cultivés dans le monde (source ISAAA, données 2003).

Sommaire

[modifier] Les insectes combattus

La pyrale du maïs (Ostrinia nubilalis) est répandue en Europe et en Amérique du Nord (où elle est appelée European Corn Borer, le « foreur européen du maïs »). C'est le principal insecte nuisible du maïs. La chenille creuse des galeries dans les tiges et dans les épis. Plus récemment, plusieurs espèces de coléoptères du genre Diabrotica sont devenus d'importants insectes nuisibles en Amérique du Nord. Leurs larves vivent sur les racines du maïs. Le maïs Bt permet de détruire la pyrale mais, selon une étude réalisée par l'université de Chicago, il pourrait aussi avoir des effets sur une partie de la faune des rivières : si une partie des déchets de la plante tombe dans l'eau, elle peut entraîner la mort de la grande phrygane, insecte important pour la faune des cours d'eau[1].

[modifier] La transformation

La bactérie du sol Bacillus thuringiensis produit, parmi différentes protéines actives sur les insectes, une protéine du nom de Cry1Ab à laquelle les chenilles de la pyrale du maïs sont très sensibles. Cry1Ab est également efficace contre des chenilles d'autres espèce de lépidoptères, mais, par contre, ne possède aucun effet connu sur d'autres organismes vivants. Elle agit en se fixant spécifiquement sur des récepteurs situés au niveau de l'intestin de certaines chenilles et en produisant une paralysie intestinale. La chenille sensible s'arrête de consommer et finit par mourir de faim.

Le premier produit commercial contenant une des protéines insecticides produites par Bacillus thuringiensis, la Bactospéine, fut mise au point en 1959 pour lutter contre les chenilles de lépidoptères[2]. Aujourd'hui encore, ces protéines sont utilisées sous forme de traitements traditionnels (pulvérisations), en agriculture biologique notamment.

De même, on a pu trouver d'autres protéines de B. thuringiensis actives contre les coléoptères Diabrotica sp. (protéines Cry34Ab1, Cry35Ab1, Cry3Bb1,....).

Pour obtenir un maïs Bt, on introduit donc dans la variété un ou plusieurs gènes permettant la synthèse de Cry1ab ou des autres protéines citées.

Cette transformation peut éventuellement être accompagnée dans la variété d'autres type de transformations (résistance à un herbicide par exemple).

[modifier] Le développement des variétés

Des variétés de maïs transgénique résistantes à la pyrale et/ou aux Diabrotica sp. ont été mises au point par des firmes privées, et sont autorisées et cultivées aux États-Unis depuis 1995.

Le 8 février 1998, la France a autorisé les cultures de certaines variétés de maïs Bt résistantes à la pyrale et ces variétés ont été inscrites, une première pour un OGM, au catalogue officiel des espèces et variétés, décision annulée provisoirement en septembre de la même année par le Conseil d'État, puis rétablie en octobre 2000. Mais le rejet de telles variétés de maïs par le consommateur fait que cette technique de lutte reste peu utilisée par les exploitants agricoles.

[modifier] Les problèmes posés

Cependant, son coût et les problèmes liés à son utilisation pourraient annuler l'opportunité d'en planter[3].

Le monde scientifique et agronomique ainsi que les écologistes et opposants aux OGM s'inquiètent du phénomène de développement de résistance des pyrales a ces toxines spécifiques[4] ce qui conduirait à la prolifération de pyrales résistantes à la toxine et rendrait inefficace la méthode classique de traitement anti-pyrale via la bactérie Bacillus thuringiensis.

Pour ralentir l'apparition de ces résistances, la législation impose de mélanger les semences OGM avec des semences classique (20% de surface dédiées à du maïs non-ogm). Ces zones dites « refuges » accueillent des pyrales sensibles à la toxine et capables de se croiser avec leurs éventuels voisin résistants ce qui produit alors des hybrides qui sont tués quand ils choisissent de pondre sur le maïs Bt.

Toutefois, il faut souligner que cette « précaution » apparente a été formulée par l'administration nord-américaine et transposée en Europe contre l'expertise scientifique de plusieurs organismes qui préconisaient généralement des zones refuges de plus grandes dimensions, et ce particulièrement si ces zones refuges doivent recevoir un traitement insecticide classique.

Actuellement, non seulement la surface refuge légale est inférieure à ce qui était préconisé par les comités scientifiques mais en plus les recherches conduites par les firmes semencières tendent à inclure un traitement des zones refuges (traitement chimique ou biologique).

De plus, de récent travaux de l'INRA ont montré que la pyrale se déplace peu, ce qui remet en question cette méthode de lutte contre la résistance. Les semenciers s'efforcent de « mettre à jours » leurs semences avec l'adjonction d'autres protéines actives sur la pyrale (Cry1Ac par exemple) et aussi de faire produire de fortes concentrations de protéine insecticide de façon à ralentir la survenue de résistance. Néanmoins, personne ne considère que ces OGM constituent une solution permanente qui ne sera pas un jour remise en question par le développement des résistances de l'insecte.

Le changement de paradigme dans la lutte contre les ravageurs imposé par les OGM soulève aussi des inquiétudes : au lieu de surveiller les populations d'insectes et de traiter au moment le plus opportun (théoriquement avec la dose adaptée du produit qui constitue le meilleur compromis disponible entre efficacité sur l'insecte cible et innocuité pour les autres organismes) les OGM correspondent à un traitement continu à haute dose. L'acceptation de ce nouveau modèle de production n'est pas sans risque sachant que déjà les firmes semencières travaillent à des maïs multi-résistants, combinant une résistance aux chenilles et larves de coléoptères par exemple.

Une autre inquiétude des agriculteurs, écologistes et agronomes est le mélange avec des semences classiques[5], via les croisements, qui rendrait impossible d'autres types d'agriculture que ce soit les filières non OGM classiques ou l'agriculture biologique (qui proscrit l'usage d'OGM).

Un autre problème posé par ce maïs est que ses tissus contiennent une concentration importante en toxine, il y a donc possibilité que cette toxine ait des effets physiologiques sur l'homme ou sur le bétail (surtout le bétail puisque la toxine est produite dans les parties vertes. En élevage de bovins il est courant d'utiliser comme base alimentaire des plants entiers de maïs broyés, auquel on ajoutera divers compléments alimentaires) qui en consommera (toutefois les études actuelles n'ont montré un effet que sur les insectes). Ce maïs soulève également de nombreuses inquiétudes sur son impact sur les insectes, notamment sur ceux qui font partie de ce qu'on appelle la faune utile.

Pour les agronomes opposés à ce maïs, la meilleure solution contre la pyrale est la limitation de la monoculture et l'usage de la rotation des cultures qui permettrait de casser le cycle de vie de la pyrale (bien que la pyrale attaque d'autres plantes comme le haricot, les dégâts sont bien moindres et la chose est relativement facile à mettre en place). Par exemple, la culture biologique du maïs se fait sur de petites surfaces et en veillant à la rotation des cultures.

[modifier] Notes et références

  1. (en)Toxins in transgenic crop byproducts may affect headwater stream ecosystems sur Proceedings of the National Academie of Sciences (PNAS)
  2. Maud Buisine, « La lutte biologique : qu'en pensez-vous ? », Dossiers de l'environnement de l'INRA, no 19 (1999)
  3. Texte de mise en garde de Jean-Pierre Berlan, Directeur de Recherche Inra
  4. Pyrale du maïs : la gestion de la résistance aux toxines produites par le maïs transgénique Bt
  5. L’impossible maîtrise des contaminations

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes

Déclaration de risques Christian Velot scientifique et chercheur en biologie moléculaire

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