Mécénat

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Laurent de Médicis, dit Laurent le Magnifique, l'un des premiers mécènes.Tableau de Benozzo Gozzoli
Laurent de Médicis, dit Laurent le Magnifique, l'un des premiers mécènes.Tableau de Benozzo Gozzoli

Le mécénat désigne la promotion des arts et des lettres par des commandes ou des aides financières données par un mécène qui peut être une personne ou une organisation comme une entreprise. Dans une acception plus large, il peut s'appliquer également à d'autres domaines que l'art : recherche, éducation, innovation, etc[1],[2].

Sommaire

[modifier] Histoire du mécénat

Le mot mécénat se réfère au personnage de Caius Cilnius Mæcenas, protecteur des arts et des lettres dans la Rome antique. Il s'est progressivement élargi pour désigner dans le langage courant une personne physique ou morale qui soutient par son influence ou par des moyens financiers un projet culturel ou un artiste. Au cours de l'histoire le mécénat a connu une importance variable et fut marqué par des personnalités : on parle ainsi du mécénat des princesses médiévales comme Mahaut d'Artois ou Isabeau de Bavière dont les commandes faisaient vivre plusieurs artistes[3].

Portrait de Giuliano da Sangallo par Piero di Cosimo, entre 1500 et 1520.
Portrait de Giuliano da Sangallo par Piero di Cosimo, entre 1500 et 1520.

L'âge d'or du mécénat surgit avec la Renaissance italienne : Les Arti à Florence, qui protègent leurs corporations marchandes, financent également les beaux-arts et leurs artistes en commanditant des œuvres pour les édifices religieux (particulièrement l'Arte di Calimala). Les Médicis, notamment Laurent le Magnifique, sont connus pour répandre leurs bienfaits envers les artistes dont ils permettront ainsi la renommée; amateur éclairé, Laurent de Médicis prit sous sa protection de nombreux artistes comme Michel-Ange, Andrea del Verrocchio, les architectes Giuliano da Maiano et Giuliano da Sangallo ou des humanistes ou savants comme Pic de la Mirandole et Savonarole. À Ferrare, Hercule Ier d'Este eut un rôle comparable.

A cette époque,le cardinal et Ier ministre de louis XII, Georges d'Amboise, est reconnu pour être grand mécène, et un des principaux introducteurs de la Renaissance en France.

Rodolphe II fut également un grand mécène, confirmant en 1595 les privilèges de la corporation des peintres et acquérant de nombreux tableaux du Titien, d'Albrecht Dürer ou des Brueghel qu'il installe au Château de Prague. L'Italien Giuseppe Arcimboldo le dépeint en vertumne et reçut le titre de comte palatin[4].

Le XXe siècle est une période de renouveau aux États-Unis et en Europe; parmi les grands noms de l'époque on peut citer Charles et Marie-Laure de Noailles, la famille Rothschild, Charles de Beistegui, Alexis de Redé, Peggy Guggenheim, le marquis de Cuevas, Marcellin et Madeleine Castaing, Francine Weisweiller, Pierre Cardin, Pierre Bergé, Yves Saint Laurent.

[modifier] Le mécénat de nos jours

Selon Guy de Brébisson, la reconnaissance du mécénat est moindre en France qu'aux États-Unis, même si les mentalités ont nettement évolué depuis les années 1980[5]. Il reste majoritairement une pratique des grandes entreprises mais la participation des PME n'est plus négligeable au niveau local et régional. Les entreprises de Province ne représentaient que 12,5% des entreprises-mécènes en 1985, mais 41% au début des années 1990[5].

En 1994, le poids du mécénat d'entreprise en France était évalué à 800 millions de francs, alors que le budget du ministère de la culture, hors grands travaux, s'élevait à 13 milliards et demi de francs (1% environ du budget de l'État). Les dépenses des collectivités locales représentent près du double[5].

Le mécénat d'entreprise passe généralement par la création de fondations, en particulier dans les pays anglo-saxons. aux États-Unis, il existait en 2006 62 000 fondations qui investissent chaque année 3,6 milliards de dollars dans la culture[6]. Les deux plus importantes dans ce domaine sont la fondation Ford (environ 80 millions de dollars par an) et la fondation Reynolds (58 millions de dollars par an)[6]. En France on en comptait la même année 2 100, contre 14 000 au Danemark, 10 000 en Allemagne, 8 800 au Royaume-Uni ou 3 300 en Italie[7].

Le champ d'action des fondations peut être vaste, de la peinture à la photographie, en passant par les lettres ou l'architecture. La Fondation du Patrimoine a ainsi pour but de financer la restauration du patrimoine local qui ne sera jamais classé. Le Fonds mondial pour les monuments, financé par des mécènes américains, a payé la restauration de 450 monuments dans 90 pays, comme le cloître de Saint-Trophime à Arles ou Preah Khan au Cambodge[7].

[modifier] Cadre légal et fiscal

[modifier] États-Unis

Les fondations américaines, comme les associations à but non lucratif, sont régies par l'article 501c3 du code des impôts américain. Elles sont par conséquent mi-publiques (car elles visent à l'intérêt général et n'obéissent aux règles du marché), mi-privées (par leur capital, leur fonctionnement et leurs méthodes)[8].

[modifier] France

En France, plusieurs lois depuis les années 1990 ont fait évoluer le cadre du mécénat et des fondations, la dernière en date étant la loi Aillagon de 2003 qui permet 60 % de déductibilité fiscale des dons effectués pour le mécénat d'entreprise, voire de 90% dans le cas d'une aide à l'acquisition d'un "trésor national". De cinq fondations créées en 2003 sous l'égide de la Fondation de France, on est passé à 24 en 2005 et 77 en 2006[7]. Cependant seule une partie a pour champ d'intervention le mécénat artistique et elles restent petites à l'échelle mondiale selon Yves Sabouret, président de la Fondation de France. La Loi TEPA a par ailleurs augmenté la déductibilité de l'ISF des dons à des fondations reconnues d'utilité publique.

Pour les entreprises, le mécénat offre 60% de réduction d'impôt plafonnés à 0,5% du chiffre d’affaire, toutefois, si excédent il y a, il pourra être reporté au titre des cinq exercices suivants. Il existe également des règles spécifiques concernant la valorisation des différents types de mécénat (de compétence, en nature, en contreparties), définies par le Code général des impôts [9].

[modifier] Exemples de mécénat récents

Le repos pendant la fuite en Égypte
Le repos pendant la fuite en Égypte
  • Louvre : L'entreprise Total a financé les travaux de restauration de la galerie d'Apollon. Plusieurs mécènes américains ont donné des fonds pour rénover les salles des objets d'art du XVIIIe siècle[10]. Les expositions temporaires du musée du Louvre sont en grande partie financées par des entreprises : en 2004, l'exposition consacrée au maître de l'École de Fontainebleau Le Primatice a reçu le soutien financier de la société Morgan Stanley. Le mécénat de la société japonaise Nippon Television Network a pris en charge le coût des travaux (4,81 millions d’euros) de la salle contenant la Joconde. D'autre part, le site web du Louvre a été soutenu par Accenture et LCL. En 2006, 60 % des recettes du Louvre proviennent des subventions publiques et 40 % des ressources propres (billets, mécénat et dons privés)[10].
  • Château de Versailles : L'entreprise Vinci à financé les travaux de restauration de la galerie des Glaces, la restauration s'est terminée en 2007. L'opération a coûté au total 12 millions €[11]. Le mécénat international prend aussi toute sa place, deux fondation américaines The American friends of Versailles et The Versailles foundation ont permis la réalisations de projets tels que la restauration du Bosquet des Trois fontaines en 2006 et de financer l'actuel restauration du pavillon frais dans les jardins du Petit Trianon. Versailles foundation, fondation plus ancienne a permis dans les années 1970 un remeublement important du château et des Trianons. en 2008 cette fondation est a la tete d'un projet de restauration et de protection des statues du parc et en particulier celle du bosquet d'apollon. La société des amis de Versailles œuvre beaucoup également dans la mise en œuvres de ces projets et dans le relationnel entre les différentes fondations et entreprises françaises et internationales

[modifier] Motivations

Le mécénat n'est généralement pas un don sans contrepartie; l'entreprise en attend un bénéfice en termes d'image et de reconnaissance. Le mécénat sert à façonner l'image de l'entreprise ou de la marque en soutenant des artistes ou des disciplines ciblées.

Cet aspect contraint l'entreprise à une certaine rigueur, pour ne pas être accusée de confondre mécénat et sponsoring. Cela n'empêche pas le mécénat de toucher également ce qui touche à la création et non uniquement aux artistes reconnus : selon Guy de Brébisson, l'aide à la création est aussi répandue que l'aide à la diffusion d'artistes connus. Il estime cependant que la banque et l'assurance privilégient la deuxième fonction, afin de toucher un large public. Exemple de soutien de la création, la Fondation HSBC pour la photographie, créée en 1995, organise chaque année un concours pour faire connaître deux photographes par la publication d'une monographie sur chacun d'eux avec Actes Sud. Elle construit également une collection de photographies.

La logique fiscale est également importante dans le mécénat, grâce à la déductibilité totale ou partielle des montants engagés pour ces opérations. Par conséquent le mécénat intéresse théoriquement davantage les entreprises les plus riches car ce sont celles pour lesquelles le mécénat coute le moins cher. Françoise Benhamou remarque ainsi que lorsque Ronald Reagan réduisit en 1986 le taux de l'imposition des bénéfices des sociétés américaines, les entreprises revirent leurs dons à la baisse[12][réf. souhaitée].

[modifier] Bibliographie

  • Marc Albouy, Du Titanic à Karnak. L'aventure du mécénat technologique, Dunod, 1994, (ISBN 2100022709).
  • Françoise Benhamou : L'Économie de la culture, La Découverte, coll. Repères, n° 192, 5e éd., Paris, 2004 (ISBN 2-7071-4410-X).
  • Guy de Brébisson : Le Mécénat, PUF, 1993, (ISBN 2130455395)
  • François Debiesse : Le Mécénat, PUF, Que sais-je ?, 2007
  • Francis Haskell : Mécènes et peintres, Gallimard, 1991, 798 pages (Edition originale de 1963 Patrons and painters)
  • Philippe Morel: "Parrainage, mécénat et Fondations d’entreprise", Editions Vuibert

[modifier] Notes et références

  1. François Debiesse, Le Mécénat, Presses universitaires de France, Que sais-je ?, 2007
  2. Valérie Pécresse parle ainsi d'introduction du mécénat à propos de la possibilité introduite pour les entreprises dans la Loi relative aux libertés et responsabilités des universités de financer des fondations d'université
  3. Le mécénat des princesses médiévales, INHA
  4. Le mécénat : une tradition tchèque, David Alon, Radio Prague, 11 avril 2007
  5. abc Guy de Brébisson, Le Mécénat, PUF, 1993. - 127 p.(ISBN 2 13 045539 5)
  6. ab Frédéric Martel, De la culture en Amérique, Paris, Gallimard, 2006, (ISBN 2070779319), p.324
  7. abcd Le mécénat au secours du patrimoine, Guide Le Figaro, 7 novembre 2007
  8. Frédéric Martel, De la culture en Amérique, Paris, Gallimard, 2006, (ISBN 2070779319), p.335
  9. (fr) Susciter ou pratiquer parrainage et mécénat culturels, Ministère de la Culture. Consulté le 13 mars 2008
  10. ab Nathalie Bensahe, «Sans les fonds privés, que des expos commerciales», in Libération du 19/08/2006, [lire en ligne]
  11. [pdf]« La restauration de la galerie des Glaces ouvre Vinci à l'art », Les Échos, 10 janvier 2006
  12. Françoise Benhamou, L'Économie de la culture, La Découverte, coll. Repères, n° 192, 5e éd., Paris, 2004 (ISBN 2-7071-4410-X)

[modifier] Voir aussi